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Une priorité absolue : réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES)

Dans le document EDP Open (Page 181-184)

Quelles priorités et quelles échéances ?

2.1 Une priorité absolue : réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES)

La réduction en France des émissions gaz à effet de serre de 40 % en 2030 par rap-port à 1990, mais également de 37 % hors ETS 105 de 2005 à 2030 dans le « Paquet énergie-climat » de l’Europe, sont des objectifs souhaitables, prioritaires, mais nous savons qu’il sera très difficile de les respecter. Les moyens d’y parvenir, ou de s’en approcher, font appel à toute une panoplie de solutions qu’il faudra développer simultanément. Dans la mesure où notre production d’électricité est déjà largement décarbonée, l’effort doit porter sur les émissions de CO2 des autres secteurs, parti-culièrement ceux des transports, du bâtiment et de l’industrie où il convient non

105. « European Union Emission Trading Scheme », ou en Français, SCEQE « Système Communautaire d’Echange de Quotas d’Emission ».

seulement d’améliorer l’efficacité énergétique, mais aussi de substituer des énergies non carbonées, dont le nucléaire, aux énergies carbonées.

La réduction des émissions des autres gaz à effet de serre que le gaz carbonique (25 % du total) touche à de très nombreux domaines déjà soumis à des réglementa-tions contraignantes et aux habitudes alimentaires du pays. Les progrès ne pourront donc être que plus lents, ce qui renforcera encore le rôle de la décarbonation de notre paysage énergétique.

Nous avons vu dans le chapitre sur la LTECV qu’une réduction aussi rapide les émissions de CO2 ne pourra être obtenue que par une substitution massive d’éner-gies non carbonées aux hydrocarbures fossiles. L’apport à l’objectif d’une réduction rapide de la consommation d’énergie finale n’est pas réaliste dans un délai de 13 ans, et hors de prix avec un parc immobilier en large partie ancien. Que faire ?

2.1.1 La France dans l’Europe

La France ne pourra pas tenir ses engagements de 23 % d’ENR affichés pour 2020 : elle s’est engagée au-delà des souhaits de l’Europe (20 %) contrairement à l’Alle-magne (18 %), ce qui était imprudent.

Le paquet énergie climat européen, voté en juin 2018 présente un ensemble d’ob-jectifs très durcis pour 2030 : gains d’efficacité énergétique de 32,5 %, part des EnR portée à 32 % 106. C’est très irréaliste et pourrait être contradictoire avec l’objectif climatique (ce sera fonction des atouts/faiblesses de chaque pays).

La France ne met pas en valeur ses performances actuelles et colle à l’idéologie

« allemande ». Son intérêt serait de se concentrer sur la réduction des émissions de GES et de maintenir le principe de subsidiarité pour tout ce qui concerne les moyens techniques d’y parvenir au meilleur coût (Taux EnR, efficacité énergétique, développement d’énergies non carbonées).

Concernant les diminutions des rejets de GES de chaque pays (hors EU-ETS), la proposition européenne est de les répartir en fonction du PIB par habitant, d’où un effort identique pour la France et l’Allemagne 107 alors que cette dernière émet largement plus : la France devrait proposer qu’on s’oriente vers une convergence des émissions par habitant en 2030 en tenant compte des émissions dans le cadre des ETS.

Il est de plus difficile d’imaginer des progrès substantiels si une fiscalité carbone homogène n’était pas mise en place au niveau européen et vis-à-vis des produits importés. C’est un principe à défendre.

106. Part des EnR de 14 % dans les transports, maximum de 7 % de biocarburants de 1re géné-ration et 3,5 % de seconde, 15 % d’interconnexions des réseaux électriques.

107. L’Allemagne, en basculant du charbon au gaz, diminuera ses émissions à prix raisonnable alors que la France devra faire des efforts très couteux sur l’efficacité énergétique.

2. La transition énergétique, sortir de l’échec. Quelles priorités et quelles échéances ?

2.1.2 La France et la LTECV et les PPE

108

De même, au niveau français, il n’est pas sain de vouloir accumuler dans la loi des obligations techniques sur le moyen terme (efficacité énergétique, taux d’EnR ther-miques ou électriques). Nous sommes en effet dans une période d’évolution rapide des techniques, et une gestion par périodes glissantes, avec révisions périodiques de l’ensemble de ces objectifs, serait de loin préférable.

Après 12 ans de mise en application de la politique de transition énergétique, avec le Grenelle de l’environnement suivi de la Loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte (LTECV), l’heure doit être à un bilan de la réalité des progrès en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Faut-il prolonger pour les dix ans à venir les orientations actuelles, dans le cadre de la mise en place des pro-grammations pluriannuelles de l’énergie (PPE) ?

Or trois rapports viennent de jeter un éclairage cru sur ce bilan :

– La Cour des comptes a publié en avril 2018 un rapport sévère sur notre poli-tique énergépoli-tique et climapoli-tique. Au-delà des cripoli-tiques de fond, très argumentées, sur les gestions de la LTECV et de la PPE 109, la Cour constate que priorité a été donnée aux énergies renouvelables électrogènes, en substitution au nucléaire décarboné, et non à la lutte contre le changement climatique.

– Le Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) dans son rap-port d’avril 2018 note un rebond de 4 % des émissions de CO2 liées à l’énergie en 2017, à climat constant. La facture énergétique annuelle de la France s’envole à 38,6 milliards d’euros (source Douanes).

– Le rapport CAP 2022 de juillet 2018, qui a mobilisé des acteurs majeurs de l’économie française, a identifié la transition énergétique comme un des deux secteurs où les aides publiques semblent particulièrement inefficaces.

En ce qui concerne la fiscalité énergétique, elle devrait désormais être portée exclu-sivement par les secteurs émetteurs de CO2 aussi bien que d’autres GES, et non, comme c’était encore le cas jusqu’en 2016 avec la CSPE (Contribution au Service Public de l’Électricité), par une électricité largement décarbonée. Si cette fiscalité a été reportée depuis 2017 sur le Compte d’Affectation Spécial Transition Energétique (CAS TE qui est financé par la TICC la TICGN et la TICPE 110), la CSPE a été plafonnée à la valeur 2016, soit 22,5 € par MWh, ou 26,8 €/MWh TTC, et trans-formée en taxe pérenne qui alimente directement le budget de l’état : elle continue à alourdir de 19 %, sans justifications, le prix de l’électricité pour les ménages, alors que celle-ci est déjà décarbonée.

108. LTECV, loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et PPE programma-tion pluriannuelle de l’énergie (par périodes de 5 ans).

109. Objectifs industriels devenus secondaires, outils de mesure à construire, objectifs 2020 et 2030 inatteignables, charges importantes et mal évaluées, visibilité limitée, non transparence.

110. TICC, Taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et cokes – TICPE, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICGN, taxes intérieures de consom-mation (TIC) sur le gaz naturel.

Les ressources apportées par cette fiscalité carbone devraient être systématiquement fléchées vers les actions en faveur du climat : soutien aux énergies non carbonées, aux réseaux de chaleur, aux transports en commun électrifiés, aux véhicules élec-triques et hybrides, à l’isolation des bâtiments.

Dans le document EDP Open (Page 181-184)