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Chapitre I Relaxation autour d’un état Inhomogène

2.2. b Quelques résultats et discussions

Nous venons de voir dans la partie précédente comment calculer numériquement la fonction de dispersion donnée par (I.22) ainsi que les pôles de Landau associés, i.e. les ωL ∈ C tels que ǫ(ωL) = 0. Cependant, pour cela, il faut considérer un état stationnaire

f0 spécifique et c’est ce que nous allons faire ici, en comparant les prédictions théoriques

aux simulations numériques dans différents cas particuliers. Précisons que par “prédictions théoriques” nous entendons : calcul de la fonction de dispersion prédite par (I.22) et de ses zéros (ce qui n’est pas, comme nous venons de le voir, chose facile).

Considérons pour commencer l’équilibre statistique comme état stationnaire. Dans le cas du modèle HMF attractif, lorsque la température est inférieure à 0,5 [Ina93], l’équilibre statistique est inhomogène et s’écrit :

f0(θ, p) = C(β)e−β(p

2/2−M (β) cos(θ))

, (I.34)

avec C(β) une constante de normalisation et M(β) la magnétisation, tous deux dépendant de la température du système.

Ayant un état stationnaire de référence, il nous est désormais facile de prévoir, grâce à l’équation (I.22), comment vont relaxer de petites perturbations via l’amortissement Lan- dau. Par exemple, la figureI.13représente les pôles de Landau pour l’équilibre statistique donné par (I.34) avec une température de T = 0, 2. Deux différents positionnements pos- sibles des branches de coupure sont representés.

Au regard de la figureI.13, il semble que selon le choix des branches de coupure, il existe plus ou moins de pôles de Landau. Plusieurs questions naturelles apparaissent naturelle- ment. Par exemple, ces différents pôles influencent-ils tous la dynamique de relaxation ?

2. RELAXATION EN “TEMPS COURT” AUTOUR D’UN ÉTAT INHOMOGÈNE

Figure I.13 – Représentation des lignes de niveau ℜ(ǫ(ω)) = 0 et ℑ(ǫ(ω)) = 0, pour différents choix de branches de coupure, en prenant comme état stationnaire f0 l’équilibre

statistique avec T = 0,2 (voir l’équation (I.34)). Les lignes en pointillés noirs représentent des branches de coupure. Les intersections des lignes de niveau, marquées par les flèches noires, représentent les zéros de la fonction de dispersion. Le nombre et la position des racines de la fonction de dispersion dépendent du positionnement des branches de coupure. Quelle est la relation entre les branches de coupure et les zéros de la fonction de dis- persion ? Malheureusement, nous n’avons pas de réponse claire à toutes ces questions et nous nous limiterons dans la suite à l’étude du pôle de Landau avec la plus grande partie imaginaire : le mode qui relaxe le plus lentement, que l’on notera simplement dans la suite ωL.

Afin de déterminer la valeur de ωL, nous avons testé différents choix de branches de cou-

pure (voir figure I.9) pour voir s’il en dépendait ou non. Il en est ressorti que la position de ωL est très robuste. Hormis les cas où une branche de coupure passe entre ωL et son

projeté orthogonal sur la droite ℑ(ω) = 0, celle-ci reste toujours un zéro de la fonction de dispersion. Cela montre une certaine robustesse du pôle de Landau ωL par rapport à

l’infinité de choix possibles de positionnement des branches de coupure, du moins pour les cas que nous avons explorés.

Pour finir, nous n’avons plus qu’à comparer les prédictions à des simulations numériques où l’état stationnaire f0 est soumis à de petites perturbations. Les simulations à N corps

ont été réalisées par Yoshiyuki Y. Yamaguchi à l’aide d’un algorithme de dynamique moléculaire. Dans le cas de l’équilibre statistique, nous avons pris la distribution initiale :

f (θ, p, t = 0) = Ca(β)e−β(p

2/2−M (β) cos(θ))

(1 + a cos(θ)) , (I.35)

où β = 1/T est la valeur fixée pour la distribution f0, a est l’amplitude de la perturba-

tion et la Ca(β) est la constante de normalisation qui dépend maintenant de a et de la

température.

Comme nous l’avons vu, il serait présomptueux de vouloir décrire parfaitement la relaxa- tion du système uniquement à partir du pôle ωL, sans tenir compte de la contribution

des autres racines de ǫ(ω) ni des branches de coupure. Cependant, comme cela se voit sur les figures I.14 et I.15, nous arrivons tout de même à capter une grande partie de la dynamique. Les fréquences et taux d’amortissement des simulations à N corps sont obtenus en supposant que la relaxation de la magnétisation suit la relation

Figure I.14 – Évolution en temps t de la magnétisation M(t) pour un état stationnaire stable f0 donné par l’équilibre statistique (I.34). Les paramètres sont : T = 0,3, a = 0,1,

N = 107 et 5 × 107.

Figure I.15 – Estimation des fréquences et des taux d’amortissement pour la condition initiale donnée par (I.35). Les courbes rouges représentent les estimations théoriques issues du pôle de Landau ωL. Les points et leur barres d’erreurs représentent les résultats obtenus

à partir de simulations à N corps avec N = 107, moyennées sur vingt réalisations. Nous

avons utilisé deux symboles différents selon l’utilisation du premier ou deuxième pic de M (t) dans l’estimation des paramètres λ et ν (voir équation (I.36)).

avec A, B, λ et ν des constantes, qui caractérise un amortissement Landau. Pour cal- culer λ et ν nous avons imposé d’une part que la simulation et la courbe donnée par (I.36) passent par le même point en t = 0 et d’autre part qu’elles coïncident au niveau du premier ou second pic. Cette dernière distinction permet de voir que lorsque le temps augmente, les autres contributions ont de moins en moins d’influence sur la relaxation. En effet, les résultats sont sensiblement meilleurs en utilisant le deuxième pic, ce qui est en accord avec le fait que c’est le mode associé à ωL qui relaxe le plus lentement.

Remarquons que sur la figure I.15, la théorie prévoit un changement brutal de la dy- namique entre T = 0,3 et 0,4 qui est relativement bien observé sur les simulations à N corps. Ce comportement s’explique par le croisement de deux zéros de la fonction de dis- persion. En effet, lorsque la température augmente, la première racine avec la plus grande partie imaginaire est rattrapée et dépassée par la seconde. Cette dernière devient alors la

3. RELAXATION EN “TEMPS LONG” AUTOUR D’UN ÉTAT INHOMOGÈNE

nouvelle valeur de ωL avec la partie imaginaire la plus élevée (voir figureI.16).

Enfin, la multiplicité des zéros, avec des valeurs imaginaires proches pour les températures entre 0,3 et 0,4, explique pourquoi la prise en compte de seulement ωL ne donne qu’une

information qualitative, qui n’est pas suffisante pour décrire complètement le système.

Figure I.16 – Représentation schématique du croisement de deux racines (cercles de couleurs) pour la condition initiale donnée par (I.34) pour T entre 0,3 et 0,4. Les flèches en pointillés représentent l’évolution de la position des zéros lorsque la température aug- mente. Les lignes horizontales sont là pour aider le lecteur à visualiser les différents croi- sements de racines.

En conclusion, le caractère inhomogène de la distribution stationnaire ne change pas drastiquement les choses par rapport au cas homogène lorsque nous nous limitons à la dynamique en “temps court”. Cependant il faut noter que les calculs théoriques deviennent plus complexes, les différents modes de Fourier sont tous couplés les uns aux autres et l’apparition de branches de coupure dans la fonction de dispersion rend la prescription de Landau plus difficile à réaliser.

Maintenant que nous avons compris la structure de la fonction de dispersion et que nous avons décrit la relaxation en “temps court” du système, nous sommes en droit de nous demander s’il est possible de décrire le comportement de la perturbation pour des temps plus grands en tenant compte cette fois de tous les ingrédients dans la transformée de Fourier-Laplace inverse, à l’instar de [BM10].

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Relaxation en “temps long” autour d’un état

inhomogène dans le modèle HMF

Contrairement à la partie2, nous nous intéresserons désormais à la dynamique asymp- totique du système, i.e. longtemps après la perturbation. Ceci est une spécificité du cas inhomogène, où la dynamique d’une perturbation n’est pas la même, que ce soit en “temps court” ou en “temps long”. En effet, dans le cas homogène, on peut montrer à partir de l’équation de Vlasov non-linéaire que les perturbations décroissent de manière exponen- tielle pour tout temps, sous réserve d’hypothèses fortes à satisfaire, vers un état station- naire proche de l’état non perturbé [MV10]. A contrario, pour un système Hamiltonien particulier et un état inhomogène, il a aussi été montré que certaines perturbations dé- croissent algébriquement [Sme98]. Une fois de plus, le modèle HMF montre son utilité de par sa simplicité. Afin de comprendre pourquoi la décroissance exponentielle est rempla- cée par une décroissance algébrique, il est crucial de pouvoir mener aussi loin que possible

les calculs explicites et c’est pourquoi le modèle HMF prend toute son importance.