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Chapitre I : Contexte

3. Recherche en sûreté nucléaire/accident grave

3.1. Recherche expérimentale

L’accident de TMI-2 a été un élément déclencheur de la recherche dans le domaine des accidents graves, renforcé par la suite par l’accident de Tchernobyl, et plus récemment par celui de Fukushima. Plusieurs programmes de recherche internationaux ont ainsi été initiés dans le but de comprendre le comportement des matériaux de structure et des PFs en conditions d’accident grave, à partir de différents essais en pile (essais intégraux) et hors pile (essais analytiques). Les objectifs principaux de ces programmes étaient de comprendre le processus de dégradation du cœur du réacteur résultant de l’interaction entre les matériaux de structure et le combustible en fusion, le phénomène de relocalisation du combustible, la production d’hydrogène suite à l’oxydation de matériaux de structure, l’influence de la dégradation du cœur sur le relâchement, le transport et le dépôt de PFs et d’aérosols lors de la chronologie accidentelle, et finalement la fragmentation du cœur dégradé suite au refroidissement survenu pendant l’étape de renoyage du cœur.

Concernant les essais intégraux, le programme Phébus-PF est parmi les programmes de relâchement de produits de fission réalisés le plus représentatif des conditions d’un accident de fusion du cœur, notamment en ce qui concerne les relâchements à partir du combustible, les transferts dans le circuit primaire et le comportement dans l’enceinte de confinement des produits de fission ([11]). Dans ce programme, quatre essais ont été réalisés (Tableau 2) avec des assemblages de 20 crayons combustibles et un crayon absorbant de neutrons. Les crayons combustibles présentaient selon les essais des taux de combustion entre 0 (essai FPT0) et 32 GWj/tU (essai FPT2). Avant la séquence expérimentale, l’assemblage des crayons combustibles était ré-irradié dans des conditions normales de fonctionnement d’un REP afin de disposer d’un inventaire représentatif des PFs à vie courte. Durant la séquence expérimentale proprement dite, l’assemblage des crayons combustibles a été porté à des températures induisant une dégradation très importante des gaines et du combustible, suivi du relâchement d’une fraction importante de matière et la formation d’un bain fondu.

Tableau 2. Objectifs et conditions expérimentales des essais Phébus-PF ([5]) Essai

(date) Objectif principal

Conditions expérimentales

Grappe combustible Circuit primaire

FPT0 (12/1993)

Formation et développement d’un bain de corium et relâchement des produits de fission dans un mélange riche

en vapeur d’eau Combustible frais 1 crayon Ag-In-Cd « ré-irradiation » : 9j Pas de condensation de la vapeur d’eau dans le générateur de vapeur FPT1 (07/1996)

Comme pour FPT0 avec du combustible irradié Combustible irradié à 23 GWj/tU 1 crayon Ag-In-Cd « re-irradiation » : 9j Comme pour FPT0 FPT2 (10/2000)

Comme pour FPT1 avec relâchement des produits de fission dans un mélange riche

en hydrogène

Combustible irradié à 32 GWj/tU « re-irradiation » : 9j

Comme pour FPT1 avec injection d’acide

borique FPT3 (11/2004) Comme pour FPT2 Comme pour FPT1 avec un crayon B4C Combustible irradié à 24 GWj/tU « re-irradiation » : 9j Comme FPT0

Les différents phénomènes physiques étudiés dans ces essais interviennent à différents niveaux :

1) Dans le cœur du réacteur simulé par 20 crayons de combustible, analogues à ceux d’un REP, et un crayon absorbant d’un mètre de long ;

2) Dans le circuit primaire dont le générateur de vapeur est simulé par un tube en U inversé ;

3) Dans l’enceinte de confinement simulée par un réservoir de 10 m3 comprenant un volume rempli d’eau en guise de puisard (100 L), et des surfaces peintes.

Ces trois zones sont reproduites à l’échelle 1/5000 par rapport à un réacteur nucléaire à eau pressurisée de type 900 MWe (Figure 6).

Au cours de ces différents essais du programme Phébus-PF, deux zones principales de rétention des aérosols et des produits de fission ont été identifiées dans la partie simulant le circuit primaire. Ces zones, où les températures de la paroi et du fluide chutent brutalement,

sont la portion verticale de la branche chaude située immédiatement au-dessus de la grappe de combustible (refroidissement d’environ 1750 à 700°C), et la branche ascendante du générateur de vapeur (refroidissement de 700 à 150°C).

Figure 6. Schéma de principe de l'installation Phébus-PF ([5])

Six programmes analytiques, avec des expériences effectuées sur des tronçons de combustibles irradiés, ont été conduits depuis la fin des années 1970 : les programmes allemand SACHA (1978 ; [12]), américain HI/VI (1981-1993 ; [13]), canadien CRL (1991 ; [14]), japonais VEGA (2005 ; [15]), français HEVA/VERCORS (1983-2002 ; [16]) et ISTP-VERDON (2011- ; [17]).

Le plus récent des programmes, ISTP-VERDON, s’est focalisé sur le relâchement et le transport des PFs à partir du combustible UO2 et MOX à haut taux de combustion, dans des

conditions d’atmosphère variables (vapeur d’eau, hydrogène, mixte vapeur d’eau/hydrogène, mixte vapeur d’eau/air). Le montage expérimental comprend un système de tubes soumis à un gradient thermique (décroissance linéaire de 700 à 150°C), ce qui a permis de mettre en évidence plusieurs pics de dépôt (particulièrement pour les PFs volatils), suggérant (1) la présence de plusieurs espèces, et (2) l’implication de plusieurs mécanismes de formation de dépôt (Figure 7). L’analyse du profil de dépôt de 131I (Figure 8) a permis de constater également une re-vaporisation de cet élément. En effet, dans la première phase de l’essai (sous vapeur d’eau), l’iode s’est déposé dans les tubes 1 et 2. Ensuite le tube 1 a été fermé et de l’air a été ajouté dans le gaz porteur. Il a été observé la disparition du premier pic d’iode dans le tube 2 (entre 400-450 mm dans le tube 1) et l’apparition d’un pic intense à 600 mm. Ces observations suggèrent une re-vaporisation d’iode et un nouveau dépôt à plus basse température.

Figure 7. Profil de dépôt du 137Cs le long des tubes à gradient thermique ([18])

Figure 8. Profil de dépôt d’131I le long des tubes à gradient thermique ([18])