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C- Limite de mon travail

2. La structure organisationnelle du système scolaire haïtien

2.1 La réforme Dartigue en 1936

Arrivé à la tête du Ministère de l’Instruction Publique après le départ des américains en 1934, Dartigue continua presque les mêmes principes laissés par les occupants. Il oublia l’importance qu’il accordait aux compétences des cadres du ministère pendant qu’il était Directeur de l’Enseignement Rural: « L’éducation d’un peuple doit être confiée à un corps de

techniciens compétents, ayant en plus des compétences techniques, de la culture et de l’intégrité morale […], un corps auquel les Pouvoirs Publics fassent confiance et dont les suggestions et les recommandations soient prises en sérieuses considérations112 ». De par ses connaissances du

milieu scolaire haïtien, Dartigue avait compris qu’il était impossible de construire cet édifice si complexe et fragile sans des compétences nécessaires des cadres et des techniciens de ce ministère qui constituaient les bases de l’instruction publique. Il lançait des campagnes de formation et de perfectionnement des cadres de l’instruction publique. Pour la première fois dans l’histoire de l’enseignement haïtien, la formation en cours d’emploi du personnel éducatif est envisagée et réalisée dans certaines dimensions. Il organisa donc des séances de formation pour les enseignants et les directeurs d’écoles. Il réalisait des stages d’été en Haïti et à l’étranger pour les cadres du Ministère.

Cependant avec son statut de ministre, « Il a renforcé les vieilles pratiques léguées par les occupants. Il a consolidé la séparation du système en deux sous-systèmes d’enseignement, destinés à deux catégories sociales : les citadins et les paysans113. À chacune de ces couches sociales correspond une école. D’abord les écoles nationales, relevant du Département de l’Instruction Publique, ont été au service des citadins ; les fermes-écoles et les écoles rurales, relevant du Département de l’Agriculture sont destinées au paysans. Voici l’objectif fixé par un ministre de l’instruction publique. La philosophie de la reforme de Dartigue était de reformer le système éducationnel haïtien en donnant aux élèves les outils adaptés à la réalité de l’élève. Il

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Maurice Dartigue, (1939), L’enseignement en Haïti (1804—1938), Port-au- Prince, Imprimerie de l’État, p.48.

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faut une nouvelle philosophie de l’éducation basée sur la science et non sur le copiage des programmes étrangers étant donné que l’enfant doit recevoir un enseignement qui est en rapport avec son milieu, c’est-à-dire le milieu dans lequel il est appelé à vivre. En appuyant notre réflexion sur un tel objectif, cela nous interpelle en plusieurs points : le coté incohérent de cette reforme, puis les cotés discriminants et obscurantistes.

Sinon, il a une augmentation des écoles, puis des cadres éducatifs, ensuite certains enseignants qui ont bénéficié de certaines formations et enfin des méthodes scientifiques pour mieux gérer le système d’éducation. Même sur ce point, ce n’est pas tout à fait positif car ce ne sont pas tous les enseignants qui bénéficiaient de cette formation. Les bénéficiaires étaient des enseignants citadins. On adressait cependant des reproches à Dartigue. D’abord, il voulait transposer à tout prix le modèle de l’école américaine ou américaniser l’enseignement haïtien. D’autant plus le modèle éducatif français n’était implanté en Haïti depuis plus d’un siècle. C’est un échec total car chaque peuple à ses mentalités, ses croyances, ses valeurs. Vu qu’il a été formé dans les écoles américaines, il croyait que ce système allait être opérationnel pour le système éducatif haïtien. D’un autre coté, la France tirait les ficelles, car c’était son ancienne colonie, et aussi, Haïti est liée par Concordat de 1860 signé entre le Vatican et le gouvernement du président Nicolas Fabre Géffrard. C’est ce paradoxe qu’on trouvait dans la reforme Dartigue, disant au départ, il ne faut pas copier le programme des étrangers, mais dans la pratique, il faisait la même chose que ses prédécesseurs. Ensuite, la façon dont il a réorganisé l’enseignement rural était mauvaise. Car en fonction de votre lieu d’habitation dépend aussi quelle type d’école, il faut fréquenter. Par exemple si un enfant vit à la campagne, il devrait aller obligatoirement aux fermes-écoles ou les écoles rurales relevant du ministère de l’agriculture, c’est-à-dire, il n’a pas droit de fréquenter les écoles nationales ; et les enfants citadin doivent aller aux écoles nationales relevant du ministère de l’instruction publique. Ce qui donne a la fin seuls les enfants citadins qui peuvent devenir agronome, ingénieur, médecin, politologue, avocat. Est-ce que, le fait que nous sommes campagnards, nous ne pouvons être avocat, ingénieur ou vice versa, si nous sommes citadins, est que, nous ne pouvons pas être agriculteur, éleveur etc. À notre avis, nous pensons que c’était une vision très réductrice de la mission de l’école et de l’homme haïtien. Cela va à l’ encontre de l’essence même de l’homme étant qu’être doué d’intelligence et doué de raison et personne ne peut définir le devenir de l’homme. Si votre père est cultivateur, votre fils devrait être cultivateur obligatoirement. Une politique qui correspondait à celles des forces de

l’occupation américaine. La politique éducative de Dartigue avait donc une allure de la politique éducative des forces américaines. C’est presque impossible de parler de reforme dans le système éducatif pour plusieurs raisons. En premier lieu, c’est un système qui a conservé et a renforcé sa logique traditionnelle d’élitisme. En second lieu, il augmente de façon vertigineuse l’inégalité des chances entre les enfants d’Haïti. Les éléments de reformes que proposait Dartigue étaient basés sur une nouvelle approche beaucoup plus incohérente du système d’éducation qui doit apporter le changement dans la vision d’un peuple.