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Chapitre II : Dépôt et re-vaporisation des PFs : état-de-l’art

6. Objectifs du travail actuel

Un accident nucléaire grave sur un REP peut avoir des conséquences importantes sur l’environnement et sur l’homme si les produits de fission, libérés lors de la fusion du cœur, ne sont plus retenus dans l’enceinte de confinement. Pour cette raison il est important de pouvoir simuler le déroulement d’un tel accident avec les logiciels de modélisation afin d’anticiper au mieux les situations dégradées.

Pour que le logiciel de modélisation décrive avec le plus de précision possible les rejets radioactifs dans l’environnement, une connaissance de tous les phénomènes physico- chimiques se produisant dans le cœur, le circuit primaire et l’enceinte de confinement est nécessaire. Dans l’état actuel des connaissances certains phénomènes sont encore mal compris, par manque de données expérimentales.

La re-vaporisation de dépôts de produits de fission depuis la surface du circuit primaire a été mise en évidence pour la première fois au cours des essais intégraux Phébus- PF [24], dont l’objectif était d’étudier les phénomènes se produisant au cours d’un accident de perte de réfrigérant primaire avec fusion du cœur du réacteur. Ensuite plusieurs études ont été réalisées afin de mieux comprendre ce phénomène, d’établir les mécanismes mis en jeu et de déterminer les conditions pour lesquelles la re-vaporisation se produit ainsi que les espèces chimiques impliquées. L’analyse critique de ces études a mis en évidence les points suivants :

- Les études antérieures se sont focalisées principalement sur la re-vaporisation de dépôts de CsOH depuis des surfaces d’acier inoxydable. Peu d’études ont visé le CsI ; - Les dépôts de PFs contenant du Cs ont été réalisés par condensation de vapeurs ou

impaction d’aérosols ;

- Les conditions expérimentales étaient : re-vaporisation à haute température (jusqu’à 1000°C) sous atmosphère oxydante (vapeur d’eau), réductrice (hydrogène) ou mixte (hydrogène/vapeur d’eau) ;

- Certaines études ont été réalisées dans des conditions peu représentatives de celles d’un accident grave (comme l’étude cinétique sous vide, l’utilisation d’acier non- oxydé) ;

- La re-vaporisation de l’iode n’a été que peu considérée. Bien que des relâchements d’iode sous forme I2 aient été mis en évidence dans certaines conditions, aucune

information n’existe sur la cinétique de relâchement, ni la température à laquelle ce phénomène commence.

Le travail présenté ici vise à combler certaines lacunes identifiées dans les travaux précédents. Ainsi, ces travaux se sont focalisés sur la re-vaporisation de dépôts d’iodures

métalliques (CsI, AgI) avec pour objectifs de comprendre les mécanismes de re-vaporisation et d’identifier les espèces re-vaporisées (avec une attention toute particulière portée sur l’iode). Le choix a été fait en faveur de ces espèces car elles sont susceptibles de relâcher l’iode sous forme gazeuse. Un soin particulier a été apporté à la maîtrise des conditions expérimentales en veillant autant que possible à leur représentativité par rapport à un cas réel d’un réacteur en situation d’accident grave. Ainsi, ces travaux s’intéressent à la re- vaporisation de dépôts d’iodures métalliques en fonction des paramètres opératoires suivants :

- La nature et l’état de surface du substrat ;

- Le potentiel oxydant de l’atmosphère : O2 (oxydant)/ H2O (moins oxydant) ;

- Le régime de température du cycle thermique ; - La présence d’autres espèces.

Ils ont pour objectif d’établir :

- Les températures de re-vaporisation et les espèces susceptibles de se re-vaporiser ; - La nature et la quantité des espèces re-vaporisées ;

- La nature et la quantité des espèces résiduelles.

Le substrat et la méthode de dépôt des iodures métalliques ont été choisis pour correspondre au mieux au cas d’un REP en situation accidentelle. Ainsi, le substrat est constitué de coupons ou feuilles en acier inoxydable de type 304L, 316L qui sont les matériaux constitutifs des branches froides et chaudes du réacteur, et l’alliage Inconel 600 qui est le matériau des tubes de générateurs de vapeur ([31]). Ces substrats sont prétraités pour présenter un état de surface aussi réaliste que possible d’un circuit primaire en cas d’accident grave ([37]). Les dépôts de CsI ont été obtenus par condensation de vapeur et par impaction d’aérosols sur des surfaces métalliques, parce que ces dépôts sont les plus importants en termes de quantité déposée. En cas de re-vaporisation, ils sont susceptibles de contribuer le plus au relâchement des PFs. La quantité obtenue est de l’ordre de quelques mg/cm2 et est réaliste par rapport à un cas d’accident grave3.

Trois types d’atmosphère de re-vaporisation ont été retenus : argon/vapeur d’eau, air synthétique et mélange air/vapeur d’eau. Le cas le plus répandu est celui de la vapeur d’eau, mais certains scénarios accidentels prennent en compte une éventuelle entrée d’air

3

Pour vérifier la représentativité de la masse déposée, un calcul simple a été fait. En se basant sur les résultats obtenus dans les essais Phébus-FP (58-84% de Cs relâché depuis le combustible, par rapport à la quantité initiale) et en supposant un dépôt homogène sur toute la surface du circuit primaire, la masse du Cs qui pourrait se déposer potentiellement sur la surface du CP d’un REP 900 MWe est de 1,4 - 4,1 mg/cm2.

dans le circuit primaire ([59]). Par ailleurs, la formation d’iode moléculaire en présence d’oxygène a déjà été observée. L’objectif est d’étudier l’effet séparé de chaque atmosphère.

Le régime thermique consiste à chauffer l’échantillon avec le dépôt jusqu’à 750°C. Dans [27] et [54] il a été observé que la vitesse de re-vaporisation diminue au-delà de 750- 800°C. De plus, même si des phénomènes de re-vaporisation de dépôts à plus haute température peuvent avoir lieu, la faible quantité de dépôt ne va pas impacter le terme source de manière significative. Cependant, quelques essais à plus haute température sont réalisés, et l’influence du gradient thermique est également étudiée.

Bien que les conditions expérimentales soient aussi représentatives que possible du cas réel d’un réacteur nucléaire, les expériences ont été réalisées à une échelle réduite. Cette dimension est imposée par les équipements disponibles. Un exemple concerne la taille des coupons métalliques (1,2 cm2), qui est imposée par les dimensions de l’appareil d’analyse thermogravimétrique (voir Chapitre III section 1.3.1.).