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Le premier volet de ce travail a apporté de nouvelles données concernant le profil spatio-temporel d’expression de Arc dans le striatum suite à une injection de cocaïne. La caractérisation précise de l’induction de Arc par la cocaïne est une étape importante dans la compréhension de son rôle dans les réponses à cette drogue. La cinétique et la localisation de cette induction sont en effet porteuses d’informations quant aux réseaux neuronaux et aux mécanismes cellulaires dans lesquels Arc est impliquée.

a. Localisation et cinétique d’induction de la protéine Arc dans le striatum

L’influence de la cocaïne sur l’expression de Arc a été rapportée au travers d’études menées chez le rat (Fosnaugh et al., 1995, Fumagalli et al., 2006). Ces travaux montrent que la cocaïne induit une augmentation de l’expression de la protéine et des messagers dans le striatum, le cortex préfrontal et dans une moindre mesure dans l’hippocampe. La détection des protéines Arc par Western-blot n’apporte cependant pas d’informations quant à leur localisation au sein de ces régions cérébrales. Nos résultats, obtenus par immunohistochimie, montrent que l’expression de Arc est augmentée dans les régions ventrales et dorsales du striatum en réponse à l’injection de cocaïne. Nous observons que la protéine Arc est majoritairement induite dans les régions médianes du striatum dorsal, et ce plus fortement que dans le NAcc. Son expression est maximale dans les régions antérieures du DM et du NAcc et diminue dans la portion la plus postérieure. Bien que ce soit peu discuté par les auteurs, les

données de Fosnaugh et ses collaborateurs, obtenues par hybridation in situ, révèlent une forte expression des ARNm dans le striatum dorso-médian, qui est en accord avec nos observations

(Fosnaugh et al., 1995).

Ce travail m’a également permis d’établir la cinétique précise d’induction de Arc dans le striatum, en réponse à la cocaïne. Suite à l’injection de drogue, nous observons une augmentation rapide et transitoire des messagers et de la protéine. Cette fenêtre d’induction restreinte est en accord avec la régulation extrêmement fine de l’expression de Arc en réponse aux changements d’activité neuronale (Lyford et al., 1995, Shepherd and Bear, 2011).

Nos données indiquent que la transcription de arc est activée dans des délais très courts suite à l’administration intrapéritonéale de cocaïne. Si l’augmentation des ARNm est significative à partir de 30 minutes, nous avons observé qu’ils tendent à augmenter dès 15 minutes. A une dose de 10 mg/kg, les ARNm sont significativement augmentés dès 10 minutes, suggérant que la dose de cocaïne n’impacte pas uniquement l’amplitude mais également la cinétique d’induction. Ces données sont en accord avec les observations faites dans d’autres modèles, notamment dans l’hippocampe où les ARNm sont détectés dès 15 minutes après l’exposition à un nouvel environnement (Guzowski et al., 1999, Ramirez-Amaya et al., 2006). Si une induction rapide est la caractéristique commune à tous les IEG, certains d’entre eux, dont arc, s’avèrent particulièrement sensibles à l’activité synaptique et sont dits « IEG rapides ». Les résultats que nous obtenons reflètent cette caractéristique de arc. Un mécanisme a été proposé pour rendre compte de la transcription extrêmement rapide ces IEG dits « rapides ». Pour ces gènes, la polymérase est positionnée de manière constitutive à proximité du promoteur et peut ainsi être recrutée de manière extrêmement rapide en réponse à l’activité neuronale (Saha et al., 2011). L’initiation de la transcription, via le recrutement de la RNA Pol-II, étant une étape limitante de la transcription, ces gènes dits « rapides » sont induits plus précocement que d’autres gènes régulés par l’activité neuronale. Dans le cas des gènes « rapides » qui codent pour des facteurs de transcription, les auteurs proposent que ce mécanisme leur permette d’être induits en amont d’autres gènes afin de pouvoir en contrôler l’expression (Saha et al., 2011). Concernant, arc, les auteurs proposent que ce mécanisme sous-tende le transport rapide de ces ARNm vers les dendrites. A la lumière de nos données, et notamment la rapide accumulation de Arc au noyau, ce mécanisme d’induction précoce du gène, pourrait rendre compte de la capacité de la protéine Arc à réguler d’autres gènes induits plus tardivement.

Notre étude montre également que la fenêtre temporelle d’expression de Arc par la cocaïne est fortement restreinte. Le pic d’expression des messagers et de la protéine est très transitoire et rapidement suivi d’un retour au niveau basal indiquant une régulation active de leur dégradation. Ce phénomène s’explique notamment par les différents mécanismes de dégradation dépendants de l’activité qui sont impliqués dans la régulation de Arc. Nous avons vu précédemment que le mécanisme du NMD (Giorgi et al., 2007) ainsi que l’adressage de la protéine vers le protéasome (Mabb et al., 2014) sont importants pour le contrôle spatio-temporel de l’induction de Arc en réponse à l’activité synaptique. Si ces mécanismes n’ont pas été décrits dans les neurones striataux, il est fortement envisageable qu’ils soient mis en jeu et sous-tendent l’induction transitoire de Arc en réponse aux drogues.

b. Voies de signalisation impliquées dans l’induction de Arc par la cocaïne dans le striatum

S’il a été montré que la stimulation des récepteurs dopaminergiques joue un rôle important dans la régulation de Arc (Fumagalli et al., 2006), les voies de signalisation responsable de l’induction de Arc par la cocaïne demeurent inconnues. L’administration d’un antagoniste des D1R bloque l’induction des ARNm de Arc par la cocaïne (Fosnaugh et al., 1995, Fumagalli et al., 2006). Nos résultats confirment ces données et montrent également que cette induction est strictement dépendante de la stimulation des NMDAR. La régulation de Arc par la cocaïne dépend donc de la convergence des signaux intracellulaires en aval des afférences dopaminergiques et glutamatergiques. La voie ERK joue un rôle important dans l’intégration de ces signaux dans les MSN et son activation est impliquée dans l’induction de nombreux IEG en réponse à la cocaïne (Girault et al., 2007, Cahill et al., 2014a, Pascoli et al., 2014). Nous montrons que cette voie est nécessaire à l’induction de Arc par la cocaïne aux niveaux transcriptionnel et traductionnel. Ces résultats corroborent les données obtenues dans l’hippocampe où l’activation de la voie ERK contrôle l’induction de Arc dans des protocoles d’induction d’une LTP (Waltereit et al., 2001, Chotiner et al., 2010). L’implication de ERK est cohérente au vu de la composition du promoteur de arc et notamment la présence de deux éléments de régulation de type SRE (Serum Response Element). La mutation d’un des sites SRE du promoteur de arc abolit la phase tardive de la LTD dans le cervelet indiquant que l’activation transcriptionnelle de arc en aval de ces sites de régulation est essentielle pour la mise en place de la plasticité neuronale (Smith-Hicks et al., 2010). L’activation de la

transcription au niveau des sites SRE dépend de la fixation d’un complexe formé de deux molécules de SRF associées à un TCF tel que Elk-1. La phosphorylation de Elk-1 par ERK est nécessaire et suffisante à l’activation de la transcription dépendante des sites SRE (Lavaur et al., 2007). Une étude récente menée par notre équipe a montré que l’inhibition spécifique de Elk-1 en aval de ERK diminue l’induction des ARNm de Arc par la cocaïne (Besnard et al., 2011). Nos données démontrent donc l’importance du maillon ERK-Elk-1 dans l’activation transcriptionnelle de arc.

Les données obtenues au cours de ce travail de thèse, suggèrent que ERK pourrait également réguler l’expression de arc en aval de la transcription SRE-dépendante, via la kinase Mnk1. Cette protéine est une cible directe de ERK et participe à la régulation de la synthèse protéique via la phosphorylation du facteur d’élongation de la traduction, eIF4E. L’activation de Mnk1 en aval de ERK est requise pour l’induction de la LTP dans l’hippocampe (Panja et al., 2009). Mes travaux montrent pour la première fois que Mnk1 est activée par la cocaïne dans le striatum en aval de ERK suggérant que ce substrat cytoplasmique de ERK pourrait jouer un rôle dans les réponses à la cocaïne. Ce contrôle de l’expression de Arc par le maillon ERK/Mnk1 s’exerce au niveau traductionnel uniquement puisque l’inhibition de Mnk1 n’altère pas l’induction des ARNm (Panja et al., 2009). L’ensemble de ces données suggère que le maillon cytoplasmique ERK/Mnk1 pourrait moduler la traduction rapide de Arc en réponse à la cocaïne. Cette voie de régulation apparaît également comme un mécanisme par lequel ERK promeut une induction rapide et massive de Arc en coordonnant les activités transcriptionnelle et traductionnelle.