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Réactions de couplages pinacoliques

PARTIE II – Développement et optimisation des voies de synthèses des composés

A. Synthèses chimiques réalisées

1) Réactions de couplages pinacoliques

Les premières réactions de couplages pinacoliques ont été réalisées sur au moins un substrat d’origine naturelle. Les conditions réactionnelles ont été choisies en accord avec les travaux de Billamboz et al.139. Dans ces travaux, il apparait clairement que les choix du zinc comme métal réducteur et l’acide acétique comme source de protons apportent les meilleurs rendements. De plus, l’acide acétique est éco-compatible, tout comme les solvants utilisés, l’éthanol et l’eau (Schéma 18, Schéma 19, Schéma 20 et Schéma 21).

La réaction entre le citral et le 4-bromobenzaldéhyde a été réalisée en excès de citral et de zinc, à température ambiante, durant 6 heures. Les substrats linéaires réagissent plus aisément que les substrats aromatiques, d’où la nécessité d’introduire le citral en large excès. Le produit 1, produit de l’hétéro-couplage pinacolique, a été obtenu avec un rendement de 65 %. Le produit de l’homo-couplage du citral sur lui-même a été observé 26% ainsi que sa réduction directe en 3,7-diméthylocta-2,6-diènol. Le citral, l’acide acétique, l’éthanol et l’eau sont des réactifs et des solvants verts et la réaction ne nécessite pas de chauffage. Toutefois, la purification a été réalisée par chromatographie flash, technique nécessitant d’importantes quantités de solvants et posant un problème d’éco-compatibilité. Le rendement final en produit est très bon pour un hétéro-couplage, compte tenu de la compétition avec l’homo-couplage du citral sur lui-même (Schéma 18).

Schéma 18 : Réaction de couplage pinacolique entre le p-bromobenzaldéhyde et le citral.

Toutefois, cette synthèse n’a pas été optimisée ultérieurement car deux problèmes majeurs sont apparus, la non-reproductibilité de la réaction et la non-stabilité du produit, ne permettant pas de tester ultérieurement la molécule en microbiologie. La non-reproductibilité de la réaction, c’est-à-dire l’observation de résultats différents lors de la réplication de la manipulation, peut s’expliquer par la compétition avec les réactions d’homo-couplages des deux aldéhydes. Ces phénomènes sont très dépendants de l’ordre et de la vitesse d’ajout des

température ambiante, n’est, par conséquent, pas toujours identique. Les problèmes de stabilité, c’est-à-dire une dégradation de la molécule avec le temps, peuvent s’expliquer par la présence de l’atome de brome. Ce phénomène a été révélé à l’aide d’analyses CCM réalisés quelques jours après la purification du produit, de nombreux sous-produits ont été observés.

De plus, les métriques de la chimie verte calculées ici sont globalement mauvaises (Tableau 10).

Tableau 10 : Métriques de chimie verte pour la réaction de couplage pinacolique entre le

p-bromobenzaldéhyde et le citral.

EC Eat ρ Em EMR 10 % 13 % 99 % 6,8 13 %

Les facteurs d’économie de carbone et d’atomes ainsi que l’efficacité massique de réaction présentent des valeurs entre 10 et 13 % tandis que l’économie de matière est de 6,8. Ces valeurs ne sont pas acceptables d’un point d’éco-compatibilité. Seul le rendement présente une valeur excellente de 99 %. Ainsi, cette réaction ne peut être qualifiée de réaction verte.

Il est important de noter que cette réaction a d’abord été testée en micro-ondes, mais cette technique a entrainé un fort rendement en produit réduit (> 50 %) et une plus grande dégradation des substrats. Elle a donc été réalisée de manière conventionnelle, ce qui est cohérent par rapport aux résultats observés dans les travaux de Billamboz et al.138, démontrant que le choix de la technique de chauffage dépend de la nature des substrats utilisés.

La même réaction a été tentée avec du trans-hex-2-ènal, aldéhyde linéaire moins imposant, donc plus réactif, mais le rendement en hétéro-pinacol obtenu n’est que de 31 % (voir 11) Protocoles et caractéristiques des produits synthétisés -

(4-Bromophényl)hept-3-ène-1,2-diol (2), page 156). Cela peut s’expliquer par la réactivité accrue du

trans-hex-2-ènal qui est alors plus apte à réagir sur lui-même. En effet, le rendement en homo-couplage du trans-hex-2-ènal sur lui-même est de 87 % par rapport à la quantité de trans-hex-2-ènal mise à réagir. De plus, des problèmes de reproductibilité de la réaction et de stabilité du produit sont également apparus.

En raison des rendements non reproductibles et du caractère non-vert des réactions en découlant, le 4-bromobenzaldéhyde a cessé d’être utilisé dans ces travaux.

La réaction entre le diphénylacétaldéhyde et le trans-hex-2-ènal a été tentée. Le diphénylacétaldéhyde possède deux noyaux aromatiques, il présente donc une gêne stérique plus importante. Un autre point important à noter est l’absence d’une insaturation en α,β de l’aldéhyde du diphénylacétaldéhyde. En effet, les aldéhydes α,β-insaturés sont de meilleurs substrats pour les couplages pinacoliques. Ces différents éléments augmentent la compétition entre l’homo-couplage et l’hétéro-couplage. Le résultat obtenu est donc une majorité d’homo-couplage de l’aldéhyde linéaire. Le diphénylacétaldéhyde n’a effectué ni homo-, ni hétéro-couplage, une partie a simplement été réduite en alcool. Cette molécule n’est donc pas un substrat adéquat pour les réactions de couplages pinacoliques dans les conditions utilisées ici (Schéma 19).

Schéma 19 : Réaction de couplage pinacolique entre le diphénylacétaldéhyde et le

trans-hex-2-ènal.

La réaction a été réalisée sous irradiations micro-ondes, car la première tentative, en chauffage conventionnel, n’a entraîné aucune réaction sur le diphénylacétaldéhyde. Le chauffage en micro-ondes favorise habituellement les réactions de réduction, expliquant ainsi les résultats obtenus.

Le choix du substrat s’est donc porté sur un aldéhyde aromatique naturel portant une insaturation en α,β, le salicylaldéhyde. La réaction de couplage pinacolique a été réalisée avec du trans-hex-2-ènal en utilisant deux conditions réactionnelles différentes (Schéma 20).

Schéma 20 : Réactions de couplages pinacoliques entre le salicylaldéhyde et le

trans-hex-2-ènal.

Les premières conditions sont les mêmes que celles utilisées précédemment, l’acide utilisé est l’acide acétique et le solvant est un mélange d’eau et d’éthanol. L’hétéro-couplage n’a que très peu fonctionné, puisque le diol dissymétrique n’a été obtenu qu’avec un rendement de 6 %. Toutefois un produit intéressant est apparu avec un rendement de 23 %. Issu d’une réaction entre l’aldéhyde aromatique et le solvant, l’éthanol, cette dernière a été étudiée et optimisée ultérieurement (voir 2) Réactions d’éthérifications réductrices, page

63). Nous observons également le couplage pinacolique du trans-hex-2-ènal sur lui-même, la

réduction de ce dernier en trans-hex-2-ènol, une trace de salicylaldéhyde résiduel, la formation d’o-crésol et de produits secondaires en faibles quantités. La réaction d’hétéro-couplage pinacolique a été renouvelée en présence d’un acide plus fort, l’acide chlorhydrique, et dans l’eau seule afin d’éviter les réactions secondaires avec l’éthanol. Le diol dissymétrique a été obtenu à 30 %, rendement relativement satisfaisant pour un hétéro-couplage en prenant en compte la compétitivité de l’homo-couplage du trans-hex-2-ènal et la gêne stérique générée par la fonction hydroxyle en position ortho du salicylaldéhyde. De plus, ce produit est stable, permettant ainsi des tests ultérieurs en microbiologie (Schéma 20). Les autres produits observés sont le pinacol obtenu par réaction de couplage pinacolique du trans-hex-2-ènal sur lui-même ainsi que des traces d’o-crésol, de salicylaldéhyde et d’autres produits secondaires.

Les métriques de chimie verte présentent dans ce cas des valeurs meilleures que celles observées avec la réaction de couplage pinacolique entre le p-bromobenzaldéhyde et le citral (Tableau 11).

Tableau 11 : Métriques de chimie verte pour la réaction de couplage pinacolique entre le

salicylaldéhyde et le trans-hex-2-ènal dans les conditions de solvant B.

EC Eat ρ Em EMR

30 % 30 % 100 % 2,3 30 %

Le fait de n’engager qu’un équivalent d’aldéhyde linéaire au lieu de dix permet d’augmenter les métriques, même si le rendement n’est que de 30 % par rapport au 65 % obtenus avec le p-bromobenzaldéhyde et le citral.

La différence de stabilité entre le pinacol bromé (produit 1, Schéma 18, page 56) et le pinacol issu du salicylaldéhyde (produit 3, Schéma 20 s’explique par les effets électroniques provoqués par les groupements bromé et hydroxyle portés par les noyaux aromatiques. Si les deux groupements ont des effets mésomères attracteurs (+m), le groupement hydroxyle a également un effet inductif électro-donneur ( I tandis que l’atome de brome a un effet inductif électro-attracteur (-I).

L’utilisation d’acide chlorydrique pose tout de même le problème de la non-recyclabilité de l’acide. Ainsi, des résines ont été téstées, comme l’Amberlite FPC 3500. Toutefois, le greffage du salicylaldéhyde sur la résine n’a pas eu lieu et aucune réaction n’a été observée.

Dans les conditions de couplages pinacoliques utilisant du zinc, le couplage pinacolique du salicylaldéhyde sur lui-même n’a pas été observé. Le couplage pinacolique des aldéhydes aromatiques est en effet plus difficile à réaliser que celui des substrats linéaires en raison de l’encombrement stérique et de la stabilité des radicaux engendrée par la mésomérie des noyaux aromatiques. À cela s’ajoute la gêne stérique provoquée par la fonction hydroxyle en position ortho sur le salicylaldéhyde. Toutefois, lors des essais avec différentes sources métalliques (voir 2) Réactions d’éthérifications réductrices, page 63), il est apparu que le salicylaldéhyde, en présence de magnésium, commençait à réagir sans source de chauffage. Le magnésium est le métal initialement indiqué pour les réactions de couplages pinacoliques. Le milieu réactionnel, laissait à réagir à température ambiante durant 24 heures, nous a permis d’observer le produit d’homo-couplage pinacolique du salicylaldéhyde sur lui-même avec un rendement de 24 %, non négligeable pour un substrat aromatique encombré (Schéma 21). La valeur de ce rendement s’explique par la nécessité de faire réagir deux molécules de substrat pour obtenir une molécule de produit. Ainsi, le rendement maximal ne peut être que de 50 %. La valeur du rendement mesuré (12 % a donc été doublé afin d’obtenir une valeur cohérente.

Schéma 21 : Réaction de couplage pinacolique du salicylaldéhyde sur lui-même.

Les métriques de chimie verte présentent des valeurs globalement satisfaisantes (Tableau 12).

Tableau 12 : Métriques de chimie verte pour la réaction de couplage pinacolique du

salicylaldéhyde sur lui-même.

EC Eat ρ Em EMR

48 % 48 % 100 % 3,2 24 %

Les économies d’atomes et de carbone sont de 48 %, valeurs les plus élevées actuellement pour nos réactions. Le facteur environnemental est de 3,2 et l’efficacité massique de réaction de 24 %. Ces valeurs sont bien supérieures que celles obtenues avec les hétéro-couplages pinacoliques (Tableau 10 et Tableau 11).

Le bilan des réactions effectuées est présenté dans le Tableau 13. Nous constatons que deux pinacols stables ont été obtenus. Le premier est l’hétéro-pinacol issu de la réaction entre le salicylaldéhyde et le trans-hex-2-ènal, obtenu avec un rendement de 30 % (Tableau 13, ligne 9 . Le second est l’homo-pinacol issu de la réaction du salicylaldéhyde sur lui-même, obtenu avec un rendement de 24 % (Tableau 13, ligne 10).

Tableau 13 : Tableau récapitulatif des réactions de couplages pinacoliques réalisées. En bleu, les produits d’hétéro-couplages pinacoliques non-stables. Substrats Conditions réactionnelles Produits Zn (10 éq.) EtOH / H2O (1 :1) 4 heures, t.a. Zn (10 éq.) EtOH / H2O (1 :1) MW – 150 °C – 15 min. Zn (10 éq.) EtOH 2 heures, t.a. Zn (10éq.), AcOH (6 éq.) EtOH / H2O MW – 150 °C – 15 min. Zn (5 éq.), AcOH (6 éq.) EtOH / H2O MW – 150 °C – 15 min. Zn (5 éq.), AcOH (6 éq.) EtOH / H2O 24 heures, t.a. Zn (5 éq.), AcOH (6 éq.) EtOH / H2O MW – 150 °C – 15 min. Zn (5 éq.) H2O, HCl MW – 150 °C – 15 min. Mg (2 éq.), AcOH (3 éq.) EtOH 24 heures, t.a.