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La reconnaissance ou l’exécution d’un jugement rendu par un tribunal d’un État qui a fait une déclaration en vertu du

Chapitre III – Clauses générales

Article 16 Disposition transitoire

2. La reconnaissance ou l’exécution d’un jugement rendu par un tribunal d’un État qui a fait une déclaration en vertu du

paragraphe premier peut être refusée si le jugement est issu d’une procédure à laquelle est partie l’État qui a fait la déclaration ou l’État requis, l’une de leurs agences gouvernementales ou une personne physique agissant pour l’un d’entre eux, dans les limites prévues par cette déclaration.

343. Cette disposition autorise un État à déclarer qu’il n’appliquera pas la Convention aux jugements issus de procédures auxquelles était partie cet État, une de ses agences gouvernementales ou une personne physique agissant pour celui-ci ou celle-ci même lorsque le jugement relève de la matière civile ou commerciale.

344. Raisonnement. La Convention n’exclut pas les jugements de son champ d’application du seul fait qu’un État était partie à la procédure (art. 2(4)). Bien que la Convention s’applique expressément en matière civile ou commerciale uniquement (art. 1(1)), certaines délégations soutenaient que cette limite pourrait être difficile à appliquer à l’égard d’un État partie à l’instance, en particulier sur la question de savoir si un État partie à l’instance exerçait des prérogatives de puissance souveraine. Une autre crainte était que la protection des immunités à l’article 2(5) puisse se révéler insuffisante pour protéger les intérêts des États. L’article 19 répond à ces préoccupations en autorisant les États à faire une déclaration excluant l’application de la Convention aux jugements rendus à l’issue d’une procédure à laquelle ils étaient parties.

Paragraphe premier – Un État peut déclarer qu’il n’appliquera pas la présente Convention aux jugements issus de procédures auxquelles est partie :

Alinéa (a) – cet État ou une personne physique agissant pour celui-ci ; ou

Alinéa (b) – une agence gouvernementale de cet État ou toute personne physique agissant pour celle-ci.

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L’État qui fait une telle déclaration s’assure que la portée de celle-ci n’est pas plus étendue que nécessaire et que l’exclusion du champ d’application y est définie de façon claire et précise. La déclaration ne peut pas faire de distinction selon que l’État, une agence gouvernementale de cet État ou une personne physique agissant pour l’un ou l’autre est le défendeur ou le demandeur à la procédure devant le tribunal d’origine.

345. Le paragraphe premier précise les parties qui peuvent être couvertes par la déclaration. Conformément au paragraphe 1(a) et (b), ce sont l’État lui-même, une de ses agences gouvernementales, ainsi qu’une personne physique agissant pour l’État ou pour l’agence gouvernementale246 mais non les personnes morales agissant pour l’État, à moins que ce soit des agences gouvernementales247. Dans tous les cas, le paragraphe premier identifie les parties qui ont le pouvoir d’exercer la puissance souveraine, soit directement, soit par délégation, de façon générale ou dans un domaine particulier, ainsi que les personnes physiques agissant pour elles, indépendamment de leur statut professionnel. Ainsi, par exemple, une entité chargée de faire respecter le droit de la concurrence ou le droit de la consommation relèverait du paragraphe premier, qu’elle soit intégrée dans la structure de l’État ou établie sous forme d’entité autonome et indépendante. Les sous-divisions politiques d’un État (y compris les gouvernements régionaux ou locaux) peuvent être également incluses dans une déclaration en vertu de cette disposition.

Essentiellement, une déclaration en vertu de l’article 19 ne peut être faite qu’à l’égard d’une partie qui a la capacité d’exercer la puissance souveraine même si elle peut aussi exercer des activités commerciales. Les termes sont généraux afin de couvrir la diversité des structures étatiques et des définitions procédurales de la personnalité ou de la capacité juridique retenues dans les États. Le paragraphe premier exige également que la déclaration ne soit pas plus étendue que nécessaire et que l’exclusion du champ d’application y soit définie de façon claire et précise. Par conséquent, un État qui fait une déclaration en vertu de l’article 19 doit désigner les agences gouvernementales couvertes par sa déclaration et les circonstances dans lesquelles celles-ci seraient incluses.

346. Garanties. La structure et la teneur de l’article 19 sont en grande partie parallèles à celles de l’article 18. Comme dans l’article 18 en effet, l’État déclarant doit veiller à ce que celle-ci ne soit pas plus étendue que nécessaire (voir, supra, para. 337) et à ce que l’exclusion du champ d’application soit définie de façon claire et précise (voir, supra, para. 338). La déclaration peut viser, par exemple, toute procédure civile ou commerciale ou seulement certaines catégories de procédures. Elle peut être circonscrite à certaines matières, et des critères peuvent être ajoutés pour restreindre sa portée, par exemple, à certaines agences gouvernementales, à un lien particulier entre la matière et l’État requis ou à certains types de mesures (voir, supra, para. 337). En outre, le paragraphe premier précise que la déclaration ne distingue pas entre les jugements selon que l’État, une agence gouvernementale ou une

246 L’expression « agissant pour » est également employée à l’art. 2(4). Elle couvre les hypothèses dans lesquelles une personne physique agit « au nom » de l’État ou d’une agence gouvernementale ; en général, la personne agit en qualité d’« agent » de l’État. En revanche, elle ne couvre pas les hypothèses dans lesquelles la personne physique agit en son nom propre, par ex. lorsqu’elle conclut un contrat avec un tiers en son nom propre et en sa propre qualité, même si le contrat est dans l’intérêt de l’État.

247 Pour des informations sur l’origine de cette partie de l’art. 19(1), voir Procès-verbaux de la Vingt-deuxième session sur la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers (du 18 juin au 2 juillet 2019), Rapport de séance No 6, para. 36 à 43, et Rapport de séance No 15, para. 155 à 162, en particulier le consensus autour de l’idée que cette disposition ne couvre pas les personnes morales, indépendamment de leurs détenteurs, que ce soit des entreprises commerciales détenues par un État ou des entreprises privées, hormis lorsque ce sont des agences gouvernementales.

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personne physique agissant pour l’un ou l’autre est défendeur ou demandeur à l’instance devant le tribunal d’origine. Par ailleurs, elle ne doit pas distinguer entre les jugements selon que l’État, une agence gouvernementale ou une personne physique agissant pour l’un ou l’autre est le créancier ou le débiteur du jugement248. Lorsque l’État déclarant intervient seulement en qualité de tiers à l’instance dans l’État d’origine, le jugement peut circuler entre le demandeur et le défendeur, qui ne sont pas affectés par la déclaration.

347. Absence de rétroactivité. Comme à l’article 18, une déclaration faite après l’entrée en vigueur de la Convention pour l’État qui en est l’auteur prend effet le premier jour du mois suivant l’expiration d’un délai de trois mois après la date de réception de la notification par le dépositaire (voir, infra, art. 30(4)). Cette déclaration ne s’appliquera pas aux jugements rendus à l’issue d’instances déjà introduites par ou contre la partie étatique ou dans lesquelles la partie étatique est déjà intervenue devant le tribunal d’origine à la date de prise d’effet de la déclaration (voir, infra, art. 30(5)).

Paragraphe 2 – La reconnaissance ou l’exécution d’un jugement rendu par un tribunal d’un État qui a fait une déclaration en vertu du paragraphe premier peut être refusée si le jugement est issu d’une procédure à laquelle est partie l’État qui a fait la déclaration ou l’État requis, l’une de leurs agences gouvernementales ou une personne physique agissant pour l’un d’entre eux, dans les limites prévues par cette déclaration.

348. Comme à l’article 18, le paragraphe 2 établit la réciprocité pour les déclarations en vertu de l’article 19(1)249. Lorsqu’une déclaration est faite en vertu de l’article 19(1), un autre État peut refuser de reconnaître ou d’exécuter un jugement rendu par un tribunal de l’État déclarant et qui est issu d’une procédure à laquelle est partie : (i) l’État déclarant, (ii) l’État requis, (iii) une agence gouvernementale de l’État déclarant ou de l’État requis, (iv) une personne physique agissant pour l’État déclarant ou pour l’État requis ou (v) une personne physique agissant pour une agence gouvernementale de l’État déclarant ou de l’État requis250. La portée du refus de reconnaissance ou d’exécution fondé sur la réciprocité doit refléter l’étendue de la déclaration.

349. Exemple 1. L’État A a fait, en vertu de l’article 19(1), une déclaration couvrant tout jugement issu d’une procédure à laquelle il est partie. Un jugement rendu dans l’État B contre l’État A ne sera pas reconnu ni exécuté dans l’État A en vertu de la Convention. Toutefois, il circulera en vertu de la Convention dans d’autres États (en supposant, naturellement, que les conditions de sa circulation sont remplies, en particulier les critères énoncés à l’art. 5 et sous réserve de l’art. 2(5), qui confirme que la Convention n’affecte en rien les immunités de l’État A).

248 Cette garantie vise à prévenir les déclarations stratégiques ou opportunistes. Cependant, dans la pratique, elle ne peut empêcher l’État déclarant de reconnaître ou d’exécuter les jugements favorables en vertu de son propre droit national. Cela se produirait hors du champ d’application de la Convention, c.-à-d. pas en vertu de l’art. 15.

249 Contrairement à l’art. 18(2), le principe de réciprocité de l’art. 19(2) n’exclut pas l’application de la Convention.

250 Le libellé du para. 2 confirme que la reconnaissance ou l’exécution peut être logique lorsque l’État déclarant est le débiteur du jugement.

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350. Exemple 2 (réciprocité). Si un jugement est rendu dans l’État A (l’État déclarant) contre l’État B (l’État requis), ce dernier peut invoquer l’article 19(2) pour refuser de le reconnaître ou de l’exécuter. Toutefois, l’État B ne peut pas invoquer la clause de réciprocité si la reconnaissance ou l’exécution de ce jugement est demandée dans un autre État, par exemple, l’État C. De même, si le jugement a été rendu dans l’État C (État d’origine) et si l’État A (l’État déclarant) est le créancier du jugement, l’État B (l’État requis) ne peut pas refuser de reconnaître ou d’exécuter ce jugement en vertu de l’article 19(2).

351. Examen des déclarations. L’article 21 prévoit que le fonctionnement des déclarations en vertu de l’article 19 peut être examiné périodiquement (voir, infra, para. 354).

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