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III.6 Résultats des estimations

III.6.1 Résultats du modèle spatial à régime simple

La TableIII.5présente les résultats d'estimation du modèle spatial à régime simple

décrit par l'équationIII.14, tel queEP CIi,t =Ø dans la colonne (1),EP CIi,t =Coopi,t

dans les colonnes 2 et 3 et EP CIi,t = zi,tepci dans les colonnes 4 et 5. Dans chacune de

ces colonnes, le niveau de dépenses moyen des communes voisines (P

jwi,jln (zj,t))

est calculé et instrumenté avec les WX en utilisant la même matrice de voisinage

WDIST <20km (voir au bas de la Table pour la liste des instruments utilisés). Par ailleurs,

Coopi,t et zi,tepci sont introduites de manière exogène dans les colonnes 2 et 4, tandis

qu'elles sont instrumentées dans les colonnes 3 et 5.

An de nous assurer de la performance et de la validité de nos instruments, nous

présentons également les R² de première étape et la J -statistique d'Hansen. Cette

der-nière suit une distribution du chi-deux sous l'hypothèse nulle que les instruments sont

valides, i.e. qu'ils ne sont pas corrélés avec le terme d'erreurs et que les instruments

exclus ont été correctement exclus de l'équation d'estimation. Par ailleurs, cette

sta-tistique est robuste à la présence d'autocorrélation intra-clusters. Dans nos diérentes

estimations, nous sommes systématiquement dans la zone d'acceptation de H0, ce qui

nous permet de conclure que nos jeux d'instruments sont toujours valides.

Ainsi, les estimations du modèle spatial à régime simple nous indiquent qu'il existe

d'importantes interactions spatiales positives entre les dépenses des communes localisées

dans un rayon de 20 kilomètres (colonnes 1 à 5). Plus précisément, si la dépense moyenne

de ses voisins varie d'1%, une commune ajustera ses propres dépenses dans le même

sens à hauteur d'environ 0.70%-0.78%17, ceteris paribus. Ce résultat est alors cohérent

avec ceux mis en évidence dans la littérature empirique sur des données françaises. Côté

scal, Jayet et al. [2002] et Charlot et Paty [2010] montrent par exemple que les taux

de taxe professionnelle des communes interagissent spatialement positivement. Foucault

et al. [2008] conrment cette tendance côté dépenses en observant un comportement

mimétique chez les communes de plus de 50 000 habitants. Toutefois, le résultat obtenu

ici apporte la première preuve d'un tel phénomène en utilisant des données de panel sur

un large échantillon de communes, dans un modèle intégrant à la fois des interactions

horizontales et verticales des dépenses locales (colonnes 2 à 5).

Résultat III.1. Les dépenses des communes françaises interagissent

fortement spatialement.

Par ailleurs, on remarque que la valeur estimée de ce coecient d'interaction

spatiale ρ ne varie que très faiblement d'une spécication à l'autre du modèle. Plus

particulièrement, et contrairement à Revelli [2003], la prise en compte de la dimension

verticale ne remet pas ici en cause la présence de telles interactions horizontales des

dépenses (colonnes 2 à 5). Ce point conrme alors que la méthode d'estimation

adop-tée produit des estimations du coecient d'interaction spatiale robustes à la présence

p-values entre parenthèses * p < 0.10, ** p < 0.05, *** p < 0.01.

Instruments (1) à (5) : pct_pop15, pct_pop60, revenu_moyen et dgf décalées spatiallement avec la

matrice de pondération WDIST<20km.

Table III.5 Résultats des estimations du modèle spatial à régime simple en

utilisant une matrice de distance avec un seuil à 20km, 1994-2003

éventuelle d'une autocorrélation spatiale des erreurs.

En revanche, ce résultat peut être aecté par la dénition de la matrice de

voi-sinage. En eet, lorsque l'on utilise WDIST <15km pour calculer le niveau de dépenses

moyen des communes voisines, la valeur estimée du coecient d'interaction spatiale

diminue et sa signicativité s'aaiblit selon la spécication du modèle considérée (voir

Table C.3, p. 198 en annexe). Et lorsque l'on utilise WCT G, ρˆne ressort plus du tout

signicatif (voir Table C.4, p. 199 en annexe). Autrement dit, les communes

inter-agissent fortement avec leurs voisines au sein d'une une large zone géographique, mais

pas nécessairement avec leurs voisines les plus proches contrairement à nos attentes

(voir Sous-sectionIII.6.2).

Concentrons-nous maintenant sur l'eet de la coopération intercommunale sur

le niveau de dépenses des communes. On constate, de manière surprenante, que ni

Coopi,t nizepcii,t ne modient signicativementzi,t, qu'elles soient introduites de manière

exogène (colonnes 2 et 4) ou endogène (colonnes 3 et 5) dans le modèle. Autrement dit,

les communes membres d'une communauté ne pratiquent pas un niveau de dépenses

diérent des communes isolées (eet mesuré parCoopi,t). De même, les communes

et leurs communautés fournissent des biens et services indépendants (eet mesuré par

zi,tepci). De plus, ce résultat subsiste en utilisant les autres spécications de la matrice de

voisinage (voir les TablesC.3 etC.4, p. 198-199 en annexe).

Résultat III.2. La coopération intercommunale n'a aucun impact

di-rect sur le niveau de dépenses des communes.

Deux principales raisons peuvent expliquer ce résultat. En estimant un modèle

de dépenses avec interactions verticales sur des données françaises, Guengant et

Le-prince [2006] aboutissent à une conclusion similaire : la coopération intercommunale

ne réduirait que très faiblement les dépenses des communes, voir même l'augmenterait

dans certains cas18. Ils émettent alors l'hypothèse que cela résulterait de l'eet zoo

de Oates [1988] : les communes de petite taille, n'étant pas en mesure de fournir

in-dividuellement de nombreux biens et services publics, proteraient de la coopération

intercommunale pour élargir leur gamme de biens et services publics oerts. Dans ce

cas, il n'y aurait pas de substituabilité possible entre les deux niveaux de gouvernement.

L'étendue des compétences des communes ne serait pas modiée par la coopération

in-tercommunale, si bien qu'il n'y aurait pas de transfert de charges vers les communautés

et les dépenses des deux niveaux apparaîtraient indépendantes (voir Chapitre IV).

Une seconde raison peut être avancée. Si un transfert de charge s'opère des

com-munes vers leurs communautés, les comcom-munes pourraient alors choisir de maintenir

constants leurs taux d'imposition locaux (Leprince et Guengant, 2002). Ainsi, elles

pourraient fournir de nouveaux biens et services publics ou/et améliorer la qualité de

ceux déjà produits. Un tel phénomène pourrait alors résulter d'un comportement

lévia-than des communes (Brennan et Buchanan, 1980), de l'illusion scale générée par la

complexication des comptes publics locaux (e.g. Wagner, 1976), ou tout simplement

correspondre à une demande des citoyens qui ne pouvait être satisfaite auparavant.

En revanche, on remarque queCoopi,t etzi,tepci deviennent signicatifs avec le signe

négatif attendu lorsqu'elles sont introduites de manière endogène dans le modèle sans

interactions spatiales (voir colonnes 3 et 5 de la TableC.2, p.197en annexe). Rappelons

que Revelli [2003] montrait qu'en prenant en compte la dimension verticale dans son

modèle de dépense, le terme d'interaction spatiale perdait sa signicativité. Ici, nous

observons l'eet inverse : en prenant en compte les interactions spatiales des dépenses

des communes, l'interaction verticale avec le niveau intercommunal n'est plus

signi-cative. Cette remarque conrme ainsi la nécessité d'inclure ces interactions spatiales

18. Cette complémentarité entre les dépenses des deux niveaux apparaît pour les communautés

de communes et communautés d'agglomération sous le régime de la taxe professionnelle unique.

horizontales dans les modèles de dépenses.

Enn, si l'on s'intéresse maintenant aux résultats concernant les variables de

contrôle de notre modèle, on constate que seules deux d'entre elles ressortent

signi-catives dans toutes les spécications du modèle et pour chaque matrice de voisinage

(Tables III.5, C.2, C.3 et C.4). Contrairement à nos attentes, le revenu moyen des

citoyens semble avoir un impact négatif sur le niveau de dépenses communales par

ha-bitant. Une possible interprétation serait que les citoyens plus aisés consomment moins

de biens et services publics auxquels ils substituent des alternatives privées, comme

par exemple le recours aux crèches ou cliniques privées, l'usage de moyens de

trans-port individuels, etc. Toutefois, ce résultat est à prendre avec beaucoup de précautions,

Revenu_moyeni,t étant toujours à la limite de la signicativité statistique. En parallèle,

on constate que le potentiel scal des communes a un eet positif sur leur niveau de

dépenses par habitant, résultat cohérent avec ceux mis en évidence par les précédentes

études sur le cas français (e.g. Leprince et Guengant, 2002).