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Reconstruction des sauts : Jump Corrector

4.2 Détection des sauts de ligne de base

4.2.3 Reconstruction des sauts : Jump Corrector

Jump Corrector est un module que j’ai développé pour l’analyse des TOIs dans l’expérience Planck afin de pouvoir détecter et corriger les sauts de ligne de base. Ce module opère en appliquant la méthode décrite précédemment. Jump Corrector, après détection d’un saut sur l’estimation du bruit, effectue la correction du saut si ce dernier est significatif. Cette correction est calculée sur l’estimée du bruit et est alors appliquée aux TOIs. Si la déviation standard du RING augmente après la correction, cette correction est annulée : ceci préserve d’une éventuelle détérioration des données. Dans cette section nous nous intéresserons à l’erreur de reconstruction sur les paramètres du saut avec Jump Corrector.

4.2.3.1 Simulations de sauts

Afin de pouvoir quantifier l’efficacité et les limites de Jump Corrector nous avons eu recours à des simulations. Dans un premier temps nous utiliserons des simulations optimistes de bruit gaussien non corrélé, puis nous utiliserons un bruit plus réaliste issu directement des données. Simulations optimistes Dans ce premier test simplifié nous avons ajouté un saut d’amplitude et de position connues à une réalisation de bruit blanc. Cette simulation du bruit est ensuite traitée avec Jump Corrector. Les positions et amplitudes des sauts détectés sont sauvegardées. Les variables JSN R et PSN R sont également produites en sortie. En effet ces deux paramètres seront utilisés pour placer des coupures sur la détection. Le paramètre Dχ2 est imposé à une valeur supérieur à 0, indiquant qu’un saut rend mieux compte du signal qu’une dérive produite par le bruit basse fréquences.

Nous avons produit 200 réalisations de RINGs de ces simulations bruit plus saut. La figure 4.8 présente les résultats obtenus avec une amplitude Aj = 0.4σ et une position située à 20% de la taille du RING.

On observe sur la figure 4.8 une excellente précision de reconstruction de l’amplitude et la position d’un saut, on observe aussi l’absence de biais dans cette reconstruction. L’erreur relative sur l’amplitude est de ' 2% et la déviation standard de l’erreur sur la position est de 14 échantillons.

Simulations réalistes Les résultats sur les simulations précédentes sont encourageants, mais la structure du bruit présent dans les données est bien plus complexe. En effet ce dernier est corrélé et possède un excès de puissance à basses fréquences. De même, dans le cas où le gradient du signal est particulièrement fort, l’estimation du bruit peut contenir d’importants résidus de signal, tout particulièrement à 545 et 857 GHz.

Figure 4.8 – Reconstruction des paramètres d’un saut dans le cas d’un bruit blanc gaussien : erreur sur la position reconstruite en fonction de l’erreur relative sur l’amplitude reconstruite. Les points noirs correspondent aux résultats obtenus pour chacune des TOIs simulées. Les lignes rouges horizontale et verticale donnent les caractéristiques du saut simulé.

dans les données. Des RINGs ne présentant pas de saut sont choisis de façon aléatoire. Un saut de paramètres connus est ajouté à ce bruit. Le signal nouvellement créé est alors traité avec Jump Corrector. Les portions de données trop contaminées par des résidus de signal sont masquées lors du processus de détection. La figure 4.9 présente la valeur absolue de l’erreur sur la position reconstruite en fonction de la valeur absolue de l’erreur sur l’amplitude pour un bolomètre à 143 GHz avec une déviation standard typique de 183 aW. Pour chaque réalisation la position du saut est choisi aléatoirement entre 10% et 90% de la taille total du RING.

La figure 4.9 permet de mettre en évidence des considérations théoriques assez intuitives. En effet la précision sur la reconstruction de la position des sauts dépend de l’amplitude du saut. Ainsi pour un saut d’une amplitude de 1 σ nous avons une erreur sur la position de ' 9.4 échan-tillons, et pour une amplitude de 2 σ cette incertitude tombe à 1.8 échantillons. En revanche la qualité de la reconstruction de l’amplitude du saut est peu affectée par la valeur de l’amplitude du saut. Une amplitude trop faible aura pour seul effet de ne pas produire de détection. Ainsi on trouve respectivement des incertitudes de 5.6 et 6.1 aW pour des sauts à 1 et 2 σ. Parmi les 200 simulations effectuées, tout les sauts ont été reconstruits par Jump Corrector.

La figure 4.10 présente le même exercice effectué sur un bolomètre à 353 GHz. On s’attend à observer une dépendance de l’efficacité de reconstruction en fonction de la fréquence, car l’esti-mation du bruit dans les données en temps est soumis à des résidus qui dépendent du gradient du signal et l’homogénéité de la couverture. Ainsi avec l’augmentation de l’émission de poussière galactique à hautes fréquences, on observe un gradient plus fort au regard du niveau de bruit. De même la résolution angulaire est meilleure, cela aura pour effet de détériorer l’homogénéité de la couverture du ciel. À 353 GHz la déviation standard typique du bruit observé dans un bolomètre est de 160 aW. De nouveaux tous les sauts simulés sont reconstruits. De plus les conclusions tirées à 143 GHz s’appliquent également à 353 GHz, la précision sur la reconstruction de l’amplitude

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Figure 4.9 – Reconstruction des paramètres d’un saut dans le cas d’un bruit réaliste, pour des amplitudes de saut de 1 (figure du haut) et 2 (figure du bas) σ à 143 GHz. Sur chacune des figures on observe l’erreur sur la position en fonction de l’erreur sur l’amplitude. La limite en pointillés rouges marque le nombre d’échantillons masqués autour de la position reconstruite par Jump Corrector.

du saut est essentiellement indépendante de cette amplitude et la précision sur la reconstruction de la position du saut croît avec l’amplitude du saut. Ici les positions des sauts sont reconstruits

Figure 4.10 – Reconstruction des paramètres d’un saut dans le cas d’un bruit réaliste, pour des amplitudes de saut de 1 (haut) et 2 (bas) σ à 353 GHz. Sur chacune des figures on observe l’erreur sur la position en fonction de l’erreur sur l’amplitude. La limite en pointillés rouges marque le nombre d’échantillons masqués autour de la position reconstruite par Jump Corrector.

avec une très grande précision de 6 échantillons pour des sauts de 1 σ et 1.7 échantillons pour des sauts de 2 σ.

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Figure 4.11 – Reconstruction des paramètres d’un saut dans le cas d’un bruit réaliste, pour des amplitudes de saut de 1 (haut) et 2 (bas) σ à 857 GHz. Sur chacune des figures on observe l’erreur sur la position en fonction de l’erreur sur l’amplitude. La limite en pointillés rouges marque le nombre d’échantillons masqués autour de la position reconstruite par Jump Corrector.

Ensuite nous avons effectué une troisième fois cette même analyse sur l’estimée du bruit à 857 GHz (Fig.4.11) où les résidus de signal dans l’estimation du bruit sont les plus forts et où la déviation standard du bruit est de 210 aW. Nous observons que le nombre de sauts reconstruits

avec une amplitude de 1 σ est plus faible que pour des sauts à 2 σ. Cela met en évidence les limites de l’algorithme de détection dans le cas où l’estimée du bruit contient de forts résidus de signal. Les seuils de détection ont été ajustés de manière à s’assurer que les sauts mal reconstruits ne soient pas détectés. Dans le cas à 2 σ tous les sauts sont reconstruits et la plupart le sont avec une erreur sur la position inférieure à 100 échantillons.

Figure 4.12 – Pourcentage de sauts reconstruits en fonction de l’amplitude du saut à 143 GHz en utilisant des simulations de saut réalistes.

Finalement nous avons quantifié la capacité à reconstruire des sauts dans les canaux entre 100 et 353 GHz en fonction de l’amplitude de ces derniers. La figure 4.12 montre la capacité de reconstruction en fonction de l’amplitude du saut. On constate que l’on est capable de reconstruire la plupart des sauts (99%) ayant une amplitude de 0.5 σ, l’efficacité de reconstruction diminue rapidement en dessous de ce niveau. Ceci implique que la quasi totalité des sauts au dessus de 0.5 σ peuvent être soustraits aux fréquences d’intérêts pour la physique du CMB. Ainsi les sauts résiduels non corrigés contribuent en terme d’amplitude pour moins de 1% de la déviation standard du bruit une fois projetés sur le ciel. Cet effet ne sera donc pas une source majeure d’erreur dans l’analyse scientifique des données HFI.

4.2.3.2 Statistiques

Apres avoir testé, validé et optimisé Jump Corrector sur des simulations réalistes du bruit, nous avons utilisé l’algorithme sur les données afin de soustraire les sauts des TOIs avant la construction des cartes. La figure 4.13 présente le nombre de sauts détectés par bolomètre. On constate plusieurs centaines de sauts pour un total d’environ 22 000 RINGs, avec une moyenne d’environ 260 sauts par bolomètre : 1.2% des RINGs de la mission sont affectés.

Pour la plupart des bolomètres le nombre de sauts semble augmenter avec l’avancement de la mission. Ceci est clairement mis en évidence à la figure 4.14 qui montre le nombre de sauts par jour en fonction du numéro de RING, moyenné sur l’ensemble des bolomètres.

Il est important de noter que le nombre de sauts n’est pas corrélé avec les passages successif par le centre Galactique, ainsi nous constatons que nous ne sommes pas fortement contaminés par de fausses détections induites par des résidus de signal.

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Figure4.13 – Nombre de sauts reconstruits par bolomètre au cours des 4 premières couvertures du ciel.

Figure 4.14 – Nombre de sauts reconstruits en fonction de l’avancement de la mission, les sauts détectés dans tous les bolomètres sont considérés. Le nombre de sauts est convolué par une fenêtre carrée de 101 points pour mettre en évidence le comportement global du nombre de sauts détectés au cours des 4 premières couvertures du ciel.

4.2.3.3 Conclusions

Nous avons détecté une grande quantité de sauts (' 1% des RINGs), lesquels sont une source potentielle de non-gaussianités dans les cartes de Planck. Pour corriger ces sauts j’ai développé un algorithme qui a été intégré à la chaîne de production officielle des données HFI. Ce module est appliqué en fin de chaine dans le traitement des TOIs. Les simulations ont montré que Jump Corrector détecte les sauts d’une amplitude de 1 σ avec une grande précision et ce à toutes les fréquences d’observation. Comme escompté Jump Corrector permet de faire un nettoyage fin des données en temps, ce qui est nécessaire pour de fournir des mesures de haute précision dans le domaine de la cosmologie.