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Résultats des travaux de référence de Morgan et Stockford

I. Imagerie polarimétrique des tissus biologiques

I.5 Principe du filtrage polarimétrique pour le sondage en profondeur des tissus

I.5.2 Résultats des travaux de référence de Morgan et Stockford

Les travaux de Morgan et Stockford (2002 et 2003) ont ainsi montré, de manière théorique (Stockford et al. 2002), avec des simulations Monte Carlo, et expérimentale (Morgan and Stockford 2003), que, dans certains schémas de détections, la polarisation de la lumière permet de récupérer des informations à différentes profondeurs d'un milieu diffusant (diffusion de Mie).

Simulations Monte Carlo

Pour conserver un caractère général aux résultats toutes les dimensions sont exprimées en MFP (mean free path, libre parcours moyen de diffusion) selon la relation suivante : 1 MFP=1/µs, où µs est le coefficient de diffusion du milieu. Les milieux sont supposés non absorbants. Le trajet de chacun des photons dans le milieu est sauvegardé. En procédant de la sorte, l’absorption peut être prise en compte à l’aide de la loi de Beer-Lambert en post-traitement. Le milieu considéré est composé de particules de Mie monodisperse, supposé semi-infini, illuminé en incidence normale et a les caractéristiques suivantes :

Indice de réfraction 1.4

Paramètre de taille des diffuseurs ka 13.9 Coefficient d’anisotropie g 0.92

Dans la méthode utilisée ici, on suit les modifications de l’état de polarisation des photons dans le formalisme de Stokes décrivant l’état de polarisation à l’aide d’un vecteur à 4 composantes [I Q U V]T. Dans ce formalisme, les intensités mesurées dans les quatre canaux de détection sont décrites de la façon suivante :

; 2

En suivant le trajet de chaque photon, un histogramme de la profondeur maximale sondée par les photons rétrodiffusés peut être construit pour chaque canal. La soustraction des histogrammes obtenus pour les canaux co-polarisés et contre-polarisés permet ensuite d’établir les histogrammes de la profondeur maximale sondée par les photons ayant maintenu leur polarisation initiale (linéaire ou circulaire) et les photons dépolarisés (Figure I.20).

Figure I.20: Profondeur maximale sondée par les photons ayant maintenu la polarisation initiale linéaire (marqueurs triangulaires), la polarisation initiale circulaire (marqueurs carrés) ou dépolarisés (marqueurs ronds).

Les résultats sont synthétisés dans le tableau suivant auquel sont ajoutés quelques équivalences pour certains tissus biologiques compte-tenu des données de la littérature:

Tissus, MFP (µm) Unité Canal

Matière blanche à 633 nm: MFP

1 MFP=18.7 µm µm 37.4 µm 131 µm 187.2 µm

Utérus à 633 nm: MFP

1 MFP=25.4 µm µm 50.7 µm 177.5 µm 253.6 µm

Profondeur maximale sondée par les photons rétrodiffusés

0 0.92 [1]

Figure I.21: Profondeurs correspondantes dans des tissus biologiques pour la profondeur maximale sondée par les photons rétrodiffusés. Les références sont [1] : (Tuchin 1997), [2] : (Beek 1993), [3] :

(Jacques, Alter, and Prahl 1987), [4] : (Yoon 1988), [5] : (Marchesini et al. 1989).

Nous avons ajouté dans le tableau pour chaque tissu biologique également le coefficient d’absorption µa et le facteur d’anisotropie g. Ces paramètres permettent d’estimer l’évolution des histogrammes qui, nous le rappelons ont été obtenus pour un milieu sans absorption et avec un g=0.92. Comme nous le verrons au chapitre III, un facteur d’anisotropie agit en faveur de la maintenance de la polarisation initiale et un coefficient d’absorption va réduire les profondeurs associées aux polarisations maintenues.

Résultats expérimentaux

Le banc expérimental pour réaliser le filtrage polarimétrique est composé d’une source laser (633 nm) filtrée avec un diffuseur tournant pour éliminer le speckle. Un polariseur linéaire, placé devant le faisceau et un l’analyseur linéaire devant la caméra CCD permettent d’obtenir les mesures des canaux 1 et 2. Pour les mesures des canaux 3 et 4, deux lames quart-d’onde sont placées après le polariseur linéaire et devant l’analyseur linéaire.

Figure I.22: Schéma du banc d’expérimentation pour l’imagerie polarimétrique.

Le banc d’expérimentation permet la mesure d’intensité des trois canaux et leur analyse donne accès à l’information provenant de trois niveaux de profondeurs :

« superficiel » : image issue de la soustraction Ch1-Ch2

« sub-surfacique » : image issue de la soustraction Ch3-Ch2

« profond » : image obtenue avec Ch2

Pour chaque mesure, le temps d’exposition est conservé (64 µs) et les images directement soustraites sans normalisation.

Une validation expérimentale est obtenue sur un fantôme : le milieu diffusant est constitué d’une suspension aqueuse de microsphères de polystryrène (g=0.97, µs=200cm-1 1MFP=50µm). Un objet totalement absorbant est introduit dans le milieu : il s’agit d’un empilement d’un film plastique (Perspex) de diamètre 3mm transparent sur un film totalement noir le tout placé au bout d’une tige transparente du même matériau. L’ensemble est placé à 2, 10 et 22 MFPs (soit 100, 500 et 2200 µm) selon différentes manipulations de clichés obtenus à partir de polarisations colinéaire, cross-linéaire et cocirculaire (Ch1, Ch2, Ch3).

Les profondeurs ont été choisies selon les résultats de simulations Monte Carlo. Dans l’image de « surface » l’objet n’est visible que lorsqu’il est à 2 MFP (ni à 10 ni 22 MFPs), dans l’image « milieu » il est visible à 2 et 10 MFP mais pas à 22 MFP. Dans l’image de profondeur, l’objet est visible à toute position.

Ne sont pas reportés ici les résultats obtenus sur la peau car ils sont purement qualitatifs.

Echantillon Source laser

CCD f POL λ/4

POL λ/4 Diffuseur

2MFP 10MFP 22MF Surface

Milieu

Profond

Figure I.23: Sondage polarimétrique à différentes profondeurs (2, 10, 22 MFP) d'une inclusion à partir de 3 canaux de mesures différents (Ch1, Ch2, Ch3).

Commentaires

En ce qui concerne les résultats théoriques, notons que les valeurs reportées sont obtenues sur l’histogramme de la profondeur maximale atteinte par les photons. Cela ne signifie pas que les photons détectés proviennent forcément de cette profondeur. Un indicateur plus pertinent serait peut-être la profondeur moyenne de pénétration des photons, indiquant qu’une majorité de photons détectés est passé effectivement par cette profondeur.

Nous introduisons cette quantité aux chapitres suivants. Une étude extensive sur la question est présentée au chapitre 3. Notons également que les valeurs annoncées seront modifiées en tenant compte de l’absorption des tissus et du coefficient d’anisotropie. Par ailleurs, la modélisation est faite pour une illumination ponctuelle, et les résultats sont extrapolés pour une illumination en champ plein.

Dans la réalisation expérimentale, l’angle d’incidence n’est pas précisé: comme il n’y a pas de réflexion spéculaire dans le canal de surface et que le temps d’exposition est le même pour chaque mesure, on suppose qu’il y a effectivement un angle. S’il y a un angle, que ce soit pour l’illumination ou la détection, la polarisation circulaire est, en pratique, difficilement réalisable : soit l’illumination est inclinée et la polarisation illuminant la surface est elliptique, soit la détection ne permet pas d’effectuer une sélection parfaite de la polarisation circulaire.