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Chapitre 2 Revue de la littérature

2.3 Évaluations économiques et analyses de coûts de Housing First

2.3.3 Résultats de recherche : Impact sur l’utilisation des services

Cette section de la revue de la littérature porte sur l’impact des programmes de logement avec support sur l’utilisation de services de santé, de services sociaux et de services de justice par des personnes itinérantes avec des problèmes de santé mentale. Les résultats se dégageant des études recensées ont été regroupés en cinq catégories dans le but de faciliter la lecture des résultats de recherche (tableau X). La catégorie hôpital comprend les hospitalisations de type psychiatrique et médical ainsi que les visites aux urgences. La catégorie justice comprend, les contacts avec la police, les arrestations, les comparutions et les séjours en prison. La catégorie clinique externe comprend les visites en cliniques externes à l’hôpital, à un CLSC ainsi que le suivi communautaire. La catégorie ‘’autre’’ regroupe les variables qui n’ont pas pu être catégorisées dans les catégories précédentes. La catégorie impact net total évalue l’impact net de l’intervention sur les coûts d’utilisation de services.

Tableau X Impact sur l'utilisation de services et les coûts

Auteur Population Hôpital Justice Clinique

externe

Autre Impact net

sur les coûts totaux (Culhane et al., 2002) New York

Itinérants avec troubles de santé mentale graves

-* -* +* Refuges (-*) +

(Rosenheck et al., 2003)

HUD-VASH

Vétérans itinérants avec

troubles de santé mentale graves et/ou problèmes de dépendance

+ + +* Santé mentale (-) Refuges (-*)

+

(Gilmer et al.,

2009)REACH Itinérants avec troubles de santé mentale graves San Diego

Reaching Out and Engaging to Achieve Consumer Health (REACH)

-* n.d. +* n.d. +

(Larimer et al., 2009)

Itinérants chroniques avec des problèmes d’alcoolisme sévères

Medicaid (- *) Harbor View Urgence(-) - + Detox(+) Centres de rehabilitation (-) Refuges (-) - (Mares & Rosenheck, 2009) CICH Itinérants chroniques -* - -* n.d. n.d. (McLaughlin, 2011)

Itinérant chronnique avec trouble de santé mentale ou handicap physique - - - Detox(-) Ambulances(-) Refuges (-) Logement(+) Médicaments(+) - (Basu et al., 2012)

Itinérants avec problèmes de santé chronique - - +* Urgences ( -) Centres de réadaptation (-*) CHSLD (-) Logement (+) Gestion de cas (+) - (Debra Srebnik et

al., 2013) Itinérants et utilisateurs intensifs des hôpitaux et des centres de réadaptation

- - n.d. n.d. n.d.

Note : Étant donné que certaines variables ont été regroupées, afin de simplifier la lecture du tableau, les changements de coûts sont exprimés en avec le signe ‘’-‘’ lorsque l’intervention est associée à une diminution des coûts d’utilisation de service et ‘’+’’ lorsque l’intervention est associée à une augmentation des coûts. Un ‘’*’’ est présent lorsque la différence est statistiquement significative. Étant donné la validité limitée des études non- publiées, seules les résultats des études publiées sont présentés dans ce tableau.

Hospitalisation

Toutes les études à l’exception celle de HUD-VASH (Rosenheck et al., 2003) ont observé une diminution du coût des hospitalisations. Deux études ont observé une diminution significative. L’augmentation des coûts d’hospitalisations des vétérans itinérants avec troubles mentaux graves dans l’étude de HUD-VASH n’était pas statistiquement significative. Au moins deux études ont démontré l’association entre des coûts élevés d’hospitalisation et le fait d’être itinérant (Salit, Kuhn, Hartz, Vu, & Mosso, 1998; Hwang, J., Aubry, & Hoch, 2011). Une revue de littérature (Geoffrey Nelson & al., 2007) a observé que les personnes itinérantes avec troubles mentaux graves assignées à des programmes de logement avec support avaient une plus grande réduction au niveau de l’utilisation des hôpitaux que les participants recevant les services usuels (Drake, Yovetich, Bebout, Harris, & McHugo, 1997; Lipton et al., 2000; Rosenheck et al., 2003) et le suivi communautaire seul (Rosenheck et al., 2003).

Clinique externe et suivi dans la communauté

La majorité des études ont observé une augmentation significative des coûts de cliniques externes et de suivi communautaire. Une explication a priori plausible serait l’utilisation de suivi communautaire provenant de l’intervention, à laquelle les participants n’avaient pas accès auparavant. Cependant, cette association n’est pas claire car ces études ne précisent pas si l’augmentation de l’utilisation de services de santé dans la communauté est dûe à l’utilisation de programmes de suivi communautaires offerts avec les programmes étudiés. Une autre explication serait que les personnes itinérantes passant plus de temps dans la communauté et moins de temps en institution, sont plus disposées à utiliser les services des cliniques externes. Culhane écrit qu’une fois logée, la personne avec des problèmes de santé mentale peut être plus disposée à utiliser les services de cliniques externes (Culhane et al., 2002), ce qui pourrait prévenir des hospitalisations et expliquer en partie la diminution de l’utilisation des hôpitaux observée ci-haut.

Justice

Plusieurs études ont observé une association entre l’itinérance et les activités criminelles (Martell, Rosner, & Harmon, 1995). Les personnes itinérantes sont souvent arrêtées pour des délits reliés à des stratégies de survie, par exemple, pénétrer sur une propriété privée ou dormir

sur un banc de parc (P. J. Fischer, 1988; S. Fischer, Shinn, Shrout, & Tsemberis, 2008; Snow, Baker, & Anderson, 1989). Une association entre la sévérité des symptômes psychiatriques et les crimes non-violents a été observée (S. Fischer et al., 2008). Les personnes itinérantes avec troubles de santé mentale peuvent commettre plus de méfaits parce que leur manque d’environnement structuré nuit à leurs utilisation de services de santé (ex : suivi communautaire) et/ou à la prise de médicaments prescrits (Belcher & Toomey, 1988).

Les programmes de logement permettent de sortir la personne de sa situation d’itinérance et réduisent l’occurrence de comportements criminels associés à l’itinérance. Le suivi communautaire contribue fortement à stabiliser l’environnement de vie de la personne et travaille à contrôler les troubles de santé mentale. Il n’est donc pas surprenant que la grande majorité des études recensées aient observé une diminution des coûts de justice avec les programmes de logement avec support. Cependant, les études de New York (Culhane et al., 2002) et de REACH (Gilmer et al., 2009) sont les seules à avoir observé une diminution significative des coûts de justice. Étant donné les périodes d’observation relativement courtes, moins de trois ans dans la majorité des cas, il est possible que les participants aient été condamnés pour des crimes qu’ils avaient commis avant leur entrée dans l’étude. Une période d’observation plus longue aurait peut-être permis d’observer une différence significative au niveau des coûts de justice.

Impact net sur les coûts totaux

L’analyse de l’impact net de l’intervention sur les coûts totaux donne des résultats moins tranchés que les autres catégories. Trois études observent une augmentation totale des coûts (Culhane et al., 2002; Gilmer et al., 2009; Rosenheck et al., 2003) et trois autres études observent une diminution totale des coûts (Larimer et al., 2009; McLaughlin, 2011; Basu et al., 2012). Aucune de ces études n’observe de différence significative. L’étude de New York (Culhane et al., 2002) comprenant plus de 4679 participants avec groupe de comparaison, a observé une légère augmentation des coûts. Il est difficile de conclure si le logement permanent avec support génère une augmentation ou une diminution des coûts totaux d’utilisation de services. Au mieux, on peut conclure que les coûts d’utilisation de service par des personnes itinérantes avec des problèmes de santé mentale sont semblables avec ou sans programme de logement permanent avec support.

L’étude HUD-VASH (Rosenheck et al., 2003), la seule à avoir réalisé une analyse coût- efficacité, présente les résultats sous différentes perspectives d’analyse. Il est intéressant d’observer comment la perspective d’une étude peut influencer les résultats, même si la conclusion ne change pas. Dans cette étude, une augmentation des coûts nets d’utilisation de service a été observée. Entre le groupe recevant le logement permanent avec support et le groupe recevant les services usuels, le coût incrémental par jour en logement est de 74 $ sous la perspective gouvernementale et de 45 $ sous la perspective sociétale. Le coût incrémental est moins élevé sous la perspective sociétale pour deux raisons. Premièrement, les revenus d’emploi ont été soustraits des coûts sous la perspective sociétale car ils augmentent les ressources disponibles à la société. Deuxièmement, le supplément au loyer (section 8 voucher de 6775 $) n’a pas été inclus dans les coûts. Sous la perspective sociétale conventionnelle, il est considéré comme un paiement de transfert. En incluant le coût du supplément au loyer, le coût incrémental du programme de logement avec support aurait sans doute était similaire sous la perspective sociétale et gouvernementale. Le coût du logement peut être considéré comme coût de maintien de l’individu dans la société, tel qu’il a déjà été effectué dans des études précédentes (Fenton & et al., 1982; Weisbrod, Test, & Stein, 1980).