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1.1.

Introduction au chapitre 1 : port et énergie

Etabli sur la base d’un retour d’expériences international de démarches d’écologie industrielle menées en 2011-2012 au sein de territoires industrialo-portuaires, co-financé par l’ADEME, ce premier chapitre propose un aperçu de la diversité des initiatives menées en termes d’optimisation de la gestion des ressources. Parmi les enseignements à tirer de ce travail, dont une partie des résultats a été publiée (Mat et al., 2014), deux constats appuient le positionnement de cette thèse sur les enjeux de transition énergétique dans les territoires portuaires et sont donc discutés dans cette perspective.

1.1.1. Le port levier pour la mise en œuvre de l’écologie industrielle

De nombreuses initiatives en faveur d’une meilleure gestion des ressources prennent corps sur les espaces portuaires, allant d’approches centrées sur les zones industrialo-portuaires à des approches plus larges et décloisonnées (à l’interface entre plusieurs sous-systèmes) au sein des territoires étudiés. Cela renvoie à l’hypothèse 1 selon laquelle il existe, au-delà des seules optimisations au sein des sous-systèmes, des approches territoriales qui ont pour objectif de construire une optimisation des ressources sur la base d’interactions fonctionnelles renouvelées au sein de l’espace portuaire (et entre places portuaires). Le port constitue alors un véritable levier pour la mise en œuvre et l’instauration de ces interactions avec les secteurs urbains et agricoles situés à proximité plus ou moins immédiate des Zones Industrialo-Portuaires (ZIP).

Ce constat peut être éclairé d’un point de vue économique. Les théories développées par von Thünen (1826) pourraient en partie expliquer la localisation industrielle de certaines activités (industries lourdes, transformations et exportations) dans cette typologie de territoires bénéficiant de facteurs de compétitivité différenciant du fait de leur position en front de mer (coûts et facilité d’accès aux marchés internationaux, etc.). Selon Labaronne et al. (2014), l’inscription des acteurs (notamment des entreprises) dans des démarches d’écologie industrielle semble clairement s’inscrire dans une logique et une volonté de construction d’avantages comparatifs endogènes (innovation et évolution des procédés et des services proposés localement). Le fait de pouvoir disposer d’un réseau d’utilités (chaleur, eau industrielle, etc.) localement et aisément (dans une logique plug & play par exemple) contribue au niveau global d’attractivité de la zone industrielle pour de nouveaux entrants. Ces cas étudiés à une échelle internationale soulignent la création de ces externalités positives (Marshall, 1890 ; Arrow, 1962, Romer, 1986), résultant de ces processus d’agglomération (Krugman, 1991 ; 1992 ; 1998) en front de mer et de ce bonus d’attractivité lié à la présence et à la localisation de l’outil portuaire. Parmi les externalités positives créées, Labaronne et al. (2014) citent la réduction

Page 50 des incertitudes logistiques d’approvisionnement des intrants et d’écoulement des outputs, les économies d’échelle (approvisionnements, partage d’utilités, réduction des coûts de transaction entre les opérateurs, etc.) issues des démarches coopératives (exemple de la mutualisation de compétences sur le site de Jorf Lasfar au Maroc), la stimulation des capacités d’innovation (exemple de la Plateforme PIICTO à Fos sur Mer), le transfert de connaissances (knowledge spillovers) et la circulation d’information (informations spillovers), conditions essentielles de mise en œuvre des synergies en écologie industrielle (via des réseaux de relations formelles et informelles, comme Ecopal sur Dunkerque, Ecotown Program au Japon, NISP au Royaume-Uni, etc.).

1.1.2. L’importance des enjeux énergétiques

La dimension énergétique, que ce soit au niveau de la gestion des consommations, de la production, de la diversité du mix énergétique, des émissions de gaz à effet de serre, etc. est considérée par les acteurs du territoire comme un enjeu important pour plus de 80% des cas étudiés. Les stratégies adoptées pour opérer la transition énergétique reposent généralement sur deux principaux piliers :

- l’efficacité énergétique par l’optimisation des consommations (utilisation rationnelle de l’énergie, notamment d’origine fossile), des process de production (cleaner production) et de la logistique. Cette efficacité énergétique s’opère aussi par des échanges énergétiques au sein de la zone industrielle (synergies) et par la réutilisation de co-produits ou déchets locaux. C’est le cas par exemple à Zeeland aux Pays-Bas avec la création d’une infrastructure (réseaux de chaleur) favorisant les échanges de flux d’énergie, à Marseille et à Osaka avec la valorisation des flux de frigories générés par les terminaux méthaniers, à Jorf Lasfar avec une optimisation énergétique du complexe chimique (cogénération, réutilisation des excédents thermiques générés par les réactions chimiques du processus de production de l’acide phosphorique), etc.

- la production énergétique diversifiée, à partir de sources et gisements locaux renouvelables (biomasse, éolien, solaire, géothermique, etc.). C’est le cas par exemple à Rotterdam qui ambitionne de devenir un territoire industrialo-portuaire basé sur l’utilisation des flux de biomasse notamment locaux (bio-based economy), à Ulsan ou Marseille où l’énergie est également produite à partir de sources locales (déchets urbains ou agricoles, éolien, solaire, etc.).

Ce chapitre correspond principalement à la publication suivante :

Mat, N., Cerceau, J., Junqua, G., Lin, L., Laforest, V., Gonzalez, C. Implementing industrial ecology in port cities: international overview of case studies and cross-case analysis. Journal of Cleaner Production. Disponible en ligne depuis le 28 mars 2014. (2014).

Page 51 Ce chapitre s’appuie également sur les productions et compléments apportés aux publications suivantes (en annexe notamment) :

- Annexe n°2 : Cerceau, J., Donsimoni, M., Labaronne, D., Mat, N. Ecologie industrielle dans les territoires portuaires du Maghreb. Cas de Jorf Lasfar (Maroc) et Béjaïa (Algérie). Article

publié dans l’ouvrage collectif dirigé par Labaronne, D. (Coord). Villes portuaires au Maghreb,

acteurs du développement durable. Presses des Mines - TRANSVALOR, Paris (2014)

- Mat, N., Junqua, G. Cerceau, J. Ecologie industrielle dans les territoires portuaires : pratiques internationales et expériences françaises. Les Techniques de l’Ingénieur (2014).

1.2. Mettre en œuvre l’écologie industrielle dans les villes

portuaires : retours d’expériences internationales et analyse