• Aucun résultat trouvé

2. Pourquoi le Web social pour l’apprentissage du FLE ?

2.4. Les rôles des utilisateurs du WS dans le FLE

Les utilisateurs du WS pour l’enseignement/apprentissage des langues étrangères et notamment du FLE jouent différents rôles, qui sont généralement au nombre de trois :

2.4.1. Le rôle de l’apprenant

Le rôle de l’apprenant au sein du WS est de consulter les différentes ressources mises à sa disposition que ce soit des ressources didactiques, fabriquées ou authentiques. Il est donc dans ce cadre « consultant de ressources ». Il est aussi « communiquant » avec les autres membres du même espace virtuel pour demander une information, répondre à une question ou échanger avec les autres. Les apports du WS le rendent maitre de son apprentissage. Le WS lui permet de « définir ses besoins et d’évaluer ses lacunes [de] construire son propre apprentissage » (Loiseau, M. & al.2010).

Ce rôle demande aussi de l’apprenant qu’il s’engage pleinement dans la formation qu’il a déjà accepté de suivre. Cet engagement est crucial dans l’apprentissage en général et dans l’apprentissage collectif en ligne en particulier.

2.4.2. Le rôle de l’enseignant

Le WS donne la possibilité à l’enseignant de jouer de nouveaux rôles qui n’étaient auparavant pas disponibles dans l’enseignement traditionnel. Trois modèles sont proposés par Philippe Meirieu (2006) pour l’enseignant du 21ème siècle, à savoir : le modèle du « clerc », le modèle de l’« enseignant-bibliothécaire » et le modèle du « maitre-compagnon ». Ces trois modèles existent aujourd’hui dans les sites du WS dédiés au FLE. Deux chercheurs, Chrysta Pélissier et Hani Qotb (2012), essaient, dans un article113 sur les réseaux sociaux, de définir ces trois modèles dans le site social qu’ils analysent, Palabéa, qui concerne l’apprentissage des langues.

2.4.2.1. Le modèle du « clerc »

Il s’agit du modèle de l’enseignant qui adopte la démarche traditionnelle. En occident, ce modèle est associé au professeur d’université qui donne des cours à des étudiants attentifs dans un amphithéâtre. Il s’apparente à un professeur parfait car il touche un salaire plus élevé et enseigne aux meilleurs étudiants. Il a, aux yeux des autres, un statut prestigieux. De leur côté, Pélissier et Qotb, (2012) définissent ce modèle « par la mise à disposition d’un savoir sous une

113 Chrysta Pélissier et Hani Qotb, « Réseaux sociaux et apprentissage des langues – Spécificités et rôles de

l'utilisateur », Alsic [En ligne], Vol. 15, n° 2 | 2012, mis en ligne le 25 juin 2012, Consulté le 09 avril 2014. URL : http://alsic.revues.org/2513 ; DOI : 10.4000/alsic.2513

forme particulière, exprimée par le maître lui-même. » Ils trouvent ce modèle, dans leur site étudié, à travers un utilisateur qui « crée et/ou dépose et/ou donne accès à des documents destinées à faciliter l’apprentissage de la langue cible. » Ils voient que ce rôle de « clerc- contributeur de ressources » qui, consiste à proposer aux autres des sources, que ce soit des liens Internet ou des ressources fabriquées par le même utilisateur, contribue à l’évolution du Web participatif.

2.4.2.2. Le modèle de l’« enseignant-bibliothécaire »

Avec ce modèle, Meirieu (2006) décrit l’enseignant comme quelqu’un qui « ne détient pas tous les savoirs » et qui « aide simplement chacun à se retrouver dans le labyrinthe de la bibliothèque ». Son travail est de guider, de conseiller et d’expliquer ce que les autres utilisateurs trouvent difficile. Il leur fournit (ou précise) les démarches nécessaires pour chercher la bonne information sans se perdre dans la masse des informations disponibles. Il est médiateur entre les apprenants et le savoir. Cependant, son travail ne lui permet pas de leur dire comment appliquer ce savoir dans tel ou tel contexte. Pélissier et Qotb, (2012), dans leur analyse du Palabéa, appellent ce modèle « bibliothécaire-capitalisateur de ressources » ; il renvoie au responsable de la classe virtuelle dans ce site, qui fournit aux autres utilisateurs différentes ressources sans leur proposer un scénario ou des activités pédagogiques.

2.4.2.3. Le modèle du « maître-compagnon »

Il s’agit de l’enseignant qui soutient son apprenant en jouant le rôle de son compagnon et qui essaie de l’accompagner tout au long de son apprentissage, notamment en ce qui concerne les difficultés qu’il rencontre. Meirieu (2006) décrit la tâche de l’enseignant dans ce modèle ainsi : « il n’explique pas abstraitement ce qu’il faut faire pour envoyer ensuite l’apprenti le faire tout seul chez lui ; il fait devant, fait avec, guide le geste, commente le résultat, fait refaire quand c’est nécessaire jusqu’à ce que l’apprenti se hisse au niveau de maître et parvienne à réaliser son “ chef-d’œuvre ”. » Pélissier et Qotb (2012) disent que ce modèle, qui existe dans Palabéa, est représenté par l’« administrateur de communautés » mais il n’est pas complètement réalisé car les apprenants ne sont pas accompagnés pas à pas à dans la résolution de leurs problèmes et ils se trouvent seuls dans leur démarche.

2.4.3. Le rôle du tuteur

Le terme « tuteur » est un terme très connu dans le domaine de l’apprentissage/enseignement en ligne parce que « la mise en place du “tutorat pédagogique“ relève d’un souci d’aide individualisée aux apprenants114 [..] » Gremmo (2009). Ce terme possède plusieurs synonymes,

dont « modérateur, facilitateur, coach, accompagnateur ». Garrot-Lavoué et al. (2009) proposent seize rôles de tuteur dans une formation en ligne, classés en fonction de trois facteurs principaux :

-! Rôles liés à la médiation des communications : organisateur des sessions (contrôler l’ordre et l’écoulement des sujets de discussion), catalyseur social (créer un environnement convivial), catalyseur intellectuel (inciter les étudiants à discuter, critiquer), accompagnateur technique (résoudre des problèmes techniques ponctuels).

-! Rôles dépendant de la nature de la tâche : pédagogue (fournir des ressources...), expert du contenu (être expert du domaine), architecte pédagogue (proposer un scénario pédagogique),

qualimétreur (soigner la qualité des produits), évaluateur formatif et/ou sommatif (déinir des

critères d’évaluation de l’activité, solliciter l’autoévaluation), coordinateur du groupe de travail (aider le groupe dans son travail), coach relationnel (motiver l’apprenant à s’intégrer dans le groupe), méta-catalyseur (aider l’apprenant à articuler son projet personnel avec celui du groupe).

-! Rôles dépendants de la temporalité de la formation : personnalisateur (prendre en compte le parcours de chacun, ses besoins…), autonomisateur (faciliter la maitrise des compétences), superviseur (superviser le déroulement des activités), intervenant (intervenir si nécessaire).

Sa fonction principale est de « veiller à aménager un espace qui permet aux apprenants d'interagir socio-affectivement le plus souvent possible, et par conséquent de s'impliquer personnellement dans la tâche115 » (Vetter A, 2004).

114 Gremmo. M.-J. (2009). Conseiller en langues : Proposition d’analyse de deux décennies de théorie et pratique(s)

pour une approche comparée du tutorat en FOAD. In Rivens Mompean, A. et Barbot, M.-J. (dir.). Dispositifs médiatisés en langues et évolutions professionnelles pour l'accompagnement-tutorat. Villeneuve d'Ascq : Université Lille3. Collection UL3 “travaux et recherches ”, éditions Ceges, p. 173-190. Consulté le 10 avril 2014 sur [http://hal.inria.fr/docs/00/61/98/19/PDF/Lille_2008_Gremmo_Conseiller_en_langues.pdf]

115 Vetter A. (2004). "Les spécificités du tutorat à distance à l'Open University : enseigner les langues avec

Lyceum". Apprentissage des langues et systèmes d'information et de communication (ALSIC), vol. 7, 1, novembre 2004, pp. 107-129. http://alsic.revues.org/v07/vetter/alsic_v07_06-pra2.htm, mis en ligne le 15/11/2004.

D’autres fonctions sont attribuées au tuteur en ligne par Nissen (2009a : 4 ; 2009b : 196) telles que « la fonction pédagogique, sociale et motivationnelle et organisationnelle ». S’ajoute à ces fonctions celle du « conseiller ». Selon Gremmo (2009), le rôle du conseiller créé en 1970 est différent de celui de l’enseignant. Cette volonté de rupture avec l’enseignant a comme objectif de convaincre explicitement les apprenants souhaitant apprendre une langue étrangère qu’il s’agit d’une autre façon d’enseigner.

Le terme de conseiller cherchait donc à différencier ce rôle de celui d’enseignant, pour refléter une conception de l’intervention pédagogique fondée sur une logique d’apprentissage et d’autoformation, et non une logique d’enseignement et d’hétéroformation […] [Il] vise à favoriser le développement de la compétence d’apprentissage chez l’apprenant et à lui apporter un soutien dans son apprentissage proprement dit. Il s’agit donc pour le conseiller, non pas de prendre les décisions les mieux adaptées à l’apprenant, mais d’offrir une aide à la décision, en aval et en amont de l’expérience de l’apprenant […] (Gremmo, 2009).

Le conseiller et l’apprenant travaillent ensemble en binôme pour chercher des réponses qui correspondent aux demandes de l’apprenant : « Il s’agit donc, pour l’apprenant, de construire sa personnalité d’apprenant, et pour le conseiller, de personnaliser son expertise pour mieux correspondre à l’apprenant » Gremmo (2009). Plusieurs notions sont attribuées à la fonction du conseiller par Gremmo (2009) telles que la « non-décisionnalité, non directivité et non obligation » : la non-décisionnalité signifie que le conseiller ne doit « pas prendre les décisions à la place de l’acteur principal ». Cette non-décisionnalité engendre, selon lui, une autre dimension, c’est « le droit à l’intervention » consistant à avoir « le droit d’intervenir au moment où « bon leur semble », et non pas seulement en réaction à une demande de l’apprenant, en justifiant ce droit à l’intervention par leur expertise ».

Il est à signaler que dans certains cas, le tuteur « travaille également en partenariat avec l’enseignante qui est responsable des sessions méthodologiques "apprendre à apprendre" réservées au dispositif d'autoformation guidée116 » (Rivens Mompean, 2012).

Cette fonction du tutorat n’est pas obligatoire dans tous les sites d’apprentissage en ligne. Elle ne l’est pas dans Babbel qui « n’oblige aucunement ses utilisateurs à assumer la fonction de tuteur117» (Loiseau, M. & al.2010), alors que dans d’autres sites sociaux comme Palabéa, deux

116 Annick Rivens Mompean, « Tutorat en ligne – Analyse des pratiques d'interaction et de feedback dans un

blogue pour l'apprentissage de l'anglais », Alsic [Online], Vol. 15, n° 2 | 2012, Online since 25 June 2012, connection on 13 April 2014. URL : http://alsic.revues.org/2493 ; DOI : 10.4000/alsic.2493

rôles sont identifiés, le premier, c’est celui d’« agent de convivialité » (Pélissier et Qotb, 2012), un tuteur qui, dans un cadre institutionnel, en formation à distance ou hybride, assure un « environnement convivial » dans lequel les apprenants savent que leur apprentissage est possible dans ce contexte. Le second, c’est "agent-évaluateur" (Mangenot et al., 2007) qui évalue les productions de la communauté visée. Il s’agit d’évaluer tout ce que les participants produisent sur le site social, y compris les échanges entre eux. D’ailleurs, certains sites sociaux permettent à l’utilisateur de jouer deux rôles à la fois, celui de l’apprenant et celui de tuteur : « il convient d’expliquer le fonctionnement global des sites, dont l’un des dénominateurs communs est de permettre à l’utilisateur de jouer tantôt le rôle d’apprenant, tantôt celui de tuteur118 » (Loiseau, M. & al., 2010).

Il est à noter que quand il s’agit d’aborder un nouveau sujet de l’apprentissage en ligne, on revient à l’apprentissage institutionnel pour relever les points communs et divergents entre les deux.