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R´ egionalisation des changements climatiques

1.3 R´ egionalisation et impacts en France

1.3.1 R´ egionalisation des changements climatiques

L’´etude des impacts du changement climatique n´ecessite encore un recours `a la d´esagr´ega- tion spatiale des r´esultats fournis par les mod`eles climatiques globaux. Classiquement, les m´ethodes de d´esagr´egation sont class´ees en deux grandes familles, les m´ethodes dy- namiques et les m´ethodes statistiques.

Les m´ethodes dynamiques d´esignent le plus souvent l’utilisation d’un mod`ele r´egional qui est forc´e `a ses fronti`eres par un mod`ele global. Le mod`ele climatique r´egional r´esout, en g´en´eral, les mˆemes ´equations physiques qu’un mod`ele climatique global `a une r´esolution nettement plus ´elev´ee, autour d’une dizaine de kilom`etres `a l’heure actuelle, mais sur un domaine limit´e. Cette meilleure r´esolution permet, entre autre, de mieux tenir compte des effets de l’orographie et du trait de cˆote (Frei et al.,2006). Malgr´e tout, une part de param´etrisation des processus physiques est encore indispensable, notamment sur la formation des nuages et la convection (Maraun et al.,2010). Les mod`eles r´egionaux sont capables de reproduire les caract´eristiques spatiales et temporelles des pr´ecipitations dans des r´egions du monde tr`es diverses, et d’autant mieux que la r´esolution est ´elev´ee (Rauscher et al.,2010).

Bien que les r´esultats des mod`eles r´egionaux soient encourageants, leur r´esolution moyen- ne est encore insuffisante pour la plupart des mod`eles d’impacts (Maraun et al.,2010). De plus, les r´esultats de ces mod`eles r´egionaux sont toujours tr`es sensibles `a certaines param´etrisation physiques, notamment pour la simulation des pr´ecipitations (Bachner

et al.,2008). Ces derniers ´el´ements montrent la n´ecessit´e d’utiliser les r´esultats du plus grand nombre de mod`eles r´egionaux possible, ceci afin d’estimer au mieux les incertitudes

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li´ees aux faiblesses de ces mod`eles. Les biais des mod`eles r´egionaux sont encore impor- tants ce qui ne permet pas toujours d’utliser directement leurs r´esultats sans corrections de biais pr´ealable (Teutschbein et Seibert, 2012; Muerth et al.,2013). Ces corrections de biais constituent une nouvelle source d’incertitude.

Le second type d’approche pour d´esagr´eger spatialement les r´esultats des mod`eles cli- matiques globaux sont les m´ethodes statistiques. Il n’est plus question ici de r´esoudre des ´equations physiques, il s’agit d’´etablir, `a partir des observations, une relation statis- tique entre des variables de grandes ´echelles, les pr´edicteurs, et les variables n´ecessaires `

a l’´etude d’impact, typiquement les pr´ecipitations en hydrologie. Cette relation statis- tique peut ˆetre construite de nombreuses mani`eres diff´erentes, c’est g´en´eralement cette partie qui distingue les m´ethodes entre elles. Maraun et al. (2010) effectue un inven- taire tr`es complet des m´ethodes de d´esagr´egation statistique. Un r´eseau d’observation dense maintenu depuis suffisamment longtemps, environ une trentaine d’ann´ees, est un ´el´ement indispensable `a la d´esagr´egation statistique.

Parmi la vari´et´e de m´ethodes de d´esagr´egation existantes, il est possible d’en distin- guer quelques grandes familles, du moins les plus couramment utilis´ees en France. Les mod`eles lin´eaires consistent `a d´ecomposer la variable `a d´esagr´eger comme une combi- naison lin´eaire des pr´edicteurs. Plus ´elabor´es que cette approche, les mod`eles lin´eaires g´en´eralis´es (Generalized Linear Models - GLM,Dobson(2002)) permettent de consid´erer une variable `a d´esagr´eger qui peut avoir une distribution statistique diff´erente de celle des pr´edicteurs.

La m´ethode des analogues (Lorenz, 1969; Zorita et Storch, 1999) est ´egalement une approche couramment utilis´ee pour les applications hydrologiques. C’est une m´ethode bas´ee sur le r´e-´echantillonnage des observations de la variable `a d´esagr´eger.

Les observations `a haute-r´esolution des variables `a d´esagr´eger sont associ´ees, sur la mˆeme p´eriode, `a des observations de l’´etat des pr´edicteurs. Cette p´eriode est appel´ee p´eriode d’apprentissage, elle permet d’´etablir la relation entre les pr´edicteurs et les variables `a d´esagr´eger. Les pr´edicteurs du jour `a d´esagr´eger sont ensuite compar´es aux pr´edicteurs observ´es sur la p´eriode d’apprentissage, `a l’aide d’une m´etrique d´efinie, le crit`ere d’ana- logie. Le jour analogue est d´efini comme ´etant le jour pour lequel l’´etat des pr´edicteurs observ´es est le plus proche de l’´etat des pr´edicteurs du jour `a d´esagr´eger. Enfin, les observations des variables `a d´esagr´eger du jour analogue sont d´efinies comme l’´etat des variables `a haute-r´esolution du jour `a d´esagr´eger. Pour trouver un jour observ´e le plus proche possible du jour `a d´esagr´eger, il est n´ecessaire d’avoir une p´eriode d’apprentis- sage la plus longue possible, d’autant plus que le domaine g´eographique sur lequel les pr´edicteurs sont compar´es, le domaine d’analogie, est grand.

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Avec la m´ethode des analogues, aucune hypoth`ese particuli`ere n’est faite sur les pro- pri´et´es statistiques de la variable `a d´esagr´eger. Cette m´ethode permet de conserver la coh´erence spatiale de la variable `a d´esagr´eger ainsi que la coh´erence physique entre les variables d´esagr´eg´ees lorsqu’il y en a plusieurs. La principale limite de la m´ethode des analogues est qu’il est impossible d’obtenir un ´etat des variables `a d´esagr´eger qui n’ait pas d´ej`a ´et´e observ´e par le pass´e. La d´esagr´egation de variables dont les changements futurs vont au-del`a de la variabilit´e observ´ee ne sera pas possible sans une adaptation de la m´ethode de base (Beersma et Adri Buishand,2003).

L’approche des analogues a ´et´e largement utilis´ee en France pour la d´esagr´egation des pr´ecipitations `a des fins hydrologiques (Timbal et al., 2003; Obled, 2002; Radanovics

et al., 2013). L’une des m´ethodes les plus r´ecentes en France, toujours bas´ee sur la m´ethode des analogues, s’attache `a trouver le domaine d’analogie, le domaine sur lequel les pr´edicteurs sont ´etudi´es, le plus appropri´e (Radanovics et al., 2013). Il sort de cette approche qu’un domaine d’analogie optimal pour l’ensemble du pays n’existe pas. Cette hypoth`ese d’unicit´e du domaine d’analogie peut sembler raisonnable pour le bassin de la Seine par exemple, nettement moins en revanche pour le bassin versant Rhˆone `a la topographie complexe par exemple. Toutefois, l’optimisation du domaine d’analogie pour des sous-bassins versants pose ensuite la question de la coh´erence spatiale des variables d´esagr´eg´ees entre chaque sous-bassins.

L’essentiel dans le choix, ou le d´eveloppement, d’une approche de d´esagr´egation sta- tistique est peut-ˆetre de toujours garder `a l’esprit l’objectif final de la m´ethode. Une m´ethode de d´esagr´egation ne pourra certainement pas ˆetre indiff´eremment utilis´ee pour l’´etude de l’impact du changement climatique sur le cycle hydrologique, les productions agricoles ou sur la biodiversit´e foresti`ere. Les principales variables atmosph´eriques pi- lotant les changements de chacun de ces sous-syst`emes ne sont pas n´ecessairement les mˆemes. De plus, au-del`a du sous-syst`eme ´etudi´e, il est aussi important de consid´erer les ´echelles de temps et les types d’´ev`enements qui seront analys´es ensuite. Une m´ethode adapt´ee `a la reproduction des changements moyens et des modes de variabilit´e basse- fr´equence de l’atmosph`ere ne sera pas n´ecessairement tr`es performantes pour la re- production, par exemple, de l’´evolution des extrˆemes. Il n’existe probablement aucune m´ethode qui soit parfaitement adapt´ee `a toutes les situations `a la fois.

Cette conclusion am`ene donc `a la question de l’´evaluation de la m´ethode de d´esagr´egation. Comment s’assurer que la m´ethode de d´esagr´egation utilis´ee sera bien adapt´ee `a l’objectif final ? A ce titre, les recherches actuelles s’orientent d´esormais plutˆot dans l’´elaboration d’outils d’´evaluation des m´ethodes de d´esagr´egation en fonction des objectifs recherch´es (Maraun et al.,2015).

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