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Chapitre 1 : Vieillissement et la sarcopénie

2. La sarcopénie : un syndrome gériatrique avec de nombreux enjeux

2.7 Sarcopénie et autres conditions

Il existe une série logique de descriptions classiques des changements musculaires qui entraînent une perte de la masse musculaire (sarcopénie), une perte de la puissance (kratopénie), une perte de la force musculaire (dynapénie) et la fragilité. Le tableau 11 résume les définitions des différentes conditions caractérisées par la perte de la masse, de la force et de la fonction musculaire.

Tableau 11 : Différentes définitions des conditions caractérisées par la perte de la masse, de la force et/ou de la fonction musculaire

Condition Définition

Sarcopénie Perte de la masse musculaire

Kratopénie Perte de la puissance (force x vitesse)

Dynapénie Perte de force

Fragilité Diminution des réserves physiologiques

Incapacité Perte de fonction

Le vieillissement musculaire est associé à des accumulations de dysfonctions mitochondriales dont les mécanismes impliqués ne sont pas encore

tous bien élucidés. L’implication de la mitochondrie dans le développement et la survenue de la sarcopénie demeure un sujet largement débattu. Cependant, le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques basées sur la compréhension des processus régulant la mitophagie et la dynamique mitochondriale dans la sarcopénie ainsi que la détermination complète des mécanismes par lesquels le

stress oxydatif pourra affecter l’activation de voies cataboliques et l’inhibition de la synthèse protéique peuvent peut-être nous aider à lutter contre ce syndrome gériatrique.

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Sarcopénie et fragilité : la fragilité est de plus en plus reconnue comme un trait

physiologique associé indépendamment à un risque plus élevé de morbidité et de mortalité208. À mesure que la fragilité progresse, les chutes deviennent un danger quotidien fréquent augmentant le risque de fractures et de traumatismes cérébraux ce qui entraîne une morbidité et une mortalité considérable209.

Il s’agit en fait d’une conséquence directe de la sarcopénie et des dérèglements physiologiques sous-jacents entraînant une atrophie musculaire progressive.

Sarcopénie et cachexie : la cachexie a été définie comme « un syndrome métabolique complexe et multifactoriel qui est associé à une maladie sous-jacente, une tumeur maligne, une maladie pulmonaire obstructive chronique, une maladie rénale chronique, une infection chronique ou une insuffisance cardiaque chronique, et caractérisé par une perte de masse musculaire avec ou sans perte de masse grasse » 210. Les principales caractéristiques de la cachexie sont l’inflammation, la perte de poids chez les adultes, la dégradation accrue des protéines musculaires et la résistance à l’insuline210. En outre, la cachexie et la sarcopénie entraînent une perte de masse musculaire et peuvent bénéficier de nouvelles approches thérapeutiques ciblées211. Ces deux différents états, bien qu’interconnectés, représentent deux conditions distinctes212. Les conséquences métaboliques de la sarcopénie comparées à celles de la cachexie213 sont résumées dans le tableau 12.

La sarcopénie est un élément majeur du syndrome de la fragilité, les deux sont considérées comme prédicteurs de la morbidité et du décès chez les personnes âgées.

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Tableau 12 : Comparaison des conséquences métaboliques de la sarcopénie à celles de la cachexie

Condition métabolique Sarcopénie Cachexie

Synthèse des protéines musculaires

Dégradation des protéines musculaires

Masse, force et fonction musculaires

Masse grasse

Taux métabolique basal et dépense énergétique

Inflammation

Résistance à l’insuline

La plupart des patients atteints de cachexie présentent une sarcopénie, alors que la plupart des patients sarcopéniques n’ont pas de cachexie211. En pratique clinique, la

sarcopénie peut aussi préexister à la cachexie. En effet, une perte rapide et aiguë de muscle squelettique est habituellement observée en présence de cachexie, tandis que la sarcopénie non liée à la cachexie est associée à une perte graduelle et progressive de la masse musculaire211.

Sarcopénie et anorexie : l’anorexie du vieillissement, définie comme la perte d’appétit

et/ou diminution de l’apport alimentaire en fin de vie, est un paradigme notable des syndromes gériatriques214. La régulation de l’appétit, en particulier en cas de carence, est

la clé pour comprendre l’anorexie du vieillissement. La prise alimentaire est contrôlée par des processus très complexes. Il existe de nombreux facteurs de risque théoriquement liés à ce syndrome, tels que l’altération de la fonction physique, les conditions sociales et environnementales et les maladies aiguës et chroniques215. En outre, un faible apport en calories, en protéines et en leucine est associé à une diminution de la masse musculaire chez les personnes âgées216. Des études menées chez les personnes âgées ont montré que l’anorexie est associée à une altération de la performance physique et augmentation du

Néanmoins, la cachexie peut être une condition sous-jacente menant à la sarcopénie, la sarcopénie est distincte de la cachexie.

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risque d’incapacité217. Notamment, la consommation insuffisante de leucine et/ou de la vitamine D, qui peut se produire au cours de l’anorexie, semble être causalement liée au développement de la sarcopénie et de la fragilité216.

▪ Obésité sarcopénique « parle à mon gras, mon muscle est malade » : l’obésité sarcopénique a d’abord été définie comme la coexistence de la sarcopénie et de l’obésité, mesurée à l’aide de DEXA78 avec une prévalence aussi élevée que 20 % dans les populations âgées218. Par ailleurs, l’excès d’adiposité dû à cette condition a été attribué en partie à un bilan énergétique positif associé au vieillissement219, conséquence des diminutions de tous les principaux composants de la dépense énergétique totale ainsi qu’une réduction de l’activité physique220. Parallèlement, ces aspects du vieillissement affectent la propension au développement de la sarcopénie. Cette dernière est exacerbée par d’autres modifications liées à l’âge : la diminution de l’apport protéique221, l’infiltration graisseuse du muscle squelettique222, la déficience énergétique musculaire223, l’augmentation de l’expression de la myostatine224, l’altération de la sensibilité aux effets anabolisants de l’insuline associée à un dysfonctionnement mitochondrial225 et les réductions liées à l’âge de GH et de la

sécrétion de testostérone226. L’interaction complexe des mécanismes physiopathologiques communs, tels que l’augmentation des cytokines pro- inflammatoires, le stress oxydatif, la résistance à l’insuline, les changements hormonaux et la diminution de l’activité physique sous-tendent la relation entre la sarcopénie et l’obésité227. En outre, la sarcopénie et l’obésité sont associées à des troubles

L’anorexie, la dénutrition, la perte de poids, la sarcopénie et la cachexie chez les personnes âgées sont très fréquentes. Ces problèmes peuvent être cinq

étapes différentes d’un même processus et ils sont associés à de nombreuses

conséquences néfastes et à une augmentation de la morbidité et de la mortalité, en particulier chez les patients souffrants de malnutrition et de perte de poids. Ces problèmes de santé sont souvent négligés, c’est pourquoi une augmentation de la

sensibilisation du public en général et de la population gériatrique en particulier

et du temps passé dans la zone thérapeutique pour les personnes souffrant de ces problèmes est fortement recommandée.

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métaboliques, à la morbidité et à la mortalité228. La figure 7 montre les mécanismes et les conséquences de la sarcopénie et de l’obésité.

Figure 7 : Mécanismes et conséquences de la sarcopénie et de l’obésité. CDV : maladies cardiovasculaires.

Ainsi, il a été suggéré que l’obésité sarcopénique puisse avoir un impact plus important sur les maladies métaboliques, les profils de risque cardiovasculaire (hypertension, dyslipidémie) et la mortalité que la sarcopénie ou l’obésité seule229.

L’obésité sarcopénique est un concept relativement nouveau qui est devenu de plus en plus important dans la population vieillissante. Ce syndrome

multifactoriel peut être associé à un risque plus élevé de mortalité et à des profils de risques cardiovasculaires par rapport à la sarcopénie ou à l’obésité

seule. Cependant, l’existence de plusieurs définitions de la sarcopénie limite

l’application clinique de l’obésité sarcopénique. Une bonne compréhension de

l’étiologie complexe du dialogue entre le tissu adipeux et musculaire semble être nécessaire pour promouvoir le diagnostic standardisé et la prise en charge de l’obésité sarcopénique.

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▪ Obésité ostéosarcopénique : l’ostéopénie, la sarcopénie et l’obésité sont couramment observées dans le processus de vieillissement. Une interconnexion potentielle de ces syndromes avec une physiopathologie commune a été suggérée. Le terme obésité

ostéosarcopénique a été suggéré pour décrire l’apparition concomitante de l’obésité chez

les personnes ayant une masse osseuse et musculaire faible. L’ostéopénie, la sarcopénie et l’obésité ont été reconnues et évaluées depuis des décennies, toutefois, l’apparition concomitante de ces problèmes ne fait que commencer à être discutée. D’un point de vue historique, la combinaison de la sarcopénie et de l’obésité, a été le premier terme introduit230 et largement étudié231. Le terme sarco-ostéopénie ou sarco-

ostéoporose a été introduit par Binkley et Buehring232. Les auteurs ont proposé que les patients ayant à la fois une masse osseuse et une masse/performance musculaire faibles soient diagnostiqués avec cette condition232. Par conséquent, la sarco-ostéopénie ou sarco-ostéoporose est un syndrome interconnecté qui devrait être combiné en un seul terme. Les personnes présentant une sarco-ostéopénie ou une sarco-ostéoporose seront plus à risque de chutes et de fractures et donc à une augmentation de la morbidité, une réduction de la qualité de vie et une augmentation de la mortalité232. Par ailleurs, l’association entre les os, les muscles et la masse adipeuse a été explorée par Sowers et

al., chez les femmes adultes233.

En raison du manque de technologie précise pour évaluer la composition corporelle (manque des outils sophistiqués qui sont nécessaires pour évaluer avec précision les compartiments des tissus adipeux, maigres et osseux), l’obésité ostéosarcopénique a été méconnue jusqu’à récemment. Bien que chez des individus sains jeunes et âgés, les os et les muscles changent en même temps que le poids corporel, ce processus peut être altéré chez certains individus lorsque l’excès de poids survient sans augmentation concomitante de la masse osseuse et musculaire234.

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