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Partie 2 : La signalisation de la famille TGF-β

1. La famille TGF-β : une famille nombreuse

1.2 Les récepteurs de la famille TGF-β

1.2.1

Bref historique

Les premières recherches des récepteurs de cette famille ont été faites pour TGF-β1 en utilisant du TGF-β1 marqué à l'iode radioactif (125I) (Frolik C. A. 1984) (Tucker R. F. 1984a). La découverte des récepteurs commença véritablement avec les travaux de Massagué. En effet, il montra l'existence de trois types de récepteurs de poids moléculaires très différents : un récepteur de type 1 de 65 kDa environ, un récepteur de type 2 de 85 kDa environ et enfin un récepteur de type 3 de très haut poids (> 200 kDa). Il décrit alors le récepteur de type 3 comme récepteur majoritaire au TGF-β (Massague J. 1985). Cependant, son équipe corrigea cette affirmation dès 1986 en montrant que certaines lignées cellulaires peuvent lier le TGF-β sans exprimer de récepteur de type 3 (Cheifetz S. 1986). Bien que les premières recherches se concentrèrent sur les récepteurs du TGF-β, le premier récepteur cloné fut un récepteur de l'activine, appelé maintenant ActR2 (Activin Receptor type 2). La connaissance de la séquence d'un récepteur de la famille TGF-β a permis d'émettre l'hypothèse de récepteurs transmembranaires à activité sérine/thréonine kinase pour cette famille (Mathews L. S. 1991). Les autres récepteurs ont alors été rapidement identifiés par homologie.

Ainsi, sept récepteurs de type 1, cinq récepteurs de type 2 et deux récepteurs de type 3 ont été identifiés chez les mammifères (figure 26). Les récepteurs de type 1 sont nommés ALK (Activin receptor-Like Kinase) 1 à 7. Les récepteurs de type 2 sont BMPR2 (BMP Receptor type 2), ActR2A et -B (Activin Receptor type 2 A et B), AMHR2 (AMH Receptor type 2), TβR2 (TGF-β Receptor type 2). Enfin l'endogline (Eng) et le bétaglycan sont les récepteurs de type 3 identifiés. Notons que les récepteurs de la famille du GDNF, famille la plus éloignée dans la superfamille du TGF-β, ont une activité tyrosine kinase et n'appartiennent donc pas au groupe énoncé précédemment. Je ne les présenterai donc pas dans ce manuscrit.

Figure 27 : Structure cristallographique du domaine kinase d'ALK5.

La boîte GS (en vert) est le domaine phosphorylé par le TβR2 pour activer ALK5. La boucle L45 (en bleu) détermine la spécificité des Smads.

Le domaine de liaison du phosphate (en bleu clair) permet la liaison de l'ATP.

Le domaine catalytique (orange) est le siège de la réaction de phosphorylation des substrats. Le domaine d'activation (en rose) bloque l'accès au site catalytique en l'absence d'activation du récepteur. La boîte GS est structurellement reliée au domaine d'activation par l'hélice αC. La boîte NANDOR (en bleu à pois rouges) est un domaine très conservé dans les récepteurs de type 1 et dont le rôle est peu connu.

1.2.2

Structures des récepteurs

Les récepteurs de type 1 et 2 ont trois grands domaines : un domaine extracellulaire, un domaine membranaire et un domaine kinase intracellulaire. Les récepteurs de type 3 possèdent eux-aussi un domaine extracellulaire et membranaire, mais ne possèdent pas de domaine kinase, leur domaine intracellulaire étant très court. Je présenterai d'abord les structures des récepteurs de type 1 et de type 2, puis ensuite les structures des récepteurs de type 3.

Les récepteurs de type 1 et de type 2

Les récepteurs de types 1 et 2 sont des glycoprotéines de 50-60 kDa et 70-80 kDa respectivement.

Le domaine extracellulaire est du côté N-terminal de la séquence peptidique. La séquence signal, qui adresse la protéine à la membrane, est clivée lors de la maturation du récepteur. Ce domaine est N-glycosylé, et contient dix cystéines au moins qui déterminent la structure de ce domaine. Trois de ces cystéines forment une région caractéristique des récepteurs de cette famille appelée "boîte cystéine" et se trouvant près du domaine transmembranaire (Wrana J. L. 1994b).

Ces récepteurs possèdent une région transmembranaire unique sans particularité remarquable.

Le domaine intracellulaire peut se décomposer en 3 sous-domaines : la boîte GS, le domaine kinase, la queue cytoplasmique (figure 27).

La boîte GS est une caractéristique des récepteurs de type 1. Localisée juste avant le domaine kinase, c'est un domaine de 30 acides aminés très conservés. Cette région tient son nom de la séquence caractéristique qu'il contient (SGSGSG). Cette région contient les sites de phosphorylation du récepteur de type 1 par le récepteur de type 2 (Wrana J. L. 1994a).

Le domaine kinase a une séquence canonique des serine/thréonine kinases (Mathews L. S. 1991). Ainsi, les structures des domaines kinases de ces récepteurs ont révélé la présence d'un feuillet β3 impliqué dans la liaison avec l'ATP (Carcamo J. 1994) (Wrana J. L.

Figure 28 : Structure du bétaglycan et de l'endogline.

A : Représentation schématique des récepteurs. D'après (Lopez-Novoa J. M. 2010) et (Bernabeu C. 2009).

B : Structure cristallographique du domaine ZP du bétaglycan. D'après (Lin S. J. 2011). C : Modèle prédictif de la structure du domaine extracellulaire de l'endogline à partir d'une microscopie électronique.  Monomère "vu de côté".  Organisation des domaines extracellulaires du dimère "vus du haut". D'après (Llorca O. 2007).

D : Séquences des domaines intracellulaires de l'endogline courte et longue. Les différences sont notées en bleu. Seule la forme longue possède le domaine PDZ. D'après (Lopez-Novoa J. M. 2010).

La queue cytoplasmique en C-terminal du domaine kinase est relativement courte pour les récepteurs de type 1 par rapport aux récepteurs de type 2. Cependant, une région très conservée entre les différents récepteurs de type 1 apparait primordiale dans le fonctionnement de ces récepteurs. Cette région est appelée la boîte NANDOR (pour NonActivating Non-DOwn-Regulating). Elle se situe quelques acides aminés avant l'extrémité carboxyle du récepteur et comporte onze acides aminés. Cette région apparait cruciale pour la régulation d'ALK5, mais n'interviendrait pas dans son activité kinase (Garamszegi N. 2001). Son rôle sera développé lors de la description de l'activation des récepteurs de type 1 par les récepteurs de type 2.

Les récepteurs de type 3

Le récepteur de type 3 du TGF-β est le bétaglycan. C'est un protéoglycan, avec un long domaine extracellulaire, un domaine transmembranaire et un domaine cytoplasmique très court dépourvu d'activité kinase. Le domaine extracellulaire contient deux sites de fixation des glycosaminoglycanes, en plus de site de N- et O-glycosylation (Cheifetz S. 1988). Le bétaglycan apparait comme un dimère non covalent (figure 28) (Henis Y. I. 1994).

Un autre récepteur de type 3 de la famille a été décrit chez les mammifères, il s'agit de l'endogline (ou CD105). Ce récepteur est une glycoprotéine très exprimée à la surface des cellules endothéliales (Gougos A. 1990). L'endogline se présente sous une forme dimérique (liaison covalente par au moins un pont disulfure) (figure 28). Comme le bétaglycan, l'endogline possède un long domaine extracellulaire, un domaine transmembranaire et un court domaine cytoplasmique sans activité kinase. L'endogline possède des sites de N- et O- glycosylation, mais ne possède pas de chaîne de glycosaminoglycanes. Le domaine extracellulaire de l'endogline présente un domaine RGD d'interaction avec les intégrines (domaine non conservé chez la souris, le porc et le rat) (Gougos A. 1990) (Yamashita H. 1994), un domaine zone pellucide (DZP) de 260 acides aminés (commun avec le bétaglycan) (Bork P. 1992), ainsi qu'un domaine orphelin sans homologie de structure connue (Gougos A. 1990). Le DZP est impliqué dans l'interaction de l'endogline avec les récepteurs au TGF-β en absence de celui-ci (Guerrero-Esteo M. 2002). Le domaine intracellulaire possède un motif d'interaction PDZ. De multiples sites de phosphorylation (résidus sérine/thréonine) sont

consécutives à un épissage alternatif : une forme courte (S-endogline pour Short endogline) et une forme longue (L-endogline), différentes de 30 acides aminés dans le domaine intracellulaire (Bellon T. 1993). La L-endogline est la forme majoritaire, mais le ratio S/L entre ces deux formes peut changer, notamment lors du vieillissement des tissus ou lors de la sénescence des cellules endothéliales où ce ratio est augmenté (Blanco F. J. 2008).

Ces récepteurs modulent la liaison des ligands sur les récepteurs de type 1 et de type 2, sans posséder d'activité de transduction du signal propre. Ils sont donc souvent appelés co- récepteurs. Notons que le bétaglycan peut lier seul les trois isoformes du TGF-β (Lopez- Casillas F. 1993) alors que l'endogline ne peut lier que TGF-β1 et TGF-β3 en présence de TβR2 (Letamendia A. 1998).