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Quantification basées sur les gels d’électrophorèse 2D

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Chapitre 3 Les stratégies de quantification en analyse protéomique

1. Quantification basées sur les gels d’électrophorèse 2D

Un des plus grands défis de l’analyse protéomique est de pouvoir, après l’analyse qualitative, fournir des informations quantitatives sur l’abondance des protéines et leur niveau d’expression [186]. Ceci était traditionnellement effectué à l’aide de gels d’électrophorèse 2D [187]. Après que la spectrométrie de masse se soit illustrée comme étant la méthode de choix pour l’analyse des protéomes complexes, de nouvelles méthodes de quantification de protéines basées sur la spectrométrie de masse ont été développées. Cependant, l’analyse des protéines par LC-MS/MS n’est pas une technique quantitative en soit car elle dépend d’une multitude de facteurs qui sont difficilement contrôlables. Ces facteurs se trouvent à tous les niveaux de l’analyse protéomique allant de la préparation de l’échantillon (accessibilité de l’enzyme lors de la digestion, solubilité des peptides et des protéines…) à la séparation en chormatographique et la détection en MS liées aux propriétés intrinsèques des peptides (taille, composition en acides aminés, polarité, …) [187]. Il est donc généralement nécessaire de comparer chaque peptide individuellement à travers les expériences [188].

En plus des analyses protéomiques comparatives et quantitatives par des approches basées sur les gels 2D, on trouve deux catégories de méthodes de quantification de protéines en spectrométrie de masse. Les approches « label free » qui sont effectuées sans aucun marquage des protéines et des peptides et les approches basées sur les marquages aux isotopes stables appelées « SILE quantitation » (« Stable Isotope Labelling Experiments »). Domon et Aebersold ont décrit dans un article en 2010 [189] les trois stratégies de protéomique quantitative, à savoir la stratégie de quantification en « shotgun » ou « découverte », la stratégie de quantification dirigée (« directed ») et la stratégie de quantification ciblée (« targeted »). Dans ce chapitre, nous décrirons les principales méthodes de quantification en analyse protéomique et nous commenterons les trois stratégies décrites dans cet article.

1. Quantification basées sur les gels d’électrophorèse 2D

Les gels d’électrophorèse bidimensionnelle permettent de visualiser des différences d’abondance entres les protéines et donc d’effectuer une quantification relative des protéines dans différentes conditions [9]. Ceci est réalisé à l’aide de logiciels permettant la

comparaison d’image et des intensités entre les différents spots. Traditionnellement, les gels sont colorés au Bleu de Coomassie, mais récemment, une nouvelle technique appelée gel 2D DiGE (Differential Gel Electrophoresis) a été développée et permet une meilleure reproductibilité et une meilleure sensibilité.

1.1. Protéomique quantitative à l’aide de l’électrophorèse bidimensionnelle classique

Dans un gel d’électrophorèse 2D, l’intensité d’un spot, sous forme d’intégration de la densité optique représentée dans ce spot, est directement proportionnelle à l’abondance de cette protéine. Deux échantillons peuvent ainsi être comparés grâce à une quantification relative basée sur les rapports d’intensités des spots d’une même protéine et ceci à l’aide de l’analyse d’image. Pour les études différentielles, la coloration au bleu colloïdal est préférée à celle au nitrate argent en raison de sa gamme linéaire plus étendue. En effet, si la coloration au nitrate d’argent permet une meilleure sensibilité, l’intensité de la coloration varie d’une protéine à une autre et sa gamme linéaire est très étroite [190]. Enfin, l’électrophorèse bidimentionnelle classique, en plus de ces limitations citées dans le chapitre précédent, souffre de problèmes de reproductibilité et de variabilité liés au traitement individuel des échantillons. L’électrophorèse différentielle 2D DiGE et les systèmes d’automatisation récents représentent des améliorations de cette approche.

1.2. L’électrophorèse différentielle 2D DiGE

Cette technique introduite par Unlü et al. en 1997 [191] permet la quantification relative de deux échantillons protéiques différents sur le même gel d’électrophorèse. Les extraits de protéines sont tout d’abord marqués avec des fluorochromes différents, ayant la même masse moléculaire mais des longueurs d’onde d’excitation et d’émission différentes. Ces fluorochromes sont des cyanines appelées Cy3 et Cy5. Les protéines ainsi marquées sont mélangées et séparées simultanément sur le même gel d’acrylamide bidimensionnel. Les protéines sur le gel sont ensuite visualisées à l’aide d’un scanner approprié permettant l’acquisition d’images aux longueurs d’ondes spécifiques de chaque fluorochrome. Ces images sont ensuite comparées à l’aide d’un logiciel d’analyse d’image ce qui permet de réaliser la quantification relative des protéines. Alban et al. ont introduit une amélioration de cette technique par l’utilisation d’un standard interne qui lui est marqué par un fluorochrome différent, le Cy2 [192]. L’utilisation de ce standard interne permet d’effectuer des comparaisons entre plusieurs échantillons séparés sur des gels différents. Ce standard interne est constitué d’un mélange en quantité égale de tous les extraits protéiques à comparer et marqués donc au Cy2. Toutes les protéines de tous les extraits seront représentées dans ce standard qui est donc déposé sur tous les gels avec les échantillons à comparer. Ceci permet donc de normaliser par rapport à ce standard interne tous les échantillons. L’abondance d’une protéine est donc déterminée en calculant le ratio de l’intensité du spot dans lequel elle se trouve par rapport à l’intensité du spot correspondant à la même protéine dans le standard. Les variations techniques sont ainsi dissociées des

variations biologiques ce qui constituait une limitation principale de l’approche par gel 2D classique. La figure 1 illustre la stratégie d’analyse par gel 2D DiGE.

Figure 1 : Illustration de la stratégie d’analyse en Gel d’électrophorèse 2D DiGE avec l’utilisation d’un standard interne (d’après [193]).

L’avantage majeur de cette technique est de s’affranchir, grâce à l’utilisation du standard interne, des problèmes de reproductibilité observés dans l’analyse par gel 2D

classique. Les variations dans les profils de spot d’un gel à l’autre sont ainsi réduites. Bien que la réalisation de réplicas biologiques reste nécessaire pour avoir des données statistiques, la comparaison des échantillons sur un même gel et l’utilisation du standard interne pour la normalisation ne nécessitent pas d’effectuer des réplicas techniques [194] ce qui réduit considérablement le temps et la difficulté de la réalisation des analyses. De plus, l’utilisation des fluorochromes permet de gagner en linéarité, en gamme dynamique (3,6 ordres de grandeur) et en sensibilité (~0.025 ng) par rapport à la coloration au Bleu de Coomassie (100 ng) et même par rapport à l’argent (~0,5 ng) [195]. Ces avantages ont permis à cette technique de supplanter l’approche gel 2D classique. Cependant elle présente toujours les limitations intrinsèques au gel et à l’électrofocalisation à savoir l’analyse des protéines membranaires et les pI extrêmes.