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Tel que mentionné, les kinases WNK sont activées par phosphorylation durant le stress hypertonique. Les mécanismes en jeu sont largement inconnus, mais ils impliqueraient le mouvement de ces kinases d’un compartiment cellulaire à un autre. Par exemple, WNK1 et WNK4, qui sont diffus dans le cytosol en condition basale, se concentrent dans de petites vésicules en condition hypertonique (349, 445). Quant à WNK3, il migre des jonctions cellulaires vers le cytosol lors du rétrécissement cellulaire chez le modèle des cellules HEK293 (70). De plus, le mutant WNK3kd se retrouve à proximité de l’appareil de Golgi et modifie la forme de ces cellules. Ces données suggèrent que le cytosquelette joue un rôle dans la réponse des kinases WNK au stress hypertonique et l’activité catalytique de celles-ci est importante à cet effet.

L’hypertonicité augmente la transcription du gène de la kinase SGK1 (100). Comme cette kinase phosphoryle WNK4 (330), il est donc possible que les autres kinases WNK soient également activées par l’augmentation de la kinase SGK1 en réponse au stress hypertonique.

Les kinases WNK mènent elles-mêmes à la phosphorylation de NKCC2, indiquant que le stress hypertonique pourrait engendrer l’activation de NKCC2 par la cascade WNK-

SPAK/OSR1. Plusieurs études ont d’ailleurs montré que la phosphorylation de NKCC2 par la voie des kinases WNK provoquait une augmentation de l’activité du transporteur, mais les mécanismes impliqués dans cette augmentation n’étaient pas connus, pas plus que l’effet des kinases sur chacun des variants.

La caractérisation de l’effet de WNK1 et WNK3 sur les variants sera décrite dans les prochaines sections. Rappelons que WNK2 n’est pas exprimé dans le rein et que WNK4 n’a que peu d’effet sur NKCC2 in vitro (274, 310, 328). Ces deux isoformes n’ont donc pas été inclus dans les études.

4.2.1 Effet sur l’influx

J’ai observé que la surexpression de WNK1 et WNK3 augmentait l’activité de transport de tous les variants en condition hypotonique et isotonique, possiblement parce que ces variants étaient peu actifs sous ces conditions. La surexpression de WNK1 et WNK3 n’a toutefois pas produit d’effet important en condition hypertonique, probablement parce que le transporteur était déjà maximalement actif. L’effet des kinases WNK1 et WNK3 sur l’activité de chaque variant a ainsi été rapporté pour la première fois par mes études.

4.2.2. Effets sur la Vmax et le Km(Rb+)

J’ai aussi caractérisé l’effet de la surexpression de WNK1 et WNK3 sur l’affinité des variants pour les ions transportés. J’ai utilisé NKCC2A comme modèle étant donné que tous les variants semblaient réagir de la même façon à la surexpression des kinases WNK. Grâce à ces études, j’ai pu observer que WNK1 et WNK3 ne modifiaient pas l’affinité pour les ions, mais qu’ils augmentaient la Vmax. Devant ce résultat, j’ai ensuite décidé de caractériser l’effet de WNK1 et WNK3 sur le trafic de NKCC2.

4.2.3. Effet sur l’expression membranaire

Un autre apport de mes travaux est que l’augmentation de la Vmax en présence de WNK3 s’explique, du moins en partie, par l’augmentation du nombre de transporteurs à la surface cellulaire. Toutefois, cet effet s’est produit seulement pour NKCC2A et NKCC2B. De fait, le trafic à la membrane cellulaire de NKCC2F n’a pas été affecté par WNK3 ce qui me laisse

croire encore une fois que cet isoforme contiendrait dans son domaine CS2 un signal qui engendrerait une régulation différente des deux autres variants.

Des études avaient déjà montré que NKCC2 pouvait faire l’objet d’événements constitutifs d’exocytose, d’endocytose et de recyclage endocytique (18, 21, 42, 287). Ces études avaient aussi montré que de tels événements impliquaient la régulation par l’AMPc et la GMPc. Autrement, il n’y avait pas de données disponibles dans la littérature biomédicale quant à l’effet des kinases WNK sur l’expression membranaire de NKCC2 ou quant à la possibilité d’une réponse singulière des variants.

Des études antérieures ont montré que l’expression membranaire d’autres CCC pouvait être modifiée par les kinases WNK. Par exemple, Rinehart et al. (326) ont observé que WNK3 augmentait l’abondance de NCC à la surface des ovocytes, et ce, selon des épreuves d’immunofluorescence. La capacité de WNK3 à augmenter NKCC2 et NCC à la membrane cellulaire laisse entrevoir que cette kinase pourrait agir sur les membres des CCC par des mécanismes communs.

Parmi les autres observations que j’ai faites, il y a eu celle où l’expression d’un WNK3 inactif (appelé WNK3kd) s’est soldée par une diminution de l’activité de transport et par l’abrogation de l’effet du stress hypertonique sur l’expression membranaire des variants. Ce résultat était compatible avec l’idée que les kinases WNK endogènes de l’ovocyte sont impliquées dans la réponse des variants au stress hypertonique.

Pour terminer, j’ai aussi noté que WNK1 n’affectait l’expression à la membrane d’aucun des variants. Ce résultat intriguant sera discuté plus en détail dans la section Différence dans l’action de WNK1 et WNK3 sur les CCC.

4.2.4. Endocytose

Moins de 5 % de la quantité totale de NKCC2 se retrouve à la surface cellulaire et en conséquence, une importante réserve de transporteurs se retrouvent dans des vésicules près de la surface cellulaire (287). Cette observation suggère que l’activité de NKCC2 est soumise à un trafic cellulaire qui permet d’en réguler l’abondance à son site d’activité normal, soit la surface cellulaire.

Tel que mentionné, j’ai adapté un protocole de recherche déjà publié pour étudier le trafic cellulaire de NKCC2 dans les ovocytes. Ce protocole avait été conçu originalement pour l’étudier plus spécifiquement dans l’AAH isolée du rat. Il est basé sur l’utilisation d’une biotine clivable qui ne peut traverser la membrane et sur des changements de température pour inhiber ou permettre le trafic des protéines (21, 22). J’ai d’abord exploré la vitesse d’endocytose de NKCC2 en condition hypertonique ou en présence de WNK3 et je n’ai pas observé de changement du trafic par rapport aux conditions témoins. J’ai toutefois observé une endocytose constitutive sans stimulus comme il avait été précédemment rapporté dans des cellules natives de l’AAH (20).

4.2.5. Recyclage endocytique

Grâce au protocole mis sur pied, j’ai aussi testé la vitesse de recyclage vers la membrane en condition hypertonique ou en présence de WNK3. Cette fois, j’ai observé que WNK3 accélérait l’acheminement de NKCC2 endocyté à la membrane. Ainsi, cette réponse pourrait impliquer une multitude de protéines exprimées dans les endosomes de recyclage ou bien celles impliquées dans la fusion des vésicules à la surface cellulaire.

Bien que je n’aie pas cherché à identifier la nature de ces protéines potentiellement en jeu, un certain nombre de candidates se dressent à l’horizon. Par exemple, SCAMP2 diminue l’insertion de NKCC2 dans les endosomes de recyclage (441), l’inhibition par de petits ARN interférents de VAMP3 diminue l’acheminement de NKCC2 à la surface cellulaire (43), WNK4 nuit à l’assemblage du complexe SNARE syntaxin 13/VAMP2 (66) et AP-1 colocalise avec WNK1 lors du stress hypertonique (445).

Les kinases WNK affectent le trafic à la membrane d’autres protéines de transport. En outre, elles modulent le trafic d’ENaC et de ROMK et cet effet est indépendant de leur fonction catalytique (68, 156, 221, 398). Pour pouvoir statuer sur l’importance de la fonction catalytique de WNK3 dans la régulation du trafic de NKCC2, il faudrait produire un mutant WNK3 qui a perdu sa fonction catalytique tout en conservant sa structure quaternaire (156). Or, un tel mutant n’est pas disponible à l’heure qu’il est. Il y a bien le mutant WNK3D293A, mais celui-ci est connu pour être mal replié en plus de souffrir d’une activité catalytique déficiente.

Dans mes travaux, le stress hypertonique ne s’est pas soldé par un changement de la vitesse de recyclage. Son effet sur le trafic de NKCC2 à la membrane cellulaire ne dépendrait donc pas uniquement de la voie des kinases WNK. Parmi les autres intermédiaires possiblement impliqués, mentionnons le cytosquelette dont le remodelage pourrait altérer l’interaction entre NKCC2 et des partenaires de régulation variés. Notons à cet effet que l’actine serait impliquée dans la réponse au RVI en soutenant l’augmentation de l’abondance de NKCC1 à la surface cellulaire (73, 239).

4.2.6. Différence dans l’action de WNK1 et WNK3 sur les CCC

Une autre observation qui mérite d’être discutée est en lien avec l’effet différentiel de WNK1 et WNK3 sur l’activité de transport. J’ai en effet noté que WNK1 doublait l’influx en Rb+ des variants alors que WNK3 le triplait. Tel que mentionné, j’ai aussi noté que WNK1 n’augmentait pas l’expression membranaire des variants.

Ces données suggèrent que la régulation de NKCC2 est dépendante de l’isoforme WNK en jeu. Bien que les domaines protéiques de WNK1 et WNK3 soient similaires et conservés (voir Figure 1.9) – à l’exception de l’emplacement et du nombre de domaines coiled-coil et de sites RFXV pouvant lier SPAK/OSR1 – ces kinases ne sont pas parfaitement identiques. Il se pourrait alors que WNK3 agisse différemment de WNK1 sur SPAK dans la régulation de NKCC2. Cette hypothèse s’appuie aussi sur l’étude de Roy et al. (334) qui montre que WNK3 et WNK1 réagissaient différemment à l’hypertonicité chez les cellules HEK293. Les kinases WNK sont activées par le stress hypertonique grâce à des mécanismes qui demeurent encore à élucider. Elles le sont entre autres par la phosphorylation d’un résidu conservé dans le domaine catalytique (S382 dans WNK1) de l’enzyme (164, 220, 445). D’autres résidus phosphorylés en réponse à l’hypertonicité ont aussi été identifiés (220, 445). De manière intéressante, les résidus de WNK1 phosphorylés par l’hypotonicité et l’hypertonicité ne sont pas les mêmes (449).Tel que mentionné précédemment, les enzymes qui permettent cette phosphorylation incluent celles des voies ERK1/2 et MAP p38. Ces enzymes pourraient aussi agir différemment sur WNK1 et WNK3.

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