Le moyen de communication moderne le plus répandu a été pendant longtemps la radio.
Plusieurs raisons l’expliquent: l’oralité du média, la très large facilité d’accès pour les
populations et une information parfois diffusée dans des langues locales. Les moyens de
transmission sont moins contraignants que ceux d’un autre type de média. La radio a joué un
rôle important dans le monde médiatique. De nombreux spécialistes du domaine s’accordent à
108
devient rapidement plus importante. Leur situation (celle des médias) se différencie selon les
pays. […] »
167.
Et, pour les professionnels, les raisons économiques restent aussi valables. La radio est
écoutée encore assez régulièrement aussi bien dans nos véhicules pour les informations, sur
nos téléphones portables ... C’est un média encore efficace dans de nombreux pays : « Aux
Etats Unis, 98% des gens l’écoute au moins une fois par semaine. Elle n’exige pas
d’infrastructures, et requiert peu d’investissements par les usagers qui, de surcroit, n’ont pas
besoin d’être alphabétisés »
168.
Certaines radios sont thématiques et gardent leurs publics (radio religieuses, communautaires,
...). Si elle sert en effet une revendication de liberté d’expression (en Afrique pendant les
indépendances), la radio est utile à d’autres causes, sous d’autres cieux, avec la même
efficacité. Les premières radios en Afrique étaient destinées aux colons et les programmes
émis depuis la métropole. L’ère des indépendances africaine aura pour effet d’africaniser les
médias.
Durant la période 1958-1962
169, les modes de diffusion de l’information vont se diversifier,
mais en se renforçant. En effet, la radio ne va pas disparaître au profit de la télévision, bien
que cette dernière prenne une place importante dans l’espace médiatique. La radio ne va pas
non plus disparaître au profit des journaux qui connaissent une croissance durant cette même
période. Tous ces différents médias vont se côtoyer, parfois de façon complémentaire. Nous
avons arrêté notre choix sur les trois pays d’Afrique Centrale retenus pour notre étude (le
Cameroun, la République du Congo et le Gabon).
En ce qui concerne les medias, la situation de la Guinée Equatoriale doit être évoquée car ce
pays compte un nombre important de médias pour un très faible nombre d’habitants et qui
font preuve d’un dynamisme particulier. Cela dénote l’ambition nourrie par ce pays en
matière d’information et de communication. Des ambitions qui se précisent davantage à
travers les projets d’accès aux nouvelles technologies. Pour autant, le cas équato-guinéen ne
167 Sous la direction de LENOBLE-BART Annie et André- TUDESQ Jean, Connaître les médias d’Afrique
subsaharienne, problématiques, sources et ressources, Paris, Karthala, 2008, 176p. p18.
168 Sous la direction de BERTRAND Claude-Jean Médias, Introduction À la Presse, la Radio Et la Télévision, Paris, Editions Ellipses, 320p, 2ème Edition., 1999, P 38.
109
fera pas l’objet d’une étude aussi approfondie que celle concernant les trois pays qui
constituent notre terrain privilégié d’étude.
- Le Cameroun et ses médias
Ce pays compte 13 937 000 habitants (1997-près de vingt millions en 2014) et une superficie
de 475 440 km
2. Le taux d’alphabétisation est estimé à 63% (cf. Institut Panos (2000).
Titre du journal
Statut Editeur/
Propriétaire
Périodicité Diffusion Date de
création
Isaha’a Boh Cameroun
Privé Institut d’études et de renforcement sur les médias
Quotidien
Cameroun Actualité
Privé ICCNET Quotidien on
line 10 000 visiteurs/ mois 1997 Cameroon Tribune
Public SOPECAM (société de presse et d’édition du Cameroun)
Quotidien 10 000 1974
Le Messager
Privé Le Messager (GMM) Trihebdomadaire 8 000 1979
La Nouvelle Expansion
Privé Groupe La Nouvelle Expression Trihebdomadaire 12 000-15 000 1991
Le Quotidien
Privé Association culturelle du groupe St. François
Trihebdomadaire 5 000 1996
The Herald Privé Boniface Forbin Trihebdomadaire 5 000 1992
Le Messager Popoli
Privé Le Messager GMM Bihebdomadaire 5 000 1993
Aurore plus Privé Michel Michant Moussala Bihebdomadaire 3 000 1988
Mutations Privé Protais Ayangma-outh Media Corporation SMC
Bihebdomadaire 6 000 1996
The Sketch Privé Sketch Communication Hebdomadaire 3 000 1996
The Messenger Privé Hebdomadaire 3 000 1991 Cameroon Post Privé Hebdomadaire 8 000 1969
110 Post
Happy Privé Mveng Hebdomadaire 2 000 1997
Dikalo Privé EMG-Equateur Media Group Hebdomadaire 5 000 1991
La Vision Privé Hebdomadaire 3 000-5 000
Le Liberal Privé Générale de communication GECOM Hebdomadaire 3 000 1985
Cameroon Outlook
Privé Hebdomadaire 10 000 1982
Le Patriote Privé Jean-Claude Evabekolo Hebdomadaire 5 000 1984
Ouest Echos
Privé Jean-Pierre Amougou Belinga-Groupe L’Anecdote
Hebdomadaire 4 000 1994
L’anecdote Privé Jean-Pierre Amougou Belinga-Groupe L’Anecdote Hebdomadaire 3 000 1996 L’Action Privé Parti Rassemblement démocratique du peuple camerounais RDPC Hebdomadaire 5 000 1992
Figure 11 Les médias au Cameroun. Source Institut Panos (20002) Afrique Centrale des médias pour la démocratie, Paris, Editions Karthala, p67.
Le Cameroun compte, en 2000, 8 chaînes de radios et de télévisions toutes confondues et une
vingtaine d’associations professionnelles
170.
111
- La République du Congo (Congo Brazzaville) et ses médias
Avec une population estimée à 2 745 000 (1997), le Congo a une superficie de 342 000 km
2et
bénéficie d’un tauxd’alphabétisation de 74,9%.
Titre du journal Statut Editeur/
Propriétaire
Périodicité Diffusi
on
Date de création
La Colombe Privé Parti RDPS Bimensuel 1991
La Liberté Privé Hebdomadaire
La Référence Privé Hebdomadaire
La Rumeur Privé Hebdomadaire 2 000 -
3 000 1992 La Semaine Africaine Confessionnel catholique ComafriqueConf. épisode du Congo Hebdomadaire 2 000 1992
Le Forum Privé Maurice Massengo Tiasse Hebdomadaire 2 000 1992
Le Pays Privé-Parti Pierre Mzé Hebdomadaire 2 000 1995
L’espérance Privé Hebdomadaire
Présence Economique
Privé Clotaire Hymboud Hebdomadaire 1 000 1996
Aujourd’hui Privé Société d’édition et de publicité
Bimensuel 1993
Brazza Hebdo Privé Claude Bivoua Bimensuel 25 000 1994
Le Chemin Confessionnel
évangélique
Bimensuel
Le Choc Privé Dominique de Marseille Asie Bimensuel 2 000 1990/91
Le Renovateur Privé Alain Flaubert Thombet Bimensuel 2 000 1995
Le Gardien Privé Gilles Andah-Leyet Bimensuel 2 000 –
2 500
1993 Des Jeunes pour les
jeunes
Privé Jean-Benoît Kekola-Ika Bimensuel 1 000 1995
Lumière Privé Institut congolais des Droits
de l’homme Trimestriel 1 000 – 2 000 1994 Maintenant Privé 1992 La Ruche Privé 1992
Figure 11 Les médias au Congo. Source
Institut Panos (2000) Afrique Centrale des médias pour la
démocratie, Paris, Editions Karthala, pp 124-125
112
Le Congo compte une douzaine de chaîne de radio et de télévisons et une bonne douzaine
d’associations de professionnels du domaine: des chiffres qui laissent penser qu’il y a une
liberté d’action des médias ou, du moins, un contexte favorable à leur éclosion.
113
- Le Gabon et ses médias
Le pays compte une population de 1500 000 habitants (2003), une superficie de 267 670 km
2et un taux d’alphabétisation de 63,2%.
Titre du journal Statut Editeur/
Propriétaire
Périodicité Diffusion Date de
création
L’Union Privé Quotidien 18 000 1975
La Cigale Enchantée
Privé Hebdomadaire
Esprit d’Afrique Privé Hebdomadaire
Le Réveil Privé Hebdomadaire
La Voix du Peuple Privé-Parti
Parti de l’unité du peuple Hebdomadaire 2 000 1991
La Tribune des sports
Privé Connexion Bimensuel 4 000 –
8 000
1994 Le Progressiste
Privé-Parti
Parti gabonais du progrès
Misamu Privé Misamu-Presse Bimensuel 3 000 1990
L’Insolite Privé Filipress Bimensuel 2 000 1995
Art et Loisirs Magazine
Privé Hugues Desormaux Mensuel 6 000 1995
L’Effort Gabonais Privé Hebdo
Le Bûcheron
Privé-Parti
Parti rassemblement national des bûcherons
Hebdomadaire 8 000 - 14 000
1990
L’Union Magazine Public Etat + Havas Mensuel 10 000 –
15 000
1987
La Griffe Privé Interpresse Hebdomadaire 8 000 –
12 000
1990 La Transparence Privé Grégory Ngbwa Mintsa
African
Management Today
Privé CCDM-Recto Trimestriel 1 200 1993
Figure 12 Les médias au Gabon. Source Institut Panos (2000) Afrique Centrale des médias pour la démocratie, Paris, Karthala, p 146
114
Le pays a vu le nombre de médias croître en une décennie. On y compte trois associations de
professionnels une agence de presse et 9 chaînes de radios et télévision (durant les années
2000).
a) La Guinée Equatoriale et ses médias
Avec ses 442 516 habitants, il l’un des plus petits pays du continent. Il a une superficie de
28 050 km
2et un taux d’alphabétisation de 89,6%.
Titre du journal Statut Editeur/
Propriétaire
Périodicité Diffusion Date de
création
La Gaceta de Guinea Equatorial
Sogedisa Mensuel 1996
El Sol Privé Hebdomadaire Arrêt
La Voz des Pueblo Public-Parti au pouvoir
Etat PDGE Hebdomadaire Arrêt
La Verdad Privé-Parti
opposition
N’a pu paraître que 3 fois
1991
Ebano Public Etat
Potopoto Public Etat
Radios et télévisions Lieu Création Statut Propriétaire
Radio National de Guinea Ecuatorial-RN Malabo/Bata Public Etat
Televisión Guinea Ecuatorial-RTVGE Malabo/Bata 1968 Public Etat
Radio Asonga-RA
Radio La Voz de Kientem-RVK-N TeleServicio
Figure 13 Les médias en guinée Equatoriale. Source
Institut Panos (2000) Afrique Centrale des
médias pour la démocratie, Paris, Editions Karthala,
p 159La Guinée Equatoriale compte cinq chaînes de radios et de télévision et une seule association
de journalistes et d’éditeurs de presse (ASOPGE : l’Association de prensa de Guinea).
L’activité des professionnels de ce corps de métier (pour les pays cités, du moins) connaît un
115
pays qui compte le moins d’associations professionnelles sur les quatre exemples (la liste de
données citée ci-dessus a été réalisée en 2000).
Dans le contexte des années durant lesquelles le multipartisme s’installe, les difficultés des
professionnels du domaine sont réelles. Les responsables des nouveaux partis politiques vont
s’approprier progressivement l’exercice de la diffusion de l’information, ce qui ne facilitera
pas la pratique de la liberté d’expression.
Les médias, en s’africanisant (après les indépendances), vont d’abord être des outils entre les
mains des hommes de pouvoir. Ces derniers vont avoir beaucoup de mal à laisser une marge
de manœuvre importante aux professionnels de l’information, réduisant ainsi leur espoir
d’une presse « libre ». D’ailleurs, le système politique va rythmer l’activité des médias. Du
parti unique au multipartisme, les supports de l’information et l’information connaîtront des
transformations importantes.
Toutefois, les journalistes africains (francophones) de cette époque sont très marqués par
l’esprit humaniste français. Plusieurs titres sont inspirés des journaux français. Les
professionnels africains vont alors entreprendre des actions parfois dissidentes vis à vis du
discours politique : des actions sanctionnées par la loi et tolérées par la déontologie. Une
déontologie qui pose quelques questions puisque, pour un certain nombre de professionnels,
la déontologie est le régulateur par excellence, quitte à se mettre en marge de la loi. Cela peut
constituer une limite, quand on sait que la liberté de la presse est conditionnée par
l’observation de certaines règles. Or, le reproche récurrent fait aux professionnels africains est
qu’ils sont parfois peu formés et donc pas toujours respectueux des règles (devoirs et
obligations) du métier. Plus précisément, ils peuvent choisir délibérément de ne pas se
conformer aux règles du métier (suivant les cas), afin de rendre l’information plus ‘‘juste’’.
Une attitude, qui ne facilite certainement pas le soutien nécessaire aux journalistes, qui sont
parfois victimes d’indélicatesse de la part de certains pouvoirs politiques.
Nous avons fait le constat de la brève durée de vie des journaux ; néanmoins, cette période va
enregistrer un nombre croissant de titres. C’est une des manifestations positives du
multipartisme, un multipartisme qui conforte l’esprit de renouveau dans la politique telle
qu’elle est pratiquée durant cette période.
Mais il faut s’interroger sur la capacité de ces médias à porter l’information et à la rendre
avec le maximum de réalité.
L’intérêt de cette réflexion est de comprendre le fonctionnement des médias afin de mesurer
la marge de manœuvre qui leur est réservée dans différents contextes (pré et post
116
démocratique). Cette même lecture permet d’entrevoir aussi – par extension - la marge
d’ouverture et d’accès à la liberté de s’informer via les TIC : une marge de liberté à laquelle
les Etats des pays cités seraient disposés à consentir. Car l’usage des TIC nécessite davantage
117