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Le rôle et les fonctions de la prise de notes en situation d’enseignement/ apprentissage à l’université

La prise de notes, une activité d’apprentissage à l’interface de la compréhension et de la production de textes

Chapitre 11. La prise de notes en situation enseignement/apprentissage

11.2. Le rôle et les fonctions de la prise de notes en situation d’enseignement/ apprentissage à l’université

L’intérêt de l’activité de prise de notes dépasse le moment où elle est exercée. En effet, les notes prises seront exploitées au moment de la rédaction. La prise de notes exerce des fonctions précises dans le processus d’apprentissage: l’encodage et le stockage externe d’informations. Ces deux fonctions apparaissent à des moments différents de l’activité.

11.2.1. L’encodage

La prise de notes (PDN) traite l’information entendue ou lue en la reliant aux connaissances antérieures du lecteur. Mayer (1987) précise que l’apprentissage est favorisé par des connexions internes et externes. Les connexions internes relient les informations contenues dans le texte avec les connaissances antérieures via les connexions externes. Les expériences ont été menées auprès d’étudiants pour tester non seulement l’effet de la prise de notes avant et après la lecture d’un texte mais aussi après la passation de tests (rappels libres et questions à choix multiples). Elles ont mis en évidence l’incidence des connaissances du lecteur-auditeur dans les tests de rappel.

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11.2.2. Le stockage externe des informations

Les deux situations de prises d’informations à la base de notre recherche (écouter un cours magistral ou bien lire un polycopié) ont la même finalité qui est la relecture et l’écriture de ces notes sous une forme cohérente. Toutefois, en l’absence d’apprentissage spécifique de cette activité, les étudiants développent leurs propres stratégies de stockage externe de l’information (Kiewra & Franck, 1988 ; Lindberg-Risch & Kiewra, 1990). En effet, le noteur doit produire des notes afin de se constituer une mémoire écrite d’informations à exploiter en fin du cours magistral ou en fin de lecture du polycopié.

De plus, le mode d’accès à l’information modifie qualitativement les notes prises par les étudiants. Le cours magistral et la lecture du polycopié font appel à des processus cognitifs et attentionnels particuliers qui supposent des fonctions d’encodage et de stockage différentes lors de l’activité de prises de notes.

11.3. L’analyse de deux situations d’enseignement/apprentissage à l’université : l’audition d’un cours magistral et la lecture d’un polycopié

Dans la suite de notre travail, nous allons étudier les caractéristiques des deux situations (l’écoute d’un cours magistral et la lecture d’un polycopié) sans pour autant nous attarder dans leur fonctionnement, car ce n’est pas l'objet de notre recherche. Notre but est d’étudier la prise de note à la fois comme des traces de l’activité de compréhension et de mémorisation des deux situations d’apprentissage et comme aide à l’activité de révision et de réécriture.

11.3.1. Les caractéristiques du cours magistral

Le cours magistral est un genre de discours universitaire auquel les étudiants n’ont pas été confrontés durant leurs études secondaires. Le cours magistral est dispensé par un enseignant spécialiste de la matière. C’est un

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discours oral, théorique et long (Simonin-Grumbach, 1975). Les informations scientifiques présentées dans le cours magistral sont plus ou moins inconnues des étudiants.

Le face à face « l'enseignant qui parle » et « les étudiants qui écoutent et qui écrivent » est caractérisé comme oralo-graphique, c’est-à-dire « C’est un moment oral « borné » de toute part par l’écrit et qui n’a d’existence que par l’écrit » (voir Bouchard, 1999). L’aspect interactif du discours y est important. En effet, même si les étudiants sont rarement invités à prendre la parole dans un cours magistral, leurs regards vers l’enseignant et sur les écrits de leurs voisins ainsi que leurs hésitations dans la prise de notes obligent l’enseignant à ralentir son débit, à faire des retours en arrière dans le but de mettre l’accent sur les idées les plus importantes du cours présenté.

L’activité de prise de notes dans un cours magistral est intense et contraignante. En effet, l’étudiant noteur doit régler sa vitesse d’écriture à celle de la parole de l’enseignant et par conséquent développer des stratégies d’adaptation (Piolat, 2001; Piolat, Roussey & Barbier, 2003). Elles consistent à utiliser des procédés conventionnels, idiosyncrasiques et personnels (abréviations, icônes, troncatures, raccourcissements lexicaux et syntaxiques, style télégraphique, pictogrammes) (Piolat, 2004 ; Piolat & Boch, 2004) et une gestion non linéaire de l’espace graphique (Andrieux-Reix & Bosredon, 2004 ; Boch, 1998 ; Branca-Rosoff, 1998 ; 2004). Ces facteurs permettront aux étudiants de saisir le plus d’informations possibles de l’enseignant en un laps de temps très court.

Le manque de maîtrise de la langue et donc ipso facto de la spécialité en langue étrangère constitue un facteur de blocage pour prendre des notes efficaces. En effet, noter dépend non seulement du niveau de connaissances des étudiants dans le domaine, mais aussi du niveau de leurs performances linguistiques et métalinguistiques, car « des performances linguistiques amoindries nécessitent des ressources cognitives importantes et l’insuffisance

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des automatismes de surface limitent la saisie rapide des informations » (Barbier, 1997 p.182; voir Barbier, 1998a ; 1998b ; Gaonac’h, 1999).

11.3.2. Les caractéristiques du polycopié

Le polycopié selon les chercheurs vient soit en complémentarité soit en remplacement du cours magistral. La dimension temporelle les oppose, le cours magistral est donné à un temps (T) et n’est plus répété. Par contre, le polycopié pourrait être accessible à tout moment dans des conditions moins tendues de prises d’informations. « La transmission de savoirs écrits par la voix autorisée de l’enseignant reste vécue comme le mode d’initiation disciplinaire essentiel pour beaucoup de jeunes étudiants et dans beaucoup de disciplines »(voir Bouchard, Parpette & Pochard, 2003).

Le polycopié est un discours didactique neutre et étroitement fonctionnel (Bouchard, 1999). Tant que l’étudiant est confronté seul à son texte, il est appelé à développer des habitudes idiosyncrasiques propres, loin de toute interaction avec l’enseignant. En comparant son discours avec celui de ses pairs, il pourra ainsi évoluer et mieux apprendre.

11.4. La prise de notes à l’université dans deux situations d’apprentissage: à l’oral (l’audition d’un cours magistral) et à l’écrit (la lecture du polycopié)

Bien que la prise de notes soit une activité enseignée en L2 dans le cursus secondaire algérien, elle reste cependant mal maîtrisée par les étudiants à l’université. Ce constat d’échec tend à se généraliser dans de nombreux contextes, différents de celui de l’Algérie. En effet, Boch (1998 ; 2000), Romainville et Noël (1998) et Bessonnat, (1995), précisent que les élèves doivent être habitués dès leur entrée au lycée aux différentes compétences méthodologiques adaptées aux difficultés aux différents cycles d’enseignement et à chaque contexte disciplinaire

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La prise de notes est considérée comme une démarche active de prise d’informations (Simonet & Simonet, 1998) ou de sélection de celles-ci. Selon Piolat (2001), la PDN active les opérations complexes de compréhension en profondeur, de hiérarchisation et de sélection de l’information. Des études menées sur la prise de notes lors de l’écoute d’un cours ou de la lecture d’un polycopié, ont montré que les étudiants essaient le plus souvent de préserver le contenu de discours de l’enseignant (Piolat, Roussey & Barbier, 2003).

À ce sujet, Canivet, Lecocq Ledru et Sicaire (1986) montrent que lors de l’écoute d’un cours magistral, la prise de notes ne nécessite pas un grand degré de compréhension, mais que ses retombées se font ressentir lors de l’activité de réécriture et de révision. Ce qui indique que l’effort cognitif de l’étudiant impliqué dans cette tâche est orienté soit vers la compréhension, soit vers la production (Kellogg, 1988 ; 1996 ; 1998). Des études ont comparé cet effort lors de l’écoute d’un cours ou de la lecture d’un polycopié. Elles ont montré qu’il était plus coûteux de noter en écoutant que de noter en lisant (Roussey & Piolat, 2003).

En résumé

Nous avons dans ce chapitre défini l’activité de prise de notes dans deux situations d’apprentissage, le cours magistral (CM) et la lecture du polycopié (POLY). La PDN a pour fonction d’encoder et de stocker les informations entendues ou lues. Nous avons précisé que l’audition d’un cours magistral et la lecture d’un polycopié présentent des caractéristiques de fonctionnement différentes.

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Chapitre 12. La prise de notes, une activité à l’interface de la compréhension