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Chapitre 5 : L’embout de lance

5.2. Revue des embouts actuels

Aujourd’hui, trois modèles d’embouts différents sont largement employés dans l’industrie pour le procédé par voie sèche :

• Le Hamm (1924) ;

• Le Double-Bubble (1954) ; • Le Spirolet (1973).

Le plus ancien d’entre eux, le Hamm, porte le nom de son inventeur, Thomas Hamm, et date de 1924 (Figures 5.1 et 5.2). Il est composé de deux pièces : un corps en aluminium et un revêtement intérieur

A

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(liner) en caoutchouc. Le corps est fileté à l’extrémité amont, ce qui permet de fixer l’embout à la conduite ou à l’anneau de mouillage.

Le malaxage réalisé par cet embout est favorisé par les épaulements consécutifs moulés dans le revêtement permettant de créer de la turbulence. De plus, la cavité centrale formée par l’agencement des deux surfaces coniques inversées joue le rôle de chambre de malaxage.

Figure 5.1 : Embout Hamm

Figure 5.2 : Vue en coupe longitudinale de l’embout Hamm (Adapté de Hamm (1924))

Pendant longtemps le plus populaire, voir le seul utilisé, cet embout est maintenant le moins utilisé étant donné les faibles performances qu’il offre. De plus, les utilisateurs ont tendance à ne pas remplacer le liner lorsqu’il est usé, voir à l’abandonner totalement, ce qui ne fait qu’aggraver les piètres performances de cet embout.

Revêtement

Corps

Épaulements Filetage

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L’embout Double-Bubble est facilement reconnaissable par sa forme composée de deux larges cavités contigües (Figures 5.3 et 5.4). Il s’agit d’un assemblage de deux pièces : une base en aluminium filetée à l’extrémité amont permettant la fixation sur la conduite ou à l’anneau de mouillage et un corps aujourd’hui entièrement en caoutchouc.

Figure 5.3 : Embout Double-Bubble

Figure 5.4 : Vue en coupe longitudinale de l’embout Double-Bubble (Mccormack, 1954)

On imagine aisément le trajet turbulent des particules dans l’embout, celles-ci se heurtant aux parois du corps et apportant ainsi le malaxage nécessaire.

Cet embout est apprécié dans l’industrie car il offre une maniabilité facilitée. En effet, du fait que le corps soit composé uniquement d’un caoutchouc souple, il est possible de le plier à la main et ainsi il est plus aisé de projeter dans les recoins des coffrages ou dans les zones comportant de nombreuses barres d’armatures.

Corps Base

Filetage

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Le plus récent des embouts présentés, le Spirolet, est une pièce monolithique d’uréthane (Figures 5.5 et 5.6). Le malaxage est fourni par une double spirale continue sur une partie de la longueur de l’embout. La fixation à la conduite ou à l’anneau de mouillage est réalisée grâce au filetage moulé à l’une des extrémités de l’embout.

Figure 5.5 : Embout Spirolet

Figure 5.6 : Vue en coupe longitudinale de l’embout Spirolet (Breunsbach, 1972)

Cet embout offre les meilleures performances en termes de rebond ainsi qu’un profil de vitesse plus uniforme (Ginouse, 2014). Cependant, cet embout peut être sujet à une usure prématurée des spirales de malaxages qui se traduit par une diminution de la capacité de malaxage.

Comme cela a été mentionné précédemment, les embouts de lances en voie sèche permettent le malaxage du mélange de béton sec et d’eau grâce à la turbulence engendrée par leurs formes spécifiques. Cependant, comme le montre Ginouse (2014), les particules se trouvant en périphérie du jet subissent une décélération marquée en voie sèche, le profil de vitesse adoptant une forme de cloche prononcée. Cette décélération des particules en périphérie constitue une des causes de la faible performance en termes de rebond du béton projeté par voie sèche, tel que démontré à la section précédente.

Spirale de malaxage Filetage

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5.3.

Cahier des charges

La solution retenue pour pallier à l’inhomogénéité des vélocités des particules en sortie de lance consiste au développement d’une nouvelle technologie d’embout destiné à une lance courte de béton projeté.

Les conditions que cette pièce d’équipement doit remplir sont :

• Fournir un malaxage du béton sec et de l’eau dans le but de produire un béton homogène à la sortie de la lance ;

• Limiter la décélération des particules périphériques afin de produire un profil de vitesse uniforme dans le but de réduire le rebond.

De la même manière que pour l’anneau de mouillage prototype, la pièce d’équipement doit pouvoir être installée sur le reste de l’équipement, et être suffisamment légère et maniable pour pouvoir être opérée manuellement pendant plusieurs heures de suite. L’entretien aisé et la robustesse sont des caractéristiques indispensables étant donné l’utilisation sur chantier par tout temps et dans un environnement agressif.

5.4.

Concepts et conception

Afin de satisfaire le cahier des charges, plusieurs solutions technologiques ont été envisagées. Ces solutions ont été regroupées sous différentes fonctions, appelées concepts ci-dessous, que l’embout doit remplir.

Par exemple, dans le but de fournir un malaxage du béton sec et de l’eau pour produire un béton à la sortie de la lance qui soit homogène (cahier des charges), l’embout de lance prototype doit créer une turbulence interne (concept). Pour ce faire, l’intérieur de l’embout doit imposer une tortuosité au jet de béton et cette tortuosité sera réalisée par une double spirale interne (solutions).

• Concept 1 : Créer un phénomène de turbulence au sein de l’embout

▪ Forme interne de l’embout imposant une tortuosité au jet de béton ; ▪ Création d’une double spirale interne similaire au Spirolet.

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• Concept 2 : Accélérer les particules périphériques ▪ Utilisation de l’énergie pneumatique ; ▪ Connexion de l’embout à une arrivée d’air ;

▪ Répartition de l’air de manière annulaire en sortie d’embout ; ▪ Création d’un embout à « double peau ».

La conception numérique de l’embout prototype a été réalisée à l’aide du logiciel Solidworks®. Une image du modèle numérique, qui sera décrit par la suite, est présentée sur la Figure 5.7.

Figure 5.7 : Image du modèle numérique de l’embout prototype

La Figure 5.8 présente une image du modèle numérique de l’assemblage de l’embout avec l’anneau de mouillage prototype ainsi que l’ensemble des organes de raccordement et de contrôle de débits.

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Figure 5.8 : Image du modèle numérique de l’assemblage de l’embout et de l’anneau de mouillage prototypes ainsi que des organes de raccordement et contrôle de l’eau et de l’air

L’embout de lance est donc composé de deux pièces cylindriques, l’admission et le malaxeur, assemblées par boulonnage. L’embout s’emboîte par glissement sur l’extrémité aval de l’anneau de mouillage prototype (voir Figure 4.4). L’autre extrémité de l’embout est un échappement à l’air libre, permettant l’expulsion du béton en direction de la surface réceptrice. La Figure 5.9 présente un dessin technique et une vue en coupe de l’assemblage.

Figure 5.9 : Dessin technique de l’assemblage de l’embout prototype avec vue en coupe longitudinale (bas)

Entrée du béton Sortie du béton Air Eau 5 cm

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La Figure 5.10 montre les différents constituants de l’assemblage. Les orifices de boulonnage permettent l’assemblage des deux pièces.

Figure 5.10 : Description de la coupe A-A extraite de la Figure 5.9

La suite du document vise à décrire la réalisation technique des concepts et solutions énoncés précédemment.

• Concept 1 : Créer un phénomène de turbulence au sein de l’embout

D’après les travaux de Ginouse (2014), l’embout Spirolet est à l’origine du profil de vitesse le plus uniforme en voie sèche (voir Figure 2.9). De plus, au vu de nos expériences et observations en laboratoire, il semble permettre de produire le béton le plus homogène. Ainsi, la solution technologique retenue permettant de créer de la turbulence au sein de l’embout prototype est donc identique à celle employée dans l’embout Spirolet. Il s’agit d’une double spirale de malaxage continue sur la totalité de la longueur du malaxeur. Cette solution technique est mise en couleur sur la Figure 5.11.

Orifice pour l’alimentation en air Orifices de boulonnage Admission Malaxeur Spirale de malaxage Raccord anneau de mouillage 5 cm

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Figure 5.11 : Double spirale de malaxage au sein de l’embout

Dans l’optique d’une optimisation du procédé de malaxage, il pourrait être judicieux de chercher de l’information dans le domaine de l’injection plastique et en particulier de la conception des vis d’extrusion. En effet, les vis d’extrusion ont une forme similaire à la double spirale de malaxage, et l’homogénéisation du matériau est une composante prépondérante dans l’injection plastique. Plus d’informations à ce sujet peuvent être trouvées à ce sujet dans Injection Molding Handbook de Rosato et Rosato (2012) par exemple.

• Concept 2 : Accélérer les particules périphériques

L’utilisation de l’énergie pneumatique pour combattre le phénomène de décélération des particules périphériques provient de la disponibilité aisée de cette énergie sur un chantier de béton projeté. La solution retenue consiste en un ajout d’air au pourtour de l’orifice de sortie du béton tel que présenté par les flèches orange sur la Figure 5.12. L’objectif est de redonner aux particules périphériques une accélération à la sortie de la lance, tel une impulsion, pour contrer le phénomène de décélération auxquelles elles sont soumises. La lèvre illustrée sur la figure est visible sur la photographie de la Figure 5.20.

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Figure 5.12 : Schématisation du trajet de l’air à la sortie de l’embout prototype

Pour que l’air puisse se rendre à la sortie de l’embout, un système de « double-paroi » a été conçu. L’embout prototype est constitué de deux cylindres concentriques : l’évidement hélicoïdal entre ces deux cylindres permet le passage de l’air comme on peut le voir sur la Figure 5.13.

Figure 5.13 : Interstice hélicoïdal entre les deux cylindres concentriques permettant le passage de l’air

Evidement permettant le passage de l’air

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L’évidement est hélicoïdal étant donné qu’il est formé de quatre hélices qui prennent leur origine à la base du malaxeur, comme le montre la coupe B-B sur la Figure 5.14.

Figure 5.14 : Coupe B-B de la base du malaxeur

L’interstice entre les deux cylindres concentriques formant le malaxeur par quatre hélices permet d’assurer une distribution de l’air sur l’ensemble de la périphérie de sortie de l’embout. De cette manière, l’air sort uniformément sur l’ensemble du pourtour de l’embout. De plus, l’air adopte un mouvement de tourbillon en sortie de l’embout ayant un sens de rotation identique à la spirale interne, ce qui semble intuitivement bénéfique pour concentrer le jet de béton en un faisceau concentré et ayant un profil de vitesse plus uniforme.

Cependant, pour que la distribution de l’air soit uniforme en sortie d’embout, il faut que l’air soit également réparti entre les quatre hélices à l’entrée. Cette répartition équitable est assurée par l’organe d’admission. En plus de permettre la fixation sur l’anneau de mouillage prototype, cette pièce permet de répartir le débit d’air incident provenant du tuyau d’air entre les quatre hélices interstitielles du malaxeur. La forme générale de l’organe d’admission s’inspire de la forme en « escargot » des volutes de turbocompresseur comme on peut le voir sur l’exemple illustré sur la Figure 5.15. La principale

Orifice de boulonnage

Base de quatre hélices permettant le passage de l’air

Spirale de malaxage : matériau, eau et air

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fonction d'une volute est d'alimenter la turbine centrale avec un débit uniforme, à l'angle désiré, afin d'optimiser les performances du turbocompresseur (Yang et al., 2015).

Figure 5.15 : Exemple de turbocompresseur

Ainsi, la Figure 5.16 présente une coupe de la pièce d’admission. La surface plane en contact avec l’extérieur permet la fixation d’une plaque de connexion pour le raccordement avec l’arrivée d’air.

Figure 5.16 : Coupe C-C de l’admission

Volute

Support de fixation pour plaque de connexion

Orifice d’entrée d’air Volute

Emplacement de la turbine

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Afin de valider la conception de l’admission et du malaxeur vis-à-vis du trajet de l’air, une étude simple à l’aide du module de mécanique des fluides « Solidworks Flow Simulation » a été menée. La Figure 5.17 présente le trajet de l’air au sein de l’embout à l’aide de lignes de courant. Cette simulation a permis de montrer la présence d’un débit d’air équivalent dans chacune des quatre hélices entourant le malaxeur, ainsi que l’absence de zones de recirculation (ou tourbillon) du flux d’air. En effet, toutes les lignes de courant, représentées par les flèches sur la figure, sont d’intensité équivalente (flèches vertes et bleues), ce qui est synonyme d’un débit uniforme dans le malaxeur.

Figure 5.17 : Résultat de l’étude du flux d’air au sein de l’embout à l’aide du module Solidworks Flow Simulation

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