La séquence élaborée pour développer la lecture subjective des élèves et entrevoir si l’utilisation d’un récit filmique pouvait avoir une incidence dans la formation du sujet lecteur dans une classe de CP, sera ici présentée.
1. Présentation de la séquence
La séquence s’est déroulée du 22 janvier au 12 février 2016 à raison de huit séances de 45 minutes dans chaque classe. Les séances ont eu lieu deux fois par semaine et ont suivi le découpage des œuvres. Le découpage a été choisi en fonction des moments « opportuns » dans la narration (moments permettant l’anticipation, la formulation d’hypothèses…).
Le post-test et le pré-test se sont déroulés dans les mêmes conditions.
1.1. Observer l’implication subjective des sujets lecteurs fragiles au début
Pour établir d’éventuels changement dans les postures des élèves fragiles, j’ai proposé une séance menée dans chaque classe de CP. Il s’agissait d’identifier les lecteurs fragiles pour suivre leur évolution dans chacune des classes.
L’objectif de ces deux séances était d’identifier les élèves fragiles. Ceux-ci peuvent appartenir à trois catégories. Tout d’abord, les élèves qui ne semblent pas produire d’activité fictionnalisante. On peut aussi rencontrer des élèves dont l’activité fictionnalisante débridée les éloigne, à leur insu, de la compréhension du récit. Je pense aussi aux élèves qui restent dans la posture du texte-tâche, décrite par Dominique Bucheton. Dans le cadre de cette recherche qui s’intéresse à l’implication des sujets lecteurs-spectateurs, et à l’appropriation subjective des œuvres, je ne m’attacherai pas à la deuxième catégorie qui traite de la compréhension235. Même si ce point m’intéresse, je ne pourrai le traiter faute de temps. En effet, cet aspect engendre une catégorie supplémentaire dont il faut traiter les données.
Séance 1 : le titre et la couverture
Lors de la première séance du pré-test, les élèves ont tout d’abord été invités à réfléchir sur le titre de l’histoire, C’est pour mieux te manger, sur leur journal de lecteur. Quatre consignes visant la production d’activités fictionnalisantes, ont été proposées :
- Dessine et/ou écris ce que tu vois dans ta tête quand tu entends le titre. - Que ressens-tu quand tu entends « C’est pour mieux te manger»?
- Penses-tu qu’il y aura des personnages ? Si oui, comment les vois-tu
(dessine-les) ?
- Ce titre te fait-il penser à des choses de ta vie à toi ?
Ensuite, les élèves ont travaillé sur la couverture du livre. De nouveau, quatre consignes ont été énoncées :
- Quelles émotions ressens-tu quand tu regardes le loup et le paysage ? - Dessine le loup comme tu l’imagines.
- Que voudrais-tu qu’il se passe dans l’histoire ? (dessine et/ou écrit) - Penses-tu que ce livre va te plaire ? Pourquoi ?
A l’issu de ce travail personnel, un cercle de lecture a été organisé. Les enfants, se sont alors rassemblés dans l’espace lecture, pour parler de ce qu’ils avaient écrit, de ce qu’ils ressentaient et pensaient de ce titre et de la couverture.
Séance 2 : l’histoire
La lecture de l’album s’est déroulée en deux temps. Après la lecture de l’enseignante, les enfants ont été invités à réfléchir à ce qu’ils avaient ressenti pendant la lecture, dans leurs journaux. Pour les aider, trois consignes ont été données. Après un cercle de lecture, les élèves ont découvert la fin de l’histoire. De nouveau, ils ont écrit dans leurs journaux avant de faire un dernier cercle de lecture.
1.2. Observer l’implication subjective des sujets lecteurs fragiles à la fin
Pour pouvoir comparer les données, un travail similaire à celui qui a été mené pendant les deux premières séances a été proposé à la fin de la séquence.
Tableau comparatif des séances 1-2 et 7-8
C’est pour mieux te manger ! La grande aventure
Séance 2 Séance 7
1. Le titre :
M : Le titre de l’histoire que je vais vous lire
est : C’est pour mieux te manger. Je vous
demande de réfléchir à ce titre dans votre journal. Pour vous aider, je vais vous poser
quatre questions. Vous pourrez répondre avec des mots, des phrases ou en dessinant votre idée. Si vous avez besoin, vous pourrez nous dicter ce que vous voulez écrire.
1. Le journal du lecteur :
- Dessine et/ou écris ce que tu vois dans ta tête quand tu entends le titre.
- Que ressens-tu quand tu entends « C’est pour mieux te manger !» ?
- Penses-tu qu’il y aura des personnages ? Si oui, comment les vois-tu (dessine-les) ? - Ce titre te fait-il penser à des choses de ta vie à toi ?
2. Présentation de la couverture
- Quelles émotions ressens-tu quand tu regardes le loup et le paysage ?
- Dessine le loup comme que tu l’imagines. - Que voudrais-tu qu’il se passe dans l’histoire ? (dessine et/ou écrit)
- Penses-tu que ce livre va te plaire ? Pourquoi ?
3. Cercle de lecture : les enfants se
rassemblent pour parler de ce qu’ils ont écrit, de ce qu’ils ressentent et pensent face au titre et à la couverture.
1. Le titre :
M : Hier à la librairie je cherchais un livre
pour vous. J’en ai trouvé un. Le titre que j’ai lu sur la tranche m’a attiré : La grande aventure.
Je vous demande de réfléchir à ce titre dans votre journal. Pour vous aider, je vais vous
poser quatre questions. Vous pourrez répondre avec des mots, des phrases ou en dessinant votre idée. Si vous avez besoin, vous pourrez nous dicter ce que vous voulez écrire.
1. Le journal du lecteur :
- Dessine et/ou écris ce que tu vois dans ta tête quand tu entends le titre.
- Que ressens-tu quand tu entends « La grande aventure » ?
- Penses-tu qu’il y aura des personnages ? Si oui, comment les vois-tu (dessine-les) ?
- Ce titre te fait-il penser à des choses de ta vie à toi ?
2. Présentation de la couverture
- Quelles émotions ressens-tu quand tu regardes la couverture ?
- Que voudrais-tu qu’il se passe dans l’histoire? (dessine et/ou écrit)
- Penses-tu que ce livre va te plaire ? Pourquoi ?
3. Cercle de lecture : les enfants se
rassemblent pour parler de ce qu’ils ont écrit, de ce qu’ils ressentent et pensent face au titre et à la couverture.
Séance 3 Séance 8
1. Lecture par l’enseignante (jusqu’à « Oh
mère-grand, que vous avez de grandes dents. »)
Je vais vous lire le début de l’histoire « C’est pour mieux te manger ! ». Ensuite, je vous demanderai de réfléchir à ce que vous avez ressenti pendant la lecture, dans votre journal. Pour vous aider, je vous poserai trois questions.
2. Journal du lecteur 10’
Rappel : Vous pouvez répondre avec des mots, des phrases ou en dessinant votre idée. Si vous avez besoin, vous pourrez nous dicter ce que vous voulez écrire.
1. Lecture par l’enseignante (jusqu’à « Alors qu’est-ce que tu veux mon petit ? Eh bien euh… »)
Je vais vous lire le début de l’histoire : La grande aventure. Ensuite, je vous demanderai de réfléchir à ce que vous avez ressenti pendant la lecture, dans votre journal. Pour vous aider, je vous poserai trois questions.
2. Journal du lecteur 10’
M lit la première question.
- Dessine Poucet ou d’autres personnages, tels que tu les vois dans ta tête.
M lit la première question.
- Dessine le Petit Chaperon Rouge tel que tu le vois dans ta tête.
- Tu entres dans la maison. Que ressens-tu ? Que fais-tu ?
- Aimerais-tu être à la place d’un des personnages ? Que ferais-tu ?
3. Cercle de lecture
Les enfants expriment leurs points de vues sur l’album, ce qu’ils ont compris.
4. Lecture de la fin 3’
5. Cahier de lecture : même consigne que
précédemment. 10’
- Qu’as-tu ressenti à la fin de l’album ? - Que penses-tu de la fin ?
- Comme le personnage, aimes-tu jouer à faire ou te faire peur ? Tu peux dessiner.
6. Cercle de lecture 5’
- Impressions de lecteurs
- A ton avis, que va-t-il se passer ?
- Aimerais-tu être à la place d’un des personnages ? Lequel ? Que ferais-tu ?
3. Cercle de lecture
Les enfants expriment leurs points de vue sur l’album, ce qu’ils ont compris.
4. Lecture de la fin 3’
5. Cahier de lecture : même consigne que
précédemment. 10’
- Qu’as-tu ressenti à la fin de l’album ? - Que penses-tu de la fin ?
- Comme le personnage, as-tu déjà vécu une « grande aventure » ? Tu peux dessiner.
6. Cercle de lecture 5’
- Impressions de lecteurs
Dans mon analyse, je prendrai en compte l’investissement des élèves dans leurs journaux de lecteurs et dans les cercles de lecture en observant les éventuelles évolutions. Il s’agira aussi d’observer si les élèves de la classe 2 s’investissent davantage dans l’appropriation de l’album au cours des séances 7 et 8, par rapport aux élèves de la classe 1.
1.3. Phase d’apprentissage, séances 4 à 6
Le deuxième élément que je souhaite prendre en compte, concerne la réception de l’album Un petit chaperon rouge, par les sujets lecteurs fragiles, et de l’œuvre cinématographique, T’es où Mère-grand ? par les sujets lecteurs-spectateurs. Si, la phase d’apprentissage est, du point de vue du médium, différente, la mise en œuvre, le questionnement, et le thème littéraire ont des points communs. Il s’agira d’observer les interventions orales et écrites des élèves fragiles, afin d’analyser s’ils entrent dans des activités fictionnalisantes et de quelles manières. Les évolutions éventuelles entre les deux premières séances, seront aussi analysées. Ce recueil de données me permettra de mesurer
de possibles écarts entre l’investissement des élèves fragiles en situation de lecture et en situation de spectature, toute proportion gardée vu le faible échantillon.
2. Les données
2.1. Le recueil des données
Les enseignantes ont accepté d’être filmées pendant les séances. J’ai donc pu transcrire les échanges oraux et observer les postures physiques des enfants. Les interventions orales des sujets lecteurs-spectateurs seront un indicateur de l’implication subjective de ceux-ci. Par ailleurs, chaque élève possédant un journal de lecteur, l’analyse de ceux-ci permettra d’identifier les postures et les activités fictionnalisantes mises en œuvre.
2.2. Le traitement des données
Tout d’abord, les échanges qui auront lieu pendant les cercles de lecture seront retranscrits. Ensuite, les interventions orales et écrites des élèves fragiles seront classées dans un tableau présentant différents types d’activités fictionnalisantes. Enfin, le traitement des données recueillies dans les journaux de lecteurs-spectateurs, et à l’occasion des échanges oraux, se fera sous l’angle d’une analyse « qualitative ». Il s’agira de rendre compte de l’évolution des postures mises en œuvre par les sujets lecteurs-spectateurs entre le pré-test et les séances d’apprentissage, avant de comparer les postures mises en œuvre pendant le pré-test et le post-test.