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La relativisation de l’opposition entre propriété privée et bien collectif hydrique

« Par son omniprésence dans les notions fondamentales du droit, la propriété apparaît comme inhérente à l'art juridique »287.L’exploitation de l’eau et des étangs en Dombes repose

sur des pratiques traditionnelles, transmises de propriétaires en propriétaires depuis le XIIIème

siècle, mais dépend également du régime juridique de la propriété privée. La propriété privée individuelle, succédant à la propriété seigneuriale, a été absorbée au système traditionnel de

gestion de l’eau. Certains auteurs du XIXème siècle déplorent d’ailleurs le partage des grandes

281 Celui dispose que « la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ».

282 GUDEFIN J. préc., p. 172.

283 DROSS W., L’article 552 n’est-il qu’une présomption de propriété ?, note sur Cass. 3ème Civ., 13 mai 2015, n° 13-27.342, RTD civ. 2015, p. 902.

284Ibid., p. 173.

285 V. notamment Cass. Civ., 19 avril 1864, Mollet c/ Berthelot, S. 1864.1252, et Cass. Req., 21 fév. 1893, Decamps c/ Préfet de la Somme. S. 94.I.74. Alors que le principe veut qu’un plan d’eau traversé ou alimenté par des eaux courantes emprunte leur régime de chose commune, la Cour, par ces deux arrêts attribue à ces plans d’eau le régime de chose appropriable.

286 Cass. 3ème Civ., 10 juin 2009, Cne de Le Pin, n° 08-14014, AJDI 2009, p. 650.

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propriétés de la noblesse, du clergé et de la bourgeoisie, la grande propriété étant nécessaire à

la productivité agricole de ce territoire288. Toutefois, la recomposition du paysage

démographique de la Dombes, au gré des successions ou des faillites, a abouti à la

multiplication de propriétés modestes intégrant un faible nombre d’étangs289, là où les

concentrations foncières avaient permis le profit de grands propriétaires XVIème au XIXème

siècle290. Il en découle une démultiplication des relations juridiques, comme autant de

propriétaires, et donc des difficultés potentielles dans la gestion collective du territoire. Cette propriété privée, pivot de la gestion de l’eau en Dombes, peut cependant sembler être un danger pour la préservation de la ressource sur ce territoire, le propriétaire ayant des droits particulièrement étendus sur sa chose (I). Pour autant, l’absoluité des droits du propriétaire se trouve réduite par les droits des autres propriétaires sur la même chose, bien que sa possession soit alternative (II).

I. La proprie te prive e et l’e tendue des droits d’usage sur la ressource

L’existence d’une propriété privée prépondérante dans l’organisation des rapports sociaux en Dombes est un fait indéniable. L’importance sociale sur ce territoire se mesure bien souvent à la puissance patrimoniale d’un propriétaire. Toutefois, les droits de propriété qui s’exercent sur la ressource en eau et plus encore sur l’étang lui-même sont d’une nature particulière en raison de la distinction traditionnelle entre la propriété de l’assec et la propriété de l’évolage (A). En tout état de cause, la seule propriété privée s’imposant à une ressource naturelle conduit à l’exercice de droits absolus qui sont susceptibles de mettre en péril la pérennité de ladite ressource (B).

A. Les prérogatives absolues du propriétaire de l’eau

Le droit de propriété, tel qu’il est traditionnellement conçu en droit français, s’appuie sur une conception individualiste. C’est-à-dire qu’une propriété emporte la maîtrise pleine et

288 Voir par exemple sur ce point, DUBOST M, Etude agricole de la Dombes, Impr. Dufour (Bourg), 1859, pp. 70-72.

289PANDELAKIS T., BOISSIEUX Y., Etude sociologique des propriétaires et exploitants d’étangs de la Dombes en vue de la mise en place d’un guide de bonnes pratiques pour la gestion des étangs piscicoles dombistes, Mémoire Master 1 Etudes Rurales – Géographie, Univ. Lumière Lyon 2, 2013, p. 10.

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directe sur sa chose. Cette conception est pleinement présente dans le contexte dombiste où les propriétaires accordent une grande importance à la délimitation et la protection de leur propriété qui se manifeste par le droit de se clore (1). Une telle approche conduit à s’interroger sur le degré de maîtrise de l’eau par le propriétaire foncier (2).

1. Le droit de se clore : pierre angulaire de la propriété en Dombes

Avant d’exploiter ou d’user de sa propriété de quelque façon que cela soit, il s’agit de l’identifier et de la limiter matériellement, et plus symboliquement de la revendiquer. Pour cela, plusieurs moyens sont possibles afin d’éviter l’intrusion d’un tiers sur son fonds mais l’objectif demeure de manifester matériellement sa propriété ainsi que les limites juridiques de son bien. Cette démarche traduit l’affirmation du rapport qui peut exister entre le propriétaire et sa chose. Dans les sociétés occidentales modernes dont les relations entre individus sont

articulées autour de la propriété privée, droit inviolable et sacré291, le rapport à la propriété est

celui de l’exclusivité. L’appropriation exclusive est un signe ostensible de pouvoir292 et est la

démonstration du dominium de l’ancien droit293. La propriété privée en Dombes est primordiale

et jalousement gardée, close et préservée. « Nous, en Dombes, c’est clair, tout est privé »294. En

tout état de cause, et quel que soit le fondement juridique de cette démarche, force est de constater que bon nombre des domaines en Dombes (comme ailleurs) sont délimités par une clôture, voire parfois au moyen de fossés creusés entre deux fonds contigus. En découle d’ailleurs une disposition du droit coutumier particulier retranscrite dans les ouvrages de la fin

du XIXème siècle, et parfois oubliée depuis. Ce droit a pour objet de permettre à un propriétaire

foncier, détenteur ou non d’un étang, dont le fond voisin est occupé par un étang, d’imposer la délimitation des deux propriétés par le creusement d’un fossé. Cette possibilité est motivée par un double objectif : d’une part, l’aspect matériel de délimitation des propriétés et d’autre part, la limitation du risque d’inondation Le propriétaire de l’étang est alors contraint de creuser un fossé en contigüité des deux propriétés. Les terres excavées deviennent sa propriété à titre de

compensation du travail fourni295.

291 Déclaration des Droit de l’Homme et du Citoyen, 1789, art. 17.

292 Cf. Tocqueville, cité par Parance et Saint-Victor, Repenser les biens communs, p.10.

293 Sur les origines romaines de cette notion, voir CHOUQUER G., Etude juridique et historique du dominium et de la propriété foncière dans le monde romain, l’Observatoire des formes du foncier dans le monde, 2014.

294 MANCERON V., préc., p.100.

295 TRUCHELUT A, 1904, préc., p. 289, adapté en droit contemporain dans le « Document de référence », art. 3-2.

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Il est indéniable que, depuis le XIIème siècle, les propriétaires d’étangs, ou en tout cas les

titulaires du droit d’évolage, sont de grands propriétaires terriens296. Cet attachement à la

propriété privée s’est trouvé exacerbé à la suite de la chute de l’Ancien Régime. La propriété est alors devenue le moyen d’exercer sa pleine liberté individuelle et de s’affranchir des liens imposés par la féodalité. Plus encore, elle en est la condition. En effet, la propriété telle qu’elle est conçue par les Révolutionnaires suppose d’accorder au propriétaire des droits que l’on peut qualifier de souverains sur la chose qui lui appartient. En cela, cette nouvelle conception de la liberté et de la propriété s’oppose au système féodal. Dorénavant, le propriétaire est libre alors que celui qui ne possède rien est asservi. La propriété est d’ailleurs inscrite au nombre des

« droits naturels et imprescriptibles de l’Homme » à la suite de la liberté297, faisant ainsi du

droit de propriété une liberté fondamentale298. Plus encore, selon les constituants de 1789, la

propriété constitue un droit « inviolable et sacré » conférant à la liberté du propriétaire une dimension symbolique presque sans limite. Presque seulement puisque des limites peuvent être

imposées au droit de propriété par le législateur299 et par la « nécessité publique »300. Le droit

de se clore et la possibilité d’exploiter son fonds propre indépendamment des autres, sont autant de prérogatives attribuées aux propriétaires et qui fondent les particularités sociales de la Dombes. Ce droit constitue une concrétisation de la propriété définie par le Code civil comme le « droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue qui soit », ce qui suppose

ainsi de disposer du « droit d’exclure autrui de la jouissance du bien »301. Le droit de se clore

constitue une prérogative offerte au propriétaire d’un fonds par l’article 647 du Code civil, et

duquel découle l’action en bornage302. Ces dispositions sont retranscrites et adaptées au

contexte local dans le droit coutumier écrit de la Dombes303. On retrouve cette dimension dans

l’ouvrage de Truchelut publié en 1904. Reprenant l’article 646 du code civil, celui-ci inscrit l’action en bornage dans les usages locaux en indiquant que « tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës ». Toutefois, est détaillée, aux pages 166 et suivantes, la procédure de bornage amiable, au renfort de laquelle le concours d’experts « géomètres et arpenteurs » est requis. Ce bornage peut s’appuyer sur le cadastre, « considéré

296 BENOIT C., Les étangs de la Dombes au Moyen-Age, préc.

297 Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, art. 2.

298 MESTRE J.-L., La propriété, liberté fondamentale pour les constituants de 1789, RFDA 2004, p. 1.

299 Code civil, art. 544.

300 Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, art. 17.

301 RIFKIN J., L’âge de l’accès. La nouvelle culture du capitalisme, La Découverte, 2005.

302 Article 646 du même Code.

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comme une présomption » de délimitation des propriétés. L’on s’aperçoit ici d’un certain scepticisme – à juste titre - envers un document, le cadastre, auquel le recours est systématique aujourd’hui sur le terrain. En effet, l’identification des propriétés est une des sources de conflits récurrentes entre propriétaires d’étangs. Pour autant, seul le juge judiciaire se trouve compétent

pour déterminer les limites de propriétés304, indépendamment des énonciations cadastrales qui,

en cas d’erreur, sont susceptibles d’entraîner la responsabilité de l’administration. Dès lors, le moyen le plus équitable et sûr de procéder au bornage des propriétés est celui qui résulte de l’entente amiable entre propriétaires. Reprenant à nouveau la rédaction de l’article 646 du Code civil, Truchelut énonce que « le bornage se fait à frais communs », avec cependant une précision d’importance : « chaque propriétaire ne doit supporter ces frais que suivant l’étendue de sa propriété » ; de plus, si un propriétaire « refuse le bornage, il doit supporter les frais que sa résistance à occasionné, ce qui est équitable »305. On retrouve ainsi le caractère presque sacré de la délimitation de la propriété privée. Cet impératif de se clore n’est pas sans rappeler la vague britannique d’ « enclosure », qui a abouti à un certain nombre de réflexions sur les biens communs. Se pose alors la question de savoir si la propriété privée n’entraîne pas des inconvénients indésirables. En effet, de nombreuses réflexions ont été menées concernant le « crime of enclosure », qui correspond à l’accaparement des ressources se trouvant sur une

propriété privée306. Cet accaparement était la conséquence de la nouvelle liberté de pouvoir

jouir de sa propriété, quitte à voir disparaître certains communs matériels. Au contraire en Dombes, l’articulation des propriétés et des droits inhérents a justement permis de renforcer l’organisation de ce commun qu’est l’eau qui circule de propriété en propriété. Malgré tout, peut néanmoins se poser la question du démembrement des propriétés qui a entraîné une croissance importante du nombre de propriétaires sur le territoire et donc des disfonctionnements dans la gestion de l’eau pour l’approvisionnement de tous.

Initialement, le droit coutumier contient un mécanisme particulier, le « jet de terre », qui est inhérent à l’ensemble du droit coutumier tel qu’il s’est constitué au fil de l’évolution des pratiques. Pour autant, il vient d’être démontré que Truchelut, dans son analyse, ne s’est pas contenté de retranscrire ces droits anciens. Ce qui fait la particularité de son ouvrage est qu’il y intègre, en les citant et en les adaptant, des dispositions du Code civil. Il n’écarte cependant pas l’un des mécanismes au profit de l’autre mais les fait coexister. Plus encore, les deux

304 Ce principe est par exemple rappelé par CE, 30 déc., 2013, n° 358544, JCP N 2014, act. 223, note Erstein.

305 TRUCHELUT A., 1904, préc., p. 171.

306DARDOT P. et LAVAL Ch., Commun, Essai sur la révolution au XXIè siècle, Ed. La Découverte, 2015, p. 21 ; voir également FAIRLY S., A short history of enclosure in Britain, The Land [en ligne], 2009, n° 7.

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mécanismes sont envisageables parallèlement et la mise œuvre du « jet de terre » nécessite en effet que la limite séparative de propriété soit connue.

Les principes inhérents à la propriété privée sont d’une grande importance en Dombes et d’ailleurs consacrés depuis les lois d’après Révolution, la loi du 21 juillet 1856 sur la licitation

des étangs et la loi Bérard du 25 novembre 1901307 sur la remise en eau des étangs. Cette

dimension de la patrimonialité de la Dombes peut sembler entrer en conflit avec une autre

dimension, certes d’un intérêt théorique plus récent, qu’est celle de la propriété collective308.

Plus encore, et malgré les réalités perçues par le juriste, l’idée de patrimoine commun comme celle de propriété collective se heurtent au sentiment d’appropriation de l’eau, malgré la conscience d’un pouvoir limité sur la chose que l’on détient.

2. Le propriétaire maître de l’eau comme de sa chose

La définition du droit de propriété par l’article 544 du Code civil définit « jouir et de

disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements». Le caractère absolu qualifie la propriété privée en ce qu’elle

ne comporte de prime abord ni aucune réserve, ni aucune restriction309. Les caractéristiques de

la propriété ainsi inscrites dans le droit permettent de concrétiser la pensée de Descartes selon

laquelle la modernité suppose une appropriation totale et absolue de la nature310. Selon le

philosophe, les sciences et techniques permettent de rendre les hommes « comme maîtres et possesseurs de la Nature »311. En ce sens, les droits afférents à la propriété privée sont la consécration juridique de la maitrise par l’homme de l’eau, élément naturel et indomptable par essence. Bien que cette conception absolutiste et exclusive de la propriété fasse régulièrement

l’objet de critiques ou de remises en cause312, elle imprègne la façon dont le droit français

appréhende encore aujourd’hui. Le droit d’ « abusus » traduit un droit souverain du propriétaire

sur sa chose, attestant de sa maîtrise totale de la ressource appropriée313. Ce « droit de

307 V. supra.

308 V. supra, « patrimoine commun ».

309 ZENATI F., Pour une rénovation de la théorie de la propriété, RTD Civ. 1993, p. 305.

310 LE ROY E., La terre de l’autre, LGDJ, 2011, p. 258.

311 DESCARTES R., Le discours de la méthode, 1637.

312 CHAZAL J.-P., La propriété : dogme ou instrument politique ? Ou comment la doctrine s’interdit de penser le réel, RTD Civ. 2014, p. 763.

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détruire »314, découle directement de l’application de l’article 544 du Code civil en ce sens que

la disposition absolue de la chose peut entraîner sa disposition, ce qui rejoint la pensée de Michel Serres pour qui la propriété privée, individuelle et exclusive « se termine en destruction »315.

Au regard des considérations environnementales, ou d’un point de vue plus pragmatique, sur l’usage collectif d’une ressource, il est possible de s’interroger sur la possible contradiction de ce droit de détruire introduit par la loi et l’article 544 du Code civil avec des droits fondamentaux inclus dans le bloc de constitutionnalité. De ce point de vue, les dispositions précitées pourraient être considérées comme contraires au « droit à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé »316. Toutefois, le juge constitutionnel a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la constitutionnalité de l’article 544 et d’énoncer qu’il « ne méconnait aucun droit ou liberté que la Constitution garantie »317. La maîtrise de l’eau et de l’étang est autant technique que juridique ou sociale. Le but, pour un exploitant d’étang, est de

rester « maître de l’étang », c’est-à-dire le plus indépendant possible318. Il n’est maître que parce

que les autres exploitants sont soumis à l’obligation de lui transmettre l’eau, et tant qu’il n’y a pas eu exercice du droit des autres d’obtenir l’eau. La création de ce droit procède des autres et sa maîtrise est contrainte. Pour autant, et on l’a vu précédemment, cette maîtrise de l’eau par l’exploitant ou le propriétaire d’un étang s’accompagne d’une obligation à laquelle chacun consent de respecter le droit d’usage d’autrui. Dans cette circonstance particulière, la chose, ou le bien que constitue l’eau des étangs en Dombes est appréhendée à travers un double prisme : celui de la maîtrise technique propre à chaque exploitant et celui de la place qu’elle occupe au sein d’un milieu particulier : la chaîne d’étang, le bassin versant. De ce fait, et pour reprendre Sarah Vanuxem, l’exploitation juridique et technique de l’eau en Dombes est l’expression d’une

« approche mésologique » de la ressource, c'est-à-dire de la chose comme milieu319.

B. L’appropriation spécifique des eaux en Dombes

314 REMOND-GOUILLOUD M., Du droit de détruire. Essai sur le droit de l’environnement, P.U.F., 1989.

315 SERRES M., Le contrat naturel, Ed. François Bourrin, 1990.

316 Charte de l’environnement, art. 1er.

317 Cons. Const., 30 septembre 2011, décision n° 2011-169-QPC, AJDI 2011, p. 885.

318 MANCERON V., Être maître de l'étang. Histoire d'une appropriation de l'eau au xix siècle en Dombes, Études rurales 3/2005 (n° 175-176), p. 149-166.

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L’identification de la nature patrimoniale de l’eau en Dombes n’est pas chose aisée. Cette analyse est soumise à la dichotomie juridique qui existe entre eaux libres et eaux closes (1) mais également à la dualité de propriété existant traditionnellement sur ce territoire (2). Cette distinction entre l’assec et l’évolage n’ayant plus court aujourd’hui, il est proposé de dépasser cette distinction dans un objectif de préservation de la ressource.

1. La dualité de propriété en Dombes, une volonté locale ou une réalité juridique ?

Le droit coutumier de la Dombes n’est pas à une originalité près, comme en témoigne la double propriété dont fait l’objet l’étang qui est le fruit d’une construction tant historique que juridique (a). Cette conception originale est pour autant largement remise en cause par l’application du droit civil général, le dédoublement de propriété étant assimilé par les juridictions à une indivision (b).

a. Origines de la distinction de proprie te s

C’est généralement au titre de la distinction de propriété que le droit coutumier de Dombes

est cité dans les ouvrages, les manuels ou les articles de doctrine320, et ce, sans véritablement

se soucier de savoir si cette distinction entre le propriétaire de l’assec et de l’évolage a encore cours aujourd’hui et donc s’il s’agit là d’une coutume encore applicable. Bien que, d’un point

de vue pratique, l’on retrouve aujourd’hui un nombre infime de « pies d’assec »321, l’analyse

de la propriété duale de l’étang en Dombes permet de penser un statut juridique original pouvant être attribué à l’eau sur ce territoire. Ce statut permet de consacrer juridiquement l’objectif de la préservation de sa qualité ainsi que son usage durable et équilibré.

La distinction de propriété entre assec et évolage tire son origine du droit d’inondation du propriétaire de l’étang et de la nécessité de dédommager le propriétaire foncier ainsi lésé. Autorisé à élever une chaussée sur son fonds par le seigneur, le propriétaire avait alors la

capacité de retenir les eaux de ruissellement qui s’y accumulaient322. De manière surprenante,

320 Pour s’en rendre compte, il suffit de consulter l’ouvrage de Jean-Louis Gazzaniga et Jean-Paul Ourliac (préc.), le fascicule « Eaux – régime juridique – propriété et usage » au Jurisclasseur « Rural » (2 février 2016, n° 167 à