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Reconnaissance de la décision de faillite étrangère

33. Condition. de l'article 166 WIP. Une décision étrangère de faillite peut être reconnue en Suisse:

S'il s'agit bien d'une décision de faillite, et non d'une autre déci-sion de règlement d'une situation d'insolvabilité. Les articles 166 ss LDIP s'appliquent cependant par analogie au concordat ou procédu-res analogues homologuées par une juridiction étrangère (art. 175 LOIP).

Si l'administration de la faillite étrangère ou un créancier en fait la réquisition.

Si le Tribunal étranger était compétent.

Si la décision étrangère est exécutoire.

S'il n'

y

a pas de violation manifeste de l'ordre public suisse.

Si la réciprocité est accordée dans l'Etat ou la décision de faillite a été rendue.

34. Définition d'une procédure de faillite. Le juge saisi d'une demande de reconnaissance d'une décision étrangère doit en premier lieu déterminer s'il s'agit d'une décision de faillite. On peut à cet égard adopter une dé-finition helvétique de la notion de faillité4. Il est cependant plus cons-tructif à notre sens de s'en remettre à une définition uniforme, au moins sur le plan européen, de la notion de faillite. Le Règlement définit les

«procédures de liquidation» comme des procédures collectives fon-dées sur l'insolvabilité du débiteur qui entraînent le dessaisissement par-tiel ou total de ce débiteur, la désignation d'un syndic65, et la liquidation

62 Article 2 leI. c el 17 al. 2 de la Loi Iy~.

63 Markus, p. 25.

()-\ Voir notamment les définitions données par Hanisch, Die VollSlfcckung von ausHindischen Konkurserkenntnissen in der Schweiz. PJA 99, p. 18, et Bel1i, (Basler) KOJ1Ullentar zurn schweizerischcn Privatrecht, Intemationales Plivatrecht. Art. 166, N 8.

65 Article 1 et 2 a RPI.

des biens du débiteu,;;6 Une liste des procédures étrangères correspon-dant à la notion de faillite est reproduite à l'annexe B du Règlement. Il nous paraît extrêmement opportun que les juges suisses s'inspirent de ceUe liste dans leur appréhension des décisions étrangères, Selon la dé-finition du Règlement, un concordat par abandon d'actif est assimilé à la faillite,

35, Requête de "administration ou d'un créancier, L'administration de la faillite est l'instance qui, selon le droit étranger, dispose du pouvoir d'administrer, de réaliser et de répartir les biens du failli, Elle peut agir jusqu'à la clôture de la faillite, date de la fin de son mandat61,Un créan-cier J'eut agir isolément, sans autorisation de l'administration de la fail-Iite6 , dans la mesure où sa qualité de créancier est au moins vraisem-blable", Le débiteur failli ne peut requérir lui-même la reconnaissance de la décision de faillite70, et n'est pas partie à la procédure de recon-naissance71, La condition formelle d'une requête de reconnaissance ne correspond pas à la solution du Règlement, où une procédure de liquida-tion est reconnue dans les autres Etats membres dès qu'elle produit ses effets dans l'Etat d'ouverture", La solution européenne permet notam-ment la suspension immédiate des poursuites en cours, et évite donc des procédures parallèles dont le sort dépend de questions chronologiques assez fortuites", La Loi type de la CUNDCI prévoit comme le droit suisse une requête de reconnaissance, et n'accorde la qualité pour agir qu'à l'administration de la faillite étrangère7'.

36, Compétence du juge de lafailli/e, L'article 166 LDiP pose une règle de compétence internationale indirecte en exigeant que la décision de fail-lite ait été rendue par l'autorité du domicile du débiteur. Le principe de l'incorporation posé par le Tribunal fédéral75 implique qu'il s'agisse de l'autorité du lieu du siège statutaire76, Ce formalisme a l'avantage de la

~9 Beni. Art. 166, N 22: Slaehelin, Die Annerkennung auslândischer Konkurse und

Nachlassver-!rage in der Schweiz, Bâle 1989. p. 28. de la succursale en Suisse; Voir à ce sujet Jeannerel, Cross-border insolvency. La situation de la succursale de droit suisse, in Insolvence, désendettement et redressement, études en "honneur de Louis Dallèves. Collection genevoise 2000, p. 171. no!n!runen! p. 177,

I~ Anicle 15 de la Loi Type.

J~ ATFI17Il497.

16 Lembo/Jeanneret, p. 256.

i7 Des arrêts cantonaux se sont démarqués du principe de l'incorporation: ZR 94-59; Brunner, GHiubigerschulz im imemalionalen Konkursrechl. PJA 95. p. 3ss, p. 14 S5.

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quoi être confortés par le droit européen: l'article 3 RPI prévoit en effet que les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité principale78, La Loi type de la CNUDCI va dans le même sens, en prévoyant en son article 17 ch, 2 let. a quc la procédure étrangère est reconnue si elle a lieu dans l'Etat où le débiteur a le centre de ses intérêts principaux 79, Il paraît difficilement concevable que la Suisse se drape dans un formalisme héroïque et, contre vents et marées, résiste longtemps au triomphe de la théorie du siège effectif.

37, Caractère exécutoire de la décisioll,

Cette condition n'implique pas le caractère définitif de la décision, qui peut être reconnue en Suisse même si elle fait l'objet d'un recours non suspensi!"o, Se pose cependant le problème de la prise en compte en Suisse d'un recours non suspensif il l'étranger qui aboutit. La procédure de mini-faillite suisse ne peut conti-nuer alors que la faillite étrangère est révoquée, Il faut donc admettrc que le débiteur peut demander la révocation de la mini-faillite suisse (article 195 LDIP), et produire à cet effet le jugement étranger de der-nière instance. Le débiteur doit obtenir l'exequatur de ce jugement avanl que la procédure suisse ne soit révoquée. Cet exequatur n'est pas soumis à la convention de Lugano8l, ni aux articles 166 ss LDIP", En l'absence d'une autre convention internationale applicable, l'exequatur de la déci-sion finale étrangère doit donc à notre avis être prononcé selon les rè-gles de la loi sur le droit international privé (article 25 ss LDIP),

38, Absence de violatioll mallifeste de l'ordre public,

Cette condition

dé-coule du renvoi de l'article 166 al. 1 let. b LDIP à l'article 27 LOIP, Pour une fois, cette condition du droit suisse se retrouve aussi bien dans le Règlement" que dans la Loi type de la CUNDCI84, Il s'agit d'un garde-fou dont il faut eviter d'abuser. L'adverbe «mamfestement», employé dans les trois textes, en témoigne, Le Tribunal fédéral l'a confinné85 en considérant que la faillite d'une société non inscrite au registre du commerce n'était pas contraire à l'ordre public, Comme le remarque le Guide de la CNUDCI pour l'incorporation dans le droit in-terne de la Loi typeB6: «un nombre croissant de s)'stème juridique re-connaissent la dichotomie elltre la notion d'ordre public teile qu'appliquée aux affaires ùltérieures, et la notion d'ordre public utili-sée pOlir les questions de coopération internationale et la

reconnais-73 L'Etal ou se trouve une succursale n'est compétent que pom ouvrir une procédure secondaire:

an. 3 al. 2 RPI.

N cf. Markus. p. 27.

8ll ATF 126 III 101; Lembo/Jeannerel. p. 258.

SI Article 1 al. 2 ch. 2 CLug.

S~ Car il ne s'agit pas d'une décision de faillite.

S3 Article 26 RPL S~ Article 6 de la Loi Type.

85 ATF126111 101.

86 Disponible sur le site indiqué supra, note 48.

sance des effets des lois étrangères ». C'est le cas en Suisse" et la ré-serve d'ordre public doit être limitée à des cas extrêmes, par exemple lorsque la faillite étrangère crée des discriminations injustifiables entre les créanciers, basés sur le domicile ou la nationalité, ou n'est qu'un prétexte à une confiscation de biens en Suisse"".

39. RéciprocitéS'. Cette condition est à la fois le pathétique témoignage de l'isolement de la Suisse en Europe, et le point faible des articles 166 ss LDIP. Ce point faible met en danger tout le système de reconnaissance des faillites étrangères, tant les juges cantonaux confrontés à ceUe condition sont tentés de la contourner par des argumentations compré-hensibles dans les cas d'espèce, mais insoutenables dans leur principe.

Ainsi, l'Obergericht zurichois90, confronté au fait que l'Autriche ne ré-pond pas à cette condition de réciprocité, a-t-il contourné la difticuIté en prétendant que la banque suisse où se trouvaient les fonds du failli surpre-nant dans ces conditions que la doctrine et le Tribunal fédéral tentent de limiter les effets de ceue condition, en indiquant qu'il ne s'agit pas d'exiger que le contenu de la loi étrangère soit identique à celui du droit suisse9lLa loi type de la CNUDCI ne pose aucune condition de réci-procité. Les Etas européens s'en affranchissent du fait même de l'application immédiate du Règlement.

40. Juge compétent. Le juge suisse du lieu de situation des biens en Suisse est compétent. L'article 167 al. 3 LDIP, selon lequel les créances sont localisées au domicile du tiers débiteur, confirme la jurisprudence fédé-rale en la matière" et est euro-compatible9'. La jurisprudence zurichoise relative à la localisation d'une créance contre une succursale d'une ban-que suisse94, pourrait poser dans ce contexte les mêmes problèmes qu'en matière de séquestre. Lorsque des biens se trouvent dans plusieurs cantons. le premier juge saisi est compétent95 pour tout le territoire

Hanisch Inlemalionale Insolvenzrechle tles Auslandes und das Gcgenrechl nach Art. 166 IPRG, RSDIE 1992. p. 355. 6.

% Article 170 LOIP: LembolJeôlnneret. p. 262.

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41. Recours.

Les lois cantonales d'application de la LP déterminent quels sont les recours cantonaux possibles. Seul un recours de droit public au Tribunal fédéral est possible97, une plainte98 ou un recours en réforme99 étant exclus.

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