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C- Rééducation en double tâche, détournement d’attention et contraction périnéale

Phase&mictionnelle

A). En cas d’effort, le sphincter urétral sous commande volontaire/involontaire se

VI- C- Rééducation en double tâche, détournement d’attention et contraction périnéale

Après avoir montré l’impact de l’attention sur la contraction périnéale réflexe et volontaire, nous voulions trouver une solution pour contrer les effets d’un détournement d’attention sur les caractéristiques de la contraction périnéale volontaire et réflexe. Nous avons établi un protocole de rééducation en double tâche intégrant une tâche cognitive (test d’attention N-Back) et une tâche exécutive motrice (contraction périnéale). Nous avons montré que cette rééducation permettait d’annihiler les effets d’un détournement d’attention sur les caractéristiques EMG des muscles du plancher pelvien. Après la rééducation, les volontaires amélioraient leur latence de contraction périnéale volontaire : RT1 en condition d’épreuve de charge cognitive après rééducation était plus court que RT1 sans épreuve de charge cognitive avant rééducation. De même, après rééducation, la contraction périnéale réflexe semblait être améliorée d’un facteur 1,86 en termes d’anticipation de la pré-contraction périnéale, en l’absence de détournement d’attention.

La continence urinaire est le fruit d’un mécanisme complexe impliquant l’intégration cognitive. Harvey et Gillespie (282,283) ont ainsi introduit le concept de miction cognitive. Ils ont montré que le contrôle de l’alternance miction/continence était sous l’influence de multiples facteurs d’ordre conscient (habitude mictionnelle, horaire, localisation des toilettes…) et inconscient (remplissage vésical, « guarding reflex »…). Nos précédentes expériences vont dans ce sens-là. Elles montraient qu’il existe une implication de la cognition et plus particulièrement de l’attention dans le renforcement/altération de la continence

   

138  urinaire par un impact sur la contraction périnéale réflexe (diminution de l’anticipation réflexe) et volontaire (diminution du renforcement des capacités résistives) (260,264). Le traitement de première intention de l’IUE repose sur la rééducation pelvi-périnéale. En émettant l’hypothèse qu’une altération des temps de latence de contraction périnéale réflexe et volontaire, en cas de détournement d’attention, puissent provoquer des fuites d’urine lors d’un effort, notre protocole de rééducation pourrait avoir une utilité certaine dans le traitement de l’IUE.

De nouvelles approches de rééducation périnéale ont vu le jour ces derniers temps, prenant en compte les personnes dans leur globalité (mouvement, environnement, démarches, activités de la vie de tous les jours…). L’objectif de la rééducation pélvi-périnéale selon Bo et al. (284) est de transformer une contraction périnéale consciente en contraction périnéale automatique. Cela rejoint le principe de l’apprentissage de la « Knack maneuver » (281). Comme nous l’avons précédemment mentionné, Elliot et al. (280) sont les seuls à avoir créé un programme de rééducation en double tâche utilisant la réalité virtuelle. Contrairement à nos expériences, ils utilisaient deux tâches motrices (danser et contracter le périnée). Ils montraient une amélioration des symptômes d’IUM. Les bénéfices de ce type rééducation passaient probablement par une automatisation de la contraction périnéale consciente et inconsciente, lors du déplacement et des mouvements effectués dans la vie de tous les jours par les patientes. De nombreuses études se sont intéressées à l’impact de la posture dans la continence urinaire. La relation entre l’apparition de fuite d’urines à l’effort et la contraction des muscles périnéaux selon la posture des patientes a été étudiée par Smith et al. (273,285). Ils montraient que l’activation des muscles pelvi-périnéaux après un mouvement rapide du bras était retardé chez les patientes présentant une

  139  incontinence urinaire à l’effort. L’activité EMG des muscles périnéaux apparaissait avant l’activité EMG du deltoïde chez les patientes continentes variant entre −15,1 ± 34 ms et −31,2 ± 35 ms selon le degré de flexion ou d’extension du bras et le niveau de remplissage vésical. En reproduisant le même protocole expérimental chez des femmes incontinentes, ils montraient que l’activité EMG du deltoïde précédait celle des muscles du plancher pelvien variant de 4.8 ± 32 à 22.4 ± 44 ms. Madill et al. (286) comparaient les caractéristiques des activités EMG des muscles du plancher pelvien en réponse à un effort de toux des femmes continentes et incontinentes. Ils montraient chez ces patientes, que l’apparition d’une IUE était probablement plus liée à un défaut de pré-activation qu’à une altération de la force musculaire. La norme de la latence de pré-activation est difficile à définir du fait des différents types d’entités enregistrées (deltoïde, muscles des grands droits, pression abdominale, pression vésicale, muscles intercostaux…). Aucune abaque n’existe à ce jour et les résultats sont très variables entre nos résultats et ceux trouvés par Deffieux et al. (14) alors même que nous utilisions les mêmes modalités d’enregistrement. Ceci peut être lié au positionnement des électrodes de surface, qui de par leur largeur peuvent enregistrer avec plus ou moins de précision les muscles du SAE ou d’autre faisceaux musculaires de la région.

Puisque la posture à un retentissement sur la continence urinaire, un travail de rééducation prenant en compte la posture, la démarche de l’individu permet aux patientes de renforcer leur continence urinaire. Notre étude reprend la même idée, qui est que si l’attention a un retentissement sur la continence urinaire, une rééducation par du travail cognitif quotidien permettrait à l’individu d’améliorer sa continence. Dans une étude récente, Fraser et al. (287) analysaient l’impact d’une rééducation en double tâche (posture de la patiente, contraction périnéale, jeux

   

140  vidéo) sur la cognition chez 23 patientes présentant une incontinence urinaire mixte. Ils retrouvaient qu’après la rééducation, le nombre d’erreur dans les questionnaires évaluant les fonctions exécutives motrices et le nombre d’erreurs dans le test n-back au cours d’une double tâche diminuait de manière significative. Une analyse en sous-groupe retrouvait que seules les patientes présentant une amélioration de leur continence (évaluée par des pad test) réduisaient de manière significative le nombre d’erreurs du n-back lors d’épreuves de double tâche. Cette étude suggère bien qu’il existe une relation importante entre le statut cognitif et le contrôle mictionnel. Bien qu’aucune étude n’ait évalué la rééducation en double tâche cognitive et motrice dans le domaine de l’urogynécologie, cette technique a été évaluée dans d’autres domaines (288,289). Wollensen et al. (289) ont étudié l’impact d’une rééducation en double tâche (marche et test de Stroop) sur la démarche et la stabilité des patients âgés. Ils retrouvaient qu’une rééducation en double tâche améliorait les performances motrices des patients en condition de double tâche mais également lors de la marche seule. Nous montrons également une amélioration des performances d’anticipation de contraction périnéale volontaire et involontaire au décours de notre protocole de rééducation en double tâche.

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