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PARTIE I : INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE

CHAPITRE 2 : MECANISMES D’INITIATION ET D’ACTIVATION DES VOIES

II- 1-1 Ras : protéine centrale dans l’activation des MAPK

Ras appartient à la superfamille des petites protéines G monomériques portant une activité GTPase (Guanosine triphosphate hydrolase) (pour revue voir (Wennerberg et al., 2005)). Cette superfamille compte environ 150 membres, est très conservée dans l’évolution et se sépare en plusieurs groupes :

- Ras : groupe d’oncoprotéines auquel Ras appartient et comptant 36 membres. La plupart sont considérés comme de véritables oncogènes dont des mutations ont été identifiées dans de nombreux cancers, notamment p21Ras (Repasky et al., 2004). Ils vont jouer un rôle majeur dans différentes voies de signalisation dont la mieux identifiée est la voie des MAPK.

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- Rho (Ras homologous) : compte 20 membres dont RhoA, Rac1, cdc42,… Les Rho régulent l’organisation du cytosquelette d’actine, la progression dans le cycle, l’expression de certains gènes, la mobilité cellulaire et les voies d’endocytose et d’exocytose.

- Miro : ces protéines G étaient initialement rapportées au groupe des Rho avant que l’on admette qu’elles constituaient un groupe à part entière. Elles jouent un rôle dans le maintien de l’intégrité de la mitochondrie.

- Rab (Ras-like protein in brain): elles sont au nombre de 61 et régulent le transport vésiculaire et les voies sécrétoires. Selon leur fonction, elles vont être localisées dans différents compartiments sub-cellulaires.

- Ran (Ras-like nuclear) : ce sont les plus abondantes dans le cytoplasme. Elles interagissent avec les importines et les exportines ou avec les protéines cargo et régulent le trafic nucléaire. Elles jouent aussi un rôle dans la réplication de l’ADN et dans l’assemblage de l’enveloppe nucléaire.

- Arf (ADP-ribosylation factor) : vont réguler le transport vésiculaire

Ces différentes petites protéines G agissent en « switchant » d’un état transductionnellement inactif lié au GDP à un état actif lié au GTP. Les différences structurales observées entre la forme liée au GDP et celle liée au GTP sont localisées dans 2 régions particulières de la protéine, switch I et switch II. La conformation liée au GTP possède une affinité plus importante pour les effecteurs. Le passage d’un état à l’autre est régulé par 2 types de partenaires : les GEF (Guanine Exchange Factor) ou GNRP (guanosine nucleotide release protein) qui jouent un rôle positif en induisant un changement de conformation de la petite protéine G (Schmidt and Hall, 2002) et les GAP (GTPase activating protein), jouant un rôle négatif en stimulant l’activité hydrolase (Bernards and Settleman, 2004). Il est à noter que les GTPases peuvent aussi lier une protéine inhibitrice, GDI (guanine nucleotide dissociation inhibitor). Cette protéine fait partie d’une sous classe de petite GTPase dont le rôle précis reste à être établi.

Figure 17 : Mécanismes d’activation des GTPases de la famille des petites protéines G (d’après (Bernards and

Settleman, 2004)). La régulation du cycle de ces GTPases entre un état inactif lié au GDP et un état transductionnellement actif lié au GTP est effectué grâce à une coordination entre l’activité des GAP (GTPase-activating protein) et des GEF (guanine nucleotide exchange factor). Il existe de même une autre classe d’inhibiteurs (sauf pour p21Ras qui n’en possède pas), les GDI (guanine nucleotide dissociation inhibitor) dont le rôle exact

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b) présentation de Ras et de ses mécanismes d’activation

Ras représente donc le prototype des petites protéines G monomériques. Comme tous les membres de sa famille elle passe d’un état inactif lié au GDP à un état actif lié au GTP. Cependant, elle ne lie pas la protéine GDI. De par sa position centrale dans de nombreuses voies de signalisation et notamment la voie des MAPK, elle joue un rôle majeur dans la survie et la prolifération cellulaires. Elle a aussi été retrouvée mutée dans de nombreux cancers tels que des cancers du poumon ou du colon et est considérée comme un oncogène majeur (Aviel-Ronen et al., 2006).

Ras est une protéine de 21 kDa présentant 3 isoformes ubiquitaires codées par 3 gènes différents : H-Ras, N-Ras et K-Ras. Par des études de délétion de chacun de ces gènes, il semblerait que leurs fonctions soient assez redondantes (Esteban et al., 2001). Ras est en général produite sous forme de précurseur cytoplasmique, subissant ensuite des modifications post-traductionnelles (prénylation (farnésylation), palmitoylation, protéolyse ou carboxyméthylation) lui permettant d’être ancrée à la membrane mais aussi de moduler sa localisation. Ainsi, K-Ras possède une séquence polybasique qui favorisera sa localisation à la membrane plasmique, alors que N-Ras et H-Ras auront cette même localisation grâce à un processus de palmitoylation. De même, la farnésylation dans le cytosol d’un résidu cystéine spécifique de la région C-terminale de Ras va orienter la protéine vers le réticulum endoplasmique (Bivona and Philips, 2003; Choy et al., 1999). D’un autre côté, la phosphorylation par la PKC de K-Ras pourra la destiner à l’appareil de Golgi, au réticulum endoplasmique et à la mitochondrie (Bivona et al., 2006), et son ubiquitination va induire sa localisation dans les endosomes (Jura et al., 2006). Tous ces processus sont donc très complexes et sont réversibles, permettant ainsi des changements de localisation de la protéine (Rocks et al., 2005).

Concernant les mécanismes permettant l’activation de Ras, une voie canonique a particulièrement été décrite en aval des RTK (McCormick, 1993). En effet, une fois le récepteur activé, des tyrosines phosphorylées du récepteur servent de sites d’ancrage à la protéine adaptatrice Grb2 directement ou par l’intermédiaire de la protéine adaptatrice Shc. Or, Grb2, par ses domaines SH3, est liée de façon constitutive à Sos (Son of sevenless), une GEF de Ras. Sos, qui est alors recrutée à la membrane, se retrouve proche de son substrat qu’elle va pouvoir activer. Ce modèle initial, identifiant le recrutement de Sos à la membrane par l’intermédiaire de Grb2 comme une étape clé dans l’activation de Ras a pu être nuancé ces dernières années. Tout d’abord, des analyses structurales de ces différentes protéines ont permis de mettre en évidence un rétrocontrôle positif entre Ras liée au GTP et Sos. En effet, à l’état basal, le domaine PH de Sos masque un domaine de liaison à Ras-GTP de haute affinité (Boykevisch et al., 2006; Freedman et al., 2006). Pour permettre une pleine activation de Sos, ce domaine PH a besoin d’être « démasqué », probablement en interagissant avec l’acide phosphatidique, un produit de la PLD2 (phospholipase D2) (Sondermann et al., 2004; Zhao et al., 2007). Ainsi, ces récents travaux suggèrent que le modèle linéaire jusqu’à présent décrit pour expliquer l’activation de Ras à la membrane plasmique semble en fait beaucoup

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plus complexe. De plus, en parallèle de la voie canonique Grb2/Sos permettant l’activation de Ras, de récents travaux, notamment issus de notre laboratoire, suggèrent que de nouveaux acteurs pourraient aussi intervenir dans sa régulation, comme la protéine adaptatrice Gab1, la PI3K et la phosphatase SHP-2 (Montagner et al., 2005; Yart et al., 2001). Le rôle de ses nouveaux activateurs de Ras en réponse à l’EGF notamment, sera détaillé et discuté plus longuement dans la suite du chapitre.

En plus de son rôle au niveau de la membrane plasmique, Ras transductionnellement active va aussi se retrouver dans d’autres compartiments sub-cellulaires, comme dans les endosomes où la présence de complexes actifs de signalisation a été identifiée (Baass et al., 1995; Di Guglielmo et al., 1994). En effet, des expériences de FRET (Fluorescence Resonance Energy Transfert) ont permis de localiser Ras sous sa forme activée dans l’appareil de Golgi, le réticulum endoplasmique ou les endosomes (Chiu et al., 2002; Jiang and Sorkin, 2002). Dans ce cas là, son activation ne dépendrait plus de Sos mais d’une autre GEF, dépendante du DAG (diacylglycérol), RasGRP1 qui serait activée, notamment dans l’appareil de Golgi en aval des RTK après activation séquentielle de la kinase Src et de la PLCγ (Bivona et al., 2003). Cette voie de signalisation dépendante de Ras dans les endomembranes, serait donc importante dans le maintien de l’activation des MAPK. Cette nouvelle compartimentalisation du signal va permettre à la cellule de jouer sur la force, la spécificité et la durée du signal, de même que sur les effets biologiques qu’il induit (pour revue voir (Mor and Philips, 2006). Il semble cependant que cette activation de Ras dans les endomembranes soit plutôt tardive et une récente étude utilisant des techniques d’imagerie cellulaire par fluorescence suggère que cette activation de Ras dans l’appareil de Golgi puisse être un artéfact lié à la surexpression de la protéine G, et que le site majeur d’activation de Ras resterait la membrane plasmique (Augsten et al., 2006). Ainsi, cette signalisation membranaire nécessite des travaux supplémentaires avant d’être parfaitement acceptée.

c) inhibiteurs de Ras

Chez l’homme, il existe à peu près 160 gènes codant pour des GAP. La première GAP de Ras découverte a été p120RasGAP. Son activité semble régulée par des interactions moléculaires entre son domaine PH et son domaine catalytique (Drugan et al., 2000). Elle peut être recrutée auprès du récepteur par ses domaines SH2, par interaction directe (PDGFR) ou par l’intermédiaire d’une protéine adaptatrice (Cooper and Kashishian, 1993; Di Cristofano et al., 1998). Son recrutement est, dans ce cas, modulé par un jeu de kinases/phosphatases (Montagner et al., 2005). De plus, différentes études ont pu identifier l’annexine 6 comme un véritable partenaire de p120RasGAP dans l’inactivation de Ras (Chow et al., 2000; Grewal et al., 2005). En effet, l’annexine 6 semble constitutivement liée à p120RasGAP, et après stimulation par les RTK, elle permet sa relocalisation

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héréditaire, la neurofibromatose de type 1 (NF1) (Dasgupta and Gutmann, 2003). Elle est régulée par phosphorylation sur son domaine C-terminal par la PKA (protéine kinase A) induisant ainsi son association avec la protéine séquestratrice 14-3-3 (Feng et al., 2004). La neurofibromine peut elle aussi subir une dégradation protéique par ubiquitinination, notamment après stimulation des RTK, permettant ainsi un maintien de l’activation de Ras (Cichowski et al., 2003). Son expression est par la suite ré-augmentée, au moment ou la quantité de Ras activée diminue.

d) effecteurs de Ras

Une fois activée et sous sa forme liée au GTP, Ras va pouvoir lier de nombreux effecteurs, par l’intermédiaire de leur domaine RBD (Ras binding domain) (pour revue voir (Marshall, 1996)). De façon générale, Ras pourra activer ses effecteurs de 3 façons différentes, n’étant pas exclusives les unes des autres : par translocation membranaire et/ou rapprochement d’un substrat et/ou d’un activateur ou par changement de conformation.

Figure 18 : Mécanismes d’activation des effecteurs de Ras (Marshall, 1996). (a) Ras

induit un changement de conformation de son effecteur, augmentant ainsi son activité. (b) Ras permet la relocalisation de ses effecteurs à la membrane où ils sont alors activés par des enzymes membranaires (i) ou amenés près de leurs substrats, leur permettant ainsi de catalyser la réaction (ii).

Abréviations : RBD : Ras binding domain ;

GDP : guanosine diphosphate ; GTP :

guanosine triphosphate; CAT : domaine catalytique.

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Ras compte tout d’abord parmi ses principaux effecteurs 2 enzymes majeures quant à l’activation des voies MAPK et PI3K en réponse aux RTK, il s’agit de PI3K et Raf. Ainsi, Ras va tout d’abord pouvoir activer son effecteur majeur, Raf, que nous définirons plus précisément dans le paragraphe suivant, permettant ainsi la mise en place séquentielle des modules intervenant dans la voie des MAPK. La PI3K, a elle aussi été identifiée comme un effecteur de Ras, se liant à la protéine G par l’intermédiaire de la sous-unité catalytique p110, permettant ainsi d’augmenter son activité (Rodriguez-Viciana et al., 1994; Rodriguez-Viciana et al., 1997). Cependant, une autre étude a montré qu’un mutant constitutivement actif de PI3K avait la capacité d’activer Ras (Hu et al., 1995), suggérant ainsi que PI3K puisse être à la fois un effecteur et un activateur de Ras, notion que nous développerons et discuterons dans le paragraphe IV. Il est à noter que les Ras n’ont pas toutes la même affinité vis-à-vis de leurs effecteurs. Ainsi, H-Ras activera plutôt PI3K tandis que K-Ras liera plus facilement Raf (Yan et al., 1998).

Ras est ensuite capable d’activer de nombreuses protéines de la famille des GEF. Ainsi, Ras va interagir avec RalGEF par son domaine RA (Ras Association), conduisant à une augmentation de l’activité des petites protéines G RalB et surtout RalA, de même qu’elle peut s’associer avec RIN1, une GEF capable d’activer Rab, régulant ainsi le transport vésiculaire et l’endocytose (Barbieri et al., 1998; Hamad et al., 2002). Enfin, Tiam1, GEF de Rac interagit avec Ras grâce à un domaine RBD similaire à celui de Raf, jouant ainsi un rôle dans l’étalement et la migration cellulaires (Lambert et al., 2002).

A côté de l’activation de ces différentes GEF, Ras compte aussi parmi ses effecteurs d’autres protéines de nature variée. Ainsi, la PLCε a été montrée comme activée par H-Ras, intervenant ainsi dans les processus de prolifération et de protection contre l’apoptose (Bunney and Katan, 2006; Kelley et al., 2001). Cette activation a aussi été impliquée dans les propriétés tumorigènes des mutations de H-Ras dans les cancers de la peau (Bai et al., 2004). De même, Ras compte la PKCζ parmi ses effecteurs, même si la signification de cette interaction n’a pas encore été caractérisée (Diaz-Meco et al., 1994).

De façon intéressante, un rôle atypique de Ras dans l’apoptose a récemment été décrit. Cet effet semble lié à l’activation de Nore1 (Novel Ras Effector), protéine de la famille des RASSF (Ras association domain family), qui va pouvoir à son tour activer la kinase Mst (mammalian Ste-20-like kinase), induisant ainsi l’apoptose cellulaire (Khokhlatchev et al., 2002). Cette voie pourrait prendre place dans un contexte pathologique en permettant un ralentissement de la progression de la tumeur par l’apoptose induite par Ras elle-même.

II-1-2. Les MAPK