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La réforme de 1902 : absence ou refus d’une transposition didactique ?

Dans le document Mémoire M2 Didier Auroy (2018/2019) (Page 31-37)

et 1861 seront modifiées afin de faire apparaitre les unités légales de mesure décidées par la Commission des Poids et Mesures en 1793 ;

3. enfin, il servira de manuel scolaire entre 1830 et 1861 en lieu et place des "Eléments" d’Euclide. La transposition du savoir savant euclidien qu’il a entrepris mérite l’attention à plus d’un titre :

— il ne se précipite pas sur les mathématiques établies par Euclide, mais il les met en scène à travers un questionnement de nature didactique ;

— il augmente la complexité des problèmes à résoudre en maintenant sans cesse le lien entre le monde sensible et une mathématisation des phénomènes observés ;

— l’habitât, (les problèmes d’arpentage), qu’il a choisi pour les types de tâches qu’il présente, correspond fortement aux besoins de son époque41 de son époque.

Il a choisi d’en présenter les méthodes avec le soucis d’initier les gens du peuple au mathématiques. En somme, son ouvrage est aussi une tentative de démocratiser l’enseignement des mathématiques.

Certes, son ouvrage est critiquable. Les défenseurs d’Euclide le qualifieront de peu rigoureux (d’un autre côté, à côté des démonstrations complexes d’Euclide, pouvait-il en être autrement ?). Mais Clairaut veut initier "des commençants" à la démarche mathématique, car, plus qu’aucun autre avant lui, il a compris l’importance de nourrir l’intuition avant de passer à la théorie. En cela, il a plus d’un siècle d’avance sur son époque, comme nous allons pouvoir nous en rendre compte avec la section suivante.

4.5

La réforme de 1902 : absence ou refus d’une transposition didac-

tique ?

4.5.1 La société au début du XXe siècle

Sur Wikipédia on peut lire :

La révolution industrielle est le processus historique du XIXe siècle qui fait basculer — de manière plus ou moins rapide selon les pays et les régions — une société à dominante agraire et artisanale vers une société commerciale et industrielle. Cette transformation, tirée par le boom ferroviaire des années 1840, affecte profondément l’agriculture, l’économie, le droit, la politique, la société et l’environnement.

Wikipédia, entrée "Révolution industrielle"

Effectivement, d’après J. Molinier, les données statistiques, relatives l’évolution de la population rurale à cette époque, sont sans appel42, ainsi que le montre la Figure 4.4 qui reproduit un des tableaux de son étude.

En près de 200 ans, la population rurale a chuté de près de 30%, et la part de la population totale vivant de l’agriculture a chuté de près de 43%. La raison de ces chutes réside évidemment dans un changement profond dans la société, du fait d’une part de la révolution industrielle accompagnée d’un exode rural croissant, et d’autre part d’une augmentation de la population totale. En effet, le climat du XIXe siècle a continué sa progression entamée au siècle précédent. Par ailleurs, les progrès de la médecine font baisser le taux de mortalité.

Toutes ces conditions réunies permettent et demandent davantage de personnes dans les villes dans lesquelles les industries se développent. La nécessité d’ouvriers, de techniciens va de pair avec la vie plus facile dans les grandes villes. Le monde rural est un vivier dans lequel on peut puiser pour trouver de la main d’œuvre.

41. "Du XVIIIe siècle au milieu du XIXe, la population agricole ne cesse d’augmenter.", d’après Molinier,1977

Année Population rurale (en part de la population totale (%))

Population vivant de l’agriculture (en part de la

population totale (%)) 1700 83 - 1789 78 67 1801 77 66 1821 76 62 1846 76 57 1872 69 51 1881 65 48 1891 63 46 1901 59 42 1911 56 38

Figure 4.4 – Évolution de la population rurale XVIIIe siècle et XIXe siècle

4.5.2 L’école au début du XXe siècle

De la fin du XVIIIème à 1906 les réformes structurelles de l’éducation vont être nombreuses, en France et ailleurs43. Il y a nécessité de suivre l’évolution industrielle galopante, et préparer les jeunes pour qu’ils s’adaptent et participent à ce développement. L’arpentage va peu à peu cesser d’être une priorité, même s’il apparait encore dans certains manuels de la fin du XIXème siècle ou au début du XXème44. Les années 1860 ont marqué le retour de la géométrie euclidienne tandis que les réformes structurelles se sont succédées (lois Guizot, Falloux, Ferry, etc.45) : l’éducation, fortement contrôlée par l’Église pendant un temps, va peu à peu céder sa place à l’État. L’heure est venue "de changer les missions, les contenus

et les méthodes d’enseignements"46.

En 1899, la Chambre des députés décide de créer une enquête parlementaire, dite "Commission de l’enseignement", qui sera présidée par le député A. Ribot. Dans son rapport, ce dernier conclura :

La science a introduit une conception nouvelle du monde , une manière nouvelle d’envisager la nature, l’homme lui-même et les grands faits sociaux et, pour tout dire, une philosophie nouvelle du développement de l’humanité. C’est cet esprit qui doit être l’âme de l’enseignement moderne.

"Science et enseignement", Gispert, 2007, page 56

En réalité, l’esprit du rapport de cette commission est de préparer les acteurs de la bataille économique qui se joue à l’étranger, tandis que c’est à la filière classique que revient la formation d’une élite intellectuelle destinée à maintenir le haut niveau de culture qui fait la grandeur de la France. En somme, il faut allier l’utilitaire et le culturel.

Dans les faits, il s’agit aussi de tenir compte d’une crise du lycée dans le sens où les études "classiques" des humanités voient les effectifs des élèves plafonner, tandis que le nombre d’élèves dans l’enseignement primaire explose.

Selon H. Gispert, la réforme de 1902 est un temps fort de l’histoire de l’enseignement secondaire français et de l’histoire de l’enseignement de ses disciplines :

Cette réforme de 1902 a pour ambition de répondre enfin à la question de l’adaptation du secondaire aux réalités du "monde moderne".

ibid., page 21 43. Gispert,2007, pages 37 et suivantes

44. Par exemple, l’ouvrage de P. Leysenne(Leysenne,1887) 45. Source Wikipedia

4.5. LA RÉFORME DE 1902 : ABSENCE OU REFUS D’UNE TRANSPOSITION DIDACTIQUE ?

Plus loin, elle détaille les motifs de la réforme en citant les propos de G. Leygues, ministre de l’Instruction publique :

|. . . ] dans un pays où la population professionnelle active représente 40% de la population totale,[. . . ], l’Université ne peut plus se contenter de préparer les jeunes gens qui lui sont confiés aux carrières libérales, aux grandes écoles et au professorat ; elle doit les préparer aussi à la vie économique, à l’action"

ibid., page 22

L’aspect structurel de cette réforme va s’opérer à plusieurs niveaux :

— suppression de la distinction entre enseignement secondaire classique et enseignement secondaire moderne ;

— fin du monopole des humanités classiques, en développant l’enseignement des langues et des sciences ;

— renouvellement des missions, des contenus, des méthodes.

La question de l’utilité des disciplines, ou même de leur légitimité sociale est posée. Révolution industrielle oblige, les sciences vont être principalement impactées par cette réforme de grande ampleur. Le recteur de l’époque, L. Liard, déclara à leur sujet :

La réforme de 1902 doit avoir pour effet leur insertion à une juste place dans l’enseignement des lycées.

ibid., page 27

Par "juste place", Liard entend principalement que les sciences doivent devenir des "instruments de culture" et non juste des matières à examens.

Conscient que les méthodes pédagogiques passées ne pourront pas être utilisables avec la massification de l’enseignement, Liard tente de mettre l’accent sur les méthodes d’enseignement, en mettant en avant la nécessité de faire expérimenter les élèves afin de les rendre actifs dans leurs apprentissages.

4.5.3 Les mathématiques au début du XXe siècle

La fin du XIXe siècle a montré une véritable explosion des sciences physiques théoriques avec l’in- troduction des quanta47, la théorie de la relativité48. En ce début de XXe siècle, la légitimité des sciences physiques ne fait aucun doute dans les pays industriels, même si, en France, beaucoup d’universitaires sont hostiles et méfiants envers ces "théories"49. Cette légitimité doit apparaître dans les faits dans le monde de l’enseignement : une séparation entre sciences physiques et mathématiques s’impose, du point de vue tant de leur épistémologie que de leurs méthodes.

Parallèlement, en mathématiques, des concepts, apparus depuis fort longtemps, ont connu des déve- loppements importants à l’aide de nouvelles théories. En calcul, les développements du calcul différentiel et intégrale mettent fin au infiniment petit du XVIIIe siècle, et ont permis aux sciences physiques de découvrir, par le calcul, des planètes invisibles50. En géométrie, G. Monge a formalisé la géométrie descriptive, marquant ainsi l’aboutissement de travaux commencés au XVIe siècle par G.Desargues. La remise en cause du 5ème postulat d’Euclide a permis à J. Bolyai et N. Lobatchevski de découvrir des géométries non euclidiennes qui auront un impact considérable tant en mathématiques qu’en physique. Vers 1880, F. Klein va réaliser une "Étude comparée des différentes recherches récentes en géométrie". L’objectif est de comparer les différentes géométries apparues au cours du XIXe siècle pour en dégager 47. M. Planck formalise la théorie des quanta en 1900 sur la base d’expériences réalisées entre 1880 et 1900 concernant le rayonnement du corps noir.

48. A. Einstein la formalisera en 1905 mais les travaux, et les problèmes, auxquels elle se réfère remonte à la mécanique newtonienne. Sa théorie ne sera prouvée qu’en 1919 par des mesures astronomiques.

49. H. Gispert, "Science et enseignement", pages 23-24

les points de similitude : on peut ainsi plus clairement distinguer la géométrie affine, la géométrie projec- tive, la géométrie euclidienne, la géométrie non euclidienne au travers d’une vision globale. La clef de voûte de ce programme est de fonder la géométrie sur les notions d’actions de groupe et d’invariants..

Le bouillonnement intellectuel est intense dans toutes ces disciplines et dans bien d’autres encore. La réforme de 1902 espère mettre en place une transposition du monde savant au monde scolaire. En mathématiques, cela va se traduire par la volonté de fusionner géométrie plane et géométrie dans l’espace, les deux étant considérées comme inséparables. D’autre part, concernant les changements de méthodes prônées par le recteur L. Liard, le remède aux anciennes pédagogies va porter sur la nécessité de "rendre

les élèves actifs". Oppositions des méthodes, oppositions des structures, clivage ancien monde (agricole)

et nouveau monde (industriel), les années 1900 sont le moment où la dialectique ancien/nouveau bat son plein, la réforme de 1902 entendant bien que le nouveau monde l’emporte.

4.5.4 La dialectique ancien/nouveau en géométrie

Schématiquement, concernant la géométrie, nous pouvons dresser (Figure 4.5) le tableau de la situa- tion qui a lieu au moment de la réforme de 1900 de la manière suivante : La comparaison précédente pose

Avant 1900

— Prévalence de la géométrie d’Euclide ; — séparation des élites (enseignement se-

condaire) et du reste de la population (enseignement primaire élémentaire puis supérieur) ;

— pédagogie descendante (le savoir va du maitre aux élèves) : élèves passifs qui doivent intégrer les abstractions des élé- ments d’Euclide ;

— les mathématiques sont enseignées après les six années d’apprentissage des huma- nités (sauf dans l’enseignement primaire gratuit) ;

Objectifs de la réforme de 1900

— Éviter les abstractions d’Euclide peu compréhensibles par les élèves ;

— massification de l’enseignement en vue de s’adapter au monde industriel mo- derne ;

— rendre les élèves actifs dans l’acquisition des savoirs (expérimentations) ;

— méthodes pédagogiques nouvelles.

Figure 4.5 – Comparaison des enseignements de la géométrie avant et après 1900

le problème épineux de savoir par quoi remplacer l’enseignement classique de la géométrie qui se faisait avec Euclide, ceci en rendant en plus les élèves actifs et acteurs de leurs apprentissages.

En effet, H. Poincaré, un des personnages clé de cette réforme par son impact internationalement reconnu, pose le problème en ces termes :

Qu’ils (les élèves) soient incapables d’inventer, passe encore, mais qu’ils ne comprennent pas les démonstrations qu’on leur expose, qu’ils restent aveugles quand nous leur présentons une lumière qui nous semble briller d’un pur éclat, c’est ce qui est tout à fait prodigieux.

Gispert, 2007, page 206

H. Poincaré a toujours été convaincu que, pour qu’une abstraction ait lieu, il faut la rattacher au réel. Pour lui, ce qu’il y a eu d’abord, c’est l’image sensible, ce n’est pas la définition logique. Il considère que l’histoire des mathématiques le montre si on étudie l’histoire des fractions ou des fonctions. A l’instar de Clairaut, il ne peut envisager l’apprentissage de la géométrie sans progressivité. Pour lui, il ne faut pas énoncer une définition, mais la préparer, la justifier à partir du "concret". Pour lui, la logique vient plus tard, quand l’intuition est bien nourrie d’images et d’expériences : c’est l’intuition qui fait inventer, la logique vient ensuite pour démontrer la validité ou non de l’invention.

4.5. LA RÉFORME DE 1902 : ABSENCE OU REFUS D’UNE TRANSPOSITION DIDACTIQUE ?

Opposé à la logique d’Euclide ou de D. Hilbert, H. Poincaré leur préfère le programme d’Erlangen de F. Klein, qui promeut le groupe des mouvements des corps solides (symétrie, translation, etc.). Pour H. Poincaré, la véritable source de la géométrie, c’est la considération du mouvement des corps solides.

H. Poincaré a donc dans l’idée une transposition didactique profonde et brutale si l’on considère le passé uniquement euclidien de l’enseignement de la géométrie. Une telle transposition ne peut s’opérer que si les enseignants sont formés en conséquence. Mais cette réforme de 1900 a lieu dans une situation d’urgence qui ne prête guère à "perdre" du temps en formations des enseignants, d’autant que ces derniers sont très hostiles à cette réforme qu’ils jugent "organisée par des professeurs d’université ou des chercheurs

sans qu’eux mêmes aient été consultés". La dialectique ancien/nouveau se situe, avons-nous dit, à plusieurs

niveaux.

4.5.5 Les ouvrages et manuels de cette réforme

4.5.5.1 Les "Nouveaux éléments de géométrie" de C. Meray

Les promoteurs de la réforme de 1902 avaient à l’esprit que l’enseignement de la géométrie devait suivre la voie qu’avait tracé C. Meray51 en 1874.

Dans cet ouvrage, Meray, très influencé par les arguments de Gergonne (ancien élève de G. Monge) parus en 1826, mettait un point d’honneur a fusionner géométrie plane et géométrie dans l’es- pace. Il considérait qu’enseigner d’abord la géométrie plane constituait un obstacle "didactique" à l’ap- prentissage de la seconde, cette dernière étant la plus naturelle pour l’être humain, puisque constituant son quotidien. S’inscrivant dans la mouvance de Clairaut, il reprend l’idée de s’affranchir des postu- lats d’Euclide qu’il estime n’avoir pas toujours une portée immédiate, afin de baser son enseignement d’abord sur l’intuition que les humains ont du monde sensible. Son propos est fortement orienté vers le monde industriel dans lequel on ne s’embarrasse pas de "subtilités insignifiantes" pour reprendre les mots qu’il utilise. Plaçant le mouvement comme composante empiriquement connue par les êtres humains52, s’opposant ainsi à la géométrie euclidienne qui avait proscris le mouvement dans ses

explications53, il va baser les siennes sur la translation, la rotation, la symétrie et la similitude. Ainsi, les premiers chapitres traitent des points suivants :

Chapitre I : Objet et nature de la géométrie - Abstractions fondamentales Chapitre II : Ligne droite - Plan - Applications

Chapitre III : Mouvement de translation - Droites parallèles - Droite et plan parallèles - Plans parallèles - Cas d’intersection des droites et des plans - Applications

Chapitre IV : Mouvement de rotation - Plans perpendiculaires à des droites - droites perpendicu- laires - Plans perpendiculaires - Applications

Chapitre V : Définitions et axiomes - Relation entre segments découpés sur deux droites quel- conques par des droites ou des plans parallèles - Applications

C’est donc dans le Chapitre V que Meray parle pour la première fois de la grandeur "longueur" et des axiomes relatifs à celle-ci. Comme il prend en compte le mouvement, il est amené à distinguer constamment deux directions (celle du mouvement et la direction contraire), ce qui alourdi un peu son propos, mais il passe néanmoins par les axiomes théoriques déjà rencontrés dans la section 2.2, à savoir :

Axiome (i) : La superposition de deux segments prouvant qu’ils sont égaux ;

Axiome (viii) La somme de deux segments (qui est indépendante de l’ordre dans laquelle elle est réalisée)

Axiome (x) : Si deux segment sont inégaux, l’un deux est la somme du premier et d’un troisième segment non nul

51. Meray,1874

52. cf R. Bkouche dans "Variations autour de la réforme 1902/1905 ", page 6

53. R. Bkouche précise à ce propos qu’en réalité "les grecs n’ont jamais vraiment réussit à éliminer complètement le mouvement de la géométrie dans leurs démonstrations", car, entre autres, qui dit "superposition" dit aussi "mouvement", ibid. page 6.

Axiome (xi) : Le rapport de deux longueurs (en distinguant les cas selon que les longueurs sont commensurables ou non)

Sans entrer dans davantage de détails, il suffit de dire que Meray procède de la même manière, et avec les mêmes axiomes, pour parler des angles (Chapitre VI), des aires (Chapitre X) ou des volumes (Chapitre XII).

D’après R. Bkouche, l’influence de C. Meray serait allée jusqu’à C. Bourlet qui fut un des concepteurs de la réforme de 1902. On peut donc raisonnablement penser que les grandeurs, et leurs types de tâches usuels, ont sûrement vécu dans les classes à partir de 1902. L’argument de l’expérimentation, comme devant permettre des définitions ultérieures, plaide d’ailleurs en faveur de cette affirmation.

D’un autre côté, il est évident qu’une réforme ne se met pas en place d’un claquement de doigts. Nous l’avons vu, une résistance tant pédagogique que didactique était fortement présente, ce qui a pu nuire à l’enseignement de différentes parties du programme de 1902. Les grandeurs ont pu en être victime. Pour lever ce doute, nous sommes allés consulter le manuel de Vacquant et Macé paru en 1903, indiqué comme étant conforme à la réforme de 1902.

4.5.5.2 Le manuel de Vacquant et Macé, édition 1903 - Partie "leçon"

Par commodité, nous avons appelé partie "leçon" la partie de l’ouvrage dans laquelle les axiomes et autres théorèmes sont annoncés et prouvés, et partie "exercices" celle consacrée à des démonstrations que les élèves doivent réaliser sans que la correction n’apparaisse.

Dans l’Annexe "Géométrie élémentaire de Vacquant et Macé - Édition 1903" on trouvera la copie du sommaire de cet ouvrage qui distingue les enseignements du Premier Cycle, basé sur la géométrie plane, et du Deuxième Cycle, basé essentiellement sur la géométrie dans l’espace. Ceci nous donne déjà le ton par rapport aux préconisations de C. Meray qui entendait fusionner la géométrie plane et la géométrie dans l’espace : Vacquant et Macé ne les fusionnent pas ! On est donc à nouveau dans l’apprentissage de la géométrie à partir des "prescriptions" d’Euclide.

Dans les notions préliminaires, la section IV mentionne, programme euclidien oblige, les "mesures

des grandeurs". Dans cette section, Vacquant et Macé, sans donner de définition de ce qu’est une

grandeur, en viennent très vite au fait de comparer une grandeur à une autre de même espèce que la première, et du fait de se servir de la plus petite, soit comme unité de mesure, soit comme permet- tant d’en tirer une partie aliquote, commune au deux grandeurs, pouvant servir d’unité de mesure. Ils en viennent alors à examiner cette question, afin de déterminer si cette partie aliquote existe, et sont naturellement et logiquement conduits à étudier les cas des grandeurs commensurables et non commensurables, permettant de justifier que la mesure d’une grandeur peut exister dans ces deux cas, comme l’ont fait avant eux, Euclide, Clairaut et bien d’autres.

4.5.6 La victoire de l’ancien sur le nouveau monde

Au final, la transposition invoquée par H. Poincaré, ainsi que les recommandations de E. Borel concernant la nécessité de l’expérimentation, vont rester lettre morte. L’ancien monde, bourgeois, crai- gnant une perte de niveau pour la future élite sociale, préférera persévérer dans l’apprentissage de la géométrie par Euclide. L’enseignement de la géométrie ne connaitra pas de grands bouleversements pendant cette période, à l’exception cependant d’une chose : le fait qu’il y avait encore, à l’époque,les systèmes secondaire (payants pour les élites) et primaire (gratuit pour le reste de la po-

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