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CHAPITRE II : L’apprentissage en danse : mises en œuvre

2. L’apprentissage en danse : Les transformations visées et le sens du progrès

2.3. Relation Corps/ Espace

Dans les tâches de reproduction de forme, l’utilisation de l’espace doit être scrupuleusement respectée, à la fois en ce qui concerne l’espace proche mais aussi en ce qui

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concerne les espaces de déplacement et scénique. Le niveau très débutant s’illustre souvent par des déformations du mouvement modèle, des directions et des niveaux. En opposition, les niveaux et experts se traduisent par une conformité de la reproduction (changement de niveau, de direction par exemple).

Lors des tâches d’improvisation-composition, la relation corps/espace utilise l’espace proche, l’espace de déplacement et l’espace scénique.

Le sens du progrès, en ce qui concerne l’espace proche part d’une danse qui privilégie l’espace proche avant, les mouvements de faible amplitude et sans prise en compte du niveau bas, à une danse qui combine de manière variée les directions, les niveaux, les dimensions et les tracés dans l’espace (Pérez et Thomas, 1994). Nous proposons de qualifier la mobilisation de l’espace proche de « pauvre » chez les débutants et allant jusqu’à « habité » chez les experts.

L’utilisation de l’espace de déplacement se caractérise, au départ, par une danse où l’espace est organisé en fonction des relations, pour atteindre une danse où l’espace est organisé - du point de vue des directions, des niveaux, des tracés et des dimensions - en fonction du projet des danseurs (Pérez et Thomas, 1994).

L’usage de l’espace scénique évolue d’une danse ou cet espace est « oublié » et ne prend pas en compte les spectateurs à une danse ou l’espace est « habité » en fonction du projet de communication des danseurs (Pérez et Thomas, 1994 ; Delga, 1995).

2.4. Relation Corps/ Temps

Dans les tâches de reproduction de forme, il s’agit de reproduire les structures temporelles présentées dans le modèle. Le niveau grand débutant correspond souvent à un

« dérèglement » du temps au sens où les structures proposées sont reproduites de manière approximative puisque le sujet manque de sensibilité et de précisions rythmiques. Le niveau avancé ou expert, quant à lui, se caractérise par une grande précision dans les variations de vitesse et de durée ainsi que dans les transitions.

Lors des tâches d’improvisation-composition, Pérez et Thomas (1994) proposent d’appréhender le sens du progrès des danseurs au travers des structurations interne et externe au danseur, qui peuvent être l’une et l’autre métrique ou non métrique.

Selon elles, la structuration interne au danseur se décline d’une part en rapport à la musique et d’autre part en rapport à la musicalité du corps. Le sens du progrès part d’une danse dépendante de la musique où le corps est silencieux, pour atteindre une danse qui

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trouve son indépendance par rapport à l’environnement sonore et sa propre musicalité, le corps est alors producteur de son.

La structuration externe, en rapport au monde sonore de l’environnement (musique ou musicalité des autres danseurs), évolue d’une danse stéréotypée qui reproduit les structures de la musique à une danse qui entretient une relation dialoguée et contrastée avec la musique (Pérez et Thomas, 1994).

Pour résumer, nous proposons de retenir que la relation corps/temps est considérée comme « monotone » chez les novices alors qu’elle devient « sensible » chez les experts. De même, il est possible de synthétiser la relation au monde sonore en la qualifiant de

« dépendante » ou d’ « encombrante » pour les novices et de « partenaire » pour les experts.

2.5. L’énergie

Pour les tâches de reproduction de forme, nous définissons la mobilisation de l’énergie comme les dynamismes et l’investissement corporels. La mobilisation de l’énergie, pour le niveau débutant, se traduit par une réalisation motrice involontairement nonchalante et/ou crispée et évolue, chez les experts, vers des dynamismes nuancés appropriés aux contraintes de la phrase modèle.

Il y a peu de différence dans les propositions faites en ce qui concerne l’énergie, pour les tâches de reproduction de forme et d’improvisation-composition ; seule la référence au modèle diffère. En effet, lors des tâches d’improvisation-composition le sens du progrès de cette dimension proposé par Pérez et Thomas (1994) part d’une « danse confuse gênée par des tensions musculaires parasites », en passant par une « danse clarifiée par la disponibilité corporelle », à une « danse utilisant des dynamismes variés et contrastés qui créent des ruptures ». Ainsi, nous retiendrons que l’énergie peut être qualifiée de « confuse et monotone » pour les débutants et évolue vers une énergie « variée et organique » pour les experts.

2.6. Relations entre danseurs

Dans les tâches de reproduction de forme proposées en milieu scolaire et universitaire, les relations entre danseurs sont rarement prises en compte. En revanche, elles sont largement détaillées dans les tâches d’improvisation-composition. En effet, Pérez et Thomas (1994) développent le sens du progrès de cette dimension à partir des quatre organisations : en fonction du corps, de l’espace, du temps et des rôles.

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Pour les relations entre danseurs organisées en fonction du corps de l’autre perçu comme un matériau, les comportements des débutants se traduisent par une danse utilisant les contacts main-main et évolue, pour les niveaux avancés, vers une danse utilisant des contacts variés et originaux (Pérez et Thomas, 1994).

Dans les relations organisées en fonction de l’espace, le niveau novice s’illustre par une danse utilisant des regroupements dans lesquels les prises d’informations visuelles sont privilégiées, et progresse vers une danse mobilisant des « espaces variés, intimes ou lointains, pertinents par rapport au projet » des danseurs (Pérez et Thomas, 1994).

Les relations organisées en fonction du temps privilégient une danse que nous qualifions de « monotone » ne présentant qu’un seul mode de rapport au temps, pour les débutants, puis se modifie pour atteindre une danse « sensible » qui mobilise de façon pertinente les modes de rapports temporels variés.

La dernière catégorie de relations entre danseurs s’organise par rapport aux rôles. Le sens du progrès part, chez les novices, d’une danse où les rôles sont soit indéfinis, soit tous les mêmes, à « une danse où les danseurs assument des changements de rôles acceptés et prévus par le groupe » pour les niveaux de pratique les plus élevés (Pérez et Thomas, 1994).

Face à cette diversité, nous proposons de synthétiser les relations entre danseurs à partir des notions de contact et de rôle. Le niveau débutant se caractérise alors par des relations « monotones et égocentrées » et évolue jusqu’au niveau expert pour atteindre un mode de relations « variées et assumées ».

De plus, puisque nous avons précisé que l’écoute entre danseurs est un déterminant de la qualité des relations, il nous paraît intéressant de considérer également le sens du progrès envisagé sous cet angle. L’écoute et la disponibilité entre danseurs, du point de vue des novices, sont « inexistantes » puisque le danseur se centre uniquement sur ces actions, et progresse vers une écoute et une disponibilité « riches et vivantes » pour les niveaux experts.