3.4 Détection directe de matière sombre non-baryonique
3.4.4 Les rapports d’ionisation prédits par la théorie de Lindhard
La plus rapide mais la moins efficace est la recherche d’un signal lumineux produit par le
pro-cessus de scintillation. Cette technique est utilisée dans les scintillateurs à Xénon liquide ou
à cristaux de NaI. Le facteur de "quenching" en scintillation varie sur une grande plage de
valeurs :
0.08 pour le I,
0.25 pour le Na [123]. Dans le cas du
,C, il est de l’ordre
de 0.2 [124]. L’efficacité de collection de l’énergie émise en scintillation est typiquement de
quelques pourcents.
Un signal d’ionisation peut être recherché dans les matériaux comme le Ge, Si, He. Les porteurs
de charges libérés par le recul nucléaire ou électronique sont collectés sur les électrodes à l’aide
d’un champ électrique de dérive. Le nombre de charges produites peut directement être relié à
l’énergie déposée. Suivant le matériau utilisé et les conditions de fonctionnement, l’efficacité
de cette technique peut être beaucoup plus grande que celle de la scintillation, jusqu’à plusieurs
dizaines de pourcents, même si cette technique implique des signaux plus longs.
Un signal de chaleur peut être enregistré étant donné que l’énergie déposée est convertie
ulti-mement en chaleur. Les signaux sont en conséquence longs et nécessitent des conditions
cryo-géniques.
La figure 3.13 présente les principaux noyaux utilisés dans les expériences actuelles et leurs techniques de
détection associées pouvant combinées plusieurs types de signaux. Un détecteur à mesurant l’énergie
libérée dans la voie ionisation et à projection de traces permet d’être complémentaire aux expériences
en cours. Le tableau 3.3 résume les principales expériences de détection directe de matière sombre
non-baryonique. L’utilisation du milieu sensible
permet de récupérer une fraction de l’énergie totale dans
la voie ionisation. Estimons maintenant la proportion d’énergie libérée dans la voie d’ionisation dans le
cas de l’
.
3.4.4 Les rapports d’ionisation prédits par la théorie de Lindhard
La discrimination gamma/neutron est basée sur le fait que les neutrons et les rayons ont des
rapports d’ionisation différents. Les neutrons et les WIMPS ne sont sensibles qu’à l’interaction nucléaire
et n’interagissent pas avec le cortège électronique. Le rapport d’ionisation entre les reculs électroniques
et les reculs nucléaires étant différents, la mesure de ce rapport permet de discriminer les deux types
NaI, Xe
~ 100% de l’energie detecteeHe
3Xe liquide
(MACHe3)
χ
χ
~ 20% de l’energieGe Ge, Si
Al2O3
CaWO4
l’energie detectee quelques % de 3He > 40%
(MIMAC−He3)
Ionisation
Chaleur
Traces
Scintillation
FIG. 3.13 – Techniques utilisées par les principales expériences de détection directe de matière sombre
non-baryonique, associées à leurs noyaux cibles. Les pourcentages de l’énergie totale déposés dans les différentes voies sont indiqués.
de reculs. Il est essentiel de différencier les reculs nucléaires des reculs électroniques car ces derniers
constituent une source importante de bruit de fond.
Une particule de recul (électron ou noyau) va déposer son énergie essentiellement par trois processus :
ionisation, scintillation et phonons. Les proportions se répartissent différemment pour un recul nucléaire
et un recul électronique. Pour caractériser cela, il est utile de définir un facteur dit de "quenching" noté
Q, rapport de l’énergie libérée en ionisation (resp. de scintillation) par un recul nucléaire sur cette même
énergie (resp. scintillation) libérée par un recul électronique. Ces facteurs permettent de convertir les
énergies étalonnées en keV équivalent électrons (keV
) par des sources de photons en keV, ce qui est
nécessaire à l’analyse des spectres de recul en termes de WIMPs.
Pour les détecteurs à ionisation, la théorie de Lindhard [125] permet de prédire la proportion de l’énergie
totale libérée dans la voie ionisation, appelée rapport d’ionisation. Pour un recul nucléaire, une fraction
de l’énergie est perdue par collision avec les électrons alors qu’une partie est cédée pour le déplacement
des noyaux. Ces fractions sont déterminées par la compétition entre l’énergie transférée aux électrons et
74 3.4 Détection directe de matière sombre non-baryonique
Discrimination Nom Lieu Technique Matériau Statut
aucune GENIUS-TF Gran Sasso ionisation 42 kg Ge en cours MACHe3 Grenoble chaleur 0.02 g He en cours
DAMA Gran Sasso scintillation 100 kg NaI arrêtée statistique
+
+
LIBRA Gran Sasso scintillation 250 kg NaI en cours ZEPLIN-I Boulby mine scintillation 4 kg de Xe liquide en cours
CDMS-I Stanford chaleur+ionisation 1 kg Ge + Si arrêtée événement CDMS-II Soudan mine chaleur+ionisation 2 à 7 kg de Ge + Si en cours
par + + + + + + + + + + + + + +
CRESST-I Gran Sasso chaleur+scintillation 0.262 kg Al
[
O
arrêtée événement CRESST-II Gran Sasso chaleur+scintillation 0.6 à 9.9 kg de CaWO
]
en cours Edelweiss-I Modane chaleur+ionisation 1 kg Ge arrêtée
SIMPLE Rustrel superheated droplets fréon arrêtée
TAB. 3.3 – Principales expériences de détection directe de WIMPs et leurs caractéristiques.
aux reculs nucléaires lors des collisions ayant lieu lors du ralentissement de la particule. Ces dernières
dépendent du milieu, du type de particules incidentes ainsi que de son énergie. Ces quantités dépendent
des sections efficaces électronique et nucléaire. Pour comparer ces deux types de sections efficaces, il est
utile de définir les variables adimensionnées
et [125] reliées respectivement à l’énergie et au parcours
de la particule (électron ou noyau). La figure 3.14 présente les pouvoirs d’arrêt (
) électronique
et nucléaire en fontion de la variable
. La compétition de ces deux quantités dépend de l’énergie de
la particule. Deux régions de comportements différents se distinguent. La région où le pouvoir d’arrêt
nucléaire domine et où peu d’énergie est déposée par collision avec les électrons. Cette région est bornée
supérieurement par une énergie critique
\?. Au délà de cette énergie, le pouvoir d’arrêt nucléaire diminue
et le pouvoir d’arrêt électronique devient dominant. Il croît en
,
. L’énergie transférée au noyau de
recul suite à l’interaction d’un WIMP est telle que l’on se situe dans la plage où la perte d’énergie est
le résultat de la compétition entre les pouvoirs d’arrêt nucléaire et électronique. Seule une partie de
l’énergie déposée est libérée dans la voie ionisation. Cette fraction est donnée par [125] :
. .
(3.28)
où
est une fonction empirique
6et
.
est un facteur dépendant du milieu et de la particule incidente.
Dans le cas où ces derniers sont identiques, il est donné par :
. 90B0 , = ,
. Une expression
analytique résultant d’un ajustement de la fonction
est donnée dans [102]. La figure 3.15 (a) présente
6
1/2
∈
0 1 2 3 4ρ
/d
∈
d
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 lectronique e t e Pouvoir d’arr aire e t nucl e Pouvoir d’arrFIG. 3.14 – Pouvoirs d’arrêt électronique (trait plein) et nucléaire (pointillés) en unité de ( , ) qui sont reliés respectivement au parcours et à l’énergie de la particule.
Energie de recul (keV)
0 5 10 15 20 Rapport d’ionisation (%) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 He 3 Ge Xe (a) (b)
FIG. 3.15 – Rapports d’ionisation prédits par la théorie de Lindhard [125] pour l’ , le et le (a). Dans la plage en énergie considérée, 20% de l’énergie totale est libérée dans la voie ionisation pour les noyaux
et . Dans le cas l’
, plus de 40% est libérée en ionisation pour des énergies supérieures à 1 keV. L’accord de la prédiction basée sur la théorie de Lindhard avec les mesures expérimentales est présentée (b). Cette figure est adaptée de [126].
les rapports d’ionisation pour différents milieux sensibles en fonction de l’énergie du recul nucléaire.
Dans la plage en énergie [0,20] keV, le rapport d’ionisation pour le
P