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67 Axel HÄGERSTÖM, Inquiries into the Nature of Law and Morals, trad. de C. D. Broad, Stockholm: Almqvist & Wiksell, 1953, p. 348.

68 Vilhelm LUNDSTEDT, Legal Thinking Revised : My Views on Law, Stockholm: Almqvist

& Wiksell, 1956, p. 17.

69 Karl OLIVECRONA, « Legal Language and Reality », in R. A. Newman (dir.) Essays in Jurisprudence in Honor of Roscoe Pound, Indianapolis: Bobbs-Merrill Co., 1962, p. 173.

70 Alf ROSS, Towards a Realistic Jurisprudence: A Criticism of the Dualism in Law, Copenhagen : E. Munksgaard, 1946, p. 189.

71 Alf ROSS, “Tû-tû”, 7 Enquêtes 276 (1998), Eric Millard et Elsa Matzner (trad).

Les Etats-Unis ont probablement la tradition réaliste la plus ancienne, riche, diverse et forte. Le développement de ce mouvement à la fin du XIXe et au début du XXe siècle est lié à l’entrée des académiciennes jeunes et énergétiques dans les meilleures facultés juridiques de l’Amérique, et à leur connaissance des évolutions dans les autres domaines scientifiques : le pragmatisme dans la philosophie, la géométrie non-euclidienne, la théorie d’Einstein en physique, les nouvelles approches dans la psychologie et l’anthropologie.72

Ce mouvement se partage en plusieurs réalismes, certains sont plus proches des études critiques du droit, mais les autres deviendront les nouveaux juridismes. Il faut dire que le mot « réalisme » est également polysémique comme la majorité des concepts juridiques, mais on peut sans doute lier ce concept à l’affirmation que la réalité est trop complexe et fluide pour être gouvernée par des règles.73 On doit peut-être mettre au centre de cette approche Oliver Holmes74 écrivant que le droit est ce que les juges font, le droit n’est pas une logique mais une expérience. Par contre, je ne mettrais pas au cœur du mouvement la définition de Benjamin Cardozo qui comprend le réalisme comme le don de la priorité aux « considérations d’analogie, de la politique et de la justice » par rapport à la Begriffsjurisprudenz (la jurisprudence des conceptions)75.

Pas à pas le mouvement se complexifie et s’enrichie par des clivages internes, ce qui est démontré, par exemple, par le débat entre Pound et Llewellyn. En 1931 Pound introduit la notion de la « jurisprudence réaliste » pour décrire notre mouvement,76 mais Llewellyn qui entre en conflit intellectuel avec Pound sur la nature du réalisme, et parle plutôt de la

« jurisprudence réalistique ».77

Pound qualifie Llewellyn et ses amies de « nouvelles réalistes » et les critique pour la réduction de la science juridique en une simple description.78 Il pense également que les néoréalistes ont leur propre préconception de ce qui est important avant le début de sa recherche. Elles substituent aux devoirs

72 Edward A. PURCELL, Jr., The Crisis of Democratic Theory: Scientific Naturalism and the Problem of Value, Lexington : University Press of Kentucky, 1973, p. 74-94.

73 Gary MINDA, Postmodern Legal Movements: Law and Jurisprudence at Century’s End, New York : New York University Press, 1995, p. 27.

74 Oliver Wendell HOLMES, The Common Law, Boston: Little, Brown, 1881, p. 1.

75 Hynes c. New York Central R. Co., 231 NY 229, 236 (1921).

76 Roscoe POUND, “The Call for a Realist Jurisprudence”, 44 Harvard Law Review 697 (1931).

77 Karl LLEWELLYN, “A Realistic Jurisprudence – The Next Step”, 30 Columbia Law Review 431 (1930).

78 Roscoe POUND, “The Call for a Realist Jurisprudence”, op. cit., p. 697-711.

éthiques, politiques et historiques, le déterminisme psychologique.79 Pound trouve que les « néoréalistes radicales » sont encore pires puisqu’elles dénient toutes les règles, les principes, les conceptions et les doctrines. Mais il n’y a rien de plus irréel.80 Finalement, il vous propose son programme de la jurisprudence réaliste-relativiste81 :

1. Attitude fonctionnelle : emploi des approches sociologiques pour montrer le fonctionnement du système juridique sans nier l’importance des principes juridiques et des institutions.

2. Reconnaissance des éléments alogiques, irrationnels et subjectifs dans les activités judiciaires et leur étude.

3. Reconnaissance de l’importance des cas individuels en s’opposant à l’universalisme absolu du siècle passé mais sans perdre de vue l’importance des généralisations et des conceptions comme des instruments de l’ordre juridique.

4. Abandon de l’idée de la solution nécessairement unique pour chaque problème.

5. Emploi des approches psychologiques sans dépendance dogmatique d’une branche particulière de la psychologie.

6. Emploi d’une théorie des valeurs sans dogmes d’une philosophie particulière.

7. Reconnaissance de la pluralité des approches à la vérité juridique et de l’importance de chaque approche envers un problème particulier.

Karl Llewellyn ne partage pas la vision de Pound quant aux « néoréalistes ».

Il nous présente une analyse des travaux des 20 « réalistes indiscutables » et des 65 « réalistes réels » pour montrer que la notion des « néoréalistes » est sans référence concrète.82 Llewellyn soutient que le réalisme est la tournure d’esprit, une attitude, une perspective qui n’est pas liée ni à une génération ni à la politique. Quelles que soient leurs visions philosophiques ou politiques, les réalistes se distinguent par la recherche sur le droit en action.83 En réponse à Pound, Llewellyn écrit que les réalistes n’affirment pas (1) que les règles du droit substantiel sont sans importance, (2) qu’une analyse basée sur les droits-intérêts et sur les règles-recours ne peut jamais présenter la vision claire et utile du droit, (3) et qu’il faut exclure les droits substantifs et les règles du droit. Au lieu de ça, les réalistes insistent (1) sur le fait que les règles du droit substantiel sont de beaucoup moindre importance que ce que la majorité des juristes assument et qu’elles ne sont pas le centre de référence

79 Ibid.

80 Ibid.

81 Ibid.

82 Karl N. LLEWELLYN, “Some Realism About Realism – Responding to Dean Pound”, 44 Harvard Law Review 1222 (1931).

83 Roscoe POUND, “Law in Books and Law in Action”, 44 American Law Review 15 (1910).

le plus utile, (2) que la présence du terme « droits et règle » dans la structure des intérêts dérange la discussion avec un bagage qui n’est pas fortement nécessaire, (3) et que les règles et droits substantiels ne doivent pas être étudiés en tant que tels mais toujours en relation avec le champ de comportement.84

Llewellyn écrit que l’approche réaliste deviendrait irréelle si elle ne faisait pas l’attention à ce que les gens pensent que le droit est.85

Gary Minda divise les représentantes de ce mouvement en deux branches : les réalistes radicales et les réalistes progressives. Les radicaux Felix Cohen, Walter Cook et Robert Hale ont commencé le développement de la jurisprudence anticonceptuelle afin d’exposer le contexte politique du droit public et privé, l’incohérence des catégories juridiques, la dépendance des syllogismes juridiques des jugements politiques sur le rôle du droit dans la société.86 Roscoe Pound, Benjamin Cardozo, Brandeis sont des représentants du réalisme progressif qui se fonde sur le pragmatisme et sur la thèse de l’abus de déduction d’Oliver Holmes.87 Ils voient le droit comme une science sociale qui a un projet constructif et politiquement neutre.88

Duncan Kennedy classifie les réalistes en trois branches89 : 1. Frank et l’intuitionnisme, ou les radicales ;

2. Les behavioristes qui cherchent à découvrir les régularités de comportement sans permettre que les concepts juridiques jouent un rôle dans l’élaboration des hypothèses. Plus tard, cette branche deviendra la sociologie positiviste.

3. Les reconceptualistes Arthur Corbin, Morris Cohen, George Gardner, Karl Llewellyn et Lon Fuller qui considèrent les règles du droit comme des compromis entre les principes. Elles adhèrent à la rationalité des considérations conflictuelles.

Fisher, Hortwitz et Reed font la distinction entre un courant majoritaire modéré et un courant minoritaire radical. La majorité considérait que les

« règles du papier » joue un certain rôle dans la prise des décisions judiciaires mais ces dernières sont fortement influencées par les autres considérations.

Selon elles, la doctrine n’a jamais eu la force impérative : la logique déductive et le raisonnement par analogie sont beaucoup plus flexibles et

84 Karl N. LLEWELLYN, “A Realistic Jurisprudence – The Next Step”, 30 Columbia Law Review 431 (1930).

85 Ibid.

86 MINDA, Postmodern Legal Movements…, op. cit., p. 28.

87 Ibid. p. 29.

88 Ibid. p. 30.

89 Duncan KENNEDY, Marie-Claire BELLEAU, « La place de René Demogue… », p. 195-196.

ouverts que le juridisme classique ne le croit. De plus, la doctrine est toujours intérieurement contradictoire. La minorité soutenait quand même que la doctrine n’avait aucun rôle du tout.90

Après avoir fait une introduction à la méthodologie réaliste et à la classification de ce mouvement, nous allons passer brièvement par Wiliam Tilghman, Oliver Holmes, James Thayer, Roscoe Pound, Underhill Moore, Wesley Hohfeld, Arthur Corbin, Harold Laski, Robert Lee Hale, Morris Cohen, Felix Cohen, Karl Llewellyn, Jerome Frank, Lon Fuller, Thurman Arnold et Fred Rodell. Je vais essayer de garder la présentation plus ou moins chronologique pour mieux voir l’évolution de ce courant de pensée.

Le président de la Cour suprême de Pennsylvanie William Tilghman utilisait, en fait, la conception de l’abus de déduction déjà en 1811 en écrivant que les actes de la législature ne doivent être déclarés anticonstitutionnels que dans le cas où la violation est manifeste sans laisser aucun doute raisonnable.91 Robert Rantoul continuait la campagne sceptique contre la Raison par l’affirmation faite déjà en 1836 que le droit commun est la perfection de la raison humaine de la même façon que l’alcool est la perfection du sucre. La rationalité n’est douce que pour un intellect naïf.92 Mieux votre cerveau fonctionne, plus des rationalités vous voyez.

Oliver Wendell Holmes est souvent considéré comme le père du réalisme étatsunien. Ses thèses sur « la vie du droit n’était pas logique, elle était une expérience »93, « les propositions générales ne décident pas les cas concrets »94 et que le droit est une prédiction de ce que les juges feront,95 sont devenues des dogmes du réalisme. Jerome Frank a caractérisé Holmes comme un « juriste complètement adulte ».96

Il affirme que les décisions judiciaires sont toujours influencées par les nécessités du temps, par les théories prédominantes morales et politiques, par l’intuition de la politique public et même par les clichés. Ces facteurs sont beaucoup plus importants que tous les axiomes, la logique et la mathématique.97 Holmes se réfère à Langdell, qui a consacré sa carrière

90 William W. FISHER III, Morton J. HORWITZ, Thomas A. REED (dir.), American Legal Realism, Oxford: Oxford University Press, 1993, p. 164.

91 Commonwealth c. Smith, 4 Binn.117 [Pennsylvania, 1881].

92 Robert RANTOUL, « Oration at Scituate » (1836), dans Kermit L. Hall et al., American Legal History, New York : Oxford University Press, 1991, p. 317-318.

93 Oliver Wendell HOLMES, The Common Law, Boston: Little, Brown, 1881, p. 1.

94 Opinion dissidente du juge Oliver HOLMES dans Lochner c. New York, 198 US p. 76.

95 Oliver Wendell HOLMES, “The Path of the Law”, 10 Harvard Law Review 457 (1897).

96 Jerome FRANK, Law and the Modern Mind, New Brunswick: Transaction Publishers, 2009 (1930), p. 270.

97 Oliver Wendell HOLMES, The Common Law, op. cit., 1881, p. 1.

juridique à la création d’un fondement axiomatique et cohérent du système juridique, comme étant le « plus grand théologien juridique vivant ».98 Holmes, quant à lui, a créé la théorie de l’homme mauvais. Si vous avez besoin de connaître le droit et ses exigences, adoptez la perspective de l’homme mauvais.99 Vous pouvez penser que le droit est ce qui est décrit par Hobbes, par Bentham ou par Austin, que le droit émane du souverain, que le droit est la voix du Zeitgeist ou quelque chose comme ça, mais Holmes est intéressé par comment tout cela fonctionne dans la pratique régulatrice quotidienne.100 Au niveau général, la diversité de toutes ces approches détruit la certitude.

Il continue en disant que la constitution est écrite et adoptée par des gens ayant des convictions fondamentalement différentes et que, pour cette raison, elle ne peut être considérée comme ne justifiant qu’une seule théorie économique.101 Les « sympathies économiques » diverses des juges peuvent déterminer des résultats incompatibles.102

Néanmoins, Holmes reste un reconstructeur. Il maintient sa foi dans les

« principes fondamentaux comme ils ont été compris par les traditions de notre peuple et de notre pays ».103 Selon lui, l’incertitude est un dragon qui peut devenir un animal utile.104 Il propose d’intégrer les études de l’histoire dans le programme universitaire du droit pour cultiver le scepticisme éclairé.

Holmes veut reconstruire le droit en tant que science inductive de l’expérience et des faits105 pour arriver, finalement, aux règles impersonnelles.106 Il maintient la foi dans la capacité de la logique et de la raison à résoudre inductivement les problèmes juridiques et sociaux.107 James Thayer critique l’attitude selon laquelle le rôle principal et honorable du pouvoir judiciaire est la protection du peuple contre la violation de la constitution par la législature. Selon lui, si c’était le cas, le contrôle

98 Neil DUXBURY, Patterns of American Jurisprudence, Oxford, Oxford University Press, 1995, p. 37.

99 Oliver Wendell HOLMES, “The Path of the Law”, 10 Harvard Law Review 457 (1897).

100 Ibid.

101 Opinion dissidente du juge Oliver HOLMES dans Lochner c. New York, 198 US p. 76.

102 Oliver Wendell HOLMES, « Privilege, Malice, and Intent » dans Collected Legal Papers, éd. Buffalo, New York: William S. Hein, 1985 (article publié pour la première fois en 1894), p. 128.

103 Opinion dissidente du juge Oliver HOLMES dans Lochner c. New York, 198 US p. 75.

104 Oliver Wendell HOLMES, “The Path of the Law”, 10 Harvard Law Review 457 (1897).

105 R. Retall KELSO, Charles D. KELSO, Studying Law: An Introduction, St. Paul, Minn. : West Publishing, 1984, p. 115.

106 Oliver Wendell HOLMES, The Common Law – Boston : Little, Brown & Co., 1881, p. 47-48.

107 Richard POSNER, The Problems of Jurisprudence, Cambridge, Mass.: Harvard University Press, 1993, p. 19.

constitutionnel ne serait pas simplement accessoire et postérieur. Pour cette raison dans les cas où les juges ont l’opportunité d’agir, l’extension de leur contrôle doit également être étroite.108 Ce qui semble anticonstitutionnel à l’un, ne semble pas tel à l’autre. Les droits de l’homme peuvent même être mieux protégés par les législatures dans les pays sans constitution.109 Roscoe Pound introduit une distinction importante entre le droit dans les livres et le droit dans l’action. Il cite Freund pour montrer que, en fait, le droit dans les livres n’est souvent qu’un moyen dans les mains des juges pour renverser n’importe quelle législation qui, selon eux, n’est pas sage.110 Il regrette que le droit contrairement à toutes les autres sciences sociales et naturelles n’ait pas encore abandonné la déduction à partir des conceptions prédéterminées. La pensée philosophique, politique, économique et sociologique a déjà rejeté les méthodes du raisonnement a priori du XVIIIe siècle mais elles restent toujours dans les prémisses des juristes étatsuniennes.111 Pound cite les idées de John Commons pour attirer l’attention que la justice n’est pas seulement un jeu honnête entre individus mais aussi un jeu honnête entre classes sociales.112 Frank fera la référence à Pound en tant que critique du juridisme ne promouvant que l’idéologie du laissez-faire.113

Néanmoins, vers les années 30, Pound deviendra pas à pas chamanique et conservateur.114 Il essayera de renommer les réalistes qui seront en désaccord avec lui comme « néoréalistes » en leur attribuant des déclarations nihilistes qu’elles n’avaient jamais.115 Pound commence son propre projet de reconstruction du droit.

Il essaye de se distancer des réalistes comme Llewellyn et surtout des radicaux comme Underhill Moore qui niait la croyance que l’expérience humain peut montrer les choix ultimes pour la prise de décisions judiciaires rationnelles. Les ultimes ne sont que les fantômes d’un rêve journalier.116

108 James B. THAYER, “The Origin and Scope of the American Doctrine of Constitutional Law”, 7 Harvard Law Review 135 (1893).

109 Ibid.

110 Roscoe POUND, “Law in Books and Law in Action”, 44 American Law Review 15 (1910).

111 Ibid.

112 Ibid.

113 Opinion dissidente du juge Jérôme FRANK dans l’affaire M. Witmark & Sons c. Fred Fisher Music Co, 125 F.2d 949 (Cour d’Appel du 2e arrondissement.

114 FISHER et al. (dir.), American Legal Realism, p. 7.

115 Roscoe POUND, “The Call for a Realist Jurisprudence”, 44 Harvard Law Review 697 (1931).

116 Underhill MOORE, “Rational Basis of Legal Institutions”, 23 Columbia Law Review 612 (1923).

Les recherches de Wesley Hohfeld montrent que « la propriété n’est qu’une liasse des droits » sans « cœur ». Il y a une variété infinie de régimes dans le droit privé où chaque régime produit sa propre allocation des ressources et a son modèle de distribution des revenus. En même temps, tout cela est parfaitement consistant avec n’importe quelle définition cohérente de la propriété privée.117 Les mots peints au caméléon (chameleon-hued words) dérangent la pensée claire et la communication des idées.118 Mai il faut remarquer que Hohfeld croyait en la possibilité de reconstitution des concepts juridiques dans des termes empiriques et promouvait la science inductive du droit.119

Arthur Corbin examine les conflits autour de l’interprétation des contrats. Il remarque qu’il y a une tension permanente entre ce que les parties ont écrit et le standard de la personne raisonnable sur ce qu’elles devaient penser. Par ailleurs, cela n’explique même pas le choix judiciaire. Ce dernier est motivé par les facteurs inarticulés et subconscients : les opinions politiques, les opinions sur le bien-être, sur la justice, sur le correct et l’erroné.120 Harold Laski propose de réinterpréter le droit dans les termes de besoins collectifs.121 Robert Hale commence un projet très proche des études critiques du droit. Il consacre sa recherche à l’influence du droit à la distribution des revenus entre les classes sociales et trouve qu’au fond, la distribution des pouvoirs de négociation sur les fruits de la coopération en production est asymétrique. Il est tout à fait irréel de qualifier un tel accord de « liberté ». C’est plutôt une coercition : chacun est forcé de céder. Il faut remarquer que, selon Duncan Kennedy, Hale ce distingue du marxisme par sa reconnaissance de ce que les employées forcent également leur employeuse.122

Le pouvoir de négociation est affecté par deux catégories de règles123 : -Les règles sur les grèves, sur les lock-outs, sur les manifestations, sur l’inscription sur une liste noire, et sur le licenciement pour activités syndicales.

117 Wesley HOHFELD, “Some Fundamental Legal Conceptions as Applied in Judicial Reasoning”, 23 Yale Law Journal 16 (1913).

118 Wesley Newcomb HOHFELD, “Some Fundamental Legal Conceptions as Applied in Judicial Reasoning”, 23 Yale Law Journal 28 (1913).

119 FISHER et al. (dir.), American Legal Realism, p. 216.

120 Arthus CORBIN, “Offer and Acceptance, and Some of the Resulting Legal Relations”, 26 Yale Law Journal 204-206 (1917).

121 Harold LASKI, “The Basis of Vicarious Liability”, 26 Yale Law Journal 135.

122 Duncan KENNEDY, “The Stakes of Law, or Hale and Foucault!”, 15 Legal Studies Forum 327 (1991). Voyez également Robert Hale, “Prima Facie Torts, Combinations, and Non-Feasance”, 46 Columbia Law Review 196 (1946).

123 Ibid.

-Les règles influençant la présence d’un emploi alternatif et la volonté de le prendre ou de commencer des activités économiques indépendantes.

Les règles constituent le background pour les négociations et ce background est un sujet des manipulations.124 Hale conclut que l’idéologie du laissez-faire n’est pas une lutte pour liberté mais un transfert du pouvoir étatique aux groupes privés.125

John Dewey attire l’attention sur le fait qu’aucun juriste ne réfléchit jamais sur le cas de son client en termes de syllogismes mais prend ce que la cliente veut comme point de départ.126 Il dit que l’infiltration de la logique plus expérimentale et plus souple est une nécessité sociale et intellectuelle.127 Morris Cohen continue le thème en disant que la propriété est une forme de souveraineté.128 La propriété ne désigne pas la relation entre le propriétaire et une chose mais entre le propriétaire et les autres individus par une référence à cette chose.129

Felix Cohen, en ce qui concerne l’abus de déduction, assimile le droit à la magie. Il renonce au mythe sur l’existence de la presse hydraulique-dialectique-interprétative.130 Chaque mot juridique qui n’a pas de référence empirique claire, doit être déclaré banqueroute.131 Walter Cook appellait ces mots « notions mécaniques enfantines du XIXe siècle ».132 Llewellyn a montré la banqueroute du droit de propriété. Herman Oliphant vient avec les preuves de la banqueroute du contrat. Haines, Brown, T. R. Powell, Finkelstein et Cushman ont soumit la pétition pour la banqueroute du procès

Felix Cohen, en ce qui concerne l’abus de déduction, assimile le droit à la magie. Il renonce au mythe sur l’existence de la presse hydraulique-dialectique-interprétative.130 Chaque mot juridique qui n’a pas de référence empirique claire, doit être déclaré banqueroute.131 Walter Cook appellait ces mots « notions mécaniques enfantines du XIXe siècle ».132 Llewellyn a montré la banqueroute du droit de propriété. Herman Oliphant vient avec les preuves de la banqueroute du contrat. Haines, Brown, T. R. Powell, Finkelstein et Cushman ont soumit la pétition pour la banqueroute du procès