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Chapitre I : La médecine nucléaire et la Tomographie par Emission de Positons

1. Rappel sur la radioactivité

1.1. Historique.

La radioactivité fut découverte par Henri Becquerel en 1896 lors de ses travaux sur le rayonnement X découvert par Wilhelm Roentgen quelques années auparavant. Henri Becquerel découvrit par hasard que certaines substances, telles que les sels d’uranium, pouvaient noircir une plaque photographique en l’absence de lumière. Après diverses expériences, il supposa qu’il s’agissait d’une propriété atomique spécifique de l’uranium. Il admit que l’uranium émettait des rayonnements particuliers qu’il appela « rayons uraniques ». Suite à cette découverte, plusieurs scientifiques décidèrent d’étudier ce rayonnement. En 1898, Marie Curie entreprit des mesures quantitatives en se référant à l’ionisation que produisent ces rayonnements dans l’air et démontra que le thorium émet aussi ce type de rayonnements. Aidée de son mari Pierre Curie, ils isolèrent deux nouveaux éléments : le radium et le polonium et introduisirent pour la première fois le terme de radioactivité. En 1899, Ernest Rutherford met en évidence l’existence de plusieurs types de rayonnements  et  ; le premier s’arrête après avoir traversé quelques millimètres de papier aluminium et le second plus pénétrant. En 1900, Paul Villard découvre le rayonnement dans l’émission du radium. De 1901 à 1903, Ernest Rutherford et Frédéric Soddy montrent que la radioactivité est en fait une transmutation spontanée d’un élément à un autre et élaborent ainsi la théorie de la filiation radioactive. En 1913, Niels Bohr montre que le noyau atomique est le siège de la radioactivité alors que le cortège électronique est responsable des propriétés chimiques de l’élément. En 1924, Lacassagne et Lattes utilisent pour la première fois des traces de polonium pour des recherches en biologie. En 1929, le

premier cyclotron est construit par Livingston et Lawrence et cinq ans plus tard Irène et Frédéric Joliot-Curie découvrent la radioactivité artificielle1.

1.2. Les différents modes de désintégrations.

Chaque élément est représenté par le symbole 𝒁𝑨𝑿, avec X : symbole de l’élément chimique

A : nombre de masse ou nombre de nucléons (protons + neutrons) Z : nombre de charge ou numéro atomique (nombre de protons)

A un même élément peuvent correspondre des noyaux différents qui possèdent le même nombre de protons mais un nombre de neutrons différents : on parle alors d’isotopes. Ces isotopes peuvent être stables ou radioactifs. Par exemple, le carbone possède plusieurs isotopes, dont deux stables, carbone-12 et carbone-13 (12C et 13C). Parmi les isotopes radioactifs, citons le carbone-11 (11C, de période radioactive 20,4 min), élément artificiel et le carbone-14 (14C, de période radioactive 5730 ans), qui est naturel. Les noyaux radioactifs évoluent dans le temps vers un état plus stable ; ils se désintègrent en donnant un autre noyau et en émettant un rayonnement. On distingue alors trois types de rayonnements différents :

 Le rayonnement 

Ce type de rayonnement correspond à la production spontanée d’une particule lourde constituée d’un noyau atomique formé de deux protons et de deux neutrons, ce qui correspond à un noyau d’hélium (Equation 1).

𝑋 𝑍

𝐴𝑍−2𝐴−4𝑋′+ 𝐻𝑒24

Equation 1

La particule , étant 7000 fois plus lourde qu’un électron, peut être arrêtée par une faible quantité de matière. Quelques centimètres d’air et une simple feuille de papier suffisent à se protéger des rayonnements d’un émetteur .

 Le rayonnement 

Il existe deux types de rayonnements  : les  et +

.

On parle de rayonnement 

s’il y a émission d’un électron ; un neutron du noyau se désintègre en proton, en électron et en anti-neutrino (𝒗̅) (Equation 2).

𝑋 𝑍

𝐴𝑍+1𝐴𝑋′+ 𝑣̅ + 𝛽

Equation 2

Les électrons éjectés peuvent traverser quelques dizaines de centimètres de matière voire quelques mètres dans l’air, mais d’une façon générale ils sont assez rapidement absorbés par la matière où ils donnent éventuellement naissance à des rayons X et leur excédant d’énergie est transformé en

présentent donc un potentiel destructeur assez important. Certains isotopes (Tableau 1), sélectionnés pour leur énergie et leur temps de demi-vie, sont utilisés à des fins thérapeutiques, en particulier en oncologie pour la désagrégation localisés de cellules tumorales, tel que le lutécium-177 (Luthatera®) utilisé pour le traitement des tumeurs neuroendocrines.

Radionucléide Période Emax (MeV) Emission

Strontium-89 50,0 jours 1,49 β -Yttrium-90 64,1 heures 2,28 β

-Iode-131 8,0 jours 0,61 β-, CE*, γ Holmium-166 26,8 heures 1,85 β

-Lutécium-177 6,7 jours 0,50 β-, γ

*CE : capture électronique

Tableau 1: Propriétés de quelques émetteurs - utilisés en médecine nucléaire.

On parle de rayonnement +

s’il y a émission d’un positon. Le positon résulte de la transformation d’un proton en neutron, neutrino (ν) et positon, ce dernier étant un anti-électron (Equation 3).

𝑋 𝑍

𝐴𝑍−1𝐴𝑋′+ ν + 𝛽+

Equation 3

Les positons, ou électrons positifs émis par le radio-isotope vont rencontrer dans leur trajectoire d’éjection un électron et leur collision conduira à une annihilation de la matière, accompagnée d’une émission d’énergie sous la forme de deux photons de 511 keV émis de matière antiparallèle. La détection dite en coïncidence de ces deux photons constitue le principe de la TEP.

Le Tableau 2 résume les principaux radionucléides émetteurs de positions les plus couramment utilisés en médecine nucléaire.

Radionucléide Période Emax (MeV) Emission

Carbone-11 20,4 minutes 0,96 β+ Azote-13 9,96 minutes 1,20 β+ Oxygène-15 2,04 minutes 1,73 β+ Fluor-18 109,8 minutes 0,63 β+ Cuivre-64 12,7 minutes 1,35 β+, β -, CE Gallium-68 1,13 heure 1,89 β+, γ Iode-124 4,18 jours 0,65 β+

Tableau 2 : Propriétés de quelques émetteurs +

 Le rayonnement 

Ce rayonnement correspond à l’émission de photons de courte longueur d’onde et d’énergie très variable. Il traduit la perte d’énergie au niveau du noyau et le retour vers une entité plus stable. Ces rayons sont très pénétrants et peuvent traverser de fortes épaisseurs de matière. Des matériaux denses tels que le plomb, le tungstène ou de grandes épaisseurs de bétons sont nécessaires pour les atténuer fortement. L’énergie du rayonnement émis par chaque isotope est différente et permet de bien caractériser l’isotope d’origine. Dans la pratique, le technétium-99m et l’iode-123 sont les radionucléides les plus utilisés en médecine nucléaire (Tableau 3).

Radionucléide Période Emax (MeV) Emission

Technétium-99m 6,02 heures 0,14 MeV 

Indium-111 67,3 heures 0,25 MeV , CE

Iode-123 13,2 heures 0,16 MeV , CE

Tableau 3 : Propriétés de quelques émetteurs  utilisés en médecine nucléaire.

1.3. Grandeurs et unités.

1.3.1. Activité et unités de mesure.

L’activité, notée A(t), d’une source radioactive à un instant t est donnée par la loi de décroissance radioactive qui est une fonction exponentielle décroissante2 (Equation 4).

𝑨(𝒕) = 𝑨𝟎 𝒆−𝛌𝒕

Equation 4

Avec : A(t) : activité à l’instant t (Bq ou Ci) A0 : activité initiale (Bq ou Ci)

 : constante radioactive (s-1) t : temps (s)

Dans le système international, l’unité de mesure de radioactivité est le Becquerel (Bq). Il correspond à une désintégration par seconde. Cependant, l’unité historique, encore très utilisée aujourd’hui en radiochimie, est le Curie (Ci). Il est défini comme le nombre de désintégrations d’un gramme de radium, soit 37 milliards de désintégrations par seconde. Un Curie équivaut donc à 3,7.1010 Bq ou 37 GBq.

1.3.2. Temps de demi-vie.

Le temps de demi-vie ou période d’un isotope radioactif est l’intervalle de temps au bout duquel l’activité de cet isotope est divisée par deux. Ce temps est lié à la constante de désintégration 

(Equation 5.

⇒ 𝒕𝟏/𝟐= 𝐥𝐧(𝟐) 𝝀

Equation 5

La période est une constante pour un radio-isotope donné, pouvant s’étaler entre une fraction de seconde à plusieurs milliards d’années.

1.3.3. Radioactivité spécifique.

La radioactivité spécifique (RAS) est l’activité d’un radionucléide par unité de poids, de volume ou de quantité de matière. La RAS maximale théorique est atteinte lorsque le radionucléide est pur, et est généralement évaluée pour une mole. La RAS est inversement proportionnelle à la période du radionucléide, ce qui implique que la quantité de molécule marquée par un radioélément, nécessaire pour obtenir une activité donnée, est d’autant plus faible que la période de ce radioélément est courte (Equation 6).

𝑅𝐴𝑆𝑚𝑎𝑥(𝐵𝑞/𝑚𝑜𝑙) =ln(2) 𝑥 𝑁𝐴 𝑡1/2

Equation 5

A titre d’exemple, la RAS théorique du fluor-18 est de 6,33.104

GBq/mol et celle du carbone-11 est de 34,13.104 GBq/mol.