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LA SANTÉ DE LA FEMME ENCEINTE AU CŒUR DES POLITIQUES NATIONALES

SECTION II UNE PROTECTION RENFORCÉE DE LA SANTÉ DE LA FUTURE MÈRE

B- LA SANTÉ DE LA FEMME ENCEINTE AU CŒUR DES POLITIQUES NATIONALES

En droit français, les principes de prévention des risques sont repris au sein du livre IV du Code du travail. À ce titre, l’employeur est tenu de prendre « les mesures nécessaires pour

assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs »168. Ce dernier doit donc mettre en œuvre des actions de prévention des risques, d'information et de formation. Il doit fournir des moyens adaptés afin de limiter les risques169. Or, cette obligation en matière de sécurité est particulièrement rude en droit français dans la mesure où il est fréquent de la qualifier d’obligation de sécurité dite de « résultat » depuis les célèbres arrêts du 28 février 2002170. Dès lors, l’employeur est tenu pour responsable dès lors qu’une atteinte à la santé et à la sécurité des salariés est avérée. En effet, ce dernier ne peut s’exonérer d’une telle responsabilité que s’il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires171 et démontre qu’il a adopté les mesures immédiates propres à faire cesser le danger172. Or, à ce jour, aucun arrêt de la Haute juridiction n’a permis d’écarter la responsabilité de l’employeur lorsqu’un risque a été porté à la santé et la sécurité des travailleurs, ce qui témoigne de la rigidité des juges en la matière et de l’étendue de l’obligation pesant sur l’employeur. Par ailleurs, cette obligation est d’autant plus grande que les « maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement » en la matière, sont répréhensibles pénalement à hauteur de trois ans d’emprisonnement et 45 0000 euros d’amende, augmentés à cinq ans et 75 000 euros d’amende en cas de négligences délibérées173.

Or, c’est dans ces principes, protecteurs du salarié de façon générale, que la législation protectrice de la salariée enfantant tient sa source. Ainsi, le législateur consacre un chapitre entier de la partie du Code du travail portant sur la santé et à la sécurité au travail, aux femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes. À ce titre, il est par exemple interdit « d'employer les femmes enceintes, venant d'accoucher ou allaitant à certaines catégories de

travaux qui, en raison de leur état, présentent des risques pour leur santé ou leur

Art. L. 4121-1, C. Trav.

168

Art. L. 4121-2, C. Trav.

169

Cass. Soc., 28 févr. 2002, n° 99-18.389, Publié au bulletin.

170

Cass. Soc., 25 nov. 2015, n° 14-24.444, Publié au bulletin.

171

Cass. Soc.,1 juin 2016, n° 14-19.702, Publié au bulletin.

172

Art. 221-6, C. Pénal.

sécurité »174. L’employeur est tenu de s’adapter afin de garantir la santé et la sécurité de la salariée devenant mère. Néanmoins, cette adaptation est tellement importante et étendue qu’il convient de l’étudier de façon plus approfondie ultérieurement175. Toutefois, il demeure opportun de rappeler que la protection de la santé de la salariée enceinte transcende les frontières de l’entreprise.

Si pendant de nombreuses années, ces dernières bénéficiaient systématiquement d’une surveillance médicale renforcée, tel n’est plus le cas aujourd’hui176. Cependant, cette protection demeure en partie dans la mesure où, la salariée enceinte dispose, sur demande, d’un droit à suivi médical renforcé. En effet, « toute femme enceinte, venant d'accoucher ou

allaitante est, à l'issue de la visite d'information et de prévention, ou, à tout moment si elle le souhaite, orientée sans délai vers le médecin du travail »177. Ce dernier, est alors seul juge de « la fréquence et de la nature des examens nécessaires », et des nécessités de « mutations ou

transformations de postes, justifiées par l'état de santé de la salariée »178. Par ailleurs, la salariée a également droit de s’absenter de son travail afin de se rendre aux visites médicales périodiques obligatoires nécessaires au bon déroulement de sa grossesse179. De plus, ce suivi ne cesse pas une fois l’accouchement de la salariée passé. En effet, l’employeur doit impérativement prévoir une visite médicale de reprise, dans les huit jours suivants le retour d’une salariée de congé maternité180. Cet examen, réalisé par le médecin du travail en personne, permet de vérifier l’aptitude de la salariée à reprendre son poste, l’aménager, l’adapter si nécessaire ou encore prévoir un reclassement si aucune adaptation n’est réalisable181. Ainsi, le médecin du travail agit de concert avec l’employeur pour offrir une protection efficiente et transverse de la santé de la salariée enceinte et/ou mère, afin que son travail ne soit pas un obstacle à sa parentalité.

Art. L. 4152-1, C. Trav.

174

V. infra., Titre I, Chapitre I, II, A.

175

Art. R. 4624-19, C. Trav.

176

Ibid.

177

LAHALLE (T.), « Maternité », art. précité.

178 Art. L. 1225-16, C. Trav. 179 Art. R. 4624-22, C. Trav. 180 Art. R. 4624-23, C. Trav. 181

Néanmoins, il convient de souligner qu’en pratique les dispositifs de protection sont parfois lacunaires et font naître certains paradoxes. En effet, le déclenchement d’un tel dispositif de protection n’a lieu que dans l’hypothèse où l’employeur a connaissance de la grossesse de sa salariée. Dès lors, il est dans l’intérêt de la salariée de divulguer sa grossesse le plus tôt possible, ce qu’elle n’est pas tenue de faire. Ainsi, il est aisé de comprendre l’intérêt de la lutte contre les discriminations et de la protection étendue de l’emploi de la salariée enfantant étudiée précédemment. Car en effet, une salariée craignant de perdre son emploi ou d’être freinée dans sa carrière, sera hostile à divulguer sa grossesse ce qui peut être réellement préjudiciable pour sa santé et celle de son enfant. Par conséquent, un lien inéluctable existe entre l’ensemble des dispositifs de protection dévolus à la mère qui se réunissent autour du droit à être parent, et surtout à être un parent en bonne santé. Or, si de tels dispositifs sont réellement efficients c’est grâce à leur reconnaissance transnationale, la dureté des sanctions afférentes mais également leur capacité à être mobilisés pour toute la durée de la relation contractuelle (II).

II- UN ENJEU TRANSVERSE PUISSANT

La protection de la santé et de la sécurité de la salariée donnant la vie est un enjeu particulièrement transverse. Cette dernière, fait peser sur l’employeur un certain nombre d’obligations qu’il est contraint de respecter s’il ne veut pas voir sa responsabilité engagée. En outre, parallèlement à ces obligations imposées à l’employeur, se développent un certain nombre de droits accordés, quant à eux, à la salariée accédant à la parentalité. Dès lors, le travail vient s’adapter à la maternité. Ainsi, il s’agit de démontrer que si initialement cette adaptation passe par la création de divers mécanismes d’aménagement du travail de la salariée enfantant (A), elle va jusqu’à offrir un éloignement du travail à la salariée lui permettant d’aller au terme de sa grossesse dans de bonnes conditions (B).