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Résultats des mesures de concentration des solutions de trempage

Chapitre 4. Résultats et Discussion

4.2 Effet de la taille des particules du granulat réactif sur l’expansion (série 2)

4.2.3 Résultats des mesures de concentration des solutions de trempage

Le Tableau 4-6 présente le suivi de la concentration des solutions de trempage pour les éprouvettes avec les particules de GRO de différents calibres granulaires. Encore ici, les concentrations présentées sont celles des solutions de trempage qui n’ont pas été changées depuis le début des essais. Le niveau de la solution dans les contenants a été toutefois rajusté en ajoutant une certaine quantité de la solution neuve d’origine, soit une solution 1 N de NaOH, afin de conserver le volume de solution de trempage constant. Toutes les courbes montrent une diminution de la concentration initiale, atteignant 0,06 à 0,10 N durant les 56 premiers jours environ. Au-delà de cette période, la concentration semble se stabiliser. On note dans certains cas un léger accroissement, résultant vraisemblablement de l’évaporation.

(a)

(b)

(c)

Tableau 4-6 Évolution de la concentration des solutions de trempage de la Série 2(corrigées régulièrement pour le maintien du volume)

Calibre granulaire

(μm)

Concentration effective de la solution de trempage (mol/L)

0 jr 15 jrs 28 jrs 56 jrs 99 jrs 147 jrs 199 jrs 256 jrs 300 - 600 1,00 0,94 0,95 0,92 0,88 0,92 0,92 -- 600-1180 1,01 0,96 0,97 0,94 0,93 0,93 0,94 0,94 1180-2360 0,99 0,94 0,95 0,90 0,89 0,90 0,93 -- 2360 - 4760 0,99 0,95 0,95 0,94 0,93 -- 1,02 --

4.2.4 Analyse et discussion

L’analyse conjointe des résultats des expansions mesurées, des observations sur les produits blanchâtres précipités en solution et sur la surface des éprouvettes et du suivi de la concentration des solutions de trempage révèle une certaine cohérence et les tendances observées sont abordées dans les paragraphes suivants. Les résultats des mesures d’expansion montrent d’abord l’existence de deux calibres granulaires pessima jusqu’à 42 jours, soit les calibres 600-1180 μm et 1180-2360 μm. Puis, au-delà de 42 jours, le calibre intermédiaire 600-1180 μm se démarque comme le calibre pessimum, soit le calibre générant l’expansion maximale. En contrepartie, la quantité d’exsudations blanchâtres observée sur les éprouvettes de mortier et dans les solutions de trempage augmente de manière croissante avec la taille des particules de GRO. Les résultats obtenus concordent avec les conclusions des travaux réalisés par Béland (2018) avec ce même granulat. Dans un premier temps, il suggère l’hypothèse d’une augmentation de la perte de produits de réaction avec l’augmentation du calibre granulaire. Toutefois cette hypothèse n’est pas en adéquation avec les résultats obtenus pour le mortier fabriqué avec des particules de GRO de calibre 300-600 μm, qui a subi une expansion moindre que celle avec du mortier préparé avec des particules de GRO de calibre 600-1180 μm, tout en laissant s’échapper en apparence moins de produits de réaction. Deuxièmement, il propose l’hypothèse de l’accès à la silice réactive pour les mortiers préparés avec des particules de GRO des calibres 600-1180 μm, 1180-2360 μm et 2360-4760 μm ayant une surface spécifique inversement proportionnelle à la taille des particules. Cette hypothèse est basée sur les examens pétrographiques réalisés sur des éprouvettes après 1 an d’essai et révélant une dissolution plus complète (ou plus avancée) de la silice réactive des particules de GRO. Ces observations suggèrent en effet que l’accès à la silice réactive est restreint au sein des mortiers préparés avec les particules de plus forts calibres, ces derniers subissant par conséquent moins d’expansion. À nouveau, cette hypothèse d’accès à la silice réactive ne se vérifie pas dans le cas du mortier préparé avec les particules de GRO de calibre 300-600 μm. La troisième hypothèse avancée est celle de la formation de produits dans les vides. Les examens pétrographiques ont aussi révélé que la quantité de vides d’air occlus dans les éprouvettes augmente avec une diminution du calibre granulaire des particules de GRO, phénomène vraisemblablement

attribuable à la variabilité de la consistance à l’état frais des mélanges de mortier découlant des différences de fuseau granulométrique. Cette observation suggère que les vides des éprouvettes avec du GRO de calibre 300- 600 μm, plus nombreux, serviraient à soulager une partie de l’expansion par accumulation de produits de réaction dans ces derniers. La plus faible quantité de vides dans les éprouvettes avec les particules de GRO de calibre plus grossier favoriserait en contrepartie la migration des produits de la RAS à l’extérieur des éprouvettes. Dans la documentation scientifique, plusieurs hypothèses ont été développées pour expliquer l’effet pessimum lié à la taille des particules de granulat réactif dans les éprouvettes de mortier. L’une d’entre elles est expliquée dans les travaux de Multon (2016). La perte de gels par perméation en fonction de la taille des particules a un effet sur l’expansion mesurée. La distance devant être parcourue par le gel formé autour de chaque particule de granulat réactif pour sortir de l’éprouvette et la viscosité du gel sont des paramètres à considérer pour comprendre l’effet pessimum observé. Dans les éprouvettes où le rapport « taille de l’éprouvette / taille des particules » est très grand, il a été observé que la perte de gel est réduite et l’effet pessimum tend à disparaitre. Donc, plus la dimension de l’éprouvette est petite, plus la perte potentielle de gel est importante et, dans de telles conditions, plus l’expansion mesurée est faible et l’existence d’un effet pessimum peut se manifester. En faisant l’hypothèse de particules de granulat sphériques, la loi de Poiseuille permet de calculer la fraction de gel perdu à travers les fissures par la formule :

𝑑𝜑𝑔𝑝 𝑑𝑡 = 3𝑓𝑐𝑤𝑙3 16𝜋𝜂𝑅𝑉𝐸𝑅2 × 𝑝𝑔 𝛿𝑥 (4-1) avec 𝜑𝑔𝑝, la fraction de gel perdu par les fissures, 𝑓𝑐, un coefficient de forme des fissures, 𝑤𝑙, l’ouverture des fissures qui pourrait être fonction de la taille des particules de granulats, 𝜂, la viscosité du gel et 𝛿𝑥, la plus courte distance entre la particule et une face libre de l’éprouvette.

Plus la distance entre la particule et la surface de l’éprouvette (𝛿𝑥) est petite, plus la perte de gel par perméation est importante. Ceci explique pourquoi la perte relative de gel est plus significative dans les éprouvettes de petite taille que celles de plus grande taille. En outre, pour des éprouvettes de mêmes dimensions, plus la taille d’une particule est grande, plus l’ouverture de fissure (𝑤𝑙) induite dans la pâte de ciment avoisinante est importante et donc plus la perte potentielle de gel est aussi importante. Il faut néanmoins ajouter que ces analyses ne sont valides que dans la mesure où la perte de gel se fait principalement à travers les fissures. Une autre hypothèse (Dyer, 2014) ébauchée explique l’effet pessimum observé par les étapes de la réaction chimique. Une première étape consiste à l’attaque des réseaux de silice pour former le gel d’alcali-réaction et vise à augmenter la quantité de gel. Une seconde étape consiste à dissoudre le gel formé et donc contribue à réduire la quantité de gel. En effet, même après la formation du gel, l'attaque des liaisons siloxanes se poursuit

& Brivot, 1993). Ces derniers sont susceptibles de se combiner rapidement avec les ions calcium pour former le gel CSH. Le taux relatif avec lequel ces deux étapes se réalisent influence globalement l’expansion générée. Quand le processus de formation de gel est rapide et celui de dissolution est lent, il en résulte une grande quantité de gel. Les grosses particules auraient tendance à réagir partiellement à cause de leur plus grand volume, alors que les plus petites particules seraient sujettes à totalement réagir. Dans ce dernier cas, la dissolution contribuerait à réduire la contribution de cette particule dans l’expansion générée. En résumé, selon cette approche, l’effet pessimum lié à la taille des particules serait défini en fonction du bilan entre les taux de formation et de dissolution de gel autour ou au sein de ces derniers. Un taux de formation rapide et un taux de dissolution plus lent favoriseraient un effet pessimum plus important (Dyer, 2014).

En résumé, les résultats de la série 2 permettent de tirer les conclusions suivantes :

1. Un effet pessimum lié à la taille des particules est observé, avec des expansions plus importantes subies par le mortier fabriqué avec les particules de GRO de calibre 600-1180 μm.

2. Les pertes de produit de réaction par perméation sont proportionnelles à la taille des particules de GRO.

3. La porosité variable des mélanges de mortier (Béland, 2020), la viscosité du gel formé et la distance de chaque particule de GRO au parement de l’éprouvette (Multon, 2016) sont des paramètres qui aident à expliquer l’effet pessimum observé. Une autre explication consiste à définir l’effet pessimum en fonction du bilan entre les taux de formation et de dissolution de gel autour et au sein des particules de GRO (Dyer, 2014).

4.3 Évaluation de la cinétique de la réaction dans les granulats du