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RAPPELS SUR LA THYROÏDE

I. Physiopathologie des maladies auto-immunes

2. Déclenchement de la maladie auto-immune

2.2. Rupture de tolérance périphérique

Chez tous les individus il existe donc dans l’organisme des lymphocytes T reconnaissant avec une affinité faible des antigènes du soi, et ces antigènes du soi sont exprimés par les cellules de l’organisme. Néanmoins, dans la plupart des cas, les patients ne sont pas atteints de maladie auto-immune.

Les deux principales raisons qui expliquent l’absence de maladies auto-immunes sont une présentation inefficace de l’auto-antigène par les cellules de l’organisme ne permettant pas l’activation des lymphocytes T auto-réactifs et une régulation efficace du système immunitaire. Les principaux mécanismes de cette régulation périphérique semblent être la présence de lymphocytes régulateurs et les mécanismes de contrôle négatifs aboutissant à l’arrêt de la prolifération et à la mort des lymphocytes T après quelques jours d’activation.  

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2.2.1. Présentation de l’auto-antigène

Pour qu’une maladie auto-immune se déclenche, il faut que des lymphocytes T reconnaissent un auto-antigène présenté par une cellule présentatrice et reçoivent des signaux d’activation. Ainsi les peptides du soi cryptiques mal présentés, car non associés au CMH, et/ou les auto-antigènes présentés par des cellules présentatrices qui n’expriment pas les molécules de costimulation ne pourront déclencher l’activation des lymphocytes T auto-réactifs. Ces lymphocytes T qui reconnaissent l’antigène sans recevoir de second signal via les liaisons des molécules de costimulation deviennent anergiques, ils sont alors incapables de proliférer et de sécréter des cytokines. Pour déclencher une maladie auto-immune, un auto-antigène doit donc être efficacement présenté. La meilleure cellule présentatrice d’antigène est la cellule dendritique. L’importance du mode de présentation de l’antigène dans le déclenchement des pathologies auto-immunes a été démontrée pour la première fois par l’équipe d’Ohashi et al. en 1991 [26] en utilisant des techniques de transgénèse (Erreur !  Source du renvoi introuvable.).

Figure 5: Importance du mode de présentation antigénique dans le déclenchement des maladies auto-immunes.

Grâce à des techniques de transgénèse, la glycoprotéine (Gp) du virus de la leucémie murine (LCMV) est exprimée par les cellules de pancréas de souris. Dans un autre groupe de souris, en utilisant les mêmes techniques, des lymphocytes T anti-Gp de LCMV sont produits. Ces deux types de souris ne présentent pas d’anomalie, en particulier pas de réaction auto-immune détruisant le pancréas. Le croisement de ces deux types de souris permet d’obtenir une génération F1 qui a à la fois des lymphocytes T circulants anti-Gp de LCMV et des cellules de pancréas qui expriment la Gp de LCMV. De façon surprenante ces souris ne développent pas de diabète. Ces souris sont ensuite infectées avec le virus de la LCMV, ce qui déclenche un diabète. Les cellules de pancréas ne

sont pas des cellules présentatrices d’antigènes. L’expression des antigènes sans expression des molécules de costimulation ne permet pas l’activation des lymphocytes T, alors qu’après infection, ce sont les cellules dendritiques qui vont présenter efficacement les antigènes, et ainsi déclencher l’activation des lymphocytes T qui va aboutir à la destruction des cellules du pancréas exprimant cet antigène [26].

2.2.2. Mimétisme moléculaire

Un exemple de l’importance de la présentation de l’antigène est montré par ce que des auteurs ont appelé le mimétisme moléculaire. Les autoantigènes existent et sont exprimés par des cellules non immunitaires. Les lymphocytes T auto-réactifs circulent dans l’organisme mais ne déclenchent aucune maladie auto-immune car, même s’ils reconnaissent les auto-antigènes, les cellules non immunitaires qui présentent ces auto-antigènes sont incapables de les activer. À l’occasion d’une infection par une bactérie, un virus ou un parasite qui exprime des peptides antigéniques communs avec les auto-antigènes du patient, l’organisme va déclencher une réponse immunitaire qui va détruire à la fois cet agent infectieux mais aussi ses propres cellules. Au cours de l’infection, les cellules du système immunitaire vont être activées et les cellules dendritiques vont présenter aux lymphocytes T les antigènes des agents étrangers qui sont identiques à certains antigènes de l’individu. Les lymphocytes T activés vont ensuite réagir contre les cellules exprimant ces antigènes.

2.2.3. Adjuvants responsables d’inflammation

L’importance de la présentation de l’antigène est illustrée par les maladies auto-immunes expérimentales. Dans la plupart des modèles animaux utilisés,

une protéine provenant de l’organe contre lequel les chercheurs veulent déclencher une maladie auto-immune est injectée à l’animal, par exemple la myéline pour induire une encéphalite auto-immune, ou le cartilage pour induire une polyarthrite. Néanmoins l’injection de la protéine seule ne déclenche aucune réaction immunitaire. Par contre l’injection simultanée d’une protéine et d’un stimulant immunitaire entraînant une inflammation (comme l’adjuvant complet de Freund comprenant des huiles et du Bacille de Calmette et Guérin (BCG), des lipopolysaccharides des bactéries de Gram négatif, des séquences Cytosine-phosphate-Guanine (CpG) déméthylés des acides désoxyribonucléiques (ADN) bactériens) induit chez certaines souches animales des maladies auto-immunes spécifiques dirigées contre l’organe dont provient la protéine.

2.2.4. Augmentation de l’activation et du nombre des cellules

dendritiques

L’activation et l’augmentation du nombre de cellules présentatrices d’antigènes jouent probablement un rôle dans l’induction des maladies auto-immunes. Cette hypothèse a été confirmée au cours du lupus érythémateux disséminé.

2.2.5. Rôle des cytokines

L’interféron (IFN)-α jouerait aussi un rôle dans d’autres pathologies auto-immunes soit en augmentant la différenciation des monocytes et les cellules dendritiques soit en augmentant l’expression des auto-antigènes qui pourraient alors être reconnus par les lymphocytes T. De nombreuses observations de maladies auto-immunes déclenchées par l’administration d’IFN-α ont été rapportées dont les thyroïdites auto-immunes.

En confirmation des cas de maladies déclenchées par l’interleukine (IL) -2 et l’IFN-α chez l’homme, l’équipe de Miller [27] démontre le rôle important de la sécrétion locale de cytokines dans la pathogénie des maladies auto-immunes (Erreur ! Source du renvoi introuvable.).

Figure 6: Rôle de la sécrétion locale de cytokines dans les maladies auto-immunes.

En utilisant des méthodes de transgénèse, l’équipe de Miller obtient plusieurs types de souris :

• des souris dont les cellules du pancréas expriment fortement un antigène appelé Kb ;

• des souris dont les lymphocytes ont le récepteur contre cet antigène, Lc T anti-Kb ;

• des souris qui synthétisent de l’IL-2 en grande quantité au sein du pancréas ;

Ces trois types de souris ne développent pas de réaction immunitaire entraînant la destruction du pancréas. Lorsque l’on croise les deux premiers types de souris, on obtient des souris qui surexpriment un antigène au niveau du pancréas avec des lymphocytes T reconnaissant cet antigène mais cela ne suffit pas pour déclencher une activation des lymphocytes T responsable d’une destruction du pancréas. Par contre si la sécrétion d’IL-2 est augmentée au niveau du pancréas de ces souris F1, une réaction auto-immune est déclenchée, responsable d’un diabète.

2.3. Dérégulation du système immunitaire

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