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6 MÉTHODES D’INVESTIGATION SUR LE TERRAIN

7 MÉTHODES D’ANALYSE DES DONNÉES

7.3 Cartographie hydrogéologique

7.3.2 Recharge par infiltration verticale

où u est le paramètre sur un des deux vecteurs reliant chaque point et v est le paramètre latéral à l’intérieur du triangle.

Étant donné l’importance de l’emplacement des points d’observation, de leur nombre et de la méthode d’interpolation dans l’estimation de l’aire d’alimentation d’un ouvrage de captage à l’aide de la cartographie piézométrique, Verreault (2003) a développé une méthode d’agencement pour l’implantation optimale de piézomètres (IOP). Cet agencement des piézomètres est relativement stricte et suggère une approche progressive, c'est-à-dire que chaque emplacement dépend du résultat de l’estimation de l’aire d’alimentation effectuée avec les points d’observation disponibles à l’estimation précédente. La méthode générale est basée sur le fait que la bordure de l’aire d’alimentation aboutit à une singularité géométrique à son extrémité aval : le point de stagnation, où une goutte d’eau peut mourir d’incertitude, ne sachant si elle doit aller vers le puits ou s’en éloigner. Deux particules jumelles, l’une à droite et l’une à gauche, se rencontrent au point initial après avoir parcouru chacune leur bras respectif. Elles doivent maintenant faire le parcours inverse, en traversant, toujours perpendiculairement, les lignes équipotentielles. Des techniques d’implantation de piézomètres ont été conçues surtout dans le but d’estimer l’étendue d’un panache de contamination (French et al., 2000; Hudak, 2000). Cependant, nous n’avons pas identifié à ce jour de travaux portant sur une approche de ce genre appliquée à l’estimation de l’aire d’alimentation de puits de captage d’eau souterraine. La méthode est présentée en détail à l’annexe D.

7.3.2 Recharge par infiltration verticale

La recharge est un élément important, surtout lorsqu’il s’agit d’évaluer des aires de protection. En effet, communément, l’aire d’alimentation est estimée en évaluant l’écoulement horizontal. Cependant, pour une aire d’alimentation définie, certaines parties contribuent davantage à l’alimentation du puits et requièrent donc une protection accrue.

Même pour un aquifère semi-captif, une recharge s’effectuera au travers d’un aquitard. Cette drainance peut être une source de recharge considérable dans certains milieux aquifères, notamment pour des aquifères captifs profonds. La recharge peut être évaluée à partir de la loi de Darcy :

' h b

' W= K ∆

(7.4)

où ∆h est la différence entre la charge hydraulique de l’aquifère et celle mesurée au toit de l’aquitard. Le ratio K’/b’ peut être obtenu par l’interprétation d’un essai de pompage dans l’aquifère, par exemple par la technique de Walton (Kruseman et De Ridder, 1990).

De plus, l’urbanisation génère des modifications dans la recharge auxquelles il faut prêter attention (Lerner et al., 1990) :

- l’imperméabilisation du sol est généralement plus grande en zone urbaine.

Cependant, l’effet de ruissellement est augmenté et l’eau ruisselée peut s’infiltrer plus loin;

- le ruissellement accru par l’imperméabilisation en raison de l’urbanisation augmente les débits des cours d’eau et l’infiltration ultérieure sous leur lit;

- les parcs et jardins sont irrigués en plus de recevoir les précipitations naturelles et participent à l’accroissement de la recharge;

- les pertes du réseau de distribution d’eau peuvent contribuer à la recharge d’une façon considérable.

Afin de déterminer si la prise en compte de la recharge est nécessaire à l’estimation des aires d’alimentation, il est nécessaire d’évaluer en premier lieu sa distribution spatiale dans la zone étudiée. Les indicateurs à prendre en compte pour estimer la distribution spatiale de la recharge sont, en particulier : - les formations superficielles (homogènes ou non, perméables ou non) ainsi

que le type de sol;

- la topographie;

- la végétation et l’utilisation des sols;

- la stratigraphie (régulière ou non) et la profondeur de la nappe (constante ou non);

- l’interaction avec les eaux de surface.

L’étude de la recharge peut se faire en parallèle avec l’étude de vulnérabilité, les deux notions étant fortement liées. Le fait de négliger la recharge sous-tend la possibilité de surestimer la distance de la limite amont de l’aire d’alimentation (USEPA, 1987). En effet, une recharge uniforme n’a pas d’incidence sur la largeur de l’aire d’alimentation mais plutôt sur la distance de la limite amont.

Plusieurs méthodes d’analyse présentées plus loin dans ce chapitre négligent la recharge dans leur fondement mathématique. Cependant, de façon indirecte, ces méthodes incluent à tout le moins une certaine recharge, puisqu’il y a présence d’eau.

Par contre, si la recharge est hétérogène, il est indispensable de la localiser et de la quantifier. La cartographie piézométrique (section 7.3.1) est une méthode d’analyse détournée pour inclure la recharge dans l’estimation de l’aire d’alimentation. De fait, la forme des lignes équipotentielles, qui régit la méthode de la cartographie piézométrique, sera implicitement modifiée par une recharge

non uniforme. De plus, lorsque la recharge varie considérablement dans le temps et dans l’espace, une étude en régime transitoire peut s’avérer nécessaire (section 7.2.4). Ce genre de cas peut être traité, notamment, par suivi piézométrique ou par simulation numérique.

La section qui suit illustre certaines méthodes de quantification de la recharge.

Un numéro du Hydrogeology Journal (volume 10, numéro 1, février 2002) est consacré au thème de la recharge. Les méthodes sont classées selon le type de technique qu’elles requièrent; elles sont décrites dans Scanlon et al. (2002) et dans Lerner et al. (1990). Les techniques d’analyse de surface permettent d’estimer la recharge potentielle, alors que les techniques d’analyse souterraine (en milieu saturé) permettent d’estimer la recharge effective. Les techniques basées sur l’utilisation de traceurs (section 6.2.4) ainsi que celles portant sur les milieux non saturés ne sont pas abordées.

7.3.2.1 Techniques d’analyse de surface

7.3.2.1.1 Technique du bilan hydrique

Cette technique consiste à appliquer la loi de conservation de la masse sur le cycle hydrologique : la différence entre les entrées (précipitations et autres entrées potentielles) et les sorties (interception, évapotranspiration, ruissellement, recharge souterraine et autres sorties potentielles) d’eaux dans le système équivaut à la variation de stockage d’eaux dans les réservoirs.

L’approche consiste généralement à réaliser l’estimation de tous les termes du bilan et à obtenir la recharge par différence. L’exactitude de la méthode est donc directement liée à l’exactitude avec laquelle on obtient les autres variables. Les erreurs d’estimation sur chaque variable s’accumulent dans le terme de la recharge. Par ailleurs, l’incertitude sur le résultat est d’autant plus grande que la valeur de la recharge est faible par rapport aux autres flux.

Les méthodes permettant le calcul des différents termes du bilan pourront être obtenues dans des livres spécialisés en hydrologie. Citons par exemple Llamas (1993), et Champoux et Toutant (1988). Notons que certains modèles de simulation numérique de bassins versants permettent la détermination de la recharge sur la base de cette technique du bilan.

7.3.2.1.2 Perte ou gain par les eaux de surface

Les échanges entre les eaux de surface et les eaux souterraines peuvent être évalués par jaugeage des débits sur une fraction du cours d’eau (section 6.2.3.3). Le flux de recharge correspond alors à la différence entre les flux entrants et les flux sortants du système considéré. Les débits entrants correspondent au débit amont du cours d’eau et au débit des affluents sur la fraction considérée. Les débits sortants correspondent au débit aval du cours d’eau, au débit des confluents sur la fraction considérée, aux pertes par évaporation et à la variation de stockage en fonction du temps.

L’infiltration d’une eau de surface vers les eaux souterraines ou, inversement, l’exfiltration d’une eau souterraine vers la surface, peut être mesurée notamment, avec un infiltromètre (section 6.2.3.1) ou par l’implantation de mini-piézomètres (section 6.2.3.2). Il est aussi possible d’estimer la part de l’eau souterraine qui contribue à alimenter les cours d’eau de surface par la technique de séparation de l’hydrogramme de crue. Cependant, cette méthode requiert la mesure « en continu » du débit du cours d’eau. Cette technique permet d’estimer la recharge en effectuant la différence entre le débit potentiel d’écoulement souterrain restant à la fin d’une période de décrue et le débit potentiel total au début de la décrue suivante (Domenico et Schwartz, 1990).

7.3.2.2 Techniques d’analyse souterraine

7.3.2.2.1 Mesure de la fluctuation de la nappe

Cette méthode se base sur l’hypothèse qu’une élévation de niveau dans une nappe libre en condition naturelle est causée par la recharge. Elle nécessite la connaissance des variations du niveau de la nappe au cours du temps (par le biais d’hydrogrammes de puits).

dt S dh W= y

(7.5) Les difficultés de la méthode se situent dans la détermination d’une valeur représentative de la porosité de drainage Sy, et dans l’hypothèse que les fluctuations de niveau ne sont causées que par la recharge. La méthode est décrite et des exemples sont donnés dans Healy et Cook (2002).

7.3.2.2.2 Loi de Darcy

Cette méthode suppose que le débit spécifique q traversant une section verticale S1 de l’aquifère (libre ou captif) est égal au produit de la recharge W par l’aire S2

contribuant à celle-ci.

2

1

WS

qS =

avec

q = Ki

(7.6)

La section verticale doit être alignée avec une ligne équipotentielle. La méthode est simple d’application mais exige que la conductivité et le gradient hydrauliques soient homogènes et bien connus à une échelle régionale. De plus, de fortes incertitudes sur la valeur de la recharge résultent de la variabilité de la conductivité hydraulique.

7.3.2.2.3 Modèles numériques

La valeur de la recharge peut être prédite par le calage des modèles numériques (Sanford, 2002) (section 7.6.2). La méthode nécessite tout d’abord la détermination de la distribution des zones de recharge et une approximation de la valeur des taux de recharge. Lors du calage, la recharge et la conductivité hydraulique seront déterminées simultanément. Ces deux paramètres étant fortement liés, la solution n’est pas unique. La détermination de la recharge par calage du modèle en régime permanent n’est donc pas précise. La méthode doit plutôt être utilisée comme ajustement d’une valeur de recharge déjà estimée autrement. En régime transitoire, lorsque la solution doit reproduire les variations temporelles de recharge (la conductivité hydraulique restant constante), la méthode de calage simple peut donner une estimation plus juste de la recharge.

Notons que certains modèles peuvent tenir compte pour le calage de l’âge de l’eau souterraine, en plus des charges hydrauliques. Un autre paramètre doit alors être estimé : la porosité. La conductivité hydraulique, la recharge et la porosité étant fortement corrélées, la solution ne sera donc pas toujours unique.

Cependant, et à condition que la variabilité de la porosité et l’incertitude quant à sa valeur soient plus faibles que pour les deux autres paramètres, la solution pour la recharge sera, a priori, plus précise si elle tient compte de ces nouvelles données. Cette dernière affirmation sera donc généralement valide en milieu poreux, mais beaucoup plus sujette à controverse en milieu fracturé.

7.3.2.3 Exemples au Québec

La recharge a été évaluée dans la MRC de Portneuf (aquifères du piémont laurentien) à partir des méthodes du bilan hydrologique (première estimation de la recharge) et des hydrogrammes de quatre puits (deuxième estimation pour ajustement de la valeur) (Larose-Charette, 2000). La géologie de la MRC est

caractérisée par une couverture de sédiments marins et glaciaires sur socle rocheux. La recharge des aquifères libres a été évaluée à 0,25 mètre par année, soit 21,3 % des précipitations annuelles moyennes.

Une étude hydrogéologique régionale (Savard et al., 2002; Nastev et al., 2002) du système aquifère fracturé du sud-ouest du Québec (aquifère des Basses-Laurentides) a permis l’estimation de la recharge (ramenée à toute la superficie du territoire) à 77 millimètres par année, ce qui correspond à 7,3 % des précipitations moyennes de la région. Ce taux a été obtenu par calage d’un modèle numérique, avec une valeur préliminaire de 45 millimètres par année obtenue par la méthode de Darcy. Notons que 73 % du territoire est couvert de dépôts marins argileux peu perméables.

Un bilan hydrologique global a été réalisé pour le système de l’aquifère régional du roc de l’île de Laval (Berjamy, 1991). La surface du sol de l’île de Laval est en grande partie couverte d’un dépôt de till datant du Wisconsinien et des argiles de la mer de Champlain. La recharge a été évaluée à 98,5 millimètres par année, soit 9,4 % des précipitations totales.