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Rôle dans le développement et la différenciation

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Chapitre 3 : La protéine kinase activée par l'AMP (AMPK) : le senseur métabolique essentiel

4. Fonctions de l'AMPK dans le système nerveux central (SNC)

4.2. Rôle dans le développement et la différenciation

4.2.1.

Rôle dans le développement cérébral

Outre son rôle dans la régulation de la prise alimentaire, l'AMPK neuronale a également été montrée pour jouer un rôle dans le développement cérébral. L'implication de l'AMPK dans ce processus a été mise en évidence grâce à des expérimentations effectuées chez le modèle Drosophila. La drosophile est un modèle intéressant pour étudier les fonctions de l'AMPK puisque contrairement aux mammifères où chaque isoforme est codée par un gène distinct, chez la drosophile il n'existe que

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trois gènes codant chacun pour une des trois sous-unités de l'AMPK (Pan and Hardie, 2002). La réalisation d'un mutant pour la sous-unité β de l'AMPK, dénommé alicorn (alc), a ainsi permis de montrer que l'inhibition de l'expression de cette sous-unité provoque une dégénérescence rapide et importante des photorécepteurs présents au niveau de la rétine. Toutefois, comme cette dégénérescence se produit uniquement après la différenciation des neurones, cela suggère que l'AMPK joue un rôle essentiel dans le maintien des neurones matures plutôt que dans leur développement (Spasic et al., 2008). Le même phénotype a également été observé chez la drosophile löchrig (loe), au sein de laquelle la sous-unité γ de l'AMPK est fortement altérée (Tschäpe et al., 2002). Enfin, une étude réalisée cette fois-ci chez la souris par le groupe et Dasgupta, a permis de mettre en évidence l'implication de l'AMPK dans le développement neuronal. En effet, en utilisant un modèle murin transgénique pour la sous-unité β1 de l'AMPK, ils ont montré que celles-ci présentaient des anomalies structurales et fonctionnelles au niveau cérébral, dont notamment des atrophies de certaines régions cérébrales (hippocampe, cervelet) et une perte massive des neurones dans le système nerveux central (SNC). De plus, ces altérations ont été montrées pour être dues à une diminution de l'activité de l'AMPK et plus précisément à une réduction de la phosphorylation par l'AMPK de la protéine du rétinoblastome (Dasgupta and Milbrandt, 2009). Toutefois, la réalisation d'autres modèles murins transgéniques pour la sous-unité β1 n'ont pas permis de reproduire ce phénotype à ce jour (Dzamko et

al., 2010). L'ensemble de ces données rend ainsi difficile l'élucidation du rôle que peut avoir l'AMPK

dans le développement neuronal.

4.2.2.

Rôle dans la polarité neuronale

La polarisation des neurones est un processus essentiel du développement neuronal puisqu'elle permet d'assurer un transport efficace de l'information nerveuse permettant ainsi par la suite la formation des synapses et par conséquent, la fondation d'un réseau neuronal complexe et fonctionnel. La polarisation est initiée par la croissance rapide d'un prolongement neuronal appelé neurite qui deviendra l'axone. Ce dernier est reconnaissable des autres prolongements appelés dendrites, de part sa taille considérable par rapport aux autres neurites. La croissance de l'axone nécessite énormément d'énergie, et ce dans le but de produire les protéines nécessaires à son élongation. Il n'est donc pas surprenant que l'AMPK puisse jouer un rôle dans ce processus. En effet, des études effectuées dans des cultures primaires de neurones d'hippocampes montrent que lorsque celles-ci sont traitées avec l'activateur de l'AMPK, AICAR ou infectées avec le constitutif actif de l'AMPK, cela provoque une réduction de la taille de l'axone ainsi qu'une perte de la polarisation neuronale (Amato et al., 2011). Par ailleurs, au cours de la polarisation des neurones, la protéine PI3K (phosphatidyl-inositol 3-kinase) est transportée jusqu'à l'extrémité du futur axone grâce au moteur moléculaire Kif5 (Kinesin-related protein 5) provoquant ainsi un enrichissement de la PI3K qui est nécessaire pour promouvoir la polarisation neuronale. Or, il a été démontré que, dans des conditions de stress énergétique, l'AMPK

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inhibe ce transport en phosphorylant les chaines légères de la kinésine Kif 5 causant ainsi la dissociation entre la PI3K et Kif5 et par conséquent son maintien dans le compartiment somatique (Amato et al., 2011) (Figure 24). D'autres études utilisant des approches génétiques dans le but de réprimer l'expression des sous-unités catalytiques de l'AMPK ont également permis de montrer que dans des conditions basales, l'AMPK n'induit pas l'inhibition de la formation de l'axone. En revanche, lors d'un stress énergétique induit avec l'AICAR ou la metformine, l'induction de l'activation de l'AMPK par ces composés empêche l'axonogenèse. En effet, suite à son activation l'AMPK stimule le complexe TSC1/2 qui à son tour inhibe le complexe mTOR (mammalian Target of rapamycin) et de ce fait, la synthèse des protéines nécessaires pour la formation de l'axone (Williams et al., 2011). L'implication de l'AMPK dans la polarisation neuronale a aussi été retrouvée chez un modèle de Drosophilae melanogaster présentant une invalidation du gène de l'AMPK (Lee et al., 2007). Enfin, bien que les précédentes études aient montré un lien entre l'activation de l'AMPK dans des conditions de stress énergétiques et l'inhibition de l'axonogenèse uniquement, une étude plus récente a mis en évidence que l'AMPK pouvait aussi empêcher l'arborisation neuronale et la croissance des dendrites en plus de celle axonale et ce au cours des différents stades de développement neuronal (Ramamurthy et

al., 2014). Ces études semblent ainsi montrer que dans des conditions de stress énergétiques,

l'activation de l'AMPK provoque l'inhibition des processus couteux en énergie tel que la polarisation des neurones dans le but de préserver/maintenir les niveaux énergétiques des neurones.

Figure 24 : Mécanisme d’action de l’AMPK dans la polarité axonale. Dans des conditions normales

(gauche), la protéine PI3K est transportée aux extrémités des neurites grâce à la protéine motrice Kif5, afin de promouvoir la signalisation à l’origine de la croissance axonale. En condition de stress énergétique (droite), l’AMPK est activée et phosphoryle les chaines légères (KLC) de Kif5 provoquant la dissociation entre la KLC et la PI3K et empêchant par conséquent le transport de la PI3K aux extrémités des neurites. (D’après Amato et al., 2012).

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4.2.3.

Rôle dans le remodelage synaptique

En plus de ses fonctions dans le développement neuronal, l'AMPK joue aussi un rôle dans le cerveau adulte. Au cours du vieillissement, de nombreux changements ont lieu au niveau du système nerveux central telle que l'altération des fonctions neuronales qui est majoritairement due à des dysfonctionnements synaptiques. Afin d'étudier ces altérations synaptiques, le groupe de Samuel et al. a utilisé comme modèle les synapses de la rétine externe de l'œil. Ces synapses ont comme particularité d'être beaucoup plus larges que celles présentes au niveau cérébral et de subir des altérations liées à l'âge à la fois chez le rongeur et chez l'humain. En effet, contrairement aux souris jeunes qui présentent des synapses au niveau de la couche plexiforme externe de la rétine, chez les souris âgées on observe la formation de synapses ectopiques en dehors de cette couche. Grâce à l'utilisation de ce modèle, il a été mis en évidence que ce remodelage synaptique menant à la formation de synapses ectopiques était accompagné par une diminution du niveau de LKB1 et de l'AMPK sous sa forme active (Samuel et al., 2014). De plus, la répression de l'expression de l'AMPK et de LKB1 chez des souris jeunes induit également des défauts rétiniens similaires à ceux observés chez les souris adultes montrant ainsi que la voie de signalisation LKB1/AMPK joue un rôle important dans le maintien des synapses de la rétine.

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