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Quantification des blessures dans le football

3. Epidémiologie, niveau de risque, et football de haut niveau

3.1 Les blessures dans le football de haut niveau

3.1.2 Quantification des blessures dans le football

La première étape du modèle de Van Mechelen et al. (1992) consiste à établir l’étendue du problème des blessures dans le football. Pour cela, il est nécessaire de quantifier les blessures. La quantification est définie par le centre national de ressources textuelles et lexicales (CNRTL, 2012) comme l’action d’attribuer une certaine quantité à un phénomène mesurable. Dans le cadre des blessures dans le football, il s’agit d’attribuer un nombre ou une mesure au phénomène de la blessure. Pour comparer les résultats, évaluer l’effet d’une stratégie préventive, identifier des facteurs de risque, il est essentiel que les méthodes de quantification des blessures soient harmonisées (Brooks et Fuller, 2006). Plusieurs méthodes ont été proposées pour quantifier les blessures, et au-delà de la définition de la blessure, la méthode de quantification utilisée a une grande influence sur les résultats et les conclusions de l’étude épidémiologique mise en place (Brooks et Fuller, 2006).

Plusieurs articles (van Mechelen, 1992 ; Junge et Dvorak, 2000 ; Brooks et Fuller, 2006) ainsi que le consensus de l’UEFA (Fuller et al., 2006) recommandent l’utilisation de l’incidence, plutôt que la quantité absolue de blessures (un nombre absolu), pour quantifier les blessures. Selon l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), l’incidence est définie comme le nombre de nouveaux cas d’une pathologie observés sur une période donnée (INSEE, 2016). Dans le football, l’incidence des blessures est définie comme le nombre de nouvelles blessures sur une période définie selon le nombre de joueurs observés (Junge et Dvorak, 2000). Par exemple, dans l’enquête nationale réalisée par le Ministère des Sports (2011), le football était la pratique sportive à l’origine du plus grand nombre de blessures (13% des blessures liées à une activité physique). Cependant, comme c’était également la pratique qui comptait le plus de licenciés en France en 2010 (2 107 924 licenciés, soit plus de 17% des licences sportives délivrées en 2010) (Ministère des Sports, 2011), les chiffres absolus peuvent refléter la dangerosité de la pratique du football, ou tout simplement sa popularité et son nombre très important de licenciés (Junge et Dvorak, 2000). Plusieurs méthodes de normalisation ont été proposées. Le nombre de blessures pour 1000 expositions d’athlètes, pour 1000h de match, ou pour 1000h de pratique, ont été utilisés dans le sport (Brooks et Fuller, 2006).

Le nombre de blessures pour 1000 expositions d’athlètes est basé sur le nombre total d’athlètes exposés (durant l’entraînement et/ou les matchs), sans prise en compte du temps d’exposition, cette incidence est calculée de la manière suivante :

Equation 8 :

Blessures pour 1000 athlètes exposés =

Le nombre de blessures pour 1000h de pratique est basé sur la durée d’exposition totale des joueurs lors de la pratique :

Equation 9 :

Blessures pour 1000h de pratique =

Les normalisations pour 1000 athlètes exposés sont les plus simples à mettre en place, puisqu’elles ne nécessitent pas d’enregistrer la durée de pratique des joueurs suivis, cependant, les informations issues de ces méthodes peuvent être biaisées. Brooks et Fuller (2006) ont illustré ces limites (tableau 6). Dans cet article, les auteurs ont comparé deux groupes de joueurs, les titulaires et les remplaçants. En se basant sur le nombre de blessures pour 1000 athlètes exposés, ou pour 1000 matchs joués, les titulaires subissaient beaucoup plus de blessures en match que les remplaçants, et l’incidence était plus importante chez les titulaires que chez les remplaçants. Cependant, lorsque les données étaient normalisées pour 1000h de match, et donc normalisées selon le temps d’exposition (qui est beaucoup plus important chez les titulaires que chez les remplaçants), alors l’incidence de blessures était plus importante chez les remplaçants (tableau 6). Cette méthode nécessite de connaître l’exposition de chaque joueur, donc les temps d’entraînement et de jeu de chaque joueur suivi dans l’étude. Certaines études ont estimé le temps d’exposition en multipliant le nombre de joueurs par la durée de pratique hebdomadaire. Cependant, cette méthode est moins précise, puisqu’elle ne prend pas en compte les absences à l’entraînement ou les séances adaptées pour certains joueurs. La durée d’exposition peut être alors estimée ou surestimée et donc, l’incidence surestimée ou sous-estimée (Junge et Dvorak, 2000).

De manière à comparer les résultats d’une étude à l’autre, d’une population à l’autre, le consensus de la FIFA et les études sur l’épidémiologie dans le sport recommandent l’utilisation de l’incidence pour 1000h de pratique (Brooks et Fuller, 2006 ; Fuller et al., 2006 ; van Mechelen et al., 1992).

Tableau 6: Effets de la méthode de normalisation des incidences sur les résultats de suivi des blessures.

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C’est en se basant sur la définition de la blessure de la FIFA et l’incidence pour 1000h de pratique que la description épidémiologique des blessures dans le football sera réalisée dans la partie suivante de cette revue de littérature.

Les recommandations pour mener un suivi épidémiologique dans le football de haut niveau sont résumées dans la figure 11. Dans cette figure, 4 étapes à respecter lors de la mise en place d’une étude épidémiologique ont été mises en avant. L’utilisation d’une définition de la blessure définie par consensus permet une comparaison objective des résultats avec les autres études réalisées dans la discipline sportive, ou dans d’autres disciplines sportives utilisant la même définition. Le suivi d’une population suffisamment large permet de généraliser les résultats de l’étude mise en place. Il est recommandé que la population suivie ne soit pas issue d’une seule équipe ou d’un seul club, puisque l’incidence est influencée par l’environnement du club suivi (Fuller et al., 2006). Dans le cadre d’études visant à comparer des groupes ou des conditions, il est nécessaire que la taille des groupes soit définie au préalable à l’aide de tests de puissance statistique (Fuller et al., 2006). Une taille d’échantillon suffisante permet de généraliser les conclusions de l’étude à la population représentée par l’échantillon, en limitant les erreurs liées à l’échantillonnage (Hopkins, 2000a). La méthode de quantification, basée sur une incidence pour 1000h de pratique, permet d’harmoniser les chiffres d’une étude à l’autre, en limitant les effets liés au nombre de joueurs suivis, ou au temps de pratique des différents joueurs (Brooks et Fuller, 2006). Enfin, les caractéristiques des blessures rapportées dans les études permettent d’identifier les zones anatomiques les plus touchées, ainsi que les mécanismes et les actions à l’origine de ces blessures. Ces données permettent d’identifier des facteurs associés à la blessure et d’envisager la mise en place de stratégies préventives en réponse à ces facteurs.

3.1.3 Epidémiologie de la survenue de blessures chez les joueurs de football de