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CHAPITRE 7 RÉSULTATS COMPLÉMENTAIRES

7.2 Résultats sur l’effet rebond

Avant la réalisation de l’étude du chapitre 6, un travail préliminaire sur l’effet rebond a été effectué avec les tables entrée-sorties étendues à l’environnement du Canada (Lesage et al., 2012). Les résultats ont montré qu’un effet rebond pouvait apparaître dans les catégories de la santé humaine, la qualité des écosystèmes et le changement climatique (Walzberg et al., 2017). La figure 7.3 présente les résultats des réductions d’impacts environnementaux permises par les domiciles intelligents dans les catégories midpoint et endpoint d’Impact 2002+ en incluant ou non l’effet rebond. Ce dernier varie dans les catégories midpoint entre 2.1 % en moyenne pour la catégorie toxicité humaine à 72.2 % en moyenne pour la catégorie de destruction de la couche d’ozone. Pour les catégories endpoint, l’effet rebond est en moyenne de 7.3 %, 16.3 % et 32.6 % dans les catégories de santé humaine, qualité des écosystèmes et changement climatique respectivement. En raison du manque de flux élémentaires répertoriés dans les tables EEIO du Canada, l’effet rebond n’a pu être estimé dans les catégories midpoint d’impact des radiations ionisantes, de l’utilisation des terres, des énergies non renouvelables, et d’extraction de minerais et la catégorie endpoint des ressources.

La figure 7.3 démontre à nouveau (avec le chapitre 6) que l’effet rebond peut changer les résultats de l’ACV-SMA, bien que les conclusions générales ne changent pas. De plus, l’effet

rebond semble plus important lorsqu’un mix électrique moyen est considéré au lieu d’adopter la méthode mixte proposée dans le chapitre 5. Cela signifie que si la demande étudiée ne participe pas à la demande marginale, le risque d’effet rebond peut être plus important.

Figure 7.3 Réduction d’impacts environnementaux en prenant en compte ou non l’effet rebond, HT=toxicité humaine, RsE=effets respiratoires, IR=radiations ionisantes, OLD=déstruction de la couche d’ozone, PO=oxydation photochimique, Æ=écotoxicité aquatique, TE=écotoxicité terrestre, LO=occupation des terres, CC=changement climatique, NRE=énergies non renouvelables, RME=extraction de minerais, les barres d’erreurs représentent l’intervalle de confiance à 95 %

La figure 7.4 présente quant à elle l’effet de l’inclusion de l’effet rebond dans le plan factoriel fractionnaire vu au chapitre 4. Deux scénarios de réallocation des dépenses ont été étudiés pour le facteur additionnel du plan : le scénario de consommation usuelle de Girod et al. (Girod et al., 2011) (définis comme le niveau bas du facteur) et un scénario où les éventuelles économies monétaires sont allouées uniquement à l’utilisation de services financiers (commodité de banking

services dans la table EEIO et définis comme le niveau haut du facteur). Ce facteur est supposé

être lié au niveau socio-économique des utilisateurs et il est donc inclus dans la catégorie

capabilités personnelles des facteurs de Stern (Stern, 2000). Le tableau 7.1 présente les niveaux

Tableau 7.1 Niveaux hauts et bas des facteurs de Stern affectant les comportements pro- environnementaux

Facteur Bas niveau Haut niveau

Facteurs contextuels

Schéma de prix(A) Constant TOU

Géographie (B) Toronto Thunder Bay

Métrique pour le décalage de la demande (C)

kWh DALY

Facteur de capabilités personnelles

Système PV-batterie (D) Non Oui

Réallocation des économies monétaires (E)

Consommation usuelle Services financiers

Facteurs attitudinaux

Probabilité d’engagement (F) 0.2 0.3

Probabilité de se conformer (G)

0.275 0.375

Distribution des types d’utilisateurs (H)

Majorité de passifs Majorité de convaincus

Plusieurs conclusions peuvent être tirées de la figure. Premièrement de manière évidente le facteur en lien avec l’effet rebond (facteur E dans la figure) n’a d’effet que lorsque l’effet rebond est comptabilisé dans les impacts environnementaux. Ensuite, il est possible d’observer que le facteur E a un effet positif sur la réduction des impacts environnementaux incluant l’effet rebond. En effet, le niveau haut du facteur est le scénario d’utilisation de services financiers qui cause moins d’impacts environnementaux par unité monétaire que le scénario de consommation usuelle. Ce facteur apporte par ailleurs une contribution significative à la variance des résultats du plan d’expérience dans la catégorie du changement climatique (contribution de 12 %) et dans la catégorie de la qualité des écosystèmes (contribution de 3 %).

Un autre résultat saillant est que la contribution à la variation de l’impact sur le changement climatique des facteurs contextuels, de capabilités personnelles et d’attitudes passent de 14.4 %, 26.1 % et 32.6 % respectivement lorsque l’effet rebond n’est pas pris en compte à 11.5 %, 42.1 % et 24.9 % respectivement lorsque l’effet rebond est pris en compte. Les facteurs contribuant le plus à la variation d’impact sur le changement climatique passent donc des facteurs attitudinaux

aux facteurs de capabilités personnelles lorsque l’effet rebond est pris en compte. Ce résultat montre que dans une situation où le potentiel d’effet rebond est jugé important, les politiques visant à réduire les économies monétaires permises par le système ou changer leurs réallocations sont les plus appropriées pour réduire l’impact sur le changement climatique.

Les résultats de la figure 7.4 montrent (avec le chapitre 6) l’intérêt de prendre en compte l’effet rebond dans l’analyse ainsi que d’étudier de possibles politiques publiques pour diminuer son effet. Proposer aux utilisateurs d’investir leurs économies ou bien de les dépenser dans des produits/services peu impactants ou des œuvres humanitaires sont autant de stratégies permettant de réduire l’impact de l’effet rebond.

Figure 7.4 Estimation des effets principaux dans le plan factoriel fractionnaire, A=schéma de prix, B=géographie, C=métrique pour le décalage de la demande, D=système PV-batterie, E=réallocation des économies monétaires, F=probabilité d’engagement, G=probabilité de se conformer, H=distribution des types d’utilisateurs *** et ** indiquent des niveaux de confiance

de 0.999 et 0.99 respectivement

Enfin, la figure 7.5 montre l’effet de l’inclusion de l’effet rebond sur les résultats du décalage de la consommation dans le temps du chapitre 4 (figure 4.7). Le résultat principal de la figure est que l’utilisation de la métrique économique (CAD) bien que semblant pertinente si l’effet rebond n’est pas inclus (puisqu’elle évite notamment les déplacements d’impacts) n’est en réalité pas si pertinente que cela si l’on prend en compte l’effet rebond. En effet, on peut voir sur la figure que le phénomène de « backfire » apparaît dans les catégories d’impact du changement climatique et

de la qualité des écosystèmes. Ainsi une augmentation de ces impacts (plutôt que la réduction attendue) résulte de l’utilisation du système du fait de l’effet rebond.

Figure 7.5 Décalage de la demande dans le temps selon différentes métriques avec ou sans considérer les impacts environnementaux dus à l’effet rebond

Les résultats des figures 7.3, 7.4 et 7.5 sont cependant limités par :

• Le nombre plus réduit de flux élémentaires des tables EEIO du Canada par rapport à la base de données ACV utilisée (ecoinvent) ;

• La différence d’horizons temporels (années auxquelles correspondent les données) entre les tables EEIO du Canada et la base de données ACV ;

• L’utilisation d’une approche attributionnelle et non d’une approche marginale pour l’ACV ce qui peut être en contradiction avec l’étude de l’effet rebond.

Enfin, il est pertinent de noter que les facteurs d’impacts sur le changement climatique par dollar canadien du scénario de consommation usuelle calculé avec EXIOBASE et avec la table EEIO du Canada sont relativement similaires avec 3.34E-01 kg CO2 eq/CAD pour EXIOBASE

(année 2011) et 3.27E-01 kg CO2 eq/CAD pour la table EEIO du Canada (année 2009)4. Cette

remarque valide l’utilisation d’EXIOBASE pour calculer l’effet rebond dans la catégorie du changement climatique.

Le tableau 7.2 résume les contributions de l’approche développée dans la thèse pour l’étude de cas des domiciles intelligents. La prise en compte des facteurs comportementaux et des conséquences des changements comportementaux sur le système de production sont ainsi des éléments critiques à l’analyse. L’effet rebond étant relativement faible, sa prise en compte ou non n’a, cependant, que peu d’impact sur les résultats.

Tableau 7.2 Résumé des contributions de l’approche développée dans la thèse pour l’étude de cas des domiciles intelligents

Oui Non

Prise en compte des facteurs comportementaux ?

2 % de réduction de la consommation d’électricité permis par les domiciles intelligents

6 % de réduction de la consommation d’électricité permis par les domiciles intelligents

Prise en compte des conséquences des changements

comportementaux sur le système de production ?

10 % de réduction des émissions de GES permis par les domiciles

intelligents

2 % de réduction des émissions de GES permis par les domiciles

intelligents

Prise en compte de l’effet rebond ?

9.5 % de réduction des émissions de GES permis par les domiciles

intelligents

10 % de réduction des émissions de GES permis par les domiciles

intelligents

Enfin, l’annexe D présente une discussion critique de certains concepts de la thèse. Bien que cette discussion ne réponde pas directement à l’objectif du projet doctoral, elle permet de mettre en lumière certains de ses aspects connexes.

CHAPITRE 8

DISCUSSION GÉNÉRALE ET RECOMMANDATIONS