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1-3 – Révisions taxonomiques des Colubroidea

Partie III – Phylogénie des Colubroidea

III- 1-3 – Révisions taxonomiques des Colubroidea

Il a déjà été question de la monophylie des trois premières familles (Viperidae, Atractaspididae, Elapidae), largement admise même si plusieurs autres études seront nécessaires pour garantir la monophylie de l’ensemble de la famille des Atractaspididae. En revanche, toutes les études moléculaires supportent que les Colubridae ne sont pas monophylétiques, monophylie qui n’est d’ailleurs supportée morphologiquement par aucun caractère.

Trois ensembles se détachent nettement : des ensembles successivement sœurs les uns des autres comprenant les Viperidae, les Homalopsinae, les Pareatinae et les Xenodermatinae. Ces derniers n’avaient pas été considérés comme appartenant au « groupe basal » dans l’étude de Lawson et al. (2005) : le genre Oxyrhabdium était successivement placé comme basal de la classe A (sensu Lawson et al., 2005) dans l’arbre ML, sœur des Elapidae dans l’arbre BI, ou groupé avec Prosymna visseri comme sœur de cette même famille dans l’arbre MP. Aucune de ces associations n’était fortement supportée. En revanche, chaque autre fois où ils ont été intégrés à l’étude (Kraus et Brown, 1998 ; Vidal et Hedges, 2002, 2004 ; Kelly et al., 2003 ; Vidal et David, 2004), ils sont placés en position basale, parfois même frères des Acrochordoidea (Kraus et Brown, 1998 ; Kelly et al., 2003). L’inclusion de cette sous-famille au groupe basal me paraît donc fortement supportée.

Signalons qu’Underwood (1999), dans la conclusion de son article portant sur la monophylie morphologique des Viperidae, précise que les Homalopsinae pourraient être le plus proche parent des vipères (présence d’une glande dentale, pupille en général verticale, sinus génital femelle parfois très proche de celui des Viperidae), supportant l’inclusion de cette sous-famille au « groupe basal ».

Le deux groupes dérivés sont monophylétiques. Ceux-ci se composent respectivement des familles des Elapidae et des Atractaspididae ainsi que des sous-familles des Psammophiinae, des Boodontinae et des Pseudoxyrhophiinae pour la première (soit la classe A sensu Lawson et al., 2005, à laquelle on a retiré les Xenodermatinae), et les sous-familles restantes des Colubridae, c’est-à-dire les Pseudoxenodontinae, les Xenodontinae, les Dipsadinae, les Natricinae, les Calamariinae et les Colubrinae, pour la seconde (correspondant exactement à la classe B sensu Lawson et al., 2005).

Face au très bon support pour l’association de ces deux classes et du « groupe basal », les changements taxonomiques proposés par Lawson et al. (2005) sont acceptés : les Pareatinae et les Homalopsinae sont élevés au rang de familles des Pareatidae et des Homalopsidae ; le rang taxonomique des actuelles familles des Elapidae et des Atractaspididae est incohérent avec leur appartenance avec un ensemble plus vaste dérivé de rangs familiaux, ceux-ci sont donc rétrogradés au rang de sous-familles (respectivement des Elapinae et des Atractaspidinae) ; la classe B contenant la sous-famille nominale de la famille des Colubridae, c’est elle qui correspond à la nouvelle famille des Colubridae, renommée pour n’inclure que les sous-familles des Colubrinae, des Pseudoxenodontinae, des Xenodontinae, des Dipsadinae, des Natricinae et des Calamariinae ; le nom d’Elapidae est valide pour la classe B, celle-ci est donc renommée pour inclure les sous-familles des Psammophiinae, des Boodontinae, des Pseudoxyrhophiinae ainsi que les nouvelles sous- familles des Elapinae et des Atractaspidinae (Lawson et al., 2005).

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Par ailleurs, même si l’étude de Lawson et al. (2005) ne leur permettait pas de proposer ce changement, la sous-famille des Xenodermatinae est également élevée au rang de famille. L’ensemble des modifications apportées est résumée dans la figure 26.

Il n’a volontairement été traité précédemment que des études qui supportaient ces changements taxonomiques, afin de ne pas surcharger des explications déjà nombreuses et compliquées. Un petit nombre d’études réfute pourtant cette nouvelle classification. L’une d’elle (Highton et al., 2002), par des études allozymiques, mélange complètement toute la classification proposée ci-dessous : les « Elapidae » (sensu EMBL Reptile Database, [D]) sont ainsi logés au milieu des Xenodontinae, les « Atractaspididae » (sensu EMBL Reptile Database, [D]) sont inclus au milieu d’une classe rassemblant deux Colubrinae, deux Xenodontinae ainsi qu’un boa de la famille des Tropidophiinae ; les Homalopsidae sont frères du genre Acrochordus dans une position dérivée à mi-hauteur de l’arbre des Colubroidea. Il est difficile de tenir compte de ces relations tant elles rapprochent des taxons différents (vide supra).

Figure 26. Classifications actuelle et actualisée des Colubroidea. Sont présentées les relations entre les sous- familles (milieu) et les familles (côtés), pour la nomenclature admise par l’EMBL Reptile Database (à gauche) et de la nouvelle nomenclature proposée (à droite). Les traits pleins correspondent aux relations de parenté entre familles et sous-familles ; les traits en pointillés correspondent à des changements de rang taxonomique (donc les traits en pointillés situés à gauche définissent le passage d’une famille au rang de sous-famille, ceux situés sur la droite définissent l’élévation d’une sous-famille au rang de famille). Seuls les Viperidae ne sont pas concernés par ces modifications taxonomiques. Se référer au texte pour les détails de l’établissement de cette nomenclature et pour la bibliographie associée.

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L’étude de Kraus et Brown (1998) nous présentent une grande quantité d’analyses, apportant des résultats mutuellement incompatibles. Les Pareatidae sont en général associés aux Homalopsidae, et les Xenodermatidae sont en général en position basale, sous-famille parfois sœur des Acrochordidae. Mais là encore, le rapprochement de taxons éloignés rend difficile l’interprétation de ces associations, ce que reconnaissent eux-mêmes les auteurs (Kraus et Brown, 1998) en précisant que leur méthode doit comporter des erreurs (voir par exemple une classe terminale rassemblant les Viperidae, les Natricinae, les Elapinae, les Pseudoxyrhophiinae et les Atractaspidinae dans un de leurs deux arbres « préférés »).

L’interprétation de l’étude de Gravlund (2001) est plus délicate, tout d’abord parce que plusieurs relations ne sont pas résolues et certaines l’étant très faiblement (BS=1, c’est à dire qu’une seule « marche » est à franchir pour que ce groupe ne soit pas monophylétique). En particulier, la base de l’arbre est représentée par une trichotomie correspondant pour les deux premiers aux Psammophiinae et à un groupe très peu supporté (BS=1) rassemblant les cinq Elapinae de l’étude, le genre Atractaspis, trois Boodontinae et un Xenodontinae (le genre Xenodon qui, on le verra lors de l’étude de la sous-famille des Xenodontinae, a une position très variable). Ces deux groupes correspondent donc, à l’exception de Xenodon, à des membres de la famille des Elapidae. Le troisième groupe contient tous les autres serpents, classe également supportée par un « branch support » minimal de 1. Cette classe contient un groupe basal rassemblant les Viperidae et les Homalopsidae, collectivement sœurs des Natricinae, des autres Xenodontinae de l’étude, et des Colubrinae, soit à la famille des Colubridae. Ainsi, une vision un peu plus conservative (c’est-à-dire, en franchissant la marche en question, comme proposé par l’auteur ; Gravlund, 2001) aboutit à un arbre, certes moins résolu, mais qui ne contredit plus les récentes modifications apportées comme indiqué dans la figure 27.

Figure 27. Interprétation possible de l’étude de Gravlund (2001). L’arbre de gauche présente l’arbre tel qu’il a été initiallement obtenu. Cet arbre contredisait les nouvelles modifications apportées à la taxonomie des Colubroidea (figure 26). Une vision plus conservative correspond à l’arbre de droite, moins résolu, mais ne contredisant pas ces modifications taxonomiques. Les valeurs au-dessus des branches correspondent aux bremmer supports. Notez bien que les noms des taxons correspondent à la nomenclature actualisée. D’après Gravlund (2001).

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Par ailleurs, deux études placent un taxon inhabituel en position basale : Nagy et al. (2005) considèrent les Natricinae (représentés par le seul genre Natriciteres) comme frères des classes A et B collectivement (cette association n’est supportée qu’à 52%) ; et Pinou et al. (2004) considèrent la sous-famille des Psammophiinae (que les auteurs désignent comme Lamprophiidae) comme basale de tous les Colubroidea. Si cette dernière relation est faiblement supportée, on peut s’étonner qu’elle corresponde partiellement aux résultats trouvés par Gravlund (2001). Toutefois, toutes les autres études incorporant des représentants de cette sous-famille la place au sein de la famille des Elapidae avec des supports moyens à forts (Vidal et Hedges, 2002, 2004 ; Kelly et al., 2003 ; Nagy et al., 2003, 2005 ; Vidal et David, 2004 ; Lawson et al., 2005), à l’exception de Heise et al. (1995) qui la groupent avec un Boodontinae dans une trichotomie entre les Colubridae et les autres Elapidae.