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Chapitre 3 Le sous-comité des bibliothèques (1967-1975) : Priorités, réalisations, échecs

3.7 Renforcement de la position du sous-comité

Tout au long de la période étudiée, on ne peut que noter la volonté manifeste du sous- comité d’augmenter sa position hiérarchique au sein même de la CREPUQ. Ainsi, dans ses recommandations formulées en Assemblée plénière le 15 octobre 1970, il demande que l’expertise de ses membres soit reconnue dans le comité d’évaluation des études du deuxième et troisième cycles et dans le comité de la recherche436 et recommande d’être fusionné avec le

comité de documentation. Le premier point représente une préoccupation constante des bibliothèques en ce qui concerne la coordination des collections avec le développement des programmes ; le second, une formalité qui sera réalisée dans les années qui suivent. Ces demandes traduisent en fait une stratégie de contestation à l’intérieur du champ universitaire. À la suite des changements importants engendrés par les conclusions du rapport Parent

436 La position du sous-comité quant à la reconnaissance de son expertise trouve d’ailleurs écho dans celle de l’AUCC

qui soumet un rapport sur la rationalisation des bibliothèques le 1er novembre 1972. Dans ce document, on y

recommande que les bibliothèques soient représentées d’office dans les comités discutant de la création et de la révision des programmes d’études et participent à tout projet de rationalisation. Cette recommandation fait suite à des plaintes répétées des bibliothécaires partout au pays concernant les demandes soudaines d’ouvrages et d’espace pour répondre aux nouveaux programmes d’enseignement et de recherche, programmes pour lesquels ils n’ont pas été consultés. Voir Coordination des bibliothèques au Canada – Rapport du groupe d’étude de l’AUCC sur la rationalisation des bibliothèques, novembre 1972. FACREPUQ.

(investissement dans la recherche, augmentation du nombre d’étudiants, création de nouveaux programmes), les bibliothèques ont tout avantage à être consultées sur les questions relatives à la recherche et aux programmes d’enseignement supérieur, source majeure de capital symbolique pour les universités. Cela leur permettrait non seulement de faire connaître les enjeux de développement de collections découlant de la création de programmes, mais également de renforcer leur position hiérarchique à l’intérieur du champ par leur implication dans des comités au cœur de la mission des universités. Dans la même veine, la fusion avec le comité de documentation permet à la fois de fédérer les efforts et les expertises en matière de gestion documentaire et de renforcer la position du sous-comité à l’intérieur de la CREPUQ.

La position des directeurs des bibliothèques concernant le développement des programmes va d’ailleurs plus loin qu’un simple appel à profiter de leur expertise. Ils défendent en fait une coordination nationale des secteurs de la recherche, un point déjà formulé dans le cadre de divers projets. Dans son mémoire présenté à la CREPUQ en réponse à un questionnaire du Conseil des universités, le sous-comité espère « qu’on déterminera bientôt les secteurs d’excellence et/ou de spécialisation des universités » 437. On souhaite à l’époque une division rationnelle des champs du savoir entre universités en fonction de leurs forces actuelles. Une division des secteurs d’enseignement par université suppose que chaque bibliothèque n’aurait qu’à développer une collection englobant une fraction précise du savoir, ce qui, vu leurs ressources limitées, permettrait de mieux répondre aux besoins de l’université et ainsi de renforcer leur position dans le champ.

On le voit, les efforts du sous-comité sont concentrés vers une reconnaissance de leur rôle dans la recherche universitaire allant au-delà des tâches strictement bibliothéconomiques, comme l’illustre sa position quant à la structuration des axes de recherche. C’est pourquoi il réagit bien mal lorsqu’il apprend qu’il devient le 27 novembre 1972 une division du comité des affaires académiques438. Inquiètes, les bibliothèques craignent de n’être considérées que

437 Mémoire du comité des bibliothèques de la Conférence des Recteurs en réponse au questionnaire du Conseil des

universités, 22 mars 1971, 6. FACREPUQ.

comme un support à l’enseignement, sans considération pour la recherche, dont le comité est distinct439.

Sur une autre note, on ne peut parler des stratégies du sous-comité sans mentionner son entreprise d’accumulation de capital social. Déjà, de bonnes relations étaient établies avec l’Ontario Council of University Libraries (OCUL), affilié avec le Council of Ontario Universities (COU), qui, à la demande du sous-comité, avait produit en 1969 un rapport sur la faisabilité d’un service de PEB entre bibliothèques universitaires québécoises. Des rencontres conjointes sont également organisées entre les deux associations sur une base quasi annuelle. Au Québec, le 6 février 1970, le sous-comité s’entend pour communiquer avec la CBPQ pour demander qu’y soient admis les bibliothécaires universitaires440. La présence de la BNQ à

certaines réunions témoigne des relations développées avec cette institution. Sur la scène canadienne, le sous-comité charge Crouch de les représenter à la fondation de l’Association canadienne des bibliothèques de recherche qui aura lieu en juin 1970441. La stratégie utilisée

par le sous-comité, de nature contestatrice, vise, par l’accumulation de capital social et la reconnaissance de son capital culturel incorporé, à convaincre les instances de la CREPUQ, et par conséquent les recteurs des universités québécoises, de l’importance des bibliothèques universitaires dans leur champ.