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4.4 Relations de fluctuations-dissipation

5.1.4 Restauration statistique des sym´etries

A gauche, r´egime stationnaire `a Re < 250 brisant l’axisym´etrie : la vitesse moyenne est non nulle. `A droite, r´egime modul´e observ´e pour Re = 330 : le signal pr´esente des faibles oscillations.

sur les grandeurs auparavant stationnaires de l’´ecoulement. Cela correspond probablement `a l’apparition d’ondes progressives (travelling waves ou TW en anglais) dans l’´ecoulement, pr´e-vue num´eriquement et observ´ee chez d’autres ´equipes [89,91] avec des disques lisses, quoique pour des nombres de Reynolds l´eg`erement diff´erents.

5.1.3 La transition vers la turbulence

Si nous augmentons encore le nombre de Reynolds, les bifurcations se succ`edent alors rapidement : des ondes stationnaires apparaissent vers Re = 390, qui deviennent ensuite irr´eguli`eres, le syst`eme parcourant des orbites quasi-h´et´eroclines. Pour des Re plus ´elev´es en-core, il est possible d’observer un enroulement de la couche de cisaillement sur elle-mˆeme. Le spectre de la vitesse commence alors `a pr´esenter un comportement en f−1 aux tr`es pe-tites fr´equences, caract´eristique d’un r´egime chaotique (fig. 5.3). Le syst`eme devient ensuite progressivement turbulent, les fluctuations de la vitesse azimutale saturant vers Re ≈ 4000. Les spectres temporels des signaux de LDV pr´esentent alors un d´ebut de zone inertielle avec une pente caract´eristique −5/3. Pour toute cette gamme de nombres de Reynolds, la taille des fluctuations de vitesse (vφ− ¯vφ)2 varie comme Re− Rec, avec Rec = 330. Cela semble confirmer la nature globalement supercritique de la transition `a la turbulence.

Dans le r´egime d´esormais dit inertiel, les deux sens de rotation produisent des ´ecoulements tr`es diff´erents, pour lesquels la valeur des couples adimensionn´es Kpest diff´erente dans les deux sens de rotation. Le fluide, plus acc´el´er´e dans le sens (−), exercera un couple plus important sur les turbines que dans le sens (+). De mˆeme, la relation lin´eaire Kp ∝ Re−1 est perdue, comme il est possible de le voir sur la figure5.4. Tandis que le Kp de l’´ecoulement du sens (−) semble atteindre un plateau, celui du sens (+) continue de diminuer lorsque Re augmente.

5.1.4 Restauration statistique des sym´etries

5.1.4.1 Du d´esordre instantan´e `a l’ordre statistique

Le champ de vitesses de PIV instantan´e nous fournit de plus amples informations sur la nature du d´esordre r´egnant au sein de l’´ecoulement de von K´arm´an dans le r´egime turbulent. En effet, nous savons que d´esormais l’´ecoulement instantan´e varie tr`es rapidement en fonction du temps, et ne respecte plus les sym´etries du montage (voir figure5.5).

5.1. La transition `a la turbulence 87 0 200 400 600 800 1000 −1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 Temps (adim) Vitesse (adim) 0 200 400 600 800 1000 1200 −1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 Temps (adim) Vitesse (adim)

Figure 5.3 – Signaux temporels de vitesse azimutale vφ de LDV, pour θ = 0, en z = 0, toujours extraits de la th`ese de Florent Ravelet [65] pour des turbines T M 60. `A gauche, r´egime chaotique `a `a Re = 450 : la vitesse, bruit´ee, semble transiter entre deux valeurs±0.3.

`

A droite, ´ecoulement turbulent pour Re = 4000. Les vitesses sont tr`es ´elev´ees et ne semblent plus suivre une tendance particuli`ere.

101 102 103 104 105

10−1 100

Re

Kp

Figure 5.4 – Comparaison des couples adimensionn´es Kp pour les deux sens de rotation : (), sens (−), et (), sens (+), pour des T M 60. Les donn´ees sont extraites de la th`ese de Florent Ravelet [65]. Les barres d’erreur sont repr´esent´ees. Une troisi`eme branche stationnaire (), produite `a partir du sens (−), apparaˆıt vers Re ≈ 10000. La ligne en pointill´es repr´esente la d´ependance th´eorique du couple en fonction du Re en r´egime laminaire : Kp ∝ Re−1, bien respect´ee jusqu’`a Re≈ 300, qui correspond `a la troisi`eme bifurcation par rapport `a l’´ecoulement laminaire de la figure5.1.

man’s Navier Stokes, syst`eme dynamique utilis´e pour mod´eliser tr`es simplement la turbulence, pr´eservait la mesure [7]. L’interpr´etation g´en´eralement accept´ee de cette propri´et´e consiste `a dire que les sym´etries du syst`eme sont statistiquement restaur´ees dans l’´ecoulement turbulent. Notre syst`eme de PIV nous permet de mesurer des champs de vitesses qui ne suivent pas la totalit´e de la dynamique de l’´ecoulement `a cause de sa faible fr´equence d’acquisition. Toutefois, il peut exister une forme de corr´elation temporelle entre deux champs de vitesse successifs non r´esolus temporellement. Afin de quantifier cette possible corr´elation, nous pouvons examiner la grandeur suivante : C(r, z, τ ) = 1 |v|2− |¯v|2 Z t (v(r, z, t + τ )− ¯v) · (v(r, z, t) − ¯v) dt (5.8) Cette grandeur va donc mesurer la ressemblance « typique » qui existe entre deux champs

88 5. Caract´erisation de l’´ecoulement stationnaire : commande en vitesse r/R z/R −0.5 0 0.5 −0.6 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4 0.6

Figure 5.5 – ´Ecoulement instantan´e turbulent pour un nombre de Reynolds ´elev´e (≥ 104), pour des turbines en plastique T P 87. Plus aucune sym´etrie n’est constat´ee, et le fluide s’´ecoule de mani`ere d´esordonn´ee. r/R z/R −0.5 0 0.5 −0.5 0 0.5 r/R −0.5 0 0.5 r/R −0.5 0 0.5 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4

Figure 5.6 – ´Ecoulements turbulents moyenn´es sur N instantan´es d´ecorr´el´es en temps, pour des turbines en plastique T P 87. `A gauche, N = 20 : l’´ecoulement ne semble ni axisym´e-trique (divergence non nulle au centre) ni Rπ sym´etrique. Au milieu, N = 100 : l’´ecoulement semble d´ej`a mieux respecter les sym´etries mˆeme si des parties non sym´etriques sont toujours pr´esentes, comme au centre de l’´ecoulement o`u vφ 6= 0 et `a gauche, o`u le fluide semble di-rectement ˆetre entraˆın´e depuis le tore du bas jusqu’au tore du haut. `A droite, N = 10000, l’´ecoulement est parfaitement axisym´etrique et Rπ sym´etrique. La sym´etrie du syst`eme est restaur´ee.

de vitesses lorsque ceux-ci ont ´et´e acquis `a un intervalle de taille τ . Ces corr´elations sont donc distinctes de celles qui seront d´ecrites dans la partie5.3.4.4. Le trac´e d’une telle grandeur nous montre qu’il existe encore des corr´elations significatives entre les champs de vitesses pour des valeurs de τc = 3 s, soit sur environ 45 champs de vitesse.

Par cons´equent, il est possible d’effectuer une moyenne temporelle des champs de vitesse ¯v, qui nous fournira une excellente mesure de la moyenne statistique du champ de vitesseshvi si la dur´ee sur laquelle celle-ci s’effectue est grande devant le temps de corr´elation de l’´ecoulement (nos moyennes s’effectueront alors sur des dur´ees exc´edant 40 s). Cette moyenne statistique nous permettra ainsi de v´erifier la restauration de l’axisym´etrie et de laRπ sym´etrie.

Les champs de vitesse de la figure 5.6montrent bien cette restauration statistique : plus le nombre d’´echantillons sur lequel la moyenne est effectu´ee est grand, plus l’´ecoulement res-pecte les sym´etries originelles de notre montage. Cependant, le nombre d’´echantillons pour

5.1. La transition `a la turbulence 89 0 100 200 300 400 500 600 0 0.5 1 1.5 t (s) C (Nm)

Figure 5.7 – Signaux de couples turbulents stationnaires (non calibr´es) enregistr´es pour le sens (+) avec des T P 87. En bleu : (—), le couple de la turbine du bas. En rouge : (—), le couple de la turbine du haut. Les moyennes des signaux sont repr´esent´ees par un tiret´e. recouvrer rigoureusement ces sym´etries est tr`es ´elev´e : pour un champ de vitesse moyenn´e sur N = 100 instants, il est toujours possible de voir `a l’œil nu des ´ecarts `a la Rπ sym´e-trie. `A titre de comparaison, des champs de vitesse parfaitement d´ecorr´el´es moyenn´es sur une dizaine d’instants (N ≈ 10) donneraient une excellente estimation de l’´ecoulement moyen statistique : cela est principalement li´e `a la possibilit´e, dans ce cas, d’appliquer le th´eor`eme central limite. Nous consid´ererons dans la suite qu’il faut effectuer nos moyennes sur au moins N = 600 ´echantillons pour obtenir un ´ecoulement « moyen » qui restaure parfaitement — au sens statistique — toutes les sym´etries du montage exp´erimental. Ce sont principalement ces ´ecoulements « moyens » stationnaires, qui seront appel´es dans la suite de ce manuscrit les ´etats sym´etriques (s) du syst`eme, que nous cherchons `a caract´eriser dans nos exp´eriences.

5.1.4.2 Caract´eristiques de l’´etat sym´etrique (s)

Stationnarit´e Si nous regardons le signal de couple fourni par les couplem`etres `a haut nombre de Reynolds dans l’´etat sym´etrique en fonction du temps, nous voyons que celui-ci est stationnaire. Cela peut sembler contradictoire avec le caract`ere turbulent et hors-´equilibre de notre ´ecoulement, qui poss`ede des corr´elations temporelles sur une dur´ee non n´egligeable . Une fois de plus, la question des ´echelles de temps est cruciale, comme il est possible de le voir sur la figure5.7: bien que tr`es fluctuants de mani`ere instantan´ee, les signaux sont globalement stationnaires lorsque nous consid´erons leur valeur moyenne sur des tranches temporelles d’une taille typique 10τc.

Corr´elation des couples L’´ecoulement turbulent dans l’´etat (s) poss`ede statistique-ment deux cellules de recirculation s´epar´ees par une couche de cisaillestatistique-ment situ´ee en z = 0. L’´ecoulement instantan´e semble alors ˆetre la superposition de l’´ecoulement statistique et d’un bruit turbulent important qui pousse le syst`eme suffisamment loin de cet ´etat pour le rendre «m´econnaissable ».

Pour mieux comprendre cet ´ecoulement instantan´e, nous avons besoin d’effectuer d’autres mesures. Les mesures de couple sont plutˆot rapides et permettent d’avoir un aper¸cu de ce que ressent le syst`eme aux grandes ´echelles de mani`ere instantan´ee. La figure5.8nous montre l’auto-corr´elation des couples bas et haut pour deux ´ecoulements dans l’´etat (s), l’un dans le sens (+), l’autre dans le sens (−). Ceux-ci nous indiquent qu’en g´en´eral, le couple d’une turbine « oublie » ses variations pass´ees en 1 ou 2 r´evolutions.

Quelque chose au sein du fluide permet donc aux turbines d’oublier rapidement leurs fluctuations pass´ees, qui devraient normalement ˆetre retrouv´ees plus tard sur les turbines si le cycle de pompage et d’expulsion du fluide par les turbines venait simplement les transporter. Une interpr´etation de ce ph´enom`ene implique que la couche de cisaillement joue un tel rˆole :

90 5. Caract´erisation de l’´ecoulement stationnaire : commande en vitesse −5 0 5 τ (tours) −5 0 5 0 0.5 1 τ (tours) hC i (t ), Ci (t + τ )i

Figure 5.8 – Auto-corr´elation des couples des couplem`etres pour deux exp´eriences effectu´ees avec des T P 87 en r´egime pleinement turbulent. `A gauche, exp´eriences effectu´ees dans le sens (−) dans l’´etat stationnaire (s) `a f = 4 Hz. `A droite, exp´eriences dans le sens (+) `a f = 7 Hz. Le couple du couplem`etre du bas est repr´esent´e par un trait bleu (—) et celui du haut par un trait rouge (—). Dans les deux sens de rotation, les couples se d´ecorr`elent en deux tours de turbines, malgr´e quelques oscillations `a la fr´equence de rotation des turbines.

bien qu’invisible sur l’´ecoulement instantan´e de PIV, elle joue toujours globalement son rˆole de s´eparation des z ≥ 0 et z ≤ 0 avec d’importantes fluctuations. Ce sont ces fluctuations d’´ecoulement `a l’int´erieur de la couche de cisaillement qui vont empˆecher les auto-corr´elations de se construire `a τ ´elev´e.

Une preuve accr´editant cette interpr´etation vient des inter-corr´elations : si la couche de cisaillement exerce bien son rˆole de s´eparation et de fluctuations autour de z = 0, alors il est impossible que le couple du couplem`etre du haut et de celui du bas soient fortement corr´el´es dans l’´etat (s). Cela est effectivement visible lorsque nous tra¸cons ces inter-corr´elations : dans le sens (−), les inter-corr´elations poss`edent un maximum assez faible, 0.25 pour τ = 0 ainsi que deux maxima secondaires encore plus petits pour τ ≈ ±1 tour : quelques fluctuations subies par une des turbines sont ressenties un peu plus tard sur l’autre turbine. Dans le sens (+), aucune corr´elation significative n’est observ´ee mˆeme si celles-ci apparaissent p´eriodiques. Grandeurs globales de PIV Nous avons vu que les champs de PIV instantan´es sont a priori non r´esolus en temps, malgr´e une fr´equence d’acquisition pouvant aller jusqu’`a 15 Hz. Ces derniers pr´esentent de plus un certain d´esordre spatial. Il est cependant possible de tra-cer, par curiosit´e, l’´evolution temporelle des grandeurs globales de PIV afin de voir si la moyenne sur le d´esordre spatial observ´e ne viendrait pas restaurer d’une certaine mani`ere la Rπ sym´etrie. Nous rappelons qu’en toute logique, l’´etat (s) est invariant parRπ sym´etrie, ce qui implique que hIi = hΓi = 0. Cette condition est plutˆot bien respect´ee en g´en´eral (voir figure5.10) : les moyennes de ˜I et ˜Γ sont bien proches de 0. Nous voyons de plus que les fluc-tuations de ces grandeurs sont relativement faibles et peu corr´el´ees dans le sens (+), tandis que les signaux du sens (−) semblent s’´ecarter de la moyenne sur des temps plus longs. Ces der-niers n’exc`edent toutefois pas 40 s = 600/facq, confirmant la pertinence de notre ´ecoulement «moyen » calcul´e sur 600 instants.