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I. L’ ACCOMPAGNEMENT AMONT ! : ÉVALUATION ET SÉLECTION

3. L A DÉCISION DE PRÊTER

3.3 Les critères d’octroi du crédit

3.3.2 Les ressources et la gestion

Après le projet, le second critère d’acceptation d’un dossier réside dans le fait que les décideurs estiment que la personne parviendra à rembourser le crédit accordé. Ici aussi l’insertion professionnelle joue un rôle important!: un projet qui mène à un emploi augmente le revenu et les capacités de remboursement. Pourtant, nous avons montré que le profil des bénéficiaires est très variable de ce point de vue puisque les revenus s’étendent du RMI jusqu’à des revenus du travail légèrement supérieurs au SMIC. C’est que ce ne sont pas les ressources seules qui interviennent dans la décision!: la gestion est en jeu. Les banquiers, qui sont sans doute les intervenants les moins habitués à travailler avec des personnes aux ressources si modestes, sont souvent étonnés de leurs capacités de remboursement.

3.3.2.1 Un niveau de ressources plus ou moins important selon le partenaire

Du point de vue des ressources on observe une forte disparité de profil entre les régions d’expérimentation!: la moyenne des revenus initiaux des bénéficiaires rencontrés était de 647 euros pour la région de la Banque A, 681 euros pour la Banque B, et 857 euros pour la région de la Banque C. Même s’il convient de nuancer ces chiffres car le nombre de bénéficiaires interrogés n’est pas le même d’une région à l’autre, on s’aperçoit que le partenariat avec la Banque C est spécifique de ce point de vue. Les bénéficiaires y sont bien plus souvent qu’ailleurs proches de l’emploi au moment de la mise en place du prêt!: alors que 2 personnes sur 6 interrogées pour la Banque B travaillaient au moment où elles ont demandé le prêt, ce chiffre était de 2/17 pour la Banque A, et montait à 2/4 dans la région de la

Banque C, sans compter deux interviews qui n’ont pu être organisées dans cette région précisément parce que les bénéficiaires étaient occupés au travail. Les 6 accompagnateurs rencontrés dans la région C nous ont affirmé sans exception qu’ils trouvaient très délicat de prêter à des gens ne vivant que de minima sociaux. Le seul qui envisageait éventuellement de prêter à un bénéficiaire de RMI y mettait comme condition que celui-ci soit dans une dynamique de sortie du RMI, le prêt lui servant alors à solidifier son insertion professionnelle. Cependant, les arguments qu’il utilise ne sont pas uniquement ceux des ressources. Il considère en effet qu’une partie des personnes qui sont au RMI ne cherchent plus à en sortir, le système étant trop rigide!: ils perdent des aides s’ils travaillent un peu et préfèrent garder cette ressource permanente qui leur demande moins d’efforts. On s’aperçoit en réalité que les accompagnateurs tiennent alors compte non pas seulement du niveau des ressources mais de leur nature et, surtout, du mérite qu’ils y attachent.

Dans les autres régions, les accompagnateurs sont également souvent réticents a priori à prêter à des personnes trop démunies, car ils craignent de les étouffer sous les charges de remboursement. Acc. A3 affirme!: «!Moi les quelques personnes que j'ai rencontrées, celles qui avaient le RMI avaient besoin du

RMI.!» Pourtant, la plupart des Crédits projet personnel accordés l’ont été pour des personnes

bénéficiaires de minima sociaux ou touchant des allocations chômage. La spécificité soulignée plus haut de la région A où sont accordés des prêts non liés à la reprise d’emploi s’accorde avec le fait d’accepter de prêter à des personnes aux revenus uniquement sociaux. Acc. A5 explique que les personnes qui vivent de minima sociaux n’ont jamais d’économies et que cela les aide à en faire sans qu’elles s’en aperçoivent. Par ailleurs, le dispositif est perçu comme un outil de resocialisation, par ce qu’il permet d’acquérir (déménagement, amélioration de l’habitat, soins dentaires) et par le fait qu’il permette à des personnes habituellement exclues des banques de signer un contrat de crédit en bonne et due forme. Le partenariat avec la Banque B présente une image intermédiaire!: si tous les crédits sont orientés vers l’emploi ou sa recherche, les ressources des bénéficiaires ne sont pas toujours très élevées. Il semble que l’aspect expérimental ait ici pleinement joué son rôle!: les premiers prêts accordés à des bénéficiaires de minima sociaux étaient de l’ordre du pari, devant le bon déroulement des remboursements ils sont devenus plus usuels.

3.3.2.2 Des qualités de gestion qui rassurent

Le travail au noir vient parfois compléter les revenus annoncés!: garde d’enfants pour les femmes, travaux de bâtiment pour les hommes. S’ils ne sont pas officiellement pris en compte dans les dossiers, ces revenus ont une double influence sur les comités de crédit!: ils augmentent le rapport ressources/charges, et ils sont le signe de ressources morales des demandeurs. Acc. A4 le dit!: «!Ceux

qui veulent s’en sortir, ils ont une activité hors circuit!».

Une autre façon de compenser de faibles ressources est d’avoir une gestion très rigoureuse du peu d’argent disponible. Le banquier B, en contact avec la clientèle des particuliers au sein de la Banque B depuis quelques mois a d’ailleurs été surpris par la qualité de la gestion de ces personnes. Cela joue sur l’acceptation de leur demande.32

Le projet, les ressources et la situation professionnelle du demandeur ne sont donc pas suffisants pour que le comité de crédit se fasse un avis!: la motivation et la force de caractère sont des éléments essentiels.

Expérimentation «!Crédit Projet Personnel!» 78