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Coûts de production d’électricité

Dans le document EDP Open (Page 109-117)

Les impacts sur l’économie

3.2 Coûts de production d’électricité

3.2.1 Coûts complets

Le coût des différentes sources d’énergie en France est présenté de façon synthétique sur la figure 1 [5].

Figure 1 Coût des différentes sources d’énergie en France.

Selon la Cour des comptes et la Commission de régulation de l’énergie, en 2013, le coût complet de l’électricité nucléaire était de 49,50 €/MWh ; pour l’hydroélec-trique, entre 15 et 20 €/MWh. Pour les EnRi, le prix payé pour l’éolien terrestre est # 90 €/MWh (avec révision de prix) ; pour l’éolien maritime, 220 €/MWh ; pour le solaire, entre 229 et 370 €/MWh. Des valeurs détaillées sont données dans le tableau 1.

Le prix payé à l’éolien terrestre, fixé au niveau européen, est voisin du coût moyen de l’électricité à base de charbon (entre 70 et 100 €/MWh en tenant compte des coûts externes). Comme EDF ferme progressivement ses centrales à charbon, il est plus pertinent de le comparer au coût des centrales à gaz (entre 50 et 80 €/MWh en tenant compte des coûts externes qui comptent pour plus de 30 % du coût total (traitement et piégeage des gaz à effet de serre, dépollution, frais de recherche et de santé…) [5].

Tableau 1 Synthèse des coûts complets des différentes filières [6]. Dans la première catégorie, nous retenons les coûts de production définis dans le rapport Énergie 2050 du Centre d’analyse stratégique.

(1) Hypothèses retenues pour le calcul des coûts de l’intermittence (ou de substitution par un CCG – centrale à cycle combiné gaz) : au coût de production électrique de chaque ENR aléatoire, il convient d’ajouter les coûts fixes totaux plus une partie des coûts variables du CCG.

(1) Parc de 58 réacteurs (2) Définie pour une production de base continue

(3) Tarif d’achat

(4) Résultat du premier AO (5) Système au sol avec « trackers » (6) Système intégré au bâti sur petite toiture

(7) La notion de coût complet pour l’hydraulique est difficile à apprécier compte tenu de la nature très différente des installations et de l’ancienneté des investissements initiaux. La valeur moyenne proposée recouvre néan-moins des coûts très contrastés selon les installations, avec des ordres de grandeur pouvant aller de un à dix.

3. Les impacts sur l’économie

La baisse des coûts des EnRi* est notable : on peut espérer dans une dizaine d’années des coûts PV* dans le Sud de la France de l’ordre de 40-50 €/MWh ; des offres d’éolien en mer approchent désormais en Europe # 120 €/MWh. Mais ces offres arrivant en surcapacité sur un marché atone, elles subissent la loi des rendements décroissants : l’Europe s’étendant sur deux fuseaux horaires et étant de la taille des perturbations météorologiques, les périodes de production de PV et d’éolien sont concomitantes, l’ajout d’une installation EnRi supplémentaire n’apporte pas d’éta-lement aux pics de production mais ne fait qu’aggraver l’écart entre périodes de surproduction et de sous-production [4].

3.2.2 Ordre de préséance économique – Facteur de charge

L’ordre de préséance économique (« merit order ») définit l’ordre d’appel des sources de production d’électricité en fonction du coût d’exploitation, qui inclut principa-lement le coût du combustible, du personnel, et de la maintenance courante. Le fac-teur de charge en découle, les modes de production les plus coûteux n’étant appelés qu’en dernier, pour passer les pics de consommation (voir tableau 2).

Les EnRi* (éolien et solaire), n’ayant pas de combustible à payer et peu de personnel d’exploitation, sont appelées en premier. En outre, leur source n’étant pas contrô-lable, l’électricité qu’elles produisent est prioritaire. Mais ces sources renouvelables sont intermittentes et, dans les conditions météorologiques de la France, le facteur de charge moyen de l’éolien terrestre n’est que de 23 %, et du solaire PV de 13 %.

L’hydroélectricité est l’énergie renouvelable la moins coûteuse, mais le stock d’eau est géré en fonction de besoins complémentaires de reprise en secours (par exemple, redémarrage de réacteur suite à arrêt automatique) : alimentation en eau des villes et des campagnes (irrigation). Le facteur de charge qui en résulte est # 30 %.

L’essentiel de l’électricité est apporté en France par le nucléaire, dont le combustible est peu coûteux (# 4 €/MWh) et facilement stockable en comparaison des combustibles fossiles importés (1 g d’uranium produit autant d’énergie qu’une tonne de pétrole). Le facteur de charge du parc varie entre 75 et 77 % selon les années, compte tenu du suivi de charge (les réacteurs utilisés en base à l’étranger atteignent des facteurs de 90 %).

Le facteur de charge des turbines à gaz varie selon les besoins, tant en cogénération que lors des pics de consommation.

Tableau 2 Rendement et facteur de charge de différentes énergies.

(en %) Pétrole Gaz Charbon Nucl. Hydro. Éolien terr.

Éolien mer

PV Géoth. Solaire therm.

Rendement 38 40-60 38 30-33 70-90 50 50 10 70-90 38

FC 1-5 5-47 1-40 82-91 30 23 40 10-17 70-90 30

Commentaire (1) (1) (1) (2) (2) (3) (3) (3)

Rendement : Rapport entre l’énergie électrique produite (relative au procédé) et l’énergie apportée par la source d’énergie primaire utilisée.

Facteur de charge (FC) : Rapport entre l’énergie électrique effectivement produite sur une période donnée et l’énergie qu’elle aurait produite si elle avait fonctionné à sa puissance nominale pendant la même période (lié à la demande en fonction du réseau).

(1) Pour les énergies fossiles, le facteur de charge dépend de la politique énergétique du pays. En France, ces énergies servent de variable d’ajustement des consom-mations de pointe et de secours des énergies intermittentes, leur FC est faible.

(2) Pour le nucléaire, le FC dépend de la gestion en suivi de charge ; il peut atteindre 91 % pour une utilisation en base. Pour l’hydraulique, il s’agit du facteur de charge moyen pour la France, compte tenu du fonctionnement à la demande. On rappelle ici que les réacteurs français ont la capacité de varier leur puissance de 80 % Pn en 30 minutes, ce qui permet de suppléer aux déficiences des EnRi.

(3) Les énergies renouvelables sont appelées en priorité. Leur FC traduit la disponi-bilité de la ressource primaire.

3.2.3 Coût des aléas

3.2.3.1 Coût des pics de consommation

Les modes de production qui sont les moins appelés (centrales à charbon ou à fioul, dans le cas de la France) doivent cependant faire face à des coûts structurels : main-tenance, taxes, etc. même si la production est automatisée à distance, et le personnel réduit, autant que faire se peut. Il en résulte un coût d’appel très important lors des pics de production, et l’intérêt de lisser la consommation, soit en l’étalant (en l’anticipant et en la différant), soit en la supprimant passagèrement (effacement).

C’est en particulier le rôle des réseaux communicants de faciliter le lissage par une connaissance détaillée des besoins de consommation et des possibilités de produc-tion fatale (éolien, solaire).

3.2.3.2 Gestion de l’intermittence par les sources renouvelables stockables

Outre l’hydraulique, la biomasse constitue aussi un combustible renouvelable et stockable, qui peut contribuer à passer les pics. L’exploitation des déchets (agri-coles, ménagers et industriels) pour produire de l’électricité présente par contre un caractère de flux régulier dans le temps, l’incinération des déchets ayant pour but précisément d’éviter de les stocker.

3. Les impacts sur l’économie

3.2.3.3 Coût de l’intermittence

Dans le cas des énergies aléatoires et intermittentes, leurs coûts réels doivent intégrer d’autres composantes :

– coût des énergies de secours (3 à 25 €/MWh) ;

– coût du raccordement et renforcement du réseau (2 à 13 €/MWh) ;

– charges fixes des moyens centralisés venant pallier les aléas et intermittences lorsque les sources d’énergie renouvelable ne sont pas à leur valeur nominale (1 à 2 €/MWh) ;

– prix du carbone émis par les énergies de substitution (actuellement de 5 €/tonne de CO2, mais on vise a minima 30 €/tonne en 2030, et 100 €/tonne en 2050).

À titre d’exemple, pour garantir 1 MW à partir d’EnRi sur 8 000 heures en y adjoi-gnant 1 MW de cycle combiné à gaz pour avoir 1 MW garanti, cela augmente le coût de l’énergie intermittente d’un facteur 1,5 à 2.

3.2.3.4 Coût du black-out*

Un effondrement généralisé du réseau européen, fortement interconnecté, est à craindre en cas de sous-production (tempête soudaine en mer du Nord provoquant un arrêt des éoliennes, par exemple). Le coût complet d’un tel accident est énorme (7,6 Md€ par jour 68), car les conséquences en sont dramatiques, en termes d’ac-cidents notamment (absence de signalisation routière et ferroviaire, pannes d’as-censeurs, etc.). Même si le black-out* qui a affecté en septembre 2016 l’Australie méridionale dotée de 50 % d’EnRi* est dû à une forte tempête et à des inondations qui ont perturbé le transport et la distribution de l’électricité, la répétition des cou-pures en décembre puis en février de cette année marque les esprits et oblige à imagi-ner dans l’urgence des solutions de secours pilotables. D’autant que le changement climatique rend les systèmes électriques plus vulnérables aux caprices de la météo.

3.2.4 Prix pour les ménages

3.2.4.1 Décomposition du prix actuel

Au « tarif bleu » qui intéresse environ 26 millions de clients particuliers et 4 mil-lions de petites entreprises en France, le prix moyen de l’électricité, facturé en 2014, 145 €/MWh TTC, se décompose comme suit :

3.2.4.1.1 La fourniture d’énergie

Elle se monte à 53,5 €/MWh (37 % du prix total), dont 42 €/MWh de production selon le tarif ARENH*, et 11,5 €/MWh de commercialisation (facturation, service clients, etc.) sur laquelle une réduction de coût par une utilisation plus importante du numérique est possible.

68. Energie Institut, Johannes Kepler Universität, Linz, Autriche.

3.2.4.1.2 L’acheminement de l’électricité

Il est facturé 44 €/MWh (30 % du prix total) selon le tarif d’utilisation du réseau public de l’électricité (TURPE*) dont le montant est fixé par la Commission de régu-lation de l’énergie (CRE*). Il couvre les coûts de transport (RTE*) et de distribution de l’électricité (par Enedis ou par les entreprises locales de distribution – ELD).

3.2.4.1.3 Les taxes ou équivalents

Elles se montent à 47 €/MWh. Elles comprennent :

La contribution au service public de l’électricité acheminement de l’élec-tricité (CSPE)

Elle servait initialement à la péréquation territoriale et à aider les consommateurs précaires ; elle finance désormais essentiellement les subventions aux productions solaires et éoliennes (qui, en 2014, malgré les 7 milliards d’euros de subventions accordées, n’ont représenté respectivement que 1,1 % 69 et 3,1 % des 540 TWh pro-duits en France). En 2016, elle est devenue TICFE* (taxe intérieure sur la consom-mation finale d’électricité).

La taxe sur la consommation finale d’électricité

Il s’agit d’une taxe perçue au niveau local par les collectivités communales et dépar-tementales. Son montant varie de 0,5 à 9,5 €/MWh selon la puissance souscrite par le consommateur final et en fonction de la collectivité.

La contribution tarifaire d’acheminement

Ce prélèvement sert au financement d’une partie des retraites du personnel des industries électriques et gazières. Il s’élève en moyenne à 2 % de la facture du client.

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Ce prélèvement sert au financement d’une partie des retraites du personnel des industries électriques et gazières. Il s’élève en moyenne à 2 % de la facture du client.

3.2.4.1.4 L’abonnement

Pour un compteur bleu HC/HP 12 kVA, il se montait à # 13 €/mois, soit l’équiva-lent de # 94 kWh/mois.

3.2.4.2 Impact de la LTECV* sur le prix de l’électricité pour les ménages L’étude [7] montre comment le retrait de la production d’électricité nucléaire à 50 % et les investissements en éolien et solaire PV conduiront à un doublement du prix du kWh pour les ménages, comme c’est déjà le cas en Allemagne, sans la moindre réduction de rejets de CO2 – au contraire, une possible augmentation afin de suppléer à l’intermittence par des turbines à gaz.

69. L’état oblige EDF à acheter les kWh solaires à un prix garanti 20 ans : 630 €/MWh pour les petites installations, soit plus de 12 fois le prix de production nucléaire. Pour les parcs solaires récents, l’électricité est rachetée aux compagnies environ 100 à 110 €/MWh.

3. Les impacts sur l’économie

Si l’on examine le coût à investir pour les vingt années à venir selon la PPE* jusqu’en 2023 (voir tableau 3), on voit que l’investissement en 28 GW d’éolien et de solaire supplémentaires coûtera aussi cher que la mise à niveau du parc nucléaire actuel de 63 GW pour une même durée de vie de vingt ans, mais que le nucléaire produira près de 10 fois plus d’électricité, et de plus – quand on en a besoin, et non pas en fonction des caprices de la météo !

Tableau 3 PPE ­ comparaison des productions selon les investissements Chiffrage PPE 2023 Éolien + solaire PV Nucléaire

Puissance suppl. 27,7 GW 0

Investissement / 20 ans 60-70 G€ 55-70 G€

Production annuelle 43 TWh/an 415 TWh/an

3.2.5 Impact du taux d’actualisation sur le coût de l’électricité

Les investissements capitalistiques sont très sensibles au taux d’actualisation : passer le taux d’actualisation de 3 à 8 % fait doubler le coût des investissements sur 25 ans d’exploitation (éoliennes, par exemple).

La figure 2 [8] montre les fourchettes de coûts de production en fonction des taux d’actualisation.

3.2.6 Impact sur la balance commerciale de la France

En cas de sortie du nucléaire, le supplément d’importations de combustibles fossiles pour compléter les énergies intermittentes serait de 30 Md€ (2011), ce qui alour-dirait la facture énergétique de 50 %. A contrario, le marché des équipements et services du nucléaire représente un solde exportateur de 6 Md€ en 2013. L’excédent de production d’électricité, vendu sur le réseau européen, rapporte actuellement plus de 2 Md€, ce qui compense largement les achats d’uranium importé.

3.2.7 La vérité des prix

On note en Europe ces dernières années un dysfonctionnement du marché de gros en raison des EnRi : les surcapacités entraînent une baisse des prix de gros, mais l’augmentation des prix de détail.

La cause est le soutien aux énergies nouvelles par des tarifs garantis, échappant donc à toute régulation par le marché, alors que l’électricité ainsi produite arrive priori-tairement sur le marché. Elle déstabilise donc le système de prix de gros, et conduit à un gaspillage répercuté sur les consommateurs (voir Annexe 2).

Pratiquer la vérité des prix implique :

1) de prendre en compte les coûts des externalités, au premier rang desquelles les émissions de CO2 ;

2) que les marchés envoient les bons signaux aux consommateurs et aux investis-seurs, en les incitant à investir là où sont les besoins de décarbonation, ainsi que les besoins d’effacement ou de capacité apte à suppléer les manques de produc-tion des sources intermittentes [9].

Afin d’orienter les choix économiques de la décarbonation de l’énergie, il est donc important que les prix reflètent la valeur des formes d’énergies procurées. Le risque principal est que des prix de marché artificiellement déprimés n’envoient pas un bon signal aux investisseurs pour le futur, car une usine qui quitte le territoire natio-nal émettra dix fois plus de CO2 à l’autre bout du monde. Or les productions d’énergies renouvelables ne subissent aucun signal-prix, mais en provoquent un très violent pour les autres producteurs.

3.2.8 Le coût de la tonne de CO

2

évitée

Le cumul de ces recettes de la CSPE, taxe parafiscale prélevée sur la consommation d’électricité de tous les Français, avoisinait 18 Md€ en 2016 (3,9 Md€ par an pen-dant la durée des contrats d’obligation d’achat). Depuis 2007, les émissions de CO2 ont été réduites de 6,1 Mt/an, ce qui valorise le CO2 à une valeur comprise entre 350 et 650 €/tonne (voir Partie 1, Chapitre 4).

3. Les impacts sur l’économie

Avec 18 Md€, on aurait pu financer à un niveau largement suffisant (15 000 euros par voiture) l’achat de plus d’un million de voitures électriques. Le coût du CO2 évité aurait été de l’ordre de 130 €/tonne 70.

Alternativement, on aurait pu envisager de rénover thermiquement 2 millions de logements pour économiser 20 MWh d’origine fossile par an 71, ce qui aurait permis d’éviter l’émission de 5 Mt/an de CO2. En supposant un amortissement de l’inves-tissement sur 20 ans, le coût du CO2 évité aurait été d’environ 190 €/tonne [10].

Dans le document EDP Open (Page 109-117)