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Chapitre 5- Analyse de la proxémie et de la distance hiérarchique

5.1.9 Le respect des autres et de ses propres besoins

Plusieurs participants témoignent que la distance physique maintenue au Québec leur permet plus facilement de garder des distances et d'obtenir une tranquillité qu'ils ne trouvent pas dans leur pays d'origine. Toutefois, cette agréable distance physique semble aller de pair avec une distance dans l'attitude qui peut être conflictuelle. Le rapport à la distance est soumis à des changements qui peuvent être le résultat d'une adaptation aux normes québécoises.

Lorsque je suis chez nous et il y a des gens qui rentrent dans ma bulle, j’ai tendance à dire, non, vous ne pouvez pas. Je te donne un exemple, ma tante lorsque je suis arrivé chez nous, elle voulait vraiment me donner des bisous comme ça. (Elissa)

Elissa par exemple impose plus facilement ses limites proxémiques face aux membres de la famille éloignée depuis qu'elle habite au Québec.

Raphael nous décrit deux types de situation et sa façon de réagir. Il fait preuve d’une grande sensibilité pour le malaise des autres et il dit être plus susceptible dans certaines situations. Selon son humeur, il impose une distance physique à ses amis et se retire dans sa zone de distance intime.

Je ne fais pas non plus pour déranger. Quand je remarque la personne n’est pas à l’aise ou ne s’attend pas à cette réaction-là, je me remets en mode…c’est vraiment une question d’ajustement chaque fois. Avec mes amis maintenant je n’y pense plus. Parce qu’à la limite, ils me diront juste..arrête… et ça je comprends. [...] Et les personnes que je ne connais pas, j’essaie de voir la réponse ou d’essayer de me réajuster à chaque fois. […] Ça dépend de mon humeur. Oui, on s’aime bien, oui on est bons pots

et tout. Mais les gars quand même. Cette journée, j’ai bien envie de rester dans ma bulle. C’est ça. (Raphael)

Raphael s'écoute soi-même concernant ses besoins de tranquillité et il les exprime clairement s'il sent qu’ils ne sont pas respectés. En même temps, il respecte les besoins des autres et s'ajuste quand il sent que son comportement va à l'encontre des besoins d'intimité de son interlocuteur.

Carole nous explique comment elle réagit quand le comportement de la personne qu'elle rencontre pour la première fois ne lui permet pas de déduire la réaction qui serait appropriée. Elle se présente de façon plus formelle et elle initie le geste pour serrer la main. Carole prend les devants, ce que lui permet d’influencer le déroulement des salutations.

J’aurai tendance à répondre que c’est un peu un dialogue non verbal qui se joue en quelques secondes entre moi et l’autre personne. Des fois, tu rencontres des gens, ils ne vont pas te faire de colle, ils ne vont pas t’embrasser, mais en même temps, ils ne te serrent pas la main non plus, tsé. T’es comme… tu ne sais pas trop ce que tu dois faire. Faik moi, par réflexe j’ai pris l’habitude de quand je vois ce temps de flottement : « Bonjour ça me fait plaisir je suis Carole ». Et puis je tends ....j’initie le geste parce que…c’est ça (Carole)

L’analyse de Carole de son propre comportement fait émerger l’importance de l’observation des réactions des personnes impliquées dans l’interaction afin de pouvoir décoder les messages non verbaux. De plus, elle met de l’avant l’importance d’un comportement proactif. En réagissant rapidement, Carole évite des moments qui pourraient la rendre mal à l’aise.

Les témoignages précédents font preuve d'une prise de conscience de la part des interlocuteurs concernant leur propre comportement proxémique. Le fait de rencontrer des personnes qui agissent de façon différente les a poussés à réfléchir aux différences et aux façons de réagir et de s'adapter dans un nouveau contexte de vie. Nous retenons ici l’importance que les participants à la recherche accordent au fait de s’adapter à leurs interlocuteurs. Ils constatent que chaque interaction est soumise à des changements et qu’elle est en conséquence dynamique.

La partie suivante sur la distance hiérarchique suit la même logique que celle sur la proxémie en questionnant les différences dans le rapport à la hiérarchie, la manifestation de la distance hiérarchique et aussi le changement de perception des interlocuteurs.

5.2 La distance hiérarchique

Après avoir analysé et présenté les résultats en lien avec la proxémie, nous complétons l’analyse en traitant de la distance hiérarchique. En commençant par une présentation de nature plus générale des perceptions de la part des participants, les sous-chapitres suivants sont consacrés à des dimensions spécifiques. Il sera question des notions de respect et d’autorité, du rapport étudiant-professeur et des différences qui peuvent émerger entre des maitrises de type cours et des maitrises de type recherche.

Les questions qui ont été posées aux étudiants en lien avec la distance hiérarchique n’étaient pas tournées vers un contexte de vie particulier. Cependant, le contexte universitaire et en particulier le rapport étudiant-professeur ont émergé lors de l'analyse. Dans un premier temps, nous avons voulu étudier les comportements ou valeurs que les étudiants associent à la distance hiérarchique. Toutefois, nous n’avons jamais utilisé les termes « hiérarchie » et « distance hiérarchique » à moins que l'interlocuteur ou l'interlocutrice en ait fait l’utilisation en premier. Les questions ont été posées afin d’identifier les différences en générale. Ensuite, nous avons demandé à l’étudiant de préciser quand il était question de la distance hiérarchique.