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DE LA QUESTION DE RECHERCHE AUX HYPOTHESES 1.Cadrage conceptuel et formulation des hypothèses

IDENTIFICATION DE SITUATIONS A RISQUES A PARTIR DE SITUATIONS REELLES

CHAPITRE 4 : DEFINITION D’UN MODELE ET FORMULATION DES HYPOTHÈSES

I. DE LA QUESTION DE RECHERCHE AUX HYPOTHESES 1.Cadrage conceptuel et formulation des hypothèses

1) Agir dans l’urgence : faut-il respecter les règles ou improviser ? : formulation de l’hypothèse 1

Dans un objectif de fiabilité renforcée au sein des organisations hautement fiables, quel est le comportement à adopter pour le traitement de l’inattendu et plus particulièrement vis-à-vis des procédures organisationnelles ?

Selon Roberts et al, (1994), les organisations hautement fiables sont dotées de technologies très complexes interdépendantes où le potentiel de risque est extrêmement élevé. Elles enregistrent pourtant un faible taux de catastrophe. Proches du courant HRO, les représentants du courant interactionniste, soulignent « qu’elles évoluent dans un contexte politique, social et technologique où l’erreur est impardonnable » (Weick et al, 1993).

Liste des sources de résilience organisationnelle selon Weick (1993)

Les systèmes de rôles : si la structure des rôles s’effondre, ils emportent avec eux toute possibilité d’élaboration de sens et donc toute capacité d’organisation ;

L’attitude de sagesse. Vidaillet (2005) souligne que « l’attitude de sagesse consiste à être conscient de la complexité du monde, à se montrer attentif aux limites de ses connaissances, à introduire la dose de doute juste pour ne pas paralyser mais au contraire rester en alerte à l’inhabituel » ;

L’interaction entre les membres du groupe. Des modes d’interactions respectueux peuvent faire émerger des solutions nouvelles assurant la survie de l’organisation, alors que des modes d’interactions défectueux peuvent engendrer des catastrophes ;

Et enfin, l’improvisation et le bricolage, Weick (1993) précise que « lorsque des gens sont mis sous pression, ils se replient sur leurs types de réponse les plus habituels, mais que l’effondrement des systèmes de rôles ne débouche pas nécessairement sur un accident si les gens acquièrent des compétences d’improvisation de bricolage.

Pour Weick (1993), les organisations hautement fiables rassemblent, selon lui, des caractéristiques particulières et les acteurs qui exploitent ces technologies avancées se retrouvent dans des contextes à la fois de surcharge d’informations, de turbulence constante, de complexité croissante.

Weick (1995) définit la surcharge d’informations par une accumulation de procédures écrites, réécrites, réactualisées et réajustées au fur et à mesure du développement des opérations.

A propos du contexte de turbulence constante, Weick (1995) souligne qu’il entraîne un comportement des acteurs différent dans les organisations hautement fiables qui vont activer leur intuition et « définirent les situations de façon beaucoup plus heuristique que ne le feraient les procédures organisationnelles qui sont souvent inadaptées au traitement immédiat de la situation », position partagée par (Roux-Dufort, 2000 ; Thietart et Forgues, 2006 ; Perin, 1996 ; Bourrier, 1999).

Le courant actionniste considère que dans la culture de la sûreté, le respect strict de la ligne et des statuts hiérarchiques peut être une source de danger alors que les HRO soulignent la culture de la très haute fiabilité et soulèvent l’intérêt d’un respect strict du script, (Bierly et Spender, 1995 ; Klein, Bigley et Roberts, 1995).

La position différente du courant actionniste défendant l’intérêt de « l’improvisation et le bricolage » et celle du courant HRO relevant l’importance du respect strict du script nous amène à explorer ce point de divergence dans la liste des sources de résilience proposées par Weick (1993) et nous conduit à formuler l’hypothèse suivante :

HYPOTHESE 1 : En situation de complexité élevée et sous contrainte de temps, l’application stricte des règles se traduit, par des non-experts, par un niveau de fiabilité plus élevé que le recours à l’improvisation de procédure.

2) Agir rationnellement sous contrainte de temps : faut-il associer règles et méta règles ? : formulation de l’hypothèse 2

Dans des environnements dynamiques, un cadre d’actions soumis à des règles trop strictes, s’il s’avère moins risqué qu’une improvisation incontrôlée, risque cependant de limiter toute capacité

Explorant le dilemme lié à l’arbitrage entre la définition de règles et la performance, Davis, Eisenhardt et Bingham (2009) soulignent l’intérêt de règles simples dans les environnements dynamiques «When environments are very unpredictable, there is a very narrow range of optimal structure and a precarious edge of chaos. ».

La flexibilité permet de répondre de façon plus efficiente aux contraintes et/ou aux opportunités issues d’environnements dynamiques (Davis et al., 2009) et cette flexibilité peut être obtenue par un nombre modéré de règles simples, (Burgelman, 1994; Bingham, Eisenhardt, and Furr, 2007 ; Schilling and Steensma, 2001 ; Galunic and Eisenhardt, 2001 ; Williams and Mitchell, 2004 ; Martin et Eisenhardt, 2010 ; Katila and Ahuja, 2002; Sorenson, Fleming et Rivkin, 2006).

Le concept de méta règles développé notamment en intelligence artificielle (Cazenave, 2003 ; Cox, 2005; Davis, 1980) s’appuie sur une représentation abstraite du système à piloter qui identifie les principales caractéristiques structurelles conditionnant l’intégrité de l’entité pilotée.

Elles permettent d’autre part d’établir très rapidement un diagnostic sur le niveau de contrôle de cette entité et si nécessaire de redéfinir rapidement les priorités en fonction des objectifs à atteindre.

Ainsi, dans des environnements dynamiques, la possibilité d’avoir un cadre de pensée intégrateur - les méta règles - offre l’avantage de prendre des décisions rapidement tout en limitant les choix erronés. 16

Le renforcement de cette fiabilité nous conduit à envisager le cas d’une combinaison entre « l’usage de méta règles » et « l’application de règles ». En effet, dans la classe de phénomènes étudiée, il y a à la fois urgence dans la prise de décision et l’impossibilité d’apprendre par processus d’essais/erreurs. Toute improvisation peut être associée à un risque majeur d’irréversibilité surtout en cas de décision inappropriée.

Ces considérations nous amènent à poser l’hypothèse suivante :

HYPOTHESE 2 : En situation de complexité élevée et nécessitant une prise de décision rapide, le recours à des méta règles par des non-experts associé à l'application de règles se traduit par un niveau de fiabilité plus élevé que le seul recours aux méta règles (Hyp. 2a) ou qu’à la seule application des règles (Hyp. 2b).

16 Reprend des développements d’un article co-écrit avec D. Ph. Martin et H.Guyon intitulé « Prise de décision par des non experts en environnements complexes sous contrainte de temps » - en cours de soumission.

3) Les sources de résilience : quelle est la combinaison la plus fiable ? formulation de l’hypothèse 3

Quand Weick (1993) dresse la liste de sources de résilience, il en identifie quatre (présentées dans l’hypothèse 1).

Nous isolons trois sources parmi les quatre car nous considérons que l’attitude de sagesse relève d’une attitude “avant l’action” or nous nous intéressons davantage à la phase “action en cours”. Nous nous interrogeons plus particulièrement sur la combinaison des variables comme sources de fiabilité plus qu’à une variable prise isolément. Nous nous questionnons en effet sur la pertinence des sources proposées par Weick (1993) par rapport à une combinaison de sources alternative inspirée du courant HRO.

La combinaison proposée par Weick (1993) ou déclinée selon l’approche HRO nous amène à poser l’hypothèse suivante :

HYPOTHESE 3 : En situation de complexité élevée et sous contrainte de temps, pour des non-experts, le respect des règles associé à des rôles bien tenus et des interactions entre les membres de l’équipe se traduit par un niveau de fiabilité plus élevé qu’une improvisation de procédure associée à des rôles bien tenus et des interactions entre les membres de l’équipe.

4) Niveau de complexité et prise de risque : le niveau de vigilance est-il lié au niveau de risque ? : formulation de l’hypothèse 4

Lorsque Weick (1993) cite les quatre sources de résilience organisationnelle, il précise que « l’attitude de sagesse consiste à être conscient de la complexité du monde, à se montrer attentif aux limites de ses connaissances, à introduire la dose de doute juste pour ne pas paralyser mais au contraire rester en alerte à l’inhabituel ».

Il souligne la difficulté des acteurs au sein des organisations hautement fiables à faire face à des contextes à la fois de surcharge d’informations, de turbulence constante, de complexité croissante d’autant plus, comme le mentionnent les courants HRO et actionniste, « qu’elles évoluent dans un contexte politique, social et technologique où l’erreur est impardonnable » (Weick et al, 1993).

En situation à risque, le niveau de vigilance devrait être plus élevé, cependant le risque de saturation cognitive précédemment exposé nous conduit à poser l’hypothèse suivante.

HYPOTHESE 4 : Les situations de complexité élevée se traduisent, par des non-experts, par un niveau de fiabilité plus faible que les situations de complexité faible.

5) Rôle médiateur des règles : formulation de l’hypothèse 5

Le cadre théorique de référence montre une divergence sur le plan du respect des règles ; ce point a donc fait l’objet d’une analyse centrale au début de notre travail de thèse. Sur le terrain étudié, une nouvelle version des directives générales de sécurité nautique au cours de notre travail d’investigation rappelant les grands principes de navigation a déplacé le point de réflexion. Nous nous sommes donc interrogés sur le concept de méta règles en ayant recours à un autre corpus théorique.

L’influence que peuvent avoir les méta règles sur les règles nous conduit à poser une hypothèse dans ce sens. Les méta règles ont donc été intégrées à la proposition de modélisation de l’objet étudié.