Chapitre 3: Usage du réseau de dépendances des données
2 Le réseau de dépendances support à la résolution de conflit
Afin de générer une solution pour le conflit détecté, l’équipe de négociation précédemment formée, procède à la négociation suivant le protocole CO2MED (Rose 2004). Rappelons que la prise de décision selon ce protocole est menée en des itérations de résolutions successives. Chaque itération de résolution est constituée d’une alternance d’actions de vulgarisation et de médiation :
• Vulgarisation : le négociateur qui mène la vulgarisation explique d’abord le problème qu’il rencontre avec les choix actuels sur le produit (en précisant l’élément du produit concerné et les caractéristiques qui posent problème). Ensuite, il justifie ou argumente sa motivation pour modifier la solution actuelle en précisantles mauvaises conséquences des choix actuels sur le produit (performances du produit, coût, faisabilité technique, cohérence avec le cahier des charges de l’utilisateur, etc.). Cette action de vulgarisation du problème doit se faire en des termes simples et connus de tous. Le négociateur peut faire part de son expertise en employant des paraboles, allégories, exemples ou contre-exemples concrets afin de traduire de façon la plus universelle possible le problème rencontré.
• Médiation : cette action a pour objectif de préconiser la solution à adopter pour palier au problème rencontré et éviter ainsi les mauvaises conséquences de l’ancienne solution. Elle provient soit du négociateur qui vient de vulgariser son problème pour proposer sa solution, soit d’un autre négociateur concerné par le conflit et qui veut approuver une solution donnée.
Ces actions de vulgarisation/médiation sont menées à tour de rôle par chacun des membres de l’équipe de négociation afin d’atteindre un consensus (cf. Figure 37). Chaque négociateur peut intervenir sur un problème à résoudre ou sur une solution proposée via les activités de vulgarisation/médiation. En effet, selon le rôle qui lui est assigné, un négociateur peut soit proposer une nouvelle solution à un problème vulgarisé, soit améliorer ou appuyer une solution déjà proposée (solution émergente). Ceci est le rôle du membre collaborateur. Cependant, certains membres de l’équipe de négociation peuvent révoquer une solution proposée en expliquant et argumentant le(s) problème(s) engendré(s) par cette solution (donc en vulgarisant le problème). Ceci est le rôle des membres référents, qui ne sont pas tenus à proposer des solutions au problème identifié, dont l’expertise permet une approbation intermédiaire des alternatives et solutions proposées.
Figure 37. Enchaînement des activités de vulgarisation/médiation pour la résolution du conflit détecté
Outre la structuration de l’équipe de négociation, nous proposons dans ce travail de thèse d’étendre le protocole CO2MED afin d’assurer une prise de décision efficace et rapide. Premièrement, nous proposons aux membres de l’équipe de négociation des utilisations différentes du réseau de dépendances durant la phase de négociation. À chaque fois qu’une solution est proposée par un collaborateur, l’équipe est capable d’évaluer l’impact de cette solution sur le reste des données identifiées dans le réseau. Ceci permettra de choisir la solution la plus convenable tout en maîtrisant ses impacts. Cependant, les impacts sur des données non identifiées dans le réseau initial ne peuvent pas être détectés. L’équipe est alors obligée d’étendre le réseau de dépendances initialement généré pour explorer un nombre plus important de données impactées. Cette tâche est rendue possible et rapide grâce à la liberté de choix de la donnée de départ du réseau à générer. Plus encore, si l’équipe de négociation décide de ne s’intéresser qu’aux données importantes, le réseau de dépendances de données critiques peut leur fournir un choix de données dont le degré de dépendance est fixé selon un seuil choisi par l’équipe ou le responsable de la gestion de conflits.
Lors de l’enchaînement des itérations de résolution du conflit, il se peut que de nouveaux conflits apparaissent entre les membres de l’équipe de négociation concernant les alternatives et solutions proposées. Pour traiter ces conflits, de nouvelles expertises sont nécessaires et la
constitution de l’équipe de négociation est alors révisée. Des acteurs de conception concernés par les conséquences de résolution de ces nouveaux conflits sont alors invités à rejoindre l’équipe de négociation initiale. Ces acteurs sont identifiés suite à une mise à jour52 du réseau de dépendances. L’évolutivité du réseau rend ainsi l’équipe de négociation dynamique, ce qui permet une résolution plus efficace du conflit détecté.
Selon le protocole CO2MED, la clôture de la résolution de conflits peut être menée par une demande de vote53 aux différents négociateurs ayant participé à la négociation si un consensus n’est pas établi. Afin de mener à bien et d’une manière efficace ce processus de vote, nous proposons que chaque collaborateur responsable d’une solution estime l’état de la solution afin de l’argumenter. Les états de solution utilisés dans ce travail de thèse sont ceux proposés par (Grebici 2007) : brouillon, pièce à conviction, trace-habilitée et livrable. Lors du vote, chaque négociateur dispose ainsi de toutes les solutions proposées ainsi que de leurs états. Si un négociateur hésite entre plusieurs solutions, l’état de la solution peut être le critère de choix de vote. Ce critère lui permet d’estimer l’ampleur de l’impact de la solution sur l’ensemble des données qu’il manipule. Étant donné qu’une solution correspond à une ou plusieurs donnée(s) ; qu’elle soit à l’état « livrable » implique moins d’itérations de conception que si la donnée est à l’état trace-habilitée. Quand le quorum minimal de voix en faveur d’une solution est atteint, celle-ci est adoptée. Sinon, le choix de la solution est autoritaire et revient au responsable de la gestion de conflits en se basant sur un ensemble de critères dont : état de la solution proposée. La solution à l’état le plus avancé permet de réduire le temps nécessaire à son intégration vu que le nombre d’itérations de conception est nul.