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à rapa et marotiri

Dans le document Environnement marin des îles Australes (Page 75-78)

Requin des Galapagos et banc de nanue observés aux abords d’un îlot rocheux de Marotiri.

© Manu San Felix

Inventaire de la biodiversité côtière des îlots de Marotiri.

© Manu San Felix

Bateau de recherche Hanse Explorer dans la baie de Ahurei à Rapa.

© Éric Berkenpas

LES SCIENTIFIQUES DE L’EXPÉDITION NATIONAL GEOGRAPHIC

ONT EXPLORÉ L’ENVIRONNEMENT SOUS-MARIN REMARQUABLE DE RAPA ET MAROTIRI.

Nous avons mis trois jours dans une mer tumultueuse et agitée pour atteindre la lointaine île de Rapa et son groupe d'îlots rocheux Marotiri, à 1180 km au sud-est de Tahiti. Notre équipe internationale de scientifiques, explorateurs et vidéastes s’est dirigée vers l'un des endroits les plus lointains sur terre pour percer les mystères de sa biodiversité marine et les secrets de sa culture. Le projet Pristine Seas Project du National Geographic a pour objectif d’aider à protéger les derniers lieux sauvages de l'océan et de restaurer la santé et la résilience d'écosystèmes uniques à travers des explorations, des recherches scientifiques, des analyses économiques et politiques, et une couverture médiatique internationale. Rapa et Marotiri sont parmi les zones les moins habitées et les moins utilisées de la région, et Marotiri est potentiellement la zone la mieux préservée du fait de son éloignement. En outre, la population de Rapa a une longue histoire de conservation marine. C'est une des dernières îles qui pratique encore le rahui, une mesure traditionnelle pour gérer collectivement les ressources marines et terrestres.

Après un long voyage perturbé par une forte houle, nous sommes arrivés à Rapa sous des pluies torrentielles et par des vents de 100 km/h. Mais le conseil de l'île et les habitants de Rapa ont accueilli notre équipe avec une très grande hospitalité.

Nos recherches ont abouti à la création de l’une des premières bases de référence complète de l'environnement marin autour de Rapa et de Marotiri.

Des explorations en plongée sous-marine ont permis de recenser les poissons, les coraux, d’autres invertébrés et la flore marine. Nous avons également utilisé des caméras à mi-profondeur pour examiner les eaux du large, et des caméras adaptées aux fonds sous-marins afin d’explorer la partie la plus profonde de l'océan autour de ces îles.

Au bout d'une semaine passée à plonger autour de Rapa, nous avons été frappés par les différences

étonnantes entre les peuplements de récif corallien.

Des jardins de corail recouverts de centaines d'oursins contrastaient avec d'épaisses forêts d’algues sargassum de plus d'un mètre de hauteur parfois, sans qu'un seul oursin soit visible ! L'existence de ces deux types d’habitat différents augmente la diversité du paysage marin et renforce la préservation de l'écosystème sous-marin unique de Rapa.

L'une des choses les plus frappantes que nous avons également remarquées au cours de nos plongées est le grand nombre d'espèces endémiques que l'on trouve sur les récifs coralliens, des espèces qu'on ne trouve nulle part ailleurs sur terre.

Après une semaine d'exploration des environs de Rapa, nous nous sommes embarqués pour un voyage de 6 heures vers Marotiri grâce au soutien du conseil de l'île et de deux pêcheurs de Rapa à bord. Si l'île de Rapa, éloignée mais luxuriante, représente la vie au bout du monde, Marotiri représente l’extrême de la vie sur terre ! Arrivés à Marotiri, nous avons trouvé une scène chaotique de vagues énormes qui se brisaient en murs d'écume sur les rochers. Marotiri ne se compose que de quelques rochers au beau milieu du Pacifique Sud, exposés à la force gigantesque des grandes houles océaniques. Il n'y a rien qui nous sépare de l'Antarctique et toute la vie marine est adaptée à cet environnement hostile.

Il a été très difficile de mettre à l’eau et de récupérer nos embarcations gonflables, mais après une descente rapide pour échapper aux vagues, nous nous sommes retrouvés dans une étendue sous-marine immense et déserte, où l'eau était d’une limpidité incroyable. Rapidement, nous avons vu des requins des Galápagos venir tout près et des sérioles se heurter à nos masques et à nos caméras. Nous avons dû nous battre pour continuer à travailler dans cette houle, même à 20 mètres de profondeur ; les poissons n'ont pas dû être impressionnés par nos compétences sous l'eau…

Alan Friedlander

Scientifique en chef, Université de Hawaii

Paul Rose

Chef de l'expédition, National Geographic Society

Scientifiques de l’expédition National Geographic dans la baie de Ahurei à Rapa.

© Manu San Felix

Îlots rocheux de Marotiri abritant des fonds sous-marins d’une étonnante biodiversité.

© Manu San Felix

Les requins et les grands sérioles, de près d'un mètre de long étaient les rois du récif, renforçant notre théorie selon laquelle les régions éloignées où la pression exercée par la pêche est très faible à nulle, sont dominées par de grands prédateurs au sommet de la chaîne alimentaire. Toutefois, malgré son éloignement et son environnement rigoureux, des flottes de pêche hauturière sont certainement venues dans cette zone, car nous avons remarqué un grand nombre de requins avec des hameçons dans la gueule. La préservation de Marotiri est critique, car de tels endroits sont uniques, très fragiles et de plus en plus rares.

Les caméras déployées à mi profondeur autour de Rapa et de Marotiri ont permis de décrire la vie au-dessous des vagues, dans ces sites éloignés où les plongeurs n'ont pas accès. Les requins étaient présents en grand nombre devant pratiquement toutes les caméras appâtées, avec parfois plus d’une vingtaine d’individus. Les requins des Galápagos étaient les plus nombreux, mais nous avons remarqué deux jeunes requins tigres dans la zone occidentale la plus éloignée de Rapa, ce qui prouve la présence de ces prédateurs au sommet de la chaîne alimentaire. Les systèmes de Rapa et de Marotiri sont peut-être des centres vitaux dans les

cycles de vie de ces requins, ce qui rend plus urgente encore la protection de cette zone.

Après avoir exploré, plongé, écrit, photographié et tout simplement vécu à Rapa pendant plusieurs semaines, il était difficile de partir. Nous nous sentions fortement liés à cette communauté et il nous était difficile de la quitter. Nous avons assisté à de nombreuses réunions du conseil de Rapa, du comité du rahui et à des réunions publiques avec la communauté afin de partager nos résultats, présenter les films réalisés et les images de l'expédition, échanger des histoires, ainsi que notre passion commune pour l'océan. Nos investigations ont montré que les grands herbivores, surtout les perroquets, les mulets et les poissons-chirurgiens, étaient plus abondants dans la zone protégée par le rahui par rapport aux zones ouvertes entourant Rapa, ce qui montre bien l'efficacité de cette stratégie de gestion. Nous espérons que notre expédition aidera la population de Rapa dans ses efforts pour protéger leurs eaux. Nous avons beaucoup à apprendre de ces pratiques traditionnelles de préservation des ressources, qui nous montrent l’exemple pour enrayer le déclin des ressources marines mondiales et pour améliorer la qualité de notre planète pour les générations futures.

Conseil municipal de l’île de Rapa avec quelques scientifiques.

© Jérôme Petit

Requin des Galapagos et banc de nanue observés lors des plongées autour de Marotiri

© Manu San Felix

Dans le document Environnement marin des îles Australes (Page 75-78)