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Des neurones codant pour la direction des mouvements furent trouvés dans les aires corticales pré-motrice et motrice chez le singe. Dans l’aire motrice primaire Georgopoulos et al. (1982) trouvèrent que l’activité de neurones isolés changeait d’une façon ordonnée avec la direction des mouvements du bras. Chacun de ces neurones déchargeait de façon plus intense avant les mouvements dans une direction donnée et était ainsi caractérisé par un vecteur préférentiel le long duquel sa décharge était maximale. Considérant qu’un mouvement dans une direction met en jeu l’activation de toute une population de neurones, Georgopoulos et al. (1986) firent la somme d’un grand nombre de vecteurs individuels mesurés durant un mouvement d’atteinte. Ils trouvèrent que la population de vecteurs résultante était un bon indice de prédiction de la direction des mouvements.

Caminiti et al. (1990, 1991), montrèrent néanmoins que l’activité des cellules dans l’aire 4 et 6 variait pour un même mouvement réalisé selon une direction parallèle, mais ayant des positions initiales de départ différentes. Ce résultat suggère que ces cellules ne codent pas pour le vecteur d’un mouvement, mais que leur préférence directionnelle décrit une "rotation" en fonction de la position de l’articulation de l’épaule. Ainsi, l’ensemble correct de neurones codant pour l’atteinte dans une direction donnée doit être sélectionné sur la base d’une information visuelle de la position de la cible, mais aussi sur la base de l’information proprioceptive concernant la position initiale du bras. Finalement, une autre aire motrice, l’AMS (aire motrice supplémentaire) semble être également impliquée dans les fonctions visuo-motrices. De nombreux neurones de cette aire sont préférentiellement activés durant l’atteinte bimanuelle d’une cible visuelle (Chen et al., 1991).

Concernant les aires prémotrices, Gentilucci et al. (1988) et Rizzolatti et al. (1988) se sont intéressés à l’organisation fonctionnelle de la partie inférieure de l’aire 6. Leurs travaux reposent sur la division histochimique de cette aire décrite par Matelli et al. (1985). Ils ont combiné trois méthodes, l’enregistrement de l’activité cellulaire consécutive à des stimulations tactiles, ou liées à la production de mouvements volontaires, et la microstimulation. Leurs résultats montrent une organisation somatotopique de la partie inférieure de l’aire 6 scindée en aire F4 (caudale) et F5 (rostrale), dont la position correspondait à la projection des champs de réception visuelle (Figure 8). Les neurones de F4 répondent pour des mouvements proximaux et des stimulations tactiles. Pour une cellule de cette aire, les auteurs définissent une zone tactile qui stimulée, donne une réponse. La même cellule décharge pour des mouvements exécutés dans une certaine partie de l’espace corporel en réponse à des stimuli présentés à l’animal. Cet espace est alors délimité par la distance

limite que peut atteindre le singe, et la zone tactile qui stimule cette cellule. Autrement dit les auteurs obtiennent une réponse en F4, lorsque l’objet est assez proche pour être saisi, et lorsqu’il se rapproche de certaines zones cutanées du visage ou de la partie supérieure du corps. Les mouvements distaux sont représentés dans l’aire F5.

Des microstimulations intracorticales et des études sur des neurones isolés ont montré que F5 est spécifiquement liée aux mouvements distaux (Rizzolatti et al., 1988; Hepp- Reymond et al., 1994). Les neurones de "prise" de F5 déchargent en relation avec les mouvements de la main et des doigts au cours de l’action de saisir un objet. Certains déchargent durant la dernière partie de la prise (flexion des doigts). D’autres commencent à décharger durant l’extension des doigts et poursuivent durant leur flexion. D’autres sont activés en avance par rapport aux mouvements des doigts et ne cessent la décharge que lorsque l’objet est saisi. Une propriété de la plupart de ces neurones est leur sélectivité pour les différents types de préhension de la main. Il existe des spécificités pour différentes configurations des doigts, même pour le même type de pince. Les réponses visuelles furent observées chez 20-30 % des neurones F5. Deux types de réponses peuvent être distingués. Les neurones de première classe répondent à la présentation d’objets saisissables. Il existe souvent une relation entre le type de préhension codé par la cellule et la taille du stimulus déclenchant les neurones. Ceci est particulièrement clair pour les neurones de la pince de précision qui sont uniquement activés par de petits objets visuels. Les neurones de seconde classe sont particulièrement pertinents pour l’étude des représentations motrices. Ces neurones appelés "neurones miroirs" répondent quand le singe voit des mouvements de la main exécutés par l’opérateur ou un autre singe (Figure 11).

Il est ainsi intéressant d’examiner les propriétés des neurones dans cette zone corticale en relation avec la prise guidée par la vision. L’aire AIP est directement connectée avec F5 qui est elle-même directement connectée avec une partie de l’aire 4 (champ F1) correspondant au champ moteur primaire de la main. Ainsi, les neurones F5 peuvent être visuellement activés de deux façons: par des objets et par des événements. Dans les deux cas, les stimuli identifiés s’adressent spécifiquement aux neurones codant la pince qui leur correspond. Du fait que les neurones de F1 ne présentent qu’un aspect très limité à l’information visuelle, (les neurones visuellement répondeurs dans cette aire sont rares et possèdent des propriétés visuelles - réponse vive et transitoire à la présentation d’un stimulus soudain (Wannier et al., 1989) - qui ne correspondent pas à ce que l’on attend pour la formation de la pince), les transformations visuo-motrices nécessaires pour les mouvements de préhension doivent se produire en amont du contrôle, dans des aires plus étroitement liées au système visuel. Les

connexions liant les aires pariétales comme AIP aux aires du cortex prémoteur (F5) puis à F1 pourraient ainsi représenter un système visuo-moteur parallèle pour le codage des objets et créer les configurations de la main correspondante.

Figure 11. Neurones de F5 avec des propriétés en "miroir" (de second type). Dans les deux premières figures

l'expérimentateur prend un grain de raisin devant l'animal (première décharge), le déplace vers l'animal (pas de décharge), le singe le saisit (deuxième décharge). Noter la différence entre prendre le même objet avec la main et avec un outil. Finalement, le même neurone en prenant un objet dans l'obscurité. (D'après di Pellegrino et al. 1995).

Di Pellegrino et al. (1995) ont enregistré dans F5 des neurones qui répondent quand le singe voit des mouvements de la main exécutés par l’opérateur ou un autre singe. Pour faire décharger un neurone "miroir", le mouvement de la main observé doit être le même que celui qui activerait ce neurone si le singe agissait. Par exemple, de nombreux neurones "miroirs" déchargent quand le singe saisit un morceau de nourriture et également quand l’opérateur ou les autres singes le font. Cependant, ils ne déchargent pas quand l’opérateur saisit une cible qui n’est pas un aliment, ou quand l’aliment est saisi au moyen d’un outil. En d’autre termes, les neurones "miroirs" codent des actions dirigées vers des objets, qu’ils soient effectués ou observés par le singe enregistré, ce qui suggère qu’ils pourraient être mieux définis comme des neurones de représentation. Les neurones "miroirs" ne furent pas trouvés dans l'AIP.