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2 Rappels des approches et théories utilisées et choix effectués

CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE

I- 2 Rappels des approches et théories utilisées et choix effectués

Les approches et théories utilisées dans le champ des relations ville-port peuvent se résumer de la façon suivante (tab. III).

Tableau III. Paradigmes et théories utilisés dans les relations ville-port

Paradigme Approche Territoire Principaux

auteurs 1- centralité STRUCTURALISME

Théorie de la localisation Théorie des lieux centraux

Théorie de la centralité

Espace/territoire homogène et contigu Espace

Ville = centre d’attraction Port = centre d’attraction

Bird 1963 Hoyle 1989 ; 2000 Hayuth 1982 Norcliffe et al. 1996 Wiegmans et Louw 2011

2- intermédiarité Approche relationnelle Théorie des réseaux Théorie des acteurs

Maillage de nœuds et de liens Territoire archipélagique (régionalisation des activités) Lieu

Ville = point de rupture de charge

Port = nœud du réseau

Taaffe et al. 1963 Rimmer 1967 ; 2007 Robinson 2002 Ducruet 2005

Théorie des systèmes Théorie des arènes Théorie des systèmes complexes Territoire réticulaire, multiscalaire et transcalaire (déterritorialisation des activités)

Ville = point de friction, à éviter Port = plate-forme multimodale ou hub Hesse et Rodrigue 2004 Notteboom et Rodrigue 2005 Rodrigue et Notteboom 2010 Source : auteur

Qu’elles soient portuaires ou urbaines, les études utilisent des fondements théoriques assez similaires. Généralement, les études urbaines se font sous le paradigme de la centralité, de même que les études portuaires attachées au modèle de Hoyle (1989) et à l’échelle locale. Selon les théories structuralistes de la localisation, des lieux centraux et de la centralité, ville et port sont des centres d’attraction qui se renforcent l’un l’autre et qui connaissent une synergie forte. Leur lien morphologique et fonctionnel est très fort. Leur interface est plus ou moins développée selon leur degré d’attraction réciproque.

Le texte fondamental de Robinson (2002) a remis en cause la conception classiquement admise du port en tant qu’espace homogène et contigu et amené les chercheurs à adopter une démarche relationnelle, centrée sur la théorie des réseaux, en réponse au « nouveau paysage de la

gouvernance » (Woudsma 2013). Le paradigme globalement admis actuellement en études portuaires est celui de l’intermédiarité, par ailleurs largement utilisé à l’échelle régionale (Taaffe et al. 1963, Rimmer 1967 ; Notteboom et Rodrigue 2005). Il est moins développé en études urbaines, mais tend à progresser. Le port est perçu comme un nœud du réseau que sont les chaînes logistiques, puis une plate-forme multimodale. La ville est elle-même perçue comme un nœud dans les réseaux de villes mais aussi comme un point de rupture de charge logistique, donc de plus en plus un point de friction, à éviter.

L’ensemble de la littérature se positionne dans l’une ou l’autre perspective, soit urbaine, soit portuaire, cloisonnant les enjeux économiques, sociaux et environnementaux ainsi que les perspectives territoriales et portuaires. Le croisement théorique et la conciliation des enjeux empiriques reste largement à élaborer au niveau académique.

La recherche sur les processus de gouvernance se multiplie, qui analyse les conséquences de la multiplication des acteurs, publics et privés sur le territoire ainsi que l’introduction des enjeux et perspectives à toutes les échelles. Cependant, la théorisation des nouveaux territoires, devenus réticulaires, multiscalaires et transcalaires, est encore insuffisante.

Par ailleurs, la dichotomie entre territoire (espace) et flux (temps) s’en trouve renouvelée. Les logiques territoriales, aux temps longs et à l’idéal de permanence, s’opposent aux logiques économiques, dominées par les temps courts voire très courts et à l’idéal d’immédiateté. La gestion de l’espace-temps des nouveaux territoires pose un défi théorique émergent.

Une nouvelle approche doit doncpermettre de répondre aux quatre défis théoriques soulevés par la littérature, soit le croisement des perspectives, la conciliation des enjeux économiques, sociaux et environnementaux, la gestion multiscalaire et transcalaire du territoire et la maîtrise de l’espace-temps. Nous pensons que cela nécessite une démarche fonctionnaliste. Nous résumons dans le tableau suivant (tab. IV) les approches, théories et concepts envisagés.

Tableau IV. Défis théoriques soulevés et solutions envisagées Enjeux académiques Approche et théories

pertinentes Concepts choisis 1- Croisement des perspectives Approche relationnelle

Théorie des systèmes Théorie du développement territorial

Théorie centre-périphérie

Territoire commun

2- Conciliation des enjeux

éco/socio/environnementaux Approche relationnelle Écologie politique Écologie territoriale

Théorie des systèmes socio- écologiques

Géographie située

Vulnérabilité territoriale

3- Gestion multiscalaire et

transcalaire du territoire Approche relationnelle Théorie des réseaux Écoles de la proximité Théorie de la Globalisation Théorie des échelles

Proximités relationnelles

4- Maîtrise de l’espace-temps Approche relationnelle Théorie des systèmes complexes

Écologie territoriale Théorie du trou de ver Géographie située

Positionnalité territoriale

Source : auteur

Nous pensons que la meilleure approche pour notre propos reste une approche fonctionnaliste relationnelle. Elle permet d’analyser les interrelations entre les lieux et les acteurs, entre les processus de reterritorialisation des acteurs, la périurbanisation et la métropolisation des villes d’une part, et la régionalisation des ports d’autre part. L’analyse des proximités relationnelles doit ainsi permettre d’évaluer la qualité des relations entre les acteurs, malmenées par les déterritorialisations et l’émergence de nouvelles territorialités. L’écologie politique et son application au territoire, l’écologie territoriale, nous semblent les approches les plus pertinentes pour notre objectif.

L’adoption d’une perspective mixte nous apparaît comme indispensable pour améliorer la compréhension des relations ville-port et accompagner la reterritorialisation actuelle de ces deux

entités. Les études portuaires ont l’opportunité de sortir de leur perspective essentiellement économique et logistique, entrepreneuriale, pour enrichir leurs analyses des facteurs sociaux et environnementaux, donc d’une perspective sociétale. À l’inverse, les études urbaines et régionales doivent mieux comprendre et intégrer les logiques et les enjeux de l’industrie afin de mettre en place des politiques territoriales équilibrées, respectueuses des différents enjeux qui parcourent le territoire.La perspective mixte implique la conciliation des enjeux économiques, sociaux et environnementaux, conciliation nécessaire pour réduire la vulnérabilité territoriale et construire un territoire commun valorisé.

Nous allons donc développer une nouvelle approche en empruntant aux autres sciences spatiales, principalement les études régionales et la géographie économique, pour ce qui a trait à l’écologie territoriale et la théorie des SSÉ.